Jurisprudence : CA Rouen, 29-09-2023, n° 21/01483, Confirmation

CA Rouen, 29-09-2023, n° 21/01483, Confirmation

A23931KT

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N° RG 21/01483 - N° Portalis DBV2-V-B7F-IXSV


COUR D'APPEL DE ROUEN


CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE


ARRET DU 29 SEPTEMBRE 2023


DÉCISION DÉFÉRÉE :


19/01020

Jugement du POLE SOCIAL DU TJ DE ROUEN du 25 Février 2021



APPELANTE :


S.N.C. [5]

[Adresse 1]

[Localité 4]


représentée par Me Linda MECHANTEL de la SCP BONIFACE DAKIN & ASSOCIES, avocat au barreau de ROUEN


INTIMEE :


URSSAF NORMANDIE

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 2]


représentée par Mme [K] [O] en vertu d'un pouvoir spécial



COMPOSITION DE LA COUR  :


En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile🏛, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 21 Juin 2023 sans opposition des parties devant Madame POUGET, Conseillère, magistrat chargé d'instruire l'affaire.


Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :


Madame BIDEAULT, Présidente

Madame ROGER-MINNE, Conseillère

Madame POUGET, Conseillère


GREFFIER LORS DES DEBATS :


M. CABRELLI, Greffier


DEBATS :


A l'audience publique du 21 Juin 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 29 Septembre 2023


ARRET :


CONTRADICTOIRE


Prononcé le 29 Septembre 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile🏛,



signé par Madame BIDEAULT, Présidente et par M. CABRELLI, Greffier.


* * *


Exposé du litige :


Les 11 juillet et 27 septembre 2017, l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Haute Normandie (l'Urssaf) a effectué un contrôle inopiné au sein de l'établissement [6], restaurant situé à [Localité 4], exploité par la SNC [5] (la société), créée le 11 mai 1988.


Après avoir adressé deux lettres d'observation à la société, l'Urssaf a maintenu sa décision de redressement au titre de l'infraction de travail dissimulé concernant M. [D] [Aa] et MmeAb[T] [R].


Le 29 janvier 2019, une mise en demeure annulant la précédente a été adressée à la société pour un montant de 14 798 euros, soit 10 375 euros en cotisations, 3 718 euros en majorations de redressement et 705 euros en majorations de retard.



La société a formé un recours devant la commission de recours amiable (la CRA) de l'Urssaf, laquelle l'a rejeté en sa séance du 25 avril 2019.


La société a poursuivi sa contestation devant le pôle social du tribunal de grande instance de Rouen, devenu tribunal judiciaire, lequel a, par jugement du 25 février 2021 :

- annulé le redressement concernant Aa. [I],

- confirmé le redressement concernant MAbe [R],

- condamné la société à payer à l'Urssaf la somme de 5 728 euros en cotisations et 1161,75 euros en majorations de redressement,

- débouté la société de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛,

- condamné l'Urssaf aux dépens.


La décision a été notifiée à la société le 13 mars 2021, elle en a relevé appel le 9 avril 2021.


Par conclusions remises le 16 juin 2021, soutenues oralement à l'audience, la société demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il :


a confirmé le redressement concernaAbt Mme [R],

l'a condamnée à payer à l'Urssaf la somme de 5 728 euros en cotisations et 1 161, 75 euros en majorations de redressement,

l'a déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,


statuant à nouveau,

- annuler le redressement concernant MAbe [R],

- condamner l'Urssaf à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.


Elle se prévaut de l'autorité de la chose jugée puisque la procédure pénale pour travail dissimulé a été classée sans suite. Sur le fond, elle fait valoir qu'il appartient à l'Urssaf de démontrer l'intention de la société de se soustraire à ses obligations alors qu'elle justifie de l'impossibilité d'établir la déclaration préalable à l'embauche (DPAE). Elle relève que l'Urssaf se fonde sur le procès-verbal de délit de travail dissimulé sans le produire.Elle indique qu'elle a été contrainte d'appeler en urgence Mme [Ab], le 27 septembre 2017, pour remplacer M. [Aa], absent de manière inopinée et concomitamment au contrôle. Quant aux autres périodes litigieuses (2015 et 2016), elle réfute que Mme [Ab] ait commencé à travailler le 1er juillet 2015 et qu'elle ait travaillé en 2015 et 2016 puisqu'elle était en formation. Elle considère qu'il ne peut être porté aucun crédit aux auditions de cette dernière et de M. [Aa], d'autant que Mme [Ab] conteste avoir fait une telle déclaration et que l'Urssaf ne justifie pas avoir recueilli son consentement.


Par conclusions remises le 3 novembre 2021, soutenues oralement à l'audience, l'Urssaf demande à la cour de :

- débouter la société de l'intégralité de ses demandes,

- confirmer, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 25 février 2021,

- ajouter au jugement la condamnation des majorations de retard, soit la somme de 482 euros,

- condamner la société aux dépens.


Elle fait valoir que le classement 'sans suite sous conditions' n'est pas assimilable à une relaxe. Elle ajoute que les premiers juges ont considéré qu'il n'y avait pas suffisamment d'éléments pour valider le redressement de M. [Aa], cela ne signifie pas que ses déclarations sont mensongères concernant la présence de Mme [Ab] dans l'établissement. Elle indique qu'elle a recueilli le consentement de Mme [Ab] qui a signé sa fiche d'audition, comme celui de M. [Aa]. Elle constate qu'il n'a été délivré aucun bulletin de salaire à Mme [Ab] de 2015 à juillet 2017, qu'elle est reportée sur le registre du personnel comme entrée le 19 juillet 2017 et sortie le 31 août, que l'un de ses contrats de travail concerne cette dernière période et l'autre, celle du 29 septembre au 16 octobre 2017 observant que les démarches liées à cette dernière embauche n'ont été effectuées que le 29 septembre 2017. Elle relève encore que la société n'a produit aucun élément probant démontrant l'absence de Mme [Ab] de 2015 à juin 2017, que les contrats de travail sont postérieurs aux deux dates de contrôle et que la société n'en est pas à sa première tentative puisque Mme [Ab] travaille, en dehors de ses stages, depuis juillet 2015 et ce, tous les étés dans l'entreprise.


Il est renvoyé aux écritures des parties pour l'exposé détaillé de leurs moyens.



Motifs de la décision :


A titre liminaire, la cour constate qu'aux termes de ses conclusions l'Urssaf considère que compte tenu de la décision déférée, 'le litige ne porte plus que sur la situation de Mme [Ab]' et ne développe aucun moyen sur le chef de jugement ayant annulé le redressement concernanAa M. [I].


Dans ces conditions, il convient d'ores et déjà de confirmer ce point.


L'article L.311-2 du code de la sécurité sociale🏛 dispose que sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d'une pension, toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l'un ou de l'autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant ses et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat.


Aux termes de l'article L.8221-5 du code du travail🏛, dans ses versions successivement en vigueur, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

- soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité de déclaration préalable à l'embauche ;

- soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli ;

- soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.


La cour rappelle que s'il procède du constat d'infraction de travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié, le redressement a pour objet exclusif le recouvrement des cotisations afférentes à cet emploi, sans qu'il soit nécessaire d'établir l'intention frauduleuse de l'employeur.


En outre, l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil ne s'attache qu'aux décisions des juridictions de jugement qui sont définitives et qui statuent sur le fond de l'action publique, si bien que la société n'est pas fondée à l'invoquer pour une décision de classement sans suite. Ce moyen est, par conséquent, rejeté.


Par ailleurs, il résulte de la fiche d'audition de Mme [Ab] que la case 'oui' au 'consentement à l'audition' a été cochée et que sa signature a été portée à côté, de sorte que ces éléments sont suffisants pour rapporter la preuve du consentement donnée par cette dernière à son audition et considérer qu'il a été satisfait aux dispositions de l'article L. 8271-6-1 du code du travail🏛. En outre, aucun élément ne permet de considérer que Mme [Ab] soit revenue sur ses déclarations reprises dans sa fiche d'audition.


Sur le fond, il ressort de la lettre d'observation du 31 octobre 2018 que le 27 septembre 2017 à 12h20, Mme [T] [Ab] était en situation de travail en cuisine sans avoir fait l'objet d'une DPAE préalable, ce qui n'est pas contesté par la société qui se prévaut d'une situation 'd'urgence'. Toutefois, le motif invoqué, au-delà du fait qu'il n'est pas démontré, est sans incidence sur son obligation déclarative, et, au surplus, contredit par les déclarations de M. [Aa] et de Mme [Ab].


Contrairement à ce que soutient l'appelante, l'audition de ce salarié n'a pas lieu d'être écartée en raison d'un litige l'opposant à la société concernant le paiement d'heures supplémentaires, lequel est, au surplus, sans rapport avec la présence de Mme [Ab] au sein de la société. Surtout, cette dernière corrobore les déclarations de ce salarié en indiquant, notamment, qu'elle n'a pas de contrat de travail depuis septembre 2017 et qu'elle travaille de 11h à 14h les lundi, mercredi et samedi, étant observé que le 27 septembre, jour du contrôle, était un mercredi.


Dans ces conditions, il est établi que la société qui connaissait parfaitement ses obligations déclaratives, ne justifie aucunement les avoir accomplies, ce qu'elle n'a fait que postérieurement au contrôle, de même qu'elle n'a régularisé un contrat de travail à temps partiel (12 h) avec Mme [Ab] que le 29 septembre avec prise d'effet à cette date.


Concernant la période contestée du redressement, il ressort de l'audition de Mme [Ab], reprise dans le procès-verbal de travail illégal établi par l'inspecteur de l'Urssaf et dûment fourni, qu'elle a été en stage dans l'entreprise en 2015, puis qu'elle a commencé à y travailler à compter du 1er juillet 2015, et ce, chaque année de juillet à septembre. Elle indique également qu'elle n'a reçu ni contrat de travail, ni bulletins de salaires en 2015 et 2016, qu'elle a été payée en espèces et n'a signé qu'un contrat à durée déterminée pour un emploi saisonnier de juillet à août 2017. Il convient de noter que ledit contrat de travail a été, comme le précédent, signé postérieurement au premier contrôle effectué par l'Urssaf le 11 juillet , puisqu'il est daté du 19 juillet et que la DPAE n'a été effectuée que le 18 juillet.


De plus, entendu le 18 septembre 2017, M. [Aa] a indiqué que Mme [Ab] travaillait actuellement avec lui et dans l'entreprise 'depuis 2016 après un stage, sans contrat et sans bulletins de paie pendant la saison 2016", qu'elle était 'payée en espèces à chaque fin de service', qu'il en a été de même en 2017, que 'le patron lui a établi un contrat de travail à temps partiel après le contrôle du 11 juillet 2017 et qu'actuellement, elle travaille toujours les lundi, mercredi et samedi (matin ou soir)'.


En outre, comme l'ont justement relevé les premiers juges après avoir minutieusement examiné les pièces produites relatives à la formation suivie par Mme [Ab], ses dates de formation sont parfaitement compatibles avec un travail au sein de la société. D'ailleurs, ce motif soutenu par l'appelante est contredit par le fait que bien qu'en formation du 12 juin au 15 septembre 2017, elle lui a établi un contrat de travail portant sur une partie de cette période.

Enfin, aucune pièce ne contredit la présence de Mme [Ab] sur la période 2015 à 2017.


Dans ces conditions, la situation de travail dissimulé est établie concernant Mme [Ab] pour la période de redressement 2015 - 2017, si bien que la décision déférée doit également être confirmée sur ce point sauf à ajouter que la société sera également redevable des majorations de retard pour la somme de 482 euros, laquelle a été omise par les premiers juges et dont le montant n'est pas discuté.


La société, qui succombe à l'instance, est condamnée aux dépens d'appel et déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.


PAR CES MOTIFS :


La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort :


Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Rouen du 25 février 2021 ;

Y ajoutant :


Condamne la SNC [5] à payer à l'Urssaf de Haute-Normandie la somme de 482 euros au titre des majorations de retard,


Déboute la société de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,


La condamne aux dépens d'appel.


LE GREFFIER LA PRESIDENTE

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