ETUDE : Comment obtenir l’indemnisation des pertes d’exploitation par son assureur ?* Rédigée le 25.06.2020
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sans cacheDernière modification le 04-01-2021
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Un webinaire animé par Maître Valérie Morales, avocat associée chez Marvell avocats et Madame Clarisse Bréant, Expert financier et auditeur risques pertes d’exploitation. Quels sont les apports de l’ordonnance de référé du Tribunal de Commerce de Paris du 22 mai 2020 (Maison Rostang/Axa) ? Comment procéder vis-à-vis de son assureur ? Les points de vigilance dans l’audit de la police d’assurance ? Faire chiffrer sa perte d’exploitation : principes d’indemnisation et règles de calcul. La mise en jeu de la garantie pertes d’exploitation : comment constituer son dossier avec l’avocat et l’expert-financier?
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Toutefois, les assurances ont d’abord répondu de façon quasi-unanime que cette pandémie était inassurable au motif que le principe de l’assurance reposait sur le concept de la mutualisation (indemniser ceux qui sont touchés par un sinistre grâce aux primes de ceux qui ne sont pas concernés), lequel ne pouvait plus fonctionner en présence d’une pandémie touchant tous les assurés.
Cependant, certains assureurs ont fait marche arrière : notamment le Crédit Mutuel en débloquant une somme de 200 millions d’euros pour indemniser ses clients professionnels au titre des pertes d’exploitation. Le CIC et le Crédit Agricole ont aussi suivi cette démarche.
La décision de référé rendue le 22 mai 2020 par le tribunal de commerce de Paris condamnant AXA à indemniser la perte d’exploitation d’un restaurateur a ravivé les espoirs des restaurateurs et spécialistes de l’évènementiel (T. com. Paris, 22 mai 2020, aff. n° 2020017022 N° Lexbase : A02603ML : cf. la brève parue dans Lexbase, éd. priv., n° 825 N° Lexbase : N3418BYA ; cf. également, D. Krajeski, Confinement et couverture des pertes d’exploitation d’un restaurateur : la demande de provision est en partie acceptée, Lexbase, éd. priv., n° 826, 2020 N° Lexbase : N3586BYH).
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Il a ainsi sollicité :
La société AXA s’est opposée à ces demandes en développant l’absence d’urgence et l’existence de contestations sérieuses, arguments rejetés par le juge des référés.
Tous les moyens de l’assureur ont été écartés par le juge des référés.
AXA a tenté, tout d’abord, de faire valoir le caractère inassurable du risque pandémique tant au plan économique que juridique. L’argument est immédiatement balayé par le tribunal, qui relève qu’une telle question, ne le concernait pas ici, dans le cadre de cette action en référé. Il explique devoir simplement se prononcer sur l'application d'un contrat d'assurance précis comportant des conditions générales, des conditions particulières le tout constituant la loi des parties et ceci, sans avoir à trancher de contestations sérieuses.
Il relève que l'assureur ne s'appuie sur :
→ aucune disposition légale d’ordre public qui ne prévoyait le caractère inassurable des conséquences d’une pandémie ;
→ et que le risque de pandémie ne faisait pas partie des exclusions de garanties listées dans le contrat d’assurance liant les parties.
Axa a tenté de faire valoir :
Ces moyens ont été écartés par le juge des référés.
Le juge des référés a déclaré recevable l'action du restaurateur et a condamné l’assureur au versement d’une provision de 45 000 euros sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard.
Cependant, la demande d'indemnisation de l'assuré était chiffrée à la somme de 72 878,33 euros couvrant la période du 14 mars au 15 juillet 2020.
Pourquoi une telle différence dans le chiffrage ?
Le juge des référés a retenu que le préjudice était incertain entre le 1er juin et le 15 juillet 2020 au motif que la date de réouverture des restaurants n’était pas encore fixée. Une expertise judiciaire a été ordonnée afin d’évaluer le montant de la marge brute et les frais supplémentaires d’exploitation « pendant la période d’indemnisation » (sans précision de date).
Dans un communiqué de presse du 22 mai 2020, la société AXA a indiqué qu’elle interjetait appel de cette décision.
D‘autres décisions ont, depuis, été rendues sur le sujet, notamment une ordonnance du juge des référés du tribunal de commerce de Lyon, à propos d’un autre contrat AXA ; les parties ont été renvoyées devant le juge du fond, en présence d’une clause d’exclusion considérée comme ambiguë. |
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1° Dans quels contrats trouve-t-on une garantie perte d’exploitation ?
La garantie perte d’exploitation est un contrat d’assurance non obligatoire.
L’assurance perte d’exploitation peut être :
De la nature du contrat souscrit par l’assuré, vont évidemment dépendre les conditions de prise en charge de la garantie perte d’exploitation.
2° Les conditions de prise en charge
Sous réserve naturellement des clauses de chaque contrat, les conditions de prise en charge varieront selon la nature de la garantie :
L’assuré sera donc confronté à une difficulté dans ce cas puisque par hypothèse, la crise sanitaire actuelle est indépendante de tout autre sinistre préalable.
3° Les exclusions expresses
L’assuré doit se référer attentivement aux clauses d’exclusion prévues dans son contrat. En effet, bien souvent, les contrats d’assurance stipulent que les épidémies et pandémies sont exclues de la garantie. Mais l’exclusion doit être aussi entendue strictement et toute ambiguïté relevée par un juge doit profiter à l’assuré. L’assuré ne doit pas se fier aux apparences de prime abord, donc.
4° L’imprévision ou la force majeure (Pour aller plus loin : l'interview du prof. Didier Krajeski, disponible en podcast sur Lexradio).
L’assureur pourrait-il invoquer l’un ou l’autre de ces mécanismes pour se désengager ? A priori, non !
En effet, pour pouvoir recevoir application, la force majeure nécessite la preuve d’une impossibilité d’exécuter. Or, les obligations imposées par les parties au contrat d’assurance ont pu être exécutées pendant l’épidémie due au Covid-19.
Quant à la théorie de l’imprévision, elle ne pourrait tout au plus être applicable qu’aux contrats d’assurance souscrits après le 1er octobre 2016 et l’on voit mal comment elle pourrait trouver application puisque la circonstance imprévisible est de l’essence-même de tout contrat d’assurance.
La déclaration de ce sinistre doit intervenir dès que l’assuré a eu connaissance du sinistre et dans les délais prévus au contrat, sous peine de déchéance. Ce délai ne peut être inférieur à cinq jours ouvrés (C. ass., art. L. 113-2 N° Lexbase : L9563LGB). Toutefois, la déchéance ne peut être opposée à l’assuré que si l’assurance établit que le retard dans la déclaration lui a causé un préjudice. Elle ne peut également être opposée dans tous les cas où le retard est dû à un cas fortuit ou de force majeure.
L’assureur devra répondre à cette demande et préciser pourquoi il refuse sa garantie, si telle est sa position.
On peut cependant, sous réserve des termes de chaque contrat, rappeler que la perte d’exploitation prend en compte les pertes subies, les gains manqués ainsi qu’éventuellement la perte de chance.
Son évaluation est relativement complexe et il convient alors de faire appel à un expert-financier pour présenter une demande précise, chiffrée et étayée de pièces à l’appui.
Les pertes subies comprennent principalement les pertes matérielles ainsi que les surcoûts :
Les gains manqués correspondent à la perte de marge sur coût variable.
L’entreprise pourrait également souffrir d’un préjudice lié à une perte de chance de conclusion d’un contrat, d’un appel d’offres, etc..
Tous ces éléments seront examinés attentivement au regard des termes du contrat pour déterminer le montant du préjudice réparable.
En guise de conclusion... On le voit : face à la résistance de l’assureur, la possibilité d’actionner la garantie perte d’exploitation nécessite l’analyse préalable des clauses du contrat d’assurance par un avocat. L’assuré pourra alors solliciter l’allocation d’une provision et engager les procédures nécessaires pour obtenir l’indemnisation intégrale des préjudices subis, ou saisir le tribunal pour contester les clauses ambigües de son contrat. |