ETUDE : Les contraventions contre les personnes
E0157EX4
avec cacheDernière modification le 29-10-2024
La diffamation non publique envers une personne est punie de l'amende prévue pour les contraventions de la première classe, soit 38 euros au plus. La contravention est prévue aux articles R. 621-1 du Code pénal (N° Lexbase : L0962ABA). L'article précise, en outre, que la vérité des faits diffamatoires peut être établie conformément aux dispositions législatives relatives à la liberté de la presse.
L'injure non publique envers une personne, lorsqu'elle n'a pas été précédée de provocation, est punie de l'amende prévue pour les contraventions de la première classe (C. pén., art. R. 621-2 N° Lexbase : L0963ABB). La diffamation, lorsqu'elle n'est pas publique, dégénère en contravention d'injure non publique (Cass. crim., 24 janvier 1967, n° 66-90.086 N° Lexbase : A7708CIC). Lorsqu'une diffamation dégénère, par suite de l'absence de publicité, en injure non publique, l'intention coupable ne change pas de caractère. Elle résulte des imputations diffamatoires elles-mêmes et il n'est pas nécessaire qu'elle soit expressément constatée dans l'arrêt de condamnation (Cass. crim., 16 mars 1971, n° 69-91840 N° Lexbase : A6807CHL).
Le fait de porter atteinte involontairement à l'intégrité d'autrui sans qu'il en résulte d'incapacité totale de travail est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la deuxième classe (C. pén., art. R. 622-1 N° Lexbase : L5977IMC). Les personnes coupables de la contravention d'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne encourent également la peine complémentaire de confiscation de la chose qui a servi à commettre l'infraction.
Le fait, par le gardien d'un animal susceptible de présenter un danger pour les personnes, de laisser divaguer cet animal est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la deuxième classe (C. pén., art. R. 622-2 N° Lexbase : L0848ABZ). En cas de condamnation du propriétaire de l'animal ou si le propriétaire est inconnu, le tribunal peut décider de remettre l'animal à une oeuvre de protection animale reconnue d'utilité publique ou déclarée, laquelle pourra librement en disposer.
Il s'agit des menaces de violences contraventionnelles, des bruits ou tapages injurieux ou nocturnes. Les personnes coupables encourent, également, la peine complémentaire de confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction. Ainsi, celui qui organise des bals en plein air qui se terminent vers minuit et qui troublent la tranquillité publique par de la musique, amplifiée par un système de sonorisation, est coupable de tapage nocturne (Cass. crim., 15 janvier 1974, n° 73-90697 N° Lexbase : A5072CHC).
Sont également puni de l'amende prévue pour les contraventions de la 3ème classe : l'excitation d'animaux dangereux et la violation des dispositions réglementant le commerce de certains matériels susceptibles d'être utilisés pour porter atteinte à l'intimité de la vie privée.
Hors les cas prévus par les articles 222-13 (N° Lexbase : L6231LLD) et 222-14 (N° Lexbase : L7205IMS), les violences volontaires n'ayant entraîné aucune incapacité totale de travail sont punies de l'amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe (C. pén., art. R. 624-1 N° Lexbase : L0853AB9). Les personnes coupables de la contravention de violences légères encourent, également, des peines complémentaires.
Le fait de diffuser sur la voie publique ou dans des lieux publics des messages contraires à la décence est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe. Est puni de la même peine le fait, sans demande préalable du destinataire, d'envoyer ou de distribuer à domicile de tels messages (C. pén., art. R. 624-2 N° Lexbase : L5975IMA).
La diffamation non publique présentant un caractère raciste ou discriminatoire est punie de l'amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe. Est punie de la même peine la diffamation non publique commise envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de leur handicap. L'injure non publique présentant un caractère raciste ou discriminatoire est punie de l'amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe. Est punie de la même peine l'injure non publique commise envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de leur handicap. La contravention de l'article R. 624-4 est soumise, en ce qui concerne la procédure, aux dispositions particulières de la loi du 29 juillet 1881 et, notamment, à son article 65 qui fixe à 3 mois le délai de la prescription (Cass. crim., 11 mars 2003, n° 02-86.902, N° Lexbase : A5281A7Q).
Le fait, pour un parent d'un enfant soumis à l'obligation scolaire de ne pas imposer cette obligation sans faire connaître de motif légitime ou valable ou en donnant des motifs inexacts est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la 4ème classe. Le fait de faciliter, par aide ou assistance, la commission de cette contravention est puni des mêmes peines (C. pén., art. R. 624-7 N° Lexbase : L7985IR8).
Sont punies de l'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe : - les violences volontaires ayant entraîné une incapacité totale du travail d'une durée inférieure ou égale à huit jours (C. pén., art. R. 625-1N° Lexbase : L0856ABC) ;
- les atteintes involontaires à l'intégrité de la personne, entraînant une ITT d'une durée inférieure ou égale à 3 mois (C. pén., art. R. 625-2 N° Lexbase : L0968ABH) ;
- la provocation non publique à la discrimination, à la haine ou à la violence (C. pén., art. R. 625-7 N° Lexbase : L4087LGH) ;
- la violation des dispositions réglementant le commerce de certains matériels susceptibles d'être utilisés pour porter atteinte à l'intimité de la vie privée (C. pén., art. R. 625-9 [LXB]L5970IM3]) ;
- les atteintes aux droits de la personne résultant des fichiers ou des traitements informatiques (C. pén., art. R. 625-10 N° Lexbase : L9474HDA).
E0159EX8
La contravention de diffamation non publique n'est caractérisée au sens de l'article R. 621-1 du Code pénal (N° Lexbase : L0962ABA), que si les expressions diffamatoires visant un tiers et échangées dans le cadre d'une conversation entre deux personnes sont exclusives de tout caractère confidentiel. Telle est la solution dégagée par la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 14 octobre 2014 (Cass. crim., 14 octobre 2014, n°13-85.512, F-P+B+I N° Lexbase : A4491MYY ; voir dans le même sens Cass. crim., 17 janvier 1995, n° 93-85.495 N° Lexbase : A8504AXA et Cass. crim., 14 mai 2013, n° 12-84.042, F-P+B N° N° Lexbase : A9064KD3). En l'espèce, M. X, président de l'association P., qui contestait le certificat d'arrêt de travail produit par sa préposée, Mme Y, a déclaré, lors d'un entretien avec l'enquêteur de la caisse primaire d'assurance maladie : "Mme Y est suivie depuis très longtemps par le docteur Z, ce monsieur se trouve être son compagnon de vie. Donc elle est très bien conseillée". Ayant eu connaissance de ce propos, M. Z a porté plainte et s'est constitué partie civile devant le juge d'instruction, du chef de diffamation publique envers particulier. Renvoyé de ce chef devant le tribunal correctionnel, M. X a été relaxé. Pour infirmer le jugement, la cour d'appel retient que, si la publicité des imputations diffamatoires, formulées au cours d'un entretien en tête à tête avec l'inspecteur de la sécurité sociale, dans le bureau du président de l'association P. n'est pas établie, M. X avait connaissance de la mission de son interlocuteur, et ne pouvait ignorer que le rapport consignant ses propos serait communiqué à sa préposée dans le cadre de la procédure. Les juges du fond concluent qu'en l'absence de confidentialité, la faute caractérisant la contravention de diffamation non publique prévue par l'article R. 621-1 du Code pénal est caractérisée. A tort selon la Chambre criminelle qui rappelant le principe énoncé, prononce la cassation sans renvoi de l'arrêt aux visas des articles R.621-1 du Code pénal, 591 (N° Lexbase : L3975AZA) à 593 (N° Lexbase : L3977AZC) du Code de procédure pénale, et de l'article 29, alinéa 1, de la loi du 29 juillet 1881 (N° Lexbase : L7589AIW). En ne démontrant pas l'intention de l'auteur des propos litigieux de les voir porter à la connaissance d'un tiers, la cour d'appel s'est fondée sur des motifs hypothétiques et a méconnu les dispositions susvisées. (Cf. l'Ouvrage "Responsabilité civile" N° Lexbase : E4089ETM).
Ne constituent pas des injures publiques des propos tenus par une ancienne salarié et diffusés sur ses comptes ouverts tant sur le site Facebook que sur le site MSN, lesquels n'étaient en l'espèce accessibles qu'aux seules personnes agréées par l'intéressée, en nombre très restreint, celles ci formant une communauté d'intérêts. Telle est la solution retenue par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 10 avril 2013 (Cass. civ. 1, 10 avril 2013, n° 11-19.530, FS-P+B+I N° Lexbase : A9954KBB).
Dans cette affaire, une société qui avait employé Mme Y, et sa gérante, Mme X, avaient assigné leur ancienne salariée en paiement de dommages intérêts et prescription de diverses mesures d'interdiction et de publicité, pour avoir publié sur divers réseaux sociaux accessibles sur internet, les propos suivants, qu'elles qualifiaient d'injures publiques : "sarko devrait voter une loi pour exterminer les directrices chieuses comme la mienne !!!" (site MSN) ; "extermination des directrices chieuses" (Facebook) ; "éliminons nos patrons et surtout nos patronnes (mal baisées) qui nous pourrissent la vie !!!" (Facebook) ; "Rose Marie motivée plus que jamais à ne pas me laisser faire. Y'en a marre des connes". Si la cour d'appel de Paris (CA Paris, Pôle 2, 7ème ch., 9 mars 2011, n° 09/21478 N° Lexbase : A2410H7E) avait valablement retenu que les propos ne constituaient pas des injures publiques (après avoir constaté que les propos litigieux avaient été diffusés sur les comptes ouverts par Mme Y tant sur le site Facebook que sur le site MSN, lesquels n'étaient en l'espèce accessibles qu'aux seules personnes agréées par l'intéressée, en nombre très restreint, et retenu que celles-ci formaient une communauté d'intérêts), elle se voit reprocher de ne pas avoir recherché, comme il lui incombait de le faire, si les propos litigieux pouvaient être qualifiés d'injures non publiques, punies par l'article R. 621-2 du Code pénal (N° Lexbase : L0963ABB).
E0160EX9
E0163EXC
N'encourt donc pas la cassation le jugement de police, qui, sur citation délivrée pour tapage nocturne commis le 9 août 1995, relaxe le prévenu pour la contravention relevée à 23 heures 30, et le déclare coupable de celle commise entre 0 heure 30 et 0 heure 45, au cours de la même nuit.
Actualisation jurisprudentielle. – Méconnaît les principes des articles 10 et 11 de la CESDH le tribunal de police établissant une contravention de tapage injurieux alors qu’il résulte de ses énonciations et des pièces de procédure que le prévenu participait, pour exprimer et soutenir des opinions de nature politique et sociale, à une manifestation pacifique sur la voie publique, au cour de laquelle avec d’autres manifestants, il a scandé un slogan qui n’excédait pas les limites admissibles de la liberté d’expression, de sorte qu’une condamnation pour tapage injurieux ne constituait pas une mesure nécessaire, dans une société démocratique, à la défense de l’ordre ou à la protection des droits et libertés d’autrui (Cass. crim., 4 avril 2023, n° 20-87.132, F-D N° Lexbase : A26949N4). |
E0168EXI
G. Kaltoum, Les insultes proférées dans la cour d'un immeuble sont des injures publiques, Lexbase Hebdo n° 571, du 22 mai 2014 - édition privée
On sait les enjeux qui s'attachent au caractère public ou privé d'une infraction de presse, en termes de sanction notamment. En l'espèce, c'est sur ce seul terrain que portait le débat dès lors que les injures racistes, qui ne prêtaient guère à discussion, avaient été proférées dans la cour commune d'un immeuble. La question était donc de savoir si ces injures revêtaient un caractère privé ou public ? La Chambre criminelle, dans son arrêt du 8 avril 2014, a entériné la décision de la chambre de l'instruction qui a relevé que les propos incriminés, également entendus par l'épouse du plaignant, avaient été proférés dans une cour d'immeuble comportant seize appartements et à laquelle le public a accès. La Cour de cassation a alors déduit de ces circonstances la volonté de leur auteur de les rendre publics.
Les dispositions de droit interne comme les textes internationaux protègent l'être humain contre toute forme de discrimination fondée sur l'origine, la race ou la religion, ou l'appartenance (ou non) à une nation ou une ethnie. Cette protection fondée sur les principes de dignité humaine et d'égalité entre les hommes est indispensable à la cohésion et à la paix sociales.
La loi du 29 juillet 1881 sur la presse (N° Lexbase : L7589AIW) protège ces valeurs sous l'angle de la liberté d'expression, que ce soit par le biais d'incriminations autonomes ou de circonstances aggravantes. Ainsi, en particulier, est érigé en circonstance aggravante de l'injure ou de la diffamation le fait qu'une telle infraction ait été commise envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée. Le législateur a notamment pris en considération la gravité de ces atteintes en alourdissant les sanctions et en allongeant le délai de prescription de l'action publique de trois mois à un an.
Adoptant la même intransigeance que le législateur à cet égard, la Chambre criminelle a, dans cet arrêt du 8 avril 2014, entériné la condamnation à la peine de deux mois d'emprisonnement ferme qui avait été prononcée à l'encontre d'une personne ayant proféré des injures racistes. En l'espèce, le prévenu avait tenu à l'encontre de l'un de ses voisins, d'origine turque, les propos suivants : "sale bougnoule, vous êtes juste tolérés ici".
La caractérisation de l'infraction ne posait guère de difficulté en l'espèce. Rappelons simplement que l'article 29, dernier alinéa, de la loi sur la liberté de la presse définit l'injure comme "toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait". A la différence de la diffamation, l'injure n'articule aucun fait précis. Les juges du fond n'ont en conséquence eu aucune difficulté à retenir l'injure raciste, la cour d'appel précisant, à cet égard, que "ces propos sont incontestablement outrageants, sinon méprisants" et "qu'il est suffisamment établi que ces propos, replacés dans leur contexte, ont été tenus en raison des origines". Outre l'aggravation tenant à l'appartenance raciale, la circonstance aggravante -générale- de récidive a également été retenue, le prévenu ayant déjà été condamné, en septembre 2012, pour des insultes racistes commises à l'encontre de la même victime.
Le débat se cristallisait, en réalité, sur la publicité de l'injure. Fort de la position de la Chambre criminelle de la Cour de cassation, qui considère qu'il lui appartient de contrôler si la publicité, qui est l'un des éléments constitutifs commun à certaines infractions de presse, prévues par la loi du 29 juillet 1881, se trouve établie (1), le prévenu formait un pourvoi en contestant ce seul élément.
Non véritablement défini par la loi qui se contente d'énumérer différents modes de publicité, cet élément pourtant essentiel de l'infraction n'est pas toujours aisé à appréhender. La discussion, sur ce terrain, était donc parfaitement légitime (I). Pour autant, la Chambre criminelle n'a pas hésité à écarter le moyen, au terme d'une motivation qui ne peut qu'être approuvée (II).
I - La contestation de l'élément de publicité
A l'appui de son pourvoi, le prévenu faisait valoir qu'un propos injurieux, même tenu dans un lieu ou une réunion publics, ne constitue le délit d'injure que s'il a été proféré dans les conditions posées par l'article 23 de la loi du 29 juillet 1881, c'est-à-dire à haute voix, dans des circonstances traduisant une volonté de le rendre public. Or, selon lui, tel ne peut être le cas lorsque les propos sont tenus dans un cadre restreint, hors la présence de tiers.
Il avançait, au soutien de son argumentation, que la cour d'un immeuble est une partie commune, et que les parties communes d'une copropriété constituent un lieu privé. Il reprochait donc à la cour d'appel de ne pas avoir réfuté l'affirmation contraire des conclusions d'appel de l'exposant selon laquelle la cour de l'immeuble ne donnait pas sur le domaine public et ajoutait que la cour d'appel n'avait relevé aucun témoignage de ces propos émanant de tiers étrangers à la copropriété, ni même simplement de tiers étrangers à la famille du plaignant, membre de la copropriété.
Ce grief soulignant la nature du lieu privé de la cour d'un immeuble n'est pas discutable. Fallait-il, pour autant, considérer que les injures étaient dépourvues de caractère public. L'article 23 de la loi de 1881, texte de référence sur la publicité, ne vise pas les lieux privés. Il dispose seulement que "seront punis comme complices d'une action qualifiée crime ou délit ceux qui, soit par des discours, cris ou menaces proférés dans des lieux ou réunions publics, soit par des écrits, imprimés, dessins, gravures, peintures, emblèmes, images ou tout autre support de l'écrit, de la parole ou de l'image vendus ou distribués, mis en vente ou exposés dans des lieux ou réunions publics, soit par des placards ou des affiches exposés au regard du public, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique, auront directement provoqué l'auteur ou les auteurs à commettre ladite action, si la provocation a été suivie d'effet". A dire vrai, ce texte n'évoque les modes de publicité que par référence, en particulier, à des discours, des cris ou des menaces proférés dans des lieux et réunions publics.
Toutefois, loin de se cantonner à des lieux publics "par nature", la jurisprudence considère que la condition de publicité est également établie lorsque les propos sont proférés dans des lieux publics "occasionnels", ce qui recouvre des lieux privés. On retrouve ici l'autonomie du juge pénal vis-à-vis de certaines notions communes à diverses branches du droit.
En ce sens, la Chambre criminelle a décidé que doivent être regardés comme présentant les caractères de publicité exigés par la loi, un passage ou une petite cour intérieure d'un hôpital, où peuvent circuler diverses personnes sous les conditions déterminées par les règlements administratifs (2). Constituent également un lieu public un débit de boissons (3) ou un bar d'hôtel ouvert au public (4). En revanche, la circonstance de publicité n'est pas réalisée si les propos incriminés ont été tenus à voix basse, dans un coin du bar, de manière à n'être pas entendus des personnes présentes, autres que celles à qui ils étaient adressés. Plus récemment, la même solution a été rendue s'agissant de propos déclamés au porte-voix devant un palais de justice (5). La jurisprudence a apporté des précisions en indiquant qu'un propos injurieux, même tenu dans une réunion ou un lieu public, ne constitue le délit d'injure que s'il a été "proféré" au sens de l'article 23 de la loi sur la presse, c'est-à-dire tenu à haute voix dans des circonstances traduisant une volonté de le rendre public.
Au cas particulier, il ne fait pas de doute que, comme le soulignait le pourvoi, la cour commune d'un immeuble constituait un lieu privé. Néanmoins, la condition de publicité était établie, ce lieu pouvant être qualifié de lieu public "occasionnel".
II - L'établissement de l'élément de publicité
Pour retenir l'élément de publicité, la cour d'appel s'est appuyée sur le fait que les propos ont été tenus dans une cour d'immeuble qui comporte seize appartements et à laquelle le public a accès. En outre, elle a précisé que ces propos avaient été tenus suffisamment forts pour être entendus par le public.
Pour confirmer l'arrêt d'appel et rejeter le pourvoi formé par le prévenu, la Cour de cassation a estimé que la juridiction du second degré avait pleinement justifié sa décision en retenant que les propos incriminés, également entendus par l'épouse du plaignant, avaient été proférés dans une cour d'immeuble comportant seize appartements et à laquelle le public a accès. Elle a affirmé qu'en se déterminant ainsi, "d'où il se déduit que les propos litigieux ont été tenus dans des circonstances traduisant une volonté de leur auteur de les rendre publics", la cour d'appel a justifié sa décision.
La solution de l'espèce se situe dans le droit fil de la jurisprudence.
Il a ainsi été jugé que la cour d'un immeuble constituait un lieu privé par sa nature et sa destination mais qu'il peut être considéré comme devenu momentanément et accidentellement un lieu public, en raison de circonstances particulières relevées par le juge (6). Cette position est donc clairement confirmée par le présent arrêt, avec sans doute moins de clarté puisque la Chambre criminelle se contente ici d'approuver les juges du fond.
Cette jurisprudence n'est évidemment pas spécifique aux cours d'immeuble mais à l'ensemble des lieux privés. Il a, par exemple, été jugé que si le cabinet d'un maire est un lieu privé, il peut être considéré, par suite de circonstances particulières, notamment en raison de la présence de personnes étrangères à la mairie, comme devenu accidentellement et momentanément un lieu public (7). Il en est pareillement d'un atelier, qui constitue en règle générale un lieu privé par sa nature et sa destination, mais qui peut devenir occasionnellement un lieu public, en raison de circonstances que les juges du fait apprécient (8). Il s'agit de lieux privés, qui en raison de circonstances particulières appréciées au cas par cas de façon souveraine, sont considérés comme des lieux publics. Ainsi, en a-t-il encore été d'une maison particulière (9) ou d'une loge de concierge (10).
Au cas particulier, ces circonstances particulières tiennent tout à la fois à la configuration des lieux (cour d'immeuble comprenant seize appartements) auquel le public avait accès mais également au fait que l'épouse du plaignant a entendu les injures. Le plaignant avait d'ailleurs souligné dans sa plainte que le prévenu avait "hurlé" des injures racistes, ce qui démontrait de sa part une volonté d'en assurer une publicité.
(1) Cass. crim., 2 juin 1964, n° 63-92531 (N° Lexbase : A7494CEB), Bull. crim., n° 191.
(2) Cass. crim., 4 mai 1935, DH, 1935, 349.
(3) Cass. crim., 28 juillet 1949, Bull. crim., n° 263.
(4) Cass. crim., 2 février 1950, Bull. crim., n° 38.
(5) Cass. crim., 1er septembre 2005, n° 04-85.542 (N° Lexbase : ), Dr. pénal, 2005, 172, obs. Véron.
(6) Cass. crim., 23 juillet 1941, DC, 1942, 11.
(7) Cass. crim., 25 mai 1949, Bull. crim., n° 185.
(8) Cass. crim., 15 décembre 1949, Bull. crim., n° 345.
(9) Cass. crim., 20 décembre 1930, DP, 1931, 1, 133.
(10) Cass. crim., 9 janvier 1948, Bull. crim., n° 9.
Actualités jurisprudentielles. – la cour d’appel a suffisamment caractérisé le délit d’outrage sexiste en ce que l’infraction se trouve constituée dès lors que les propos ou comportements incriminés sont imposés à la victime, qu’ils étaient à la seule initiative du prévenu et sans aucun lien avec le cadre initial de la discussion menée sur le réseau social, et comportaient un caractère dégradant et intimidant pour les élèves mineures. Par ailleurs, la cour d’appel a bien caractérisé l’élément intentionnel résidant dans la connaissance de la nature explicitement sexuelle des propos adressés par le prévenu (Cass. crim., 5 mars 2024, n° 22-87.224, F-D N° Lexbase : A02572TP).
La cour a suffisamment caractérisé tant l’élément matériel qu’intentionnel de la contravention d’outrage sexuel ou sexiste résultant de la nature explicitement sexuelle des propos adressés par le prévenu à la victime alors âgée de 17 ans, qu’il recevait en sa qualité de professionnel de santé (Cass. crim., 25 septembre 2024, n° 23-86.170, F-D N° Lexbase : A999654Y). |
Amende forfaitaire simple : 135 euros
Amende forfaitaire minorée : 90 euros
Amende majorée : 375 euros
1° Par une personne qui abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ;
2° Sur un mineur de quinze ans ;
3° Sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur ;
4° Sur une personne dont la particulière vulnérabilité ou dépendance résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale est apparente ou connue de son auteur ;
5° Par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice ;
6° Dans un véhicule affecté au transport collectif de voyageurs ou dans un lieu destiné à l'accès à un moyen de transport collectif de voyageurs ;
7° En raison de l'orientation sexuelle, vraie ou supposée, de la victime.
1° L'obligation d'accomplir, le cas échéant à leurs frais, un stage de lutte contre le sexisme et de sensibilisation à l'égalité entre les femmes et les hommes ;
2° L'obligation d'accomplir, le cas échéant à leurs frais, un stage de citoyenneté ;
3° L'obligation d'accomplir, le cas échéant à leurs frais, un stage de sensibilisation à la lutte contre l'achat d'actes sexuels ;
4° L'obligation d'accomplir, le cas échéant à leurs frais, un stage de responsabilisation pour la prévention et la lutte contre les violences au sein du couple et les violences sexistes ;
5° Dans le cas où l’outrage sexiste est puni de l’amende prévue pour les contraventions de 5ème classe, un travail d'intérêt général pour une durée de vingt à cent vingt heures.
E0173EXP
Ces peines complémentaires sont :
1° La suspension, pour une durée de trois ans au plus, du permis de conduire, cette suspension pouvant être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ;
2° L'interdiction de détenir ou de porter, pour une durée de trois ans au plus, une arme soumise à autorisation ;
3° La confiscation d'une ou de plusieurs armes dont le condamné est propriétaire ou dont il a la libre disposition ;
4° Le retrait du permis de chasser, avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis pendant trois ans au plus ;
5° La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit ;
6° le travail d'intérêt général pour une durée de vingt à cent-vingt heures.
Ces peines complémentaires sont :
1° La suspension, pour une durée de trois ans au plus, du permis de conduire, cette suspension pouvant être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ;
2° L'interdiction de détenir ou de porter, pour une durée de trois ans au plus, une arme soumise à autorisation ;
3° La confiscation d'une ou de plusieurs armes dont le condamné est propriétaire ou dont il a la libre disposition ;
4° Le retrait du permis de chasser, avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis pendant trois ans au plus ;
5° La confiscation de la chose qui a servi à commettre l'infraction ;
6° Le travail d'intérêt général pour une durée de vingt à cent vingt heures.
Les personnes coupables des contraventions prévues au présent article encourent également les peines complémentaires suivantes :
1° L'interdiction de détenir ou de porter, pour une durée de trois ans au plus, une arme soumise à autorisation ;
2° La confiscation d'une ou de plusieurs armes dont le condamné est propriétaire ou dont il a la libre disposition ;
3° La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit ;
4° Le travail d'intérêt général pour une durée de vingt à cent vingt heures.
En effet, il doit informer la personne auprès de laquelle sont recueillies des données à caractère personnel la concernant :
- de l'identité du responsable du traitement et, le cas échéant, de celle de son représentant ;
- de la finalité poursuivie par le traitement auquel les données sont destinées ;
- du caractère obligatoire ou facultatif des réponses ;
- des conséquences éventuelles, à son égard, d'un défaut de réponse ;
- des destinataires ou catégories de destinataires des données ;
- de ses droits d'opposition, d'interrogation, d'accès et de rectification ;
- et, le cas échéant, des transferts de données à caractère personnel envisagés à destination d'un Etat non membre de la Communauté européenne.
Ces informations sont relatives :
- à l'identité du responsable du traitement et, le cas échéant, à celle de son représentant ;
- à la finalité poursuivie par le traitement auquel les données sont destinées ;
- au caractère obligatoire ou facultatif des réponses ;
- aux droits d'opposition, d'interrogation, d'accès et de rectification des personnes auprès desquelles sont recueillies les données.
L'information doit porter sur :
- la finalité de toute action tendant à accéder, par voie de transmission électronique, à des informations stockées dans son équipement terminal de connexion ou à inscrire, par la même voie, des informations dans son équipement terminal de connexion ;
- et les moyens dont elle dispose pour s'y opposer.
Ces demandes ont pour objet :
1° La confirmation que des données à caractère personnel la concernant font ou ne font pas l'objet de ce traitement ;
2° Les informations relatives aux finalités du traitement, aux catégories de données à caractère personnel traitées et aux destinataires ou aux catégories de destinataires auxquels les données sont communiquées ;
3° Le cas échéant, les informations relatives aux transferts de données à caractère personnel envisagés à destination d'un Etat non membre de la Communauté européenne ;
4° La communication, sous une forme accessible, des données à caractère personnel qui la concernent ainsi que de toute information disponible quant à l'origine de celles-ci ;
5° Les informations permettant de connaître et de contester la logique qui sous-tend le traitement automatisé en cas de décision prise sur le fondement de celui-ci et produisant des effets juridiques à l'égard de l'intéressé.
S’agissant de la liberté personnelle, le Conseil a répondu qu’en prévoyant la pénalisation des acheteurs de services sexuels, le législateur a entendu, en privant le proxénétisme de sources de profits, lutter contre cette activité et contre la traite des êtres humains aux fins d'exploitation sexuelle, activités criminelles fondées sur la contrainte et l'asservissement de l'être humain. Il a ainsi entendu assurer la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre ces formes d'asservissement et poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l'ordre public et de prévention des infractions.
Sachant que le législateur a estimé que «dans leur très grande majorité, les personnes qui se livrent à la prostitution sont victimes du proxénétisme et de la traite», le Conseil constitutionnel ne voit pas de déséquilibre entre «cet objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public et de prévention des infractions et la sauvegarde de la dignité de la personne humaine et, d’autre part, la liberté personnelle».
S’agissant de l’atteinte alléguée au principe de proportionnalité des peines, le Conseil relève qu’au regard de la nature des comportements réprimés, les peines de 1 500 euros d’amende, portée à 3 750 euros en cas de récidive, ainsi que certaines peines complémentaires, ne sont pas manifestement disproportionnées. Les Sages relèvent par ailleurs qu’il ne lui appartient pas de substituer son appréciation à celle du législateur sur les conséquences sanitaires pour les personnes prostituées des dispositions contestées, dès lors que cette appréciation n'est pas, en l'état des connaissances, manifestement inadéquate.