Instr. du 23-07-1998, BOI 13 L-7-98

Instr. du 23-07-1998, BOI 13 L-7-98

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BOI n° 139 du 29 juillet 1998

Instruction du 23 juillet 1998

13 L-7-98


Contrôle de l'impôt - Contentieux - Autres réglementations communes.
Contrôles et redressements.


NOR : ECOL9800105J

INSTRUCTION SUR LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE L 13 B DU LIVRE DES PROCEDURES FISCALES EN MATIERE DE CONTROLE DES OPERATIONS INTERNATIONALES



RESUME
La présente instruction a pour objet de commenter les dispositions de l'article 39 de la loi n° 96-314 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier du 12 avril 1996, codifié à l'article L 13 B du livre des procédures fiscales.
La fixation du prix de transfert des transactions conclues au sein d'entreprises multinationales ne résulte pas, nécessairement, comme pour les entreprises indépendantes, des règles du marché.
D'autres considérations internes au groupe peuvent intervenir et influer sur la répartition des résultats entre les pays concernés par les transactions.
Pour l'administration, il est donc nécessaire d'avoir les moyens, notamment juridiques, pour apprécier la normalité des prix de transfert.
A cet effet, l'article L 13 B du LPF instaure, dans le cadre de la vérification de la comptabilité des entreprises, la possibilité, pour l'administration, de demander, selon une procédure spécifique écrite, des informations juridiques, économiques, fiscales, comptables, méthodologiques sur les modalités selon lesquelles a été défini le prix des transactions entre une entreprise et des entreprises situées à l'étranger.
Sous réserve du respect de ses conditions de mise en oeuvre, le recours à cette procédure n'intervient que si au cours du débat oral et contradictoire, l'entreprise n'a pas fourni les informations demandées par l'administration et relatives aux opérations intra-groupes.
L'article L 13 B du LPF induit donc une obligation de coopération entre l'entreprise et l'administration en matière de documentation sur les prix de transfert.
Cette obligation se réfère aux principes directeurs du Chapitre V du rapport de l'OCDE de juillet 1995, ("Principes applicables en matière de prix de transfert à l'intention des entreprises multinationales et des administrations fiscales") et apporte, en fixant de manière limitative le domaine de la demande, une sécurité pour les entreprises.
En cas de défaut de réponse à la demande faite, l'administration peut évaluer dans le cadre de la procédure contradictoire, les bases d'imposition de l'entreprise à partir des éléments dont elle dispose (nouvel article 57 par 3 du CGI) et l'entreprise est soumise à une amende fiscale forfaitaire (article 1740 nonies du CGI).
Les dispositions de l'article L 13 B du LPF et les commentaires de la présente instruction s'appliquent aux contrôles engagés à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi n° 96-314 du 12 avril 1996 publiée au Journal Officiel de la République Française du 13 avril 1996.


CHAPITRE PREMIER : LE RECOURS A LA PROCEDURE SPECIALE DE L'ARTICLE L 13 B du LPF.
SECTION 1 : Conditions de mise en oeuvre.
SOUS-SECTION 1 : Une vérification de comptabilité doit être engagée.



1 Une interrogation d'une entreprise sous couvert de l'article L 13 B du LPF ne peut intervenir que dans le cadre d'une vérification de comptabilité, générale, ponctuelle ou simple, commencée par l'envoi d'un avis de vérification (article L 47 du LPF).
Elle concerne toutes les entreprises, quelle que soit leur forme juridique, imposables en France à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés, astreintes à tenir et à présenter des documents comptables en vertu des dispositions de l'article L 13 du LPF.

2 Il demeure toutefois possible au service d'adresser à tout moment une demande de renseignements ou de documents (ex. demande de transmission d'un rapport annuel, demande d'organigramme d'un groupe) mais une démarche de ce type est non contraignante et ne saurait être confondue avec la précédente.


SOUS-SECTION 2 : Le recours à la procédure n'est ni obligatoire, ni systématique.


Le recours aux dispositions de l'article L 13 B du LPF n'est pas utilisé systématiquement comme instrument de contrôle des opérations internationales.

3 Dans les faits, la formulation d'une demande visée à l'article L 13 B du LPF, ne pourra intervenir, sauf circonstances exceptionnelles, dès la première intervention sur place.
La démarche de contrôle des prix de transfert nécessite en effet des investigations longues et approfondies. Ce n'est qu'en l'absence d'explications suffisantes de la part de l'entreprise que le recours à la procédure sera envisagé.
D'une manière générale, l'entreprise peut apporter, lors d'un contrôle, toute information, même non requise par l'administration ou non couverte par les dispositions de l'article L 13 B du LPF, dès lors que ces informations sont utiles à l'examen et à la compréhension des situations.

4 Dans la majorité des cas, plusieurs interventions seront nécessaires pour permettre au vérificateur d'apprécier les circonstances de dépendance au sens de l'article 57 du CGI et les éventuelles anomalies présentées par les opérations intra-groupes ou internationales. Comme le prévoit le texte lui-même (article L 13 B du LPF, premier alinéa), les demandes invitent l'entreprise à "préciser" les points énumérés aux 1° à 4°, ce qui implique naturellement une première approche dans le cadre du débat oral et contradictoire habituel.

5 Ce n'est qu'à l'issue d'un débat oral et contradictoire au cours duquel l'entreprise n'aura pas fourni les informations nécessaires au contrôle des prix de transfert et à la compréhension des structures, des activités et des choix économiques et fiscaux opérés en la matière, que les dispositions de l'article L 13 B du LPF sont mises en ouvre par le service vérificateur.

6 Le fait pour une entreprise d'accorder sa coopération au service vérificateur et, le cas échéant, de répondre aux demandes qui lui sont faites en application de l'article L 13 B du LPF, n'exclut bien entendu pas qu'elle se voie notifier un redressement en application de l'article 57 du CGI.

7 Lors d'une vérification, l'administration peut mettre en oeuvre plusieurs fois, si nécessaire, la procédure prévue à l'article L 13 B du LPF. Toutefois, il conviendra de privilégier, dans toute la mesure du possible le recours à une seule demande.


SOUS-SECTION 3 : L'administration doit avoir réuni des éléments faisant présumer qu'une entreprise a opéré un transfert de bénéfices au sens de l'article 57 du CGI.


8 En raison de la référence aux dispositions de l'article 57 du CGI, la procédure ne peut être mise en oeuvre qu'à l'égard des entreprises susceptibles :
- soit d'être sous la dépendance ou de posséder le contrôle d'entreprises situées hors de France, soit d'être sous la dépendance d'une entreprise ou d'un groupe possédant également le contrôle d'entreprises situées hors de France ;
- et d'avoir transféré indirectement des bénéfices à ces entreprises situées hors de France ;
- soit d'avoir procédé à un transfert de bénéfice vers des entreprises établies dans un Etat étranger ou dans un territoire situé hors de France dont le régime fiscal est privilégié au sens du deuxième alinéa de l'article 238 A du CGI sans que le lien de dépendance ne doive être démontré.

9 Le premier alinéa de l'article L 13 B du LPF qui dispose notamment que l'administration doit avoir réuni des éléments faisant présumer qu'une entreprise a opéré un transfert de bénéfices a pour objet de "prévenir un emploi immédiat et systématique du dispositif. Ce n'est que si le dialogue avec l'entreprise ne permet pas d'accéder à l'information que le dispositif est mis en oeuvre" (JO débats Sénat, séance du 21 mars 1996, p 1609).
Mais "il ne s'agit pas de mettre une barrière à des demandes d'informations, ce qui résulterait d'une demande de motivation" (ibid).
Le législateur a clairement écarté l'obligation pour l'administration de motiver sa demande lorsqu'elle l'adresse à l'entreprise en considérant qu'une telle exigence serait disproportionnée pour une demande de renseignements.
En effet, s'agissant d'une présomption, il ne pourra être exigé de l'administration qu'elle possède les informations objet de la demande et qu'elle se trouve obligée de démontrer au préalable le caractère anormal des opérations dont elle souhaite apprécier la normalité.

10 La présomption d'un transfert de bénéfices au sens de l'article 57 du CGI, n'oblige donc pas l'administration à être en possession, au moment de la demande, des éléments nécessaires à la mise en oeuvre de cet article.

11 Les éléments qu'il convient de réunir pour présumer un transfert indirect de bénéfices résultent des circonstances de fait et de droit, propres à chaque vérification. Il s'agira pour le service vérificateur de réunir les renseignements et informations nécessaires à l'établissement de cette présomption dans le cadre de la période de vérification qui précède l'éventuelle mise en oeuvre de la procédure de l'article L 13 B du LPF.
A cet égard, il conviendra notamment que des indices :
- sur les liens de dépendance juridique ou de fait (organigrammes, données publiques, éléments déclaratifs, contrats, actes de sociétés ou toutes autres informations de cette nature) ; ou, sur le caractère privilégié du régime fiscal de l'entreprise établie à l'étranger (informations générales et publiques sur le régime, etc ) ;
- et sur la normalité des transactions (différences de prix ou modifications significatives de prix, de taux de redevances ; avances non rémunérées ou faiblement rémunérées ; conditions de paiement différentes des normes habituelles ; rabais, remises, surcoûts, subventions, aides, abandons non expliqués ; charges indûment supportées, etc) ;
permettent de présumer, en l'absence d'explications claires et utiles à la compréhension de la formation des prix ou des opérations contrôlées, qu'un transfert indirect de bénéfices est susceptible d'exister.

12 En revanche, l'administration devra, le moment venu, devant le juge de l'impôt, être en mesure de fournir les éléments qu'elle avait réunis, de nature à faire présumer un transfert de bénéfice.

13 La nature même des demandes formulées en application de l'article L 13 B du LPF, qui doivent être précises (deuxième alinéa), éclaire les éléments à l'origine des présomptions de l'administration.


SECTION 2 : Les modalités de la mise en oeuvre.
SOUS-SECTION 1 : Forme et envoi des demandes.



14 Les demandes écrites sont signées par l'agent des impôts ou, en cas de pluralité, par l'un des agents des impôts, chargé de la vérification de la comptabilité de l'entreprise.
Elles sont adressées au contribuable par lettre recommandée avec accusé de réception ou remises au contribuable en main propre ou à une personne mandatée contre un accusé de réception.
La demande mentionne les années concernées et fait référence au dispositif et aux conséquences liées à sa mise en oeuvre.


SOUS-SECTION 2 : Les délais de réponse.


15 Les demandes précisent à l'entreprise vérifiée le délai de réponse qui lui est ouvert. Ce délai a pour point de départ la date de réception ou la remise au contribuable de la demande d'informations. Il ne peut être inférieur à deux mois.
Le délai de réponse expire à la fin du jour du deuxième mois portant le même quantième que celui de son point de départ. Le décompte du délai sera effectué selon les mêmes règles que celles exposées dans la documentation de base 5 B 8113 par 23 visées à l'article L 16 du LPF concernant les demande d'éclaircissements ou de justifications.

16 Durant cette période de deux mois, le contribuable peut, par une demande écrite et motivée, solliciter, en précisant la durée, une prorogation de ce délai, qui dans tous les cas ne pourra excéder au total une durée de trois mois.
Dans cette hypothèse, il incombe au service d'apprécier s'il accorde un délai complémentaire et d'informer le contribuable, selon les modalités définies ci-dessus (cf par 14), de la décision retenue, en lui indiquant, dans l'affirmative, la date d'expiration du délai complémentaire accordé.
Dans la négative, le contribuable est informé, selon les modalités définies au paragraphe 14, du refus du report de délai. Il lui appartient alors de répondre dans le délai initial imparti.
Le service appréciera avec réalisme la motivation de l'entreprise. Les demandes de nature dilatoire seront rejetées.


SECTION 3 : Les modalités de la réponse.
SOUS-SECTION 1 : Forme et contenu des réponses.



17 Les réponses signées par le contribuable ou toute personne dûment habilitée sont remises directement contre un accusé de réception ou bien adressées par voie postale au service vérificateur.
L'entreprise peut communiquer tous les éléments ou documents qu'elle estime être de nature à répondre à la demande.
Les documents rédigés dans une langue étrangère sont accompagnés d'une traduction en français, conformément aux dispositions de l'article 16 du code de commerce et de l'article 54 du CGI, ou de tout moyen destiné à permettre leur entière compréhension en français.

18 Il va de soi que ces réponses ne prennent leur plein effet que lorsqu'elles interviennent dans le délai fixé selon les modalités décrites ci-dessus.


SOUS-SECTION 2 : Défaut de réponse.



19 Il y a défaut de réponse lorsque l'entreprise n'a pas répondu dans le délai précisé dans la demande ou dans le délai régulièrement prorogé.
Dans ce cas, il n'y a pas lieu d'adresser à l'entreprise une mise en demeure (voir infra, paragraphes 21 et 22) et l'administration évalue les bases d'imposition concernées par la demande à partir des éléments dont elle dispose, en suivant la procédure contradictoire prévue aux articles L 57 à L 61 du LPF (article 39, II, de la loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier du 12 avril 1996, codifié à l'article 57 du CGI, troisième alinéa).
Le fait que les éléments nécessaires à la réponse ne soient pas à la disposition de l'entreprise avant la réception de la demande ne la dispense pas de se procurer ceux-ci.


SOUS-SECTION 3 : Mise en demeure en cas de réponse insuffisante.


20 L'appréciation du caractère suffisant ou insuffisant d'une réponse appartient à l'administration, sous le contrôle du juge de l'impôt. Il s'agit d'une question de fait.
Une réponse est insuffisante lorsque notamment :
- il n'est pas apporté de réponse à une ou plusieurs des questions posées ;
- il n'est pas apporté de réponse à une partie de la question posée (ex. alors que des indications permettent de présumer des relations entrant dans les prévisions de l'article 57 du CGI avec des entreprises situées dans trois pays étrangers et que cette situation fait l'objet d'une demande, la réponse apportée ne concerne que deux pays) ;
- il est fait référence à des principes généraux (respect du principe de pleine concurrence, recours aux méthodes reconnues par l'OCDE ) sans que ces affirmations ne soient étayées d'aucune justification concrète relative aux questions posées.

21 En cas de réponse insuffisante, l'administration adresse à l'entreprise une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours. Les points de départ et d'arrivée de ce délai sont définis selon les mêmes modalités que celles développées au paragraphe 14.
Cette mise en demeure est remise ou adressée dans des conditions similaires à la demande initiale (voir supra).
Elle précise les compléments de réponse souhaités par l'administration, en rappelant les questions contenues dans la demande initiale et les raisons pour lesquelles la réponse est considérée comme insuffisante.

22 La mise en demeure rappelle les sanctions applicables en cas de défaut de réponse.
Il s'agit d'une amende fiscale égale à 50 000 F pour chaque exercice visé par la demande initiale codifiée à l'article 1740 nonies du CGI (article 39, IV, de la loi n° 96-314 du 12 avril 1996).

23 Une réponse insuffisante après une mise en demeure est considérée comme un défaut de réponse.



CHAPITRE DEUXIEME : LE CHAMP D'APPLICATION DES DEMANDES D'INFORMATIONS ET DE DOCUMENTATION.
SECTION 1 : Domaine des demandes.



24 Lorsque la présomption décrite aux paragraphes 7 et suivants de la présente instruction permet à l'administration de mettre en oeuvre les dispositions de l'article L 13 B du LPF, la demande ne peut porter que sur quatre domaines limitativement énumérés.
Ces domaines sont liés entre eux, mais il n'est pas nécessaire d'interroger l'entreprise sur tous les domaines. Ceci relève de l'appréciation du service vérificateur, de ses besoins pour appréhender la réalité des opérations qu'il contrôle et du degré de coopération qu'aura apporté l'entreprise en matière de documentation.

25 Une seule ou plusieurs demandes visant ces domaines peuvent être adressées concernant une ou plusieurs entreprises exploitées ou établies hors de France quelles que soient leurs formes juridiques (par exemple : sociétés de capitaux, de personnes, établissements stables, groupes d'intérêts économiques ).

26 Quel que soit le domaine concerné, les demandes doivent être précises, indiquer explicitement, par nature d'activité ou par produit, le pays ou le territoire concerné, l'entreprise, la société ou le groupement visé ainsi que, le cas échéant, les montants en cause.


SOUS-SECTION 1 : Nature des relations entrant dans les prévisions de l'article 57 du CGI.


27 La nature des relations sur laquelle l'entreprise peut être interrogée concerne les liens de dépendance ou de contrôle, existant entre l'entreprise vérifiée et l'entité ou les entités établies à l'étranger.
L'article 57 joue à l'égard soit d'une entreprise française placée sous la dépendance d'une entreprise étrangère, soit d'une entreprise française ayant sous sa dépendance une entreprise étrangère soit enfin lorsqu'une entreprise française est placée en même temps qu'une ou plusieurs entreprises étrangères, sous la commune dépendance, d'une même entreprise, d'un groupe ou d'un consortium.
Conformément aux développements contenus dans la documentation de base (4-A-1211 du 1er septembre 1993), la dépendance peut être juridique ou de fait.

La dépendance juridique.
28 Une entreprise française est placée sous la dépendance d'une entreprise étrangère, lorsque cette dernière possède une part prépondérante de son capital ou la majorité absolue des suffrages susceptibles de s'exprimer dans ses assemblées. Il en est de même lorsque l'entreprise étrangère exerce, au sein de l'entreprise française, directement ou par personnes interposées, des fonctions comportant le pouvoir de décision.

29 L'entreprise vérifiée doit donc être à même d'apporter l'ensemble des informations afférentes à ces sujets. A titre d'exemple, les informations suivantes pourront être notamment demandées : organigramme du groupe, chaînes de participations, pourcentages de participations, composition du capital des entités étrangères, convention d'actionnaires, nature des titres détenus, droits de vote .

La dépendance de fait.
30 Si la dépendance juridique ne peut être démontrée, il faut s'en tenir à la constatation d'une dépendance de fait. Le lien de dépendance peut être contractuel ou découler des conditions dans lesquelles s'établissent les relations entre deux entreprises.

31 Tous renseignements utiles et informations portant sur les conditions contractuelles ou sur les relations entre les deux entreprises desquelles peuvent découler la dépendance de fait doivent pouvoir être fournis à la demande de l'administration. Il convient à cet égard de se référer à la jurisprudence qui illustre cette notion (cf DB 4-A-1211 par 3 à 6 du 1er septembre 1993).

32 L'entreprise qui établit à ce stade l'absence de liens de dépendance ou de contrôle (tels que décrits ci-dessus), est en droit de se dispenser de répondre aux autres questions concernant cette entité (rapport Commission des finances du Sénat, p 257), sauf si les opérations ont lieu avec une entreprise établie dans un pays à fiscalité privilégiée.


SOUS-SECTION 2 : Méthode de détermination des prix des opérations de toute nature.


33 La présente instruction n'a pas pour objet de commenter les dispositions de l'article 57 du CGI dans sa rédaction antérieure à la loi n° 96-314 du 12 avril 1996, ni de modifier les commentaires de ces dispositions contenus dans l'instruction administrative 4 A-2-73 du 4 mai 1973 et la documentation de base 4 A 1211 du 1er septembre 1993.

34 Les entreprises des groupes multinationaux doivent déterminer le prix de leurs transactions internes selon le principe de pleine concurrence, c'est-à-dire à un niveau auquel auraient traité des entreprises indépendantes pour des marchés identiques.

35 Sont notamment visées par l'article L 13 B-2 du LPF, les transactions commerciales, tout versement en rémunération de droits incorporels, les répartitions de frais et charges (frais de siège, accords de répartition de coûts, débours ), les relations financières, d'actionnaires, les relations entre siège et établissements stables .

36 A cet égard, la demande de renseignements pourra concerner l'ensemble des éléments ayant concouru à la négociation, à la conclusion et à la réalisation des transactions et opérations en cause et permettant d'apprécier la nature exacte des relations d'affaires entretenues (contrats, engagements, description des opérations, modalités de réalisation, clefs de répartition des charges ).

37 Il est nécessaire que les entités, les opérations de nature industrielle, commerciale ou financière, en cause et le cas échéant les montants soient précisément désignés dans la demande (ex méthode de détermination des prix d'achat des produits semi-finis A, B et C à la société-mère étrangère portés en comptabilité pour 30, 40 et 50 MF sur l'exercice 1996 et 35, 45 et 55 MF sur l'exercice 1997).

38 Toute méthode invoquée par l'entreprise peut être considérée comme recevable, pour satisfaire à l'obligation documentaire de l'article L 13 B du LPF, sous réserve que sa présentation soit appuyée de justificatifs :
- d'ordre méthodologique et documentaire : par exemple document interne à l'entreprise décrivant la méthode, tout contrat ou document contractuel échangé entre les entités du groupe concernées par la transaction, exposant le cas échéant les engagements réciproques de chaque partie ;
- d'ordre comptable : tout extrait de la comptabilité générale et le cas échéant de la comptabilité analytique ;
- d'ordre économique : toutes considérations ou données se rapportant aux marchés et aux fonctions remplies par les entités du groupe concernées explicitant la méthode invoquée par l'entreprise (ex la fixation de prix bas pour pénétrer un marché implique que l'entreprise interrogée se dispose à fournir des éléments sur les études conduites sur ce marché, ses propres caractéristiques et celles de l'entité liée concernée, notamment en matière de capital, de fonctions assumées et de risques encourus, les dispositions prises pour évaluer les résultats de la méthode employée et le cas échéant réviser celle-ci) ; toute information et analyse concernant les comparables retenus, justifiant la pertinence du choix effectué.

39 La cohérence d'une politique de prix de transfert ne peut être comprise et analysée que globalement, et au travers de la connaissance de l'ensemble des dispositions prises à chaque stade de la vie du produit. Les entreprises doivent donc posséder une documentation capable d'expliquer la démarche globale suivie par le groupe en la matière.
Les explications et la documentation fournies ne sauraient se limiter à des renseignements ponctuels sortis du contexte global de la politique de prix de transfert du groupe.

40 Il n'est pas exigé que les justificatifs soient contemporains des opérations conduites pendant la période vérifiée. En revanche, ils doivent se rapporter à cette période.

41 Le 2° du premier alinéa de l'article L 13 B prévoit également que l'entreprise interrogée sur la méthode de détermination de ses prix soit, le cas échéant, invitée à mentionner les contreparties qu'elle a consenties ou qui lui ont été consenties dans le groupe.

42 Il est admis qu'un prix de transfert diffère d'un prix de pleine concurrence si une autre clause (ex. conditions de paiements, termes financiers, services accessoires, garanties, conditions d'exclusivité, garanties d'approvisionnement ou de débouchés ) convenue entre les parties, est susceptible de compenser la différence de prix initialement constatée. De même, une situation avantageuse ou désavantageuse concernant une opération peut être compensée par une autre opération (par exemple : un prix de vente minoré ou un coût d'achat majoré peut être compensé par un taux de redevance majoré ou réduit du droit de commercialisation ou de fabrication sur les produits correspondants).

43 Il appartient à l'administration d'examiner l'ensemble des relations entre les entités liées pour déterminer si leurs résultats sont conformes à ce principe.
Il est donc dans l'intérêt de l'entreprise vérifiée d'exposer l'ensemble de ses arguments le plus tôt possible dans le cours du débat oral et contradictoire, afin que l'administration dispose de l'ensemble des éléments d'appréciation.


SOUS-SECTION 3 : Activités exercées par les entreprises liées.


44 Ce domaine concerne les informations et documents permettant d'apprécier les activités d'une ou plusieurs entités liées établies à l'étranger à raison des opérations de nature industrielle, commerciale ou financière, réalisées avec l'entreprise vérifiée.
Exemples : (bilan d'une entreprise liée à laquelle l'entreprise vérifiée, créancière, a consenti un abandon de créance, ou accordé un taux réduit de redevance ou de rémunération d'un prêt) ; moyens d'exploitation et fonctions du département recherche et développement d'une entité liée à laquelle l'entreprise vérifiée verse une contribution ou une redevance, etc.

45 Il porte également sur l'analyse des fonctions assumées dans le cadre de cette activité exercée par l'entité ou les entités établies hors de France et leurs modalités de rémunération.
Les demandes auront notamment pour objet de connaître :
- la nature effective de l'activité, ses modalités d'exercice et les risques assumés (exemple : en cas d'activité de négoce de quelle façon est supporté le risque de garantie, le service après-vente , qui assure la promotion, le marketing ) ;
- les moyens mis en oeuvre (personnels et qualifications, immobilisations corporelles, propriété et exploitation des incorporels ).

46 A cet égard, les comptes d'exploitation par produit, les marges dégagées, la composition des actifs, des comptes de charge , pourront être demandés.


SOUS-SECTION 4 : Traitement fiscal.


47 A la différence des domaines précédents (article L 13 B, premier alinéas, 1° à 3°), les demandes portant sur le traitement fiscal réservé aux opérations de nature industrielle, commerciale et financière, ne peuvent concerner que des entités étrangères dont l'entreprise vérifiée possède directement ou indirectement plus de 50 % du capital ou des droits de vote, ou qu'elle exploite directement (succursales, établissements).

48 On entend par traitement fiscal :
- l'application aux écritures comptables d'une entité de toutes règles fiscales, générales ou particulières, conduisant à la détermination de son résultat imposable et imposé. A cet égard les documents comptables et fiscaux liés aux opérations concernées pourront être demandés afin de s'assurer de la réalité du traitement fiscal ;
- un accord particulier conclu avec les autorités d'un Etat ou territoire étranger.
Tout régime spécial exorbitant du droit commun du pays considéré devra être explicité.

49 Les demandes de cette nature doivent viser des opérations spécifiques. Toutefois, si l'entité étrangère concernée ne conduit qu'un type d'opérations pour lesquelles l'administration a réuni des éléments faisant présumer un transfert de bénéfices ou si l'ensemble des opérations sont présumées constitutives d'un tel transfert, il est possible d'interroger l'entreprise française sur l'ensemble des activités de l'entreprise étrangère en énumérant, le cas échéant, les différentes opérations concernées.


SECTION 2 : Effets d'un défaut de réponse.
SOUS-SECTION 1 : Procédure, méthode et calcul des redressements.



50 Le législateur a expressément prévu que la procédure de redressement contradictoire est suivie, même en cas de défaut de réponse. Toutefois, une société en situation de taxation d'office avant l'emploi de l'article L 13 B du LPF y demeure, quelle que soit l'issue de cette procédure.
La charge de la preuve repose toujours sur l'administration, conformément à la règle générale et aux dispositions particulières en matière de contrôle des transferts de bénéfice à l'étranger (instruction administrative 4 A-2-73 du 4 mai 1973, Section II, Sous-section B et documentation de base 4 A 1212 du 1er septembre 1993) :
- l'administration doit apporter la preuve du lien de dépendance, sauf dans les cas visés au deuxième alinéa de l'article 57 du CGI ;
- l'administration doit apporter la preuve qu'un avantage a été consenti à une entité étrangère et elle doit en déterminer le montant.
Si la présomption de transfert de bénéfices à l'étranger est établie par l'administration :
- l'entreprise vérifiée doit apporter la preuve qui lui incombe, que l'avantage consenti à une entité étrangère ne constitue pas, en fait, un transfert de bénéfices à l'étranger.
Pour sa part, l'entreprise vérifiée conserve la faculté de saisir la Commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires.

51 Le défaut de réponse à une demande prévue par l'article L 13 B du LPF ne peut à lui seul constituer une motivation suffisante pour notifier un redressement.
Il est néanmoins probable que l'entreprise qui aura négligé de répondre à une demande de précisions fondée sur la présomption qu'elle avait opéré un transfert de bénéfice s'exposera à un redressement.

52 En effet, dans cette situation, l'administration est autorisée à évaluer le montant du transfert de bénéfice concerné par la demande, à partir des éléments dont elle dispose et en suivant la procédure contradictoire définie aux articles L 57 à L 61 du LPF (article 39, II, de la loi n° 96-314 du 12 avril 1996, codifié à l'article 57 du CGI, troisième alinéa).
Les dispositions du troisième alinéa de l'article 57 du CGI, atténuent, en cas de défaut de réponse, l'obligation mise à la charge de l'administration de réunir, au moment de la notification de redressements, les éléments permettant d'établir la présomption de transfert de bénéfices à l'étranger.
Mais, l'entreprise pourra toujours contester cette évaluation, en produisant ses propres éléments, notamment en réponse à la notification de redressements. Cette situation sera toutefois défavorable pour elle, dans la mesure où il s'agira d'une production tardive de documents et d'informations, non fournis durant la procédure de l'article L 13 B du LPF et que le service vérificateur n'aura donc pas été en mesure d'examiner lors des interventions sur place dans l'entreprise.

53 Il est rappelé enfin, que dans un tel contexte, l'administration peut recourir à la méthode de redressement prévue au dernier alinéa de l'article 57 du CGI qui dispose : "A défaut d'éléments précis pour opérer les redressements prévus aux premier, deuxième et troisième alinéas, les produits imposables sont déterminés par comparaison avec ceux des entreprises similaires exploitées normalement".
Un tel recours n'est pas automatique ; l'administration devra privilégier, dans la mesure du possible et malgré le défaut de réponse de l'entreprise, le recours aux autres méthodes reconnues par l'OCDE.

54 Le défaut de réponse peut également avoir des conséquences sur le calcul du redressement.
A ce titre, l'administration pourra conclure à l'absence de contrepartie ou au rejet de la rémunération d'une entité étrangère, pour une fonction, dans la mesure où elle n'en aura pas eu connaissance ou n'aura pas pu obtenir de justifications.


SOUS-SECTION 2 : Amende.


55 En cas de défaut de réponse, l'entreprise est passible d'une amende fiscale égale à 50 000 F pour chaque exercice visé par la demande (article 39, IV, de la loi n° 96-314 du 12 avril 1996, codifié à l'article 1740 nonies du CGI) et cela même s'il n'y a pas de redressements.
En cas de pluralité de demandes, la pénalité est limitée à 50 000 F pour chaque exercice concerné même s'il y a plusieurs défauts de réponse.
Il est précisé qu'en cas de redressements sur les prix de transfert, les pénalités propres à ces rappels s'appliquent indépendamment de l'amende visée à l'article 1740 nonies du CGI.

56 L'amende doit être motivée (au plus tard 30 jours avant la notification de l'avis d'imposition) et elle peut être contestée comme les amendes prévues en matière de taxes sur le chiffre d'affaires (article 1736 du CGI modifié par l'article 39, III, de la loi n° 96-314 du 12 avril 1996).

57 Cette amende n'est pas une pénalité grave au sens de l'article 8-1 de la convention communautaire d'élimination des doubles impositions en cas de correction des bénéfices d'entreprises associées de l'Union européenne du 23 juillet 1990. Elle ne peut donc en aucun cas priver l'entreprise vérifiée de recourir aux procédures prévues par cette convention (JO Débats, Sénat, séance du 21 mars 1996, p 1611).


SECTION 3 : Entrée en vigueur.


58 Les dispositions de l'article 39 de la loi du 12 juillet 1996 ont été publiées au Journal Officiel du 13 avril 1996. Elles entrent en vigueur à compter soit du 13 avril 1996,, soit un jour franc après l'arrivée du Journal Officiel au chef-lieu d'arrondissement lorsque cette date est postérieure au 13 avril 1996.
Elles s'appliquent aux contrôles engagés à compter de ces dates, c'est-à-dire à compter des dates de première intervention sur place.



Le Directeur, Chef du Service de la législation fiscale, H LE FLOC'H LOUBOUTIN.
Le Directeur Général des Impôts, JP BEAUFRET.


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