ETUDE : Covid-19 : tour d’horizon des lois de finances rectificatives adoptées en 2020 * Rédigée le 14.12.2020
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sans cacheDernière modification le 14-12-2020
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Dans le but de contrer les effets économiques de la crise sanitaire, le budget rectificatif injecte dans l‘économie 45 milliards d‘euros. Les principales mesures décidées se trouvent dans une nouvelle mission budgétaire baptisée « Plan d‘urgence face à la crise sanitaire ». Elle est composée de deux programmes. L’un est relatif au dispositif de chômage partiel et l’autre au fonds de solidarité avec les très petites entreprises (TPE).
Un dispositif de chômage partiel est ainsi instauré. Jusqu‘à 4,5 SMIC le chômage partiel est pris en charge à 100 % (85 % depuis le 1er juin sauf dans les secteurs les plus touchés). Le but du chômage partiel est d‘éviter les faillites en série et le chômage de masse afin que les compétences et les savoir-faire qui seront nécessaires lors de la reprise ne soient pas détruits pendant le ralentissement de l‘économie dû à la pandémie. Un fonds de solidarité en faveur des TPE est par ailleurs abondé avec des co-financements régionaux. L’État apporte 750 millions et les Régions, 250 millions d’euros. Outre les TPE, ce fonds protège les indépendants et les micro-entrepreneurs. Il soutient les entreprises et les entrepreneurs qui ont interrompu leur activité ou bien qui ont connu une baisse de 70 % de leur chiffre d‘affaire pendant la pandémie.
Une provision de 2 milliards d‘euros est par ailleurs constituée afin d‘approvisionner les hôpitaux et de payer des indemnités journalières.
À cet effort s’ajoute l’annonce du 16 mars 2020 du gouvernement indiquant que les charges fiscales (13 milliards d’euros) et sociales (21 milliards d’euros) du mois de mars sont reportées pour toutes les entreprises qui le souhaitent afin de soulager leur trésorerie.
Un amendement du gouvernement a permis le renforcement de la réassurance publique sur l‘assurance-crédit et les crédits- exports. L‘assurance-crédit protège du non-paiement les entreprises qui accordent des délais de paiement à leurs clients. Une garantie de 10 milliards d‘euros par l‘État permet à la Caisse centrale de réassurance de sécuriser les octrois d‘assurance-crédit aux entreprises par les assureurs-crédits. Parallèlement, une garantie de 2 milliards d‘euros vient doubler le dispositif de réassurance publique des crédits-exports. Ces assurances proposées par des assureurs privés permettent aux entreprises exportatrices de conserver une trésorerie suffisante en cas de délais de paiements prolongés ou d’impayés. Une telle précaution est vitale dans le contexte actuel de crise mondiale. Cette garantie permet de compléter ou de remplacer la couverture par l‘assureur privé des risques de défaillance du client étranger. BpiFrance Assurance Export gère ce dispositif dit « Cap Francexport ». Créé en 2018, « Cap Francexport » est destiné à soutenir en même temps les exportations et le secteur des assureurs. Alors que seules les exportations en direction de 17 pays étaient couvertes auparavant, la loi de finances rectificative étend la garantie à l’ensemble des pays.
Un amendement de l‘Assemblée nationale a institué un comité auprès du Premier ministre afin de suivre et d‘évaluer les mesures de soutien aux entreprises pendant la pandémie (prêts garantis par l‘État et fonds de solidarité avec les TPE). Présidé par une personnalité désignée par le Premier Ministre, ce comité de suivi et d‘évaluation est composé de deux membres de chaque chambre parlementaire, de deux membres de la Cour des comptes, de deux représentants de l‘État et de deux représentants des fédérations d‘entreprises ainsi que d‘un représentant de chacune des associations d‘élus locaux (Association des maires de France, Assemblée des départements de France et Régions de France).
Les sénateurs n’ont déposé aucun amendement.
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Par rapport à la première loi de finances rectificative pour 2020, cette loi de finances rectificative renforce l’effort de l’État face à la pandémie et à la récession. L’ensemble des mesures de la nouvelle mission « Plan d‘urgence face à la crise sanitaire » passe ainsi de 45 à 110 milliards d’euros. Le financement du chômage partiel, sollicité par plus de 8 millions de salariés, connaît une augmentation de 5,5 milliards d’euros et atteint 24 milliards d‘euros. Le fonds de solidarité pour les TPE est relevé de 1 à 6,75 milliards d’euros. Les régions sont à nouveau mises à contribution. Les entreprises sont, de plus, exonérées de prélèvements fiscaux et sociaux sur les aides reçues depuis ce fonds (impôt sur le revenu, impôt sur les sociétés, CSG, CRDS et cotisations sociales). Le fonds de développement économique et social (FDES) est, quant à lui, doté d’un milliard d’euros afin d’accorder des prêts supplémentaires aux entreprises en difficultés (article 16 de la loi). Les petites entreprises pourront bénéficier de prêts participatifs (CMF, art. L. 313-14 N° Lexbase : L7978HB4). Ce FDES est retracé depuis 2005 sur un compte spécial « Prêts et avances à des particuliers ou des organismes privés ». Les TPE et les PME qui n’ont plus accès au crédit bancaire en raison de la crise pourront se tourner vers le FDES. Parallèlement, un fonds de 20 milliards d’euros est institué afin de permettre à l’État de recapitaliser des entreprises stratégiques par des prises de participations ou des nationalisations temporaires (article 10 de la loi). Des entreprises aéronautiques et des constructeurs automobiles peuvent profiter de ce dispositif. Ce nouveau programme « Renforcement exceptionnel des participations financières de l’État dans le cadre de la crise sanitaire » au sein de la mission « Plan d‘urgence face à la crise sanitaire » est géré par le commissaire aux participations de l’État. Une information préalable des Commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat doit être assurée par le ministre de l’Économie avant les prises de participation dépassant le milliard d‘euros (article 22 de la loi). Un rapport du Gouvernement au Parlement devra non seulement justifier la bonne gestion des ressources publiques par les entreprises recapitalisées mais aussi expliciter la mise en œuvre de leur responsabilité sociale, sociétale et environnementale. Les prêts garantis par l’État et prévus par la première loi de finances rectificative sont étendus à la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et Wallis et Futuna. De plus, des avances remboursables et des prêts bonifiés, globalement à hauteur de 500 millions d‘euros supplémentaires, pourront être octroyés aux entreprises industrielles stratégiques employant entre 50 et 250 salariés. Des impayés pourront en outre être évités grâce au relèvement de 2 à 5 milliards d’euros de la réassurance publique de l’assurance-crédit export de court terme. Le comité de suivi et d’évaluation du fonds pour les TPE et du dispositif de chômage partiel prévu par la première loi de finances rectificative voit ses missions élargies à l’ensemble des mesures anti-crise de soutien aux entreprises.
Une aide d’urgence de 900 millions d’euros prévue dans cette seconde loi de finances rectificative a été versée à 4,1 millions de ménage le 15 mai 2020. Les foyers vivant du RSA (revenu de solidarité active) ou de l’ASS (allocation spécifique de solidarité) se sont vus attribués 150 euros (plus 100 euros par enfant) tandis que les foyers qui reçoivent des allocations logement (sans RSA, ni ASS) ont pu recevoir 100 euros par enfant. Un amendement sénatorial, adopté contre l‘avis du gouvernement mais conservé par la CMP, a rehaussé de 8 millions la dotation particulière élu local (DPEL). Cette augmentation permet de faire bénéficier tous les maires des communes de moins de 500 habitants de l’augmentation prévue par la loi de finances initiale pour 2020. Lors de l’exécution du budget 2020, seules les communes au potentiel financier inférieur à la moyenne avaient pu en profiter. Les maires des petites communes sont en effet mis à rude épreuve pendant la pandémie. On peut même se demander pourquoi cette revalorisation se cantonne aux plus petites communes. Afin de soutenir les artistes et les organisateurs d’événements, les collectivités locales obtiennent, toujours grâce à un amendement sénatorial, le droit de maintenir les subventions accordées avant la crise aux manifestations culturelles annulées pendant la pandémie (article 24 de la loi). La prime exceptionnelle destinée aux agents publics en première ligne pendant l’état d’urgence sanitaire est exonérée de prélèvements fiscaux ou sociaux. La provision constituée afin de faire face aux dépenses exceptionnelles de matériel de santé (les masques notamment) et les frais de personnels liés à la pandémie (notamment en faveur des personnels de santé) passe à 8 milliards d‘euros.
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Trois traits principaux caractérisent cette troisième loi de finances rectificative pour 2020. D’une part, elleadopte 45 milliards de mesures d’aide aux secteurs les plus sinistrés par la crise économique due à la pandémie de covid-19. D’autre part, elle accorde 4,5 milliards de soutien aux collectivités locales. En dernier lieu, des fonds sont débloqués en faveur des jeunes en situation particulièrement précaire en raison de la crise.
La loi de finances rectificative autorise les crédits nécessaires pour financer le plan tourisme de 18 milliards d’euros, le plan de soutien au secteur automobile (8 milliards d’euros), le plan de soutien à l’aéronautique (15 milliards), le plan en faveur de la culture (1,3 milliards d’euro) et le plan en faveur des startups (700 millions). Le dispositif relatif au chômage partiel monte à 31 milliards d’euros. Le fonds de solidarité pour les TPE augmente à 8 milliards d’euros. La possibilité de débloquer exceptionnellement jusqu’au 31 décembre 2020 son épargne retraite est accordée aux travailleurs indépendants. Par ailleurs, la loi de finances rectificative dispense les PME de loyers et de redevances d’occupation du domaine public dus aux établissements publics ou à l’État. Une aide exceptionnelle à l’embauche est en outre prévue pour les apprentis. Les entreprises reçoivent 8 000 euros par apprenti majeur et 5 000 euros par apprenti mineur, y compris dans le cadre de contrats de professionnalisation. Un milliard d’euros est de surcroît prévu pour un dispositif exceptionnel en faveur de l’emploi des jeunes. De leur côté, les parlementaires ont ajouté au collectif budgétaire 490 millions d’euros pour décarboner l’industrie ainsi que pour financer des projets de relocalisation industrielle. Les députés ont aussi inséré un article conditionnant la participation de l’État au capital des grandes entreprises à la publication d’un bilan carbone et d‘une stratégie de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Une amende de 375 000 euros est prévue en cas d’infraction (article 66 de la loi). En raison de sa limitation à la publication d’un bilan, les associations environnementales ont jugé cette mesure cosmétique.
Le plan de soutien aux collectivités locales est composé de 750 millions d’euros pour compenser les pertes de recettes fiscales et domaniales des communes et des intercommunalités en difiiculté et des territoires d’outre-mer (régions et collectivités d’outre-mer). Tout d’abord, cette dotation de compensation des pertes de ressources fiscales et domaniales entraînées par la pandémie permettra aux communes et intercommunalités de partiellement maintenir leurs recettes malgré le marasme économique (article 21 de la loi). Si la plupart des recettes concernées seront compensées au comptant (taxe sur la publicité extérieure, taxe sur les surfaces commerciales, impôt sur les maisons de jeux, versement mobilité…), d’autres recettes ne seront compensées que forfaitairement à hauteur de 21% (redevances et recettes d’utilisation du domaine). Les versements prendront en 2020 la forme d’un acompte calculé à partir d’une estimation. En 2021, une régularisation interviendra sur la base des montants exacts à compenser. Un amendement parlementaire a prévu une dotation minimale de 1 000 euros pour les communes ou intercommunalités. Les régions et collectivités d’outre-mer bénéficieront quant à elle d’une compensation spécifique des pertes d’octroi de mer et de la taxe spéciale de consommation (article 22 de la loi). Par ailleurs, une avance de 2,7 milliards d’euros est accordée aux départements et assimilés subissant un recul des recettes de DMTO (droits de mutation à titre onéreux) par l’article 25 de la loi. Il est regrettable que la Majorité ait choisi la technique de l’avance remboursable plutôt que celle de la dotation de compensation, comme pour les communes et intercommunalités. Une dotation de compensation aurait été évidemment plus favorable à des départements déjà sous pression pour financer les aides sociales qu’ils servent. Un amendement des sénateurs, dit clause de bonne fortune, décale toutefois le remboursement par les départements de l’avance reçue à l’année suivant le retour au niveau de 2019 des recettes de DMTO. Un autre amendement parlementaire prévoit une rallonge de l’État de 425 millions d‘euros pour compenser la baisse des recettes de la société gérant les transports en Île de France (Île de France mobilité). La DSIL (dotation de soutien à l’investissement local) est renforcée d’un milliard d’euros afin de financer des projets améliorant la résilience sanitaire, la transition écologique ou la rénovation patrimoniale. Ce financement par la DSIL pourra aussi bénéficier à des projets éligibles au titre de la DETR (dotation d’équipement des territoires ruraux). Les régions (hors outre-mer) semblent en revanche avoir été oubliées par ce train de mesures. Elles devront attendre 2021 puisque l’accord signé entre l’État et les régions le 31 juillet 2020 prévoit une aide de 600 millions d’euros pour investir ainsi que le remplacement de leur part de CVAE (cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises) par une nouvelle fraction de TVA (taxe sur la valeur ajoutée).
Enfin, des fonds ont été débloqués en faveur des jeunes particulièrement frappés par la crise actuelle et souvent menacés de précarisation. Les adultes de moins de 25 ans sans personne à charge et touchant les APL (aides personnalisées au logement) devraient être destinataires d’une aide aux jeunes en précarité. Cette aide de 200 euros devrait profiter à 400 000 allocataires. Un amendement gouvernemental crée par ailleurs une ligne budgétaire de 50 millions d’euros pour mettre en place le repas à un euro pour les étudiants boursiers. Une aide de 50 millions d’euros est en outre attribuée aux départements pour renforcer l’Aide sociale à l’enfance.
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Le premier objectif de ce nouveau collectif budgétaire est de soutenir l’économie pendant le reconfinement de novembre.
Le fonds de solidarité pour les PME et les indépendants est ainsi abondé de 10,9 milliards supplémentaires s’ajoutant aux crédits déjà votés dans les lois de finances rectificatives précédentes. Les entreprises de certains secteurs comme le tourisme, la culture ou le sport voyant leur chiffre d’affaire décliner de 50 % ou plus pourront désormais en bénéficier. Les indemnisations sont dorénavant plafonnées à 10 000 euros pour les entreprises jusqu’à 50 salariés.
Certains secteurs particulièrement touchés par la crise font aussi l’objet d’une attention particulière. Un fonds d’urgence de 30 millions d’euros est créé pour sauvegarder l’emploi dans les petites associations, en particulier dans le domaine de l’économie sociale et solidaire. Les petits commerçants vont bénéficier d’une aide de 60 millions d’euros pour accélérer le passage au numérique, crucial pendant le reconfinement. L’investissement dans des branches stratégiques comme l’automobile et l’aéronautique va enfin être soutenu à hauteur de 82 millions d’euros.
Le second objectif de ce collectif budgétaire est d’aider les plus précaires.
Une aide exceptionnelle de 1,1 milliard d’euros est créée afin de soutenir les foyers les plus précarisés. Cette aide s’élève à 150 euros pour les personnes percevant le RSA ou l’ASS ainsi que pour les jeunes de moins de 25 ans bénéficiant de l’APL. Elle est fixée à 100 euros par enfant pour les familles touchant l’APL.
Un milliard d’euros est en parallèle destiné aux personnes handicapées, à l’aide à l’apprentissage et à l’embauche des jeunes ainsi qu’à l’hébergement d’urgence. 30 000 nouveaux postes dans l’insertion par l’activité sont aussi prévus pour accompagner les populations les plus fragiles.
Le dernier objectif de ce collectif budgétaire est de venir en aide aux collectivités locales.
Le fonds de stabilisation des départements est augmenté par rapport aux années précédentes afin de bénéficier à davantage de départements. Des crédits sont aussi prévus pour compenser les achats de masques par les collectivités locales. Une aide exceptionnelle de 20 millions d’euros est enfin accordée au département des Alpes-Maritimes après la tempête Alex.
En revanche, deux enveloppes adoptées dans la troisième loi de finances rectificative sont ajustées à la baisse. D’une part, la dotation de compensation du bloc communal des pertes de recettes perd plus de 350 millions d’euros. D’autre part, les avances remboursables de DMTO sont diminuées de 1,5 milliards d’euros en raison du peu d’engouement des départements pour la mesure.
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