2. Les parties privatives
E4554ETT
Ce n'est que "dans le silence ou la contradiction des titres" que l'article 3 de la loi du 10 juillet 1965 détermine les parties réputées communes. Ainsi appartient-il, en premier lieu, au règlement de copropriété de désigner, au sein de chaque copropriété, les parties communes et privatives, ainsi que leur destination.
Les parties privatives sont définies à l'article 2 de la loi du 10 juillet 1965 comme les parties des bâtiments et des terrains réservées à l'usage exclusif d'un copropriétaire déterminé. Les parties privatives sont la propriété exclusive de chaque copropriétaire.
2-1. La définition légale des parties privatives
Sont privatives les parties des bâtiments et des terrains réservées à
l'usage exclusif d'un copropriétaire déterminé.
Précisions"Le critère de l'exclusivité de l'usage est celui qui sert de guide en cas d'hésitation sur la qualification d'un élément de l'immeuble.
Sont généralement considérés comme 'parties privatives' :
- l'intérieur des appartements ou des locaux commerciaux et professionnels, y compris les fenêtres, les volets, les balustrades et les appuis des balcons ;
- les parquets, carrelages ou tout autre revêtement du sol ;
- les éléments d'équipement (appareils sanitaires, appareils de chauffage individuel, installation de cuisine) ;
- les cloisons intérieures non comprises dans le gros oeuvre ;
- les devantures des magasins ;
- les locaux accessoires accessibles par un seul copropriétaire et n'abritant aucun élément d'équiement collectif tels que les caves, les combles ou les greniers ;
- les balcons".
Mémento Francis Lefebvre, Gestion immobilière, 2010-2011, n° 35205.
Les parties privatives sont la propriété exclusive de chaque copropriétaire.
Les cloisons ou murs, séparant des parties privatives et non compris dans le gros oeuvre, sont présumés mitoyens entre les locaux qu'ils séparent.
La délimitation entre parties privatives et communes est en principe figée au jour du règlement de copropriété. Ainsi, si à la date du règlement, un lot ne disposait pas d'évacuation d'eau, installée postérieurement, celle-ci un a un caractère privatif.
Le propriétaire d'une partie privative d'un immeuble en copropriété est nécessairement un copropriétaire tenu au paiement des charges communes.
Contrairement aux parties communes, tous les lots constituant des parties privatives doivent être affectés de millièmes de copropriété.
Dès lors qu'une cour d'appel constate qu'un lot est composé de parties privatives et d'une quote-part de parties communes, elle ne peut le qualifier de "parties communes spéciales".
2-2. Le caractère supplétif de la désignation légale des parties privatives
Les dispositions de l'article 2, alinéa 1er de la loi du 10 juillet 1965, ne sont pas d'ordre public. Elles sont supplétives de la volonté des parties.
C'est en effet au règlement de copropriété qu'il appartient, en premier lieu, de déterminer la destination des parties tant privatives que communes, ainsi que les conditions de leur jouissance.
Il appartient aux juges de donner la qualification adéquate à un volume. Ils ne peuvent refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance de preuves qui lui sont fournies par les parties.
Constitue une partie privative un volume qui n'est affecté par aucun acte à un lot, qui n'est accessible que par une partie privative laquelle en a la jouissance exclusive, qui est sans utilité ni intérêt pour la collectivité et les autre copropriétaires.
Dès lors que le règlement de copropriété prévoit que les parties privatives comprennent les espaces attribués en jouissance exclusive à un copropriétaire, le paiement des charges afférentes à l'entretien de ces espaces est dû par ledit copropriétaire.
2-3. Le critère de distinction d'une partie privative : l'usage exclusif d'un copropriétaire
Sont privatives les parties des bâtiments et des terrains réservées à l'usage exclusif d'un copropriétaire déterminé.
L'affectation d'un volume à l'usage exclusif d'un copropriétaire peut constituer une base de distinction entre partie privative et partie commune.
Toutefois, un droit de jouissance exclusif sur des parties communes n'est pas un droit de propriété et ne peut constituer la partie privative d'un lot.
PrécisionsIl appartient aux juges de donner la qualification adéquate à un volume. Ils ne peuvent refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance de preuves qui lui sont fournies par les parties.
2-4. Les exemples jurisprudentiels de parties privatives
2-4-1. Les combles
Pour savoir si des combles constituent une partie privative, il convient de rechercher si, avant travaux, ils étaient réservés à l'usage exclusif des copropriétaires.
Il appartient au syndicat des copropriétaires, qui sollicite que des combles soient qualifiés de parties communes, d'établir que ces combles ont une utilité pour tous les copropriétaires ou pour plusieurs d'entre eux.
A défaut de précision dans le règlement de copropriété, un comble, dont l'accès se fait par des parties privatives et dont le propriétaire desdites parties privatives a l'usage exclusif, constitue une partie privative.
Constituent une partie privative des combles n'abritant aucun élément d'équipement collectif, n'étant d'aucun usage ou d'aucune utilité pour les autres copropriétaires, et n'étant accessibles que par une partie privative.
Constituent une partie privative des combles dont l'accès se fait par une partie privative, nonobstant le fait qu'ils permettent le passage de plusieurs canalisations communes et qu'ils soient délimités par trois murs constitutifs de parties communes.
2-4-2. Les terrasses
Une terrasse réservée à la jouissance exclusive d'un copropriétaire peut être qualifiée de "partie privative" par le règlement de copropriété.
Si le règlement de copropriété prévoit que la toiture est une partie commune, cela n'implique pas qu'une toiture-terrasse, qui se distingue naturellement de la couverture, soit une partie privative.
Si une terrasse est désignée comme une partie privative par le règlement de copropriété, les juges peuvent néanmoins estimer que son ossature, faisant partie du gros oeuvre, constitue une partie commune.
2-4-3. Les balcons et garde-corps
Dès lors que le règlement de copropriété n'intègre pas dans les parties communes les balcons, ceux-ci constituent des parties privatives.
Le règlement de copropriété peut librement qualifier les balcons de parties privatives dans leur intégralité, sans distinction, ni exception du gros oeuvre.
L'entretien et la conservation des garde-corps des parties privatives, qui servent à délimiter ces parties privatives et à en assurer la protection, doivent demeurer à la charge de leur propriétaire.
Dès lors que les loggias ou balcons ne sont accessibles que depuis l'appartement et que le règlement de copropriété n'envisage pas l'existence de parties communes à usage privatif, les balcons et loggias ne peuvent pas être qualifiés de parties communes.
Les juges du fond peuvent souverainement interpréter le règlement de copropriété, sans le dénaturer, en assimilant les terrassons aux balcons définis comme des parties privatives. Dès lors, les balustrades et vases Médicis de ces terrassons peuvent également recevoir la même qualification, en ce qu’ils forment un tout, et les copropriétaires des lots dans lesquels ils sont intégrés sont les seuls à devoir financer les travaux de leur restauration (pour un commentaire détaillé de cette décision : P.-E. Lagraulet,
Méthode de distinction entre les parties privatives et communes : le règlement de copropriété d’abord, la loi ensuite !, Lexbase Droit privé, n° 852, 28 janvier 2021
N° Lexbase : N6245BYX).
2-4-4. Les cours et courettes
Dès lors que le règlement de copropriété prévoit que les parties privatives comprennent les espaces attribués en jouissance exclusive à un copropriétaire, une courette dont l'usage exclusif est réservé à un copropriétaire constitue une partie privative.
Une cour commune dont la jouissance exclusive est réservée aux propriétaires de deux lots a pu, dans le silence du règlement de copropriété, être qualifiée de "partie privative".
2-4-5. Le plancher et les poutres
2-4-6. Les exemples divers
Vitrerie/menuiseries métalliques. Le châssis et le vitrage séparant un atelier de l'extérieur, n'étant pas affectés à l'usage ou l'utilité de tous ou plusieurs copropriétaires, l'atelier n'étant par ailleurs pas un élément de gros oeuvre, constituent des parties privatives.
Radier. Le radier d'un immeuble mis en place pour assurer l'étanchéité d'une partie privative, n'ayant aucune utilité pour les autres lots dépendant de l'immeuble, constitue une partie privative.
Loge de concierge. Le fait qu'une loge de concierge ait été érigée en lots affectés de millièmes implique que celle-ci doit être qualifiée de "partie privative". Pour des exemples de classification en parties communes, voir
N° Lexbase : E4677ETE.
WC indivis. Le lot désigné comme étant un "Water-closet commun à l'étage" constitue une propriété privative indivise entre les propriétaires des autres lots situés à cet étage.
2-5. La possibilité de créer une servitude entre deux parties privatives
Depuis un arrêt du 30 juin 2004, la Cour de cassation admet la possibilité de constituer une servitude entre deux parties privatives.
La division d'un immeuble en lots de copropriété n'est pas incompatible avec l'établissement de servitudes entre les parties privatives de deux lots, ces héritages appartenant à des propriétaires distincts.
PrécisionsJusqu'à l'arrêt de la Cour de cassation du 30 juin 2004, la possibilité de créer des servitudes entre parties privatives d'une copropriété n'était pas admise.
"La Cour de cassation décidait en effet qu'il existait une incompatibilité absolue entre servitudes et copropriété. Se fondant sur la définition de la servitude figurant à l'article 637 du Code civil, elle jugeait qu'une servitude n'existe que si le fonds servant et le fonds dominant constituent des propriétés distinctes et séparées appartenant privativement à des propriétaires différents. Or, la copropriété est constituée par des lots qui eux-mêmes sont composées de deux éléments indissolublement liés : les parties privatives et la quote-part correspondante de parties communes. Les parties privatives ne représentant pas, pour la Cour de cassation, un fonds distinct et les parties communes dont chaque lot détient une quote-part étant indivises, la Cour de cassation en déduisait l'absence de fonds distincts et séparés et l'impossibilité corrélative de constituer une servitude sur des parties privatives d'un lot au profit des parties privatives d'un autre lot.
En dépit des considérations à la fois pratiques et théoriques qui la justifiaient, cette prohibition prétorienne rencontrait l'hostilité de nombreux auteurs, qui faisaient notamment valoir que l'article 637 du Code civil signifie seulement qu'aucune servitude n'est concevable, ni nécessaire, lorsque les deux fonds sont la propriété d'une seule et même personne. La doctrine semblait néanmoins faire preuve d'une certaine résignation devant sa constante réitération, alors que dans la pratique, les notaires continuaient souvent d'insérer des clauses établissant des servitudes dans les règlements de copropriété et dans les actes de vente de biens dépendant d'immeubles en copropriété" (Extrait du rapport annuel 2004 de la Cour de cassation).
C'est dans ce contexte qu'a été rendu l'arrêt du 30 juin 2004, la Cour de cassation considérant désormais que la partie privative d'un lot et la quote-part correspondante de parties communes constituent un "héritage" au sens de l'article 637 du Code civil.
Elle admet en conséquence la possibilité d'établir une servitude entre les parties privatives de deux lots appartenant à des propriétaires distincts.
Il n'existe plus désormais d'incompatibilité de principe à l'établissement d'une servitude au profit de la partie privative d'un lot sur la partie privative d'un autre lot.
Une servitude peut grever une copropriété au profit d'un fonds voisin. Le bénéficiaire de cette servitude ne devient pas copropriétaire pour autant.
En revanche, aucune servitude ne peut être établie sur une partie commune au profit d'un lot.
Cette disposition introduite dans un nouvel article 6-1 A dans la loi de 1965, par l'ordonnance du 30 octobre 2019 portant réforme du droit de la copropriété, consacre ainsi une solution jurisprudentielle posée par la troisième chambre civile de la Cour de cassation, qui avait retenu qu'il y avait une incompatibilité entre la division d'un immeuble en lots de copropriété et la
création d'une servitude sur une partie commune au profit d'un lot privatif (Cass. civ. 3, 11 janvier 1989, n° 87-13.605
N° Lexbase : A8923AAQ ; et rappelé tout récemment, sous l'empire des dispositions antérieures : Cass. civ. 3, 23 septembre 2021, n° 19-22.556, F-D
N° Lexbase : A446647K).
E4555ETU
Ce n'est que "dans le silence ou la contradiction des titres" que l'article 3 de la loi du 10 juillet 1965 détermine les parties réputées communes. Ainsi appartient-il, en premier lieu, au règlement de copropriété de désigner, au sein de chaque copropriété, les parties communes et privatives, ainsi que leur destination.
L'article 3 de la loi du 10 juillet 1965 définit les parties communes comme les parties des bâtiments et des terrains affectées à l'usage ou à l'utilité de tous les copropriétaires ou de plusieurs d'entre eux.
3-1. La définition et la création ou l'acquisition des parties communes
Sont communes les parties des bâtiments et des terrains affectées à l'usage ou à l'utilité de tous les copropriétaires ou de plusieurs d'entre eux.
Il appartient en général au règlement de copropriété de déterminer les parties communes.
Les parties communes sont l'objet d'une propriété indivise entre l'ensemble des copropriétaires ou certains d'entre eux seulement ; selon le cas, elles sont générales ou spéciales. Leur administration et leur jouissance sont organisées conformément aux dispositions de la présente loi.
Il n'existe pas de parties communes "par nature". Les juges ont donc un rôle important d'interprétation des titres si ceux-ci ne sont pas clairs.
Des locaux ayant été construits en surélévation de parties communes sans aucun droit peuvent être acquis par le syndicat des copropriétaires par le jeu de la prescription acquisitive.
3-2. Les parties communes spéciales
Définition. La loi "ELAN" du 23 novembre 2018 a introduit dans la loi de 1965 un nouvel article 6-2, dédié aux parties communes spéciales, et qui les définit comme étant "affectées à l'usage ou à l'utilité de plusieurs copropriétaires. Elles sont la propriété indivise de ces derniers".
Les copropriétaires des parties communes spéciales ne constituent pas une indivision forcée du droit commun. Ainsi, l'administration et la disposition de telles parties communes sont régies par les dispositions de la loi du 10 juillet 1965.
Exemple : ascenseur. Un ascenseur peut constituer un élément d'équipement commun aux seuls propriétaires de certains lots.
Exemple : chambres de service. Des chambres de service peuvent constituer des parties communes spéciales aux copropriétaires titulaires de droits à leur égard.
Absence de droit des autres copropriétaires. En présence d'une partie commune spéciale, les autres copropriétaires ne peuvent prétendre à aucun droit à la propriété ou à la jouissance et ne peuvent imposer la transformation à ses propriétaires exclusif de façon à assurer la desserte de son lot.
Le règlement de copropriété qui prévoit des parties communes spéciales à chaque bâtiment, crée une propriété indivise entre les copropriétaires de chaque bâtiment, en sorte que les autres copropriétaires n'ont aucun droit de propriété indivis sur les parties d'immeuble concernées.
Charges spéciales. La création de parties communes spéciales est indissociable de l'établissement de charges spéciales à chacune d'entre elles.
PrécisionsLa loi «ELAN» précise le régime juridique des parties communes spéciales. Définies par l’article 4 de la loi de 1965 comme celles faisant l’objet d’une propriété indivise entre plusieurs copropriétaires seulement, le nouvel article 6-2 prévoit que leur création est indissociable de l’établissement de charges spéciales à chacun d’elles, ce qui consacre la jurisprudence de la Cour de cassation [11]. Il est toutefois regrettable que le texte n’ait pas repris la proposition de l’article 7 de l’avant-projet du GRECCO qui envisageait réciproquement qu’il ne pourrait y avoir de charges spéciales sans création de parties communes spéciales. Cette disposition aurait permis de supprimer le paragraphe III de l’article 24 sur les assemblées générales spéciales et de retrouver la cohérence entre propriété des parties communes spéciales et droit de vote. Cela n’a pas été le choix du législateur de 2018 et il faut espérer que les ordonnances prochaines harmoniseront les textes actuels d’autant que le dernier alinéa de l’article 6-2 nouveau organise désormais la prise de décisions afférentes aux parties communes spéciales. En effet, les décisions les concernant, quelle que soit la majorité requise, ne seront votées que par leurs propriétaires indivis soit au cours d’une assemblée spéciale soit au cours de l’assemblée générale de tous les copropriétaires.
[11] Cass. civ. 3, 8 juin 2011, n° 10-15.551, FS-P+B ([LXB=A4975HTG), Bull. civ. III, n° 95.
Florence Bayard-Jammes, extrait de La loi «ELAN» et la copropriété, paru dans Lexbase, éd. priv., n° 767, 2019 (N° Lexbase : N7025BXH)
La création dans le règlement de copropriété de parties communes spéciales a pour corollaire l'instauration de charges spéciales.
Le règlement de copropriété ne peut prévoir de charges spéciales qu'en présence de parties communes spéciales (sauf si un lot n'a aucun accès à la partie commune correspondante). Toute clause contraire doit être réputée non écrite.
Seuls les copropriétaires ayant des droits sur les parties communes spéciales sont contraints de participer à leur entretien et à leur conservation.
Assemblées spéciales. Lorsque le règlement de copropriété crée des charges spéciales, il peut être prévu que seuls les copropriétaires ayant des droits sur celles-ci prennent part au vote sur les décisions concernant ces dépenses.
Chacun d'eux vote avec un nombre de voix proportionnel à sa participation auxdites dépenses.
A défaut de stipulations contraires du règlement de copropriété, la présence de parties communes spéciales n'impose pas la tenue d'assemblées générales des copropriétaires particulières.
Mention dans le règlement de copropriété. L'existence des parties communes spéciales et de celles à jouissance privative est subordonnée à leur mention expresse dans le règlement de copropriété
Les syndicats des copropriétaires disposent d'un délai de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi pour mettre, le cas échéant, leur règlement de copropriété en conformité avec les dispositions de l'article 6-4 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. A cette fin, le syndic inscrit à l'ordre du jour de chaque assemblée générale des copropriétaires la question de la mise en conformité du règlement de copropriété. La décision de mise en conformité du règlement de copropriété est prise à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents ou représentés.
PrécisionsL’existence de parties communes spéciales et de parties communes à jouissance privative devront faire l’objet qu’une mention expresse dans le règlement de copropriété (loi du 10 juillet 1965, art. 6-4 nouveau). A cet effet, l’article 209 II de la loi «ELAN» prévoit, pour les copropriétés existantes, qu’une demande de mise en conformité du règlement de copropriété soit soumise à l’assemblée générale à l’initiative du syndic dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la loi et votée à la majorité de l’article 24 de la loi de 1965. Cette disposition interroge. Comme pour la mise en conformité du lot transitoire, le texte vise le seul règlement de copropriété ; alors doit-on considérer que l’expression intègre également l’état descriptif de division [12] ? On peut aussi se demander en quoi va consister la mise en conformité du règlement de copropriété. L’assemblée générale aura-t-elle la possibilité de créer à la majorité de l’article 24 de nouveaux droits sur des parties communes ? Que vont devenir les droits de jouissance exclusive sur des parties communes consentis par une assemblée générale s’ils ne sont pas mis en conformité dans le délai ? Doit-on considérer qu’ils s’éteindront ? Enfin, on peut se demander si le texte permet de rectifier le descriptif des lots de jouissance dans les anciens règlements de copropriété (tels les emplacements de stationnement) qui, comme on le sait, ont été condamnés par la jurisprudence. Compte tenu de ces difficultés d’interprétation, il n’est pas certain que les syndics, chargés de mettre la question de la mise en conformité du règlement de copropriété à l’ordre du jour de chaque assemblée générale des copropriétaires, soient en situation de résoudre ces questions diverses et propres et à chacun des immeubles qu’ils gèrent ; ils ne devront alors pas hésiter à proposer aux copropriétaires concernés le recours à la consultation de spécialistes.
[12] On peut raisonnablement le penser mais il aurait été mieux que le législateur soit plus précis sur ce point.
Florence Bayard-Jammes, La loi "ELAN" et la copropriété, paru dans Lexbase, éd. priv., n° 767, 2019 (N° Lexbase : N7025BXH)
3-3. Le droit de jouissance exclusif d'une partie commune
3-3-1. La définition et la nature du droit de jouissance exclusif
- Introduit par la loi "ELAN" du 23 novembre 2018, l’article 6-3 nouveau de la loi du 10 juillet 1965 consacre la notion de «parties communes à jouissance privative» qui n’était pas prévue par la loi mais très usitée en pratique pour les jardins, paliers, balcons, terrasses ou cours et dont la jurisprudence, au fil du temps, a précisé la nature et les modalités d’application.
Les parties communes à jouissance privative sont les parties communes
affectées à l'usage ou à l'utilité exclusifs d'un lot. Elles appartiennent
indivisément à tous les copropriétaires.
Le droit de jouissance privative est nécessairement
accessoire au lot de copropriété auquel il est attaché.
Il ne peut en aucun cas constituer la partie privative d'un lot.
PrécisionsL’article 6-3 nouveau de la loi du 10 juillet 1965 consacre la notion de «parties communes à jouissance privative» qui n’était pas prévue par la loi mais très usitée en pratique pour les jardins, paliers, balcons, terrasses ou cours et dont la jurisprudence, au fil du temps, a précisé la nature et les modalités d’application. Le nouveau texte les définit comme des «parties communes affectées à l’usage et l’utilité exclusifs d’un lot» (remarquons le «et» qui marque le cumul des deux critères qui selon nous auraient dû être alternatifs comme cela est prévu pour la définition des parties communes à l’article 4 de la loi de 1965 N° Lexbase : L4846AHX) et affirme qu’«elles appartiennent indivisément à tous les copropriétaires» alors qu’il aurait été opportun de rajouter «ou à certains d’entre eux seulement» pour régler le cas de parties communes spéciales faisant l’objet d’un droit de jouissance exclusif. Enfin, à l’instar de la jurisprudence de la Cour de cassation, le texte dispose que le droit de jouissance privative est nécessairement accessoire au lot de copropriété auquel il est rattaché et qu’il ne peut en aucun cas constituer la partie privative d’un lot. Le lot de jouissance est donc expressément et définitivement exclu par la loi.
Florence Bayard-Jammes, extrait de La loi "ELAN" et la copropriété, paru dans Lexbase, éd. priv., n° 767, 2019 (N° Lexbase : N7025BXH).
Droit de propriété (non). Un droit de jouissance exclusif sur des parties communes n'est pas un droit de propriété et ne peut constituer la partie privative d'un lot.
La partie commune sur laquelle s'exerce le droit de jouissance exclusif ne perd pas son caractère de partie commune.
Exclusion pour le calcul de la superficie du lot. Un droit de jouissance exclusive sur un jardin, partie commune, n'est pas un droit de propriété et ne peut constituer la partie privative d'un lot : il est donc en tant que tel exclu du calcul de la superficie du lot.
Droit réel et perpétuel. Le droit de jouissance exclusif a un caractère réel et perpétuel. L'usage effectif de ce droit est sans incidence sur sa pérennité. Ce droit ne peut être remis en cause sans le consentement de son bénéficiaire.
Si le seul droit de jouissance exclusif sur des emplacements de stationnement ne confère pas à leur titulaire la qualité de copropriétaire, ce dernier bénéfice néanmoins d'un droit réel et perpétuel.
3-3-2. La création ou l'acquisition du droit de jouissance exclusif
Mention dans le règlement de copropriété. Depuis la loi "ELAN" du 23 novembre 2018, l'existence des parties communes à jouissance privative est subordonnée à leur mention expresse dans le règlement de copropriété.
Les syndicats des copropriétaires disposent d'un délai de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi pour mettre, le cas échéant, leur règlement de copropriété en conformité avec les dispositions de l'article 6-4 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.
A cette fin, le syndic inscrit à l'ordre du jour de chaque assemblée générale des copropriétaires la question de la mise en conformité du règlement de copropriété. La décision de mise en conformité du règlement de copropriété est prise à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents ou représentés.
PrécisionsL’existence de parties communes spéciales et de parties communes à jouissance privative devront faire l’objet qu’une mention expresse dans le règlement de copropriété (loi du 10 juillet 1965, art. 6-4 nouveau). A cet effet, l’article 209 II de la loi «ELAN» prévoit, pour les copropriétés existantes, qu’une demande de mise en conformité du règlement de copropriété soit soumise à l’assemblée générale à l’initiative du syndic dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la loi et votée à la majorité de l’article 24 de la loi de 1965. Cette disposition interroge. Comme pour la mise en conformité du lot transitoire, le texte vise le seul règlement de copropriété ; alors doit-on considérer que l’expression intègre également l’état descriptif de division [12] ? On peut aussi se demander en quoi va consister la mise en conformité du règlement de copropriété. L’assemblée générale aura-t-elle la possibilité de créer à la majorité de l’article 24 de nouveaux droits sur des parties communes ? Que vont devenir les droits de jouissance exclusive sur des parties communes consentis par une assemblée générale s’ils ne sont pas mis en conformité dans le délai ? Doit-on considérer qu’ils s’éteindront ? Enfin, on peut se demander si le texte permet de rectifier le descriptif des lots de jouissance dans les anciens règlements de copropriété (tels les emplacements de stationnement) qui, comme on le sait, ont été condamnés par la jurisprudence. Compte tenu de ces difficultés d’interprétation, il n’est pas certain que les syndics, chargés de mettre la question de la mise en conformité du règlement de copropriété à l’ordre du jour de chaque assemblée générale des copropriétaires, soient en situation de résoudre ces questions diverses et propres et à chacun des immeubles qu’ils gèrent ; ils ne devront alors pas hésiter à proposer aux copropriétaires concernés le recours à la consultation de spécialistes.
[12] On peut raisonnablement le penser mais il aurait été mieux que le législateur soit plus précis sur ce point.
Florence Bayard-Jammes, La loi "ELAN" et la copropriété, paru dans Lexbase, éd. priv., n° 767, 2019 (N° Lexbase : N7025BXH)
Le règlement de copropriété peut prévoir la création actuelle ou future de parties communes à usage privatif. Ainsi peut-il être prévu qu'un couloir peut devenir partie commune à usage privatif en cas de réunion de lots.
Etat descriptif de division. La mention, dans l'état descriptif de division, d'un "droit de passage" sur des parties communes, au bénéfice d'un copropriétaire, doit s'analyser comme révélant un droit exclusif à son profit.
Décision d'assemblée générale. Le droit de jouissance exclusif sur une partie commune peut être conféré par une décision de l'assemblée générale prise à la majorité de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965 ou à l'unanimité s'il y a une atteinte à la destination de l'immeuble.
PrécisionsLe droit de jouissance exclusif peut être créé par une délibération de l'assemblée générale des copropriétaires à la majorité de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965 ou à l'unanimité s'il y a une atteinte à la destination de l'immeuble (en ce sens, Dalloz Action, La Copropriété, 2010-2011, n° 94).
Toutefois, il convient d'être vigilant concernant la rédaction de cette délibération qui peut n'accorder qu'une simple tolérance à un copropriétaire, tolérance qui s'éteindra avec la cession du lot.
Renonciation d'un copropriétaire voisin à l'usage d'une partie commune. Il a été jugé qu'un copropriétaire pouvait se prévaloir d'un droit de jouissance privatif sur une partie commune dès lors que les copropriétaires voisins ont expressément renoncé à l'usage de celle-ci.
Prescription acquisitive ou usucapion. Un droit de jouissance exclusif peut s'acquérir par prescription acquisitive, ou usucapion : ainsi en est-il d'une cour commune au profit d'un copropriétaire autorisé à bâtir sur l'emplacement de la cour pour agrandir son magasin.
La prescription acquisitive d'un droit de jouissance exclusif sur une cour peut bénéficier au copropriétaire, qui peut joindre sa possession à celle de son auteur. Tel n'est pas le cas si son titre ne mentionne pas l'existence de la cour.
Le fait de voter aux assemblées générales et d'acquitter les charges de copropriété caractérise des actes matériels de possession excluant le vice de clandestinité et permet de caractériser l'acquisition de la propriété d'un lot par usucapion.
La prescription acquisitive ne peut résulter de simples tolérances (en l'espèce, le règlement de copropriété stipulait qu'aucune tolérance ne pouvait, même avec le temps, devenir un droit acquis).
Le droit d'usage et de jouissance sur une partie commune ne constitue pas pour son titulaire un juste titre permettant une usucapion abrégée.
L'état descriptif de division ne confère aucun droit particulier au syndicat des copropriétaires de cet immeuble et ne constitue pas le juste titre requis pour se prévaloir de l'acquisition par usucapion d'une servitude de surplomb du fonds voisin.
Les actes de vente de biens immobiliers, constitués par des lots de copropriété, peuvent être le juste titre qui permet à un copropriétaire de prescrire sur les parties communes un droit de jouissance exclusif.
3-3-3. La distinction du droit de jouissance exclusif de la simple tolérance
Droit réel et perpétuel versus droit temporaire. Contrairement au droit de jouissance privatif sur des parties communes qui est un droit réel et perpétuel, et constituant l'accessoire d'un lot, la simple tolérance est temporaire et cesse en principe à la vente du lot.
PrécisionsLe droit de jouissance exclusif sur une partie commune peut être temporaire et cesser avec la vente du lot par le copropriétaire auquel il a été "accordé".
"Il en est ainsi, par exemple, dans le cadre de la jurisprudence dite 'des fonds de couloir' qui permet aux copropriétaires de lots desservis par un couloir, partie commune, d'utiliser celui-ci pour la desserte de ces lots et d'en assurer la fermeture par l'installation d'une porte. Le droit de jouissance n'est alors stipulé que temporaire et doit normalement prendre fin avec la vente des lots ; il ne peut alors faire l'objet d'une prescription acquisitive" (Dalloz Action, La copropriété, 2010-2011, n° 93).
Le règlement de copropriété peut conférer un droit de jouissance temporaire devant prendre fin avec la vente des lots des copropriétaires.
Une assemblée générale autorisant un copropriétaire à avancer la porte d'entrée de son appartement afin de réunir les trois lots ainsi que les WC de l'étage ne confère qu'une simple tolérance et non un droit de jouissance exclusif.
Des copropriétaires, autorisés à poser une porte en travers du couloir desservant leurs deux lots, réunissant ceux-ci en un seul appartement, n'ont bénéficié que d'une simple tolérance ne leur permettant pas de revendiquer la propriété dudit couloir.
Le règlement de copropriété désignant nominativement le titulaire d'un droit de jouissance exclusive, une cour d'appel a pu retenir que ce droit était attribué à titre viager par le règlement et avait disparu avec le décès de son titulaire.
Règle de majorité. Relève de la majorité de l’article 24 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, et non de celle de l’article 26, la décision autorisant l’occupation de parties communes, consentie à titre précaire et sur une surface déterminée, consistant en une transformation d’emplacements de stationnement en terrasse d’un restaurant, dans la mesure où elle est révocable et que la terrasse installée est démontable.
3-3-4. Les droits et obligations attachés au droit de jouissance exclusif
Droit qui ne peut modifié ou remis en cause sans le consentement du bénéficiaire. Le droit de jouissance exclusif partagé par deux copropriétaires ne peut être réduit, limité ou remis en cause sans le consentement des bénéficiaires, lesquels peuvent valablement s'opposer à l'extension de ce droit à un troisième copropriétaire.
Droit de jouissance privative. Le titulaire d'un droit privatif à la jouissance exclusive du jardin est en droit de s'opposer, sans commettre d'abus, au passage quotidien des conteneurs à ordures ménagères, dont le transit pouvait s'effectuer par d'autres parties communes de l'immeuble.
Vente/location/indissociabilité ? Un droit de jouissance exclusif d'une partie commune ne peut être vendu séparément aux locaux auxquels il est rattaché, ni loué à un tiers.
Le droit de jouissance privatif d'une partie commune, attaché par le règlement de copropriété à un lot, ne peut être cédé en tout ou partie au propriétaire d'un autre lot qu'avec l'accord du syndicat des copropriétaires.
PrécisionsMais s'il existe donc une indissociabilité du droit de jouissance privatif à l’égard du lot auquel il est rattaché, l’inverse n’est pas vrai, ainsi qu’il ressort du principe énoncé par la Cour suprême dans sa décision du 23 septembre 2021 : « un copropriétaire peut donner à bail les parties privatives de son lot, indépendamment du droit de jouissance privative sur les parties communes attaché à ce lot » (pour un commentaire détaillé de cette décision : M. Dagneaux,
Le droit de jouissance privative sur une partie commune attaché à un lot de copropriété fait-il nécessairement partie de l’assiette du bail consenti sur ce lot ?, Lexbase Droit privé, n° 881, 14 octobre 2021
N° Lexbase : N9065BYE).
Droit d'affouiller. Le droit de jouissance exclusif attribué par le règlement ne comporte pas le droit d'affouiller le sol et de construire un mur pour la création d'une piscine couverte. Les ouvrages édifiés en violation des obligations contractuelles doivent être démolis.
Droit de construire. Le droit de jouissance exclusif ne confère pas, en principe, le droit de construire.
L'assemblée générale ne peut autoriser des dérogations à un principe général d'interdiction de construire sur une partie commune édicté par le règlement de copropriété sans modifier celui-ci.
Droit de jouissance exclusif assorti d'un droit de construire. Le droit du titulaire d'un droit de jouissance exclusif d'édifier une construction ne le dispense pas de solliciter l'autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires.
A défaut d'avoir obtenu une autorisation de l'AG et en l'absence de péril imminent, le syndic ne peut faire procéder à l'abattage d'arbres sur une partie commune avec droit de jouissance exclusif.
Réalisation de travaux. L'assemblée générale reste compétente pour décider des travaux à réaliser sur les parties communes dotées d'un droit de jouissance exclusif au profit d'un copropriétaire.
Le copropriétaire, qui a fait réaliser des travaux défectueux sur les parties communes dotées d'un droit de jouissance exclusif, est responsable des désordres à l'égard du syndicat.
Les frais de dépose et de repose des aménagements (aménagement paysager de la terrasse) impliqués par les travaux sur une partie commune dotée d'un droit de jouissance exclusif demeurent à la charge du copropriétaire.
Le syndicat des copropriétaires peut, après avoir averti le copropriétaire, pénétrer dans un jardin, partie commune affectée d'un droit de jouissance exclusive, et y faire installer une canalisation commune.
Obligation de respecter la destination de l'immeuble et les droits des autres copropriétaires. Le titulaire d'un droit de jouissance exclusif sur une partie commune ne peut en faire un usage qui porterait atteinte à la destination de l'immeuble ou aux droits des autres copropriétaires.
Ainsi, même en l'absence d'une affectation particulière à une cour sur laquelle un copropriétaire a un droit de jouissance exclusif, ce dernier ne peut y déployer un atelier en plein air.
Le droit de jouissance exclusif ne confère pas le droit d'effectuer des travaux ayant pour but de transformer une remise en salle d'attente pour un cabinet médical.
Le droit de jouissance exclusif ne confère pas le droit de transformer en local privatif clos un cour qualifiée par le règlement de copropriété de "partie commune".
Obligation d'entretien et de réparation. Les copropriétaires titulaires d'un droit de jouissance privatif d'une partie commune sont tenus d'assurer l'entretien de cette partie commune, mais ne sont, en principe, pas tenus de supporter les réparations affectant le gros-oeuvre du bâtiment.
Les copropriétaires titulaires d'un droit de jouissance privatif d'une partie commune peuvent être tenus des réparations affectant le gros-oeuvre du bâtiment si le règlement de copropriété le prévoit expressément.
Participation aux charges. Le règlement de copropriété précise, le cas échéant, les charges que le titulaire de ce droit de jouissance privative supporte.
Le titulaire d'un droit de jouissance exclusif sur des parkings n'est pas tenu de participer aux charges communes autres que celles spécifiquement énoncées dans le règlement de copropriété, en l'espèce les frais d'entretien et de réparation des parkings.
3-3-5. L'extinction du droit de jouissance exclusif d'une partie commune
Renonciation. Un copropriétaire peut renoncer au droit de jouissance exclusif sur une partie commune.
Pour que la renonciation d'un copropriétaire à un droit de jouissance exclusif soit opposable aux acquéreurs du lot, il convient que l'acte le constituant ait fait l'objet d'une mention modificative à la Conservation des hypothèques.
A défaut de modification à la Conservation des hypothèques, l'acquéreur d'un lot peut agir contre le vendeur en délivrance d'un droit de jouissance privative.
Démolition. La démolition d'une partie commune sur laquelle était conféré un droit de jouissance exclusif implique l'extinction définitive de ce droit et l'interdiction de reconstruire.
3-4. L'énumération des parties communes matérielles
3-4-1. Le sol, les cours, les parcs et jardins, les voies d'accès
Dans le silence ou la contradiction des titres, sont réputées parties communes le sol, les cours, les parcs et jardins, les voies d'accès.
Le sol constitue en principe une partie commune sur laquelle un copropriétaire ne peut revendiquer une propriété exclusive.
Dès lors que le règlement de copropriété prévoit que les parties communes comprennent la totalité du sol, bâti ou non, les terrains qui se trouvent au droit des lots parties privatives constituent des parties communes.
Le sol d'un passage constitue en principe une partie commune. De même le passage, même s'il est considéré comme faisant partie d'une voie privée, revêt le caractère de partie commune.
La porte d'entrée de l'immeuble constitue une partie commune.
3-4-2. Le gros oeuvre des bâtiments, les éléments d'équipement communs
Dans le silence ou la contradiction des titres, sont réputés parties communes le
gros oeuvre des bâtiments, les
éléments d'équipement commun, y compris les parties de
canalisations y afférentes qui traversent des locaux privatifs.
PrécisionsEn application des critères posés par l'article 3 de la loi du 10 juillet 1965, une canalisation est commune lorsqu'elle dessert plusieurs lots ou qu'elle est afférente à un élément d'équipement commun. Dans les autres cas, elle est privative, alors même qu'elle traverse des parties communes ou d'autres locaux privatifs (en ce sens : MM. Lafond, Roux et Stemmer, Code de la copropriété, 2010, Litec, p.30).
La cour d'appel de Paris a ainsi précisé, dans un arrêt du 3 mars 1993, que "même situées partiellement à l'intérieur des lots privatifs, les canalisations sont, par leur fonction propre, rattachées à l'élément d'équipement commun qu'elles prolongent et non au local privatif qu'elles traversent sans servir à l'usage du lot" (CA Paris, 3 mars 1993, in Dalloz Action, La Copropriété, 2010-2011, n° 74, p. 35).
Canalisations. Une canalisation, encastrée dans un plancher qualifié de "partie commune", revêt en principe la qualification de "partie commune".
Une tuyauterie de chauffage central constitue en principe une "partie commune".
La culotte destinée à accueillir le branchement de l'évacuation des eaux vannes d'une partie privative, située en partie commune, encastrée et inaccessible, peut constituer une partie commune.
Gros oeuvre. La qualification de "gros oeuvre" relève du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond.
Peut ainsi être considéré comme un élément du gros oeuvre et donc comme une partie commune un mur extérieur assurant la protection de l'immeuble en tant que clôture.
Un châssis vitré, dont le dormant, fixé dans le béton et non manoeuvrable par un copropriétaire, fait corps avec le gros oeuvre, doit être qualifié de "partie commune".
En revanche, un châssis et un vitrage qualifiés de "construction légère", n'apparaissant pas comme un élément de gros oeuvre, constituent des parties privatives.
Les cloisons et murs, séparant les parties privatives et non compris dans le gros oeuvre, sont présumés mitoyens entre les locaux qu'ils séparent.
3-4-3. Les coffres, gaines et têtes de cheminées
Dans le silence ou la contradiction des titres, sont réputées parties communes les coffres, gaines et têtes de cheminées.
Une cheminée d'évacuation des gaz brûlés peut constituer une partie commune en application de l'article 3 de la loi du 10 juillet 1965.
Des conduits de fumée peuvent être qualifiés de "parties communes".
3-4-4. Les locaux des services communs
Dans le silence ou la contradiction des titres, sont réputées parties communes les locaux des services communs.
Dans le silence ou la contradiction des titres, la loge d'un concierge est réputée être une partie commune.
Il convient de se référer aux stipulations du règlement de copropriété, la loge d'un concierge ne constituant pas nécessairement une partie commune.
En présence de contradictions dans les titres, il appartient aux juges du fond de restituer l'exacte qualification au logement du gardien. Ils peuvent ainsi le qualifier de "partie commune", alors que le règlement l'érigeait en partie privative.
Pour des exemples de classification de la loge du gardien en partie privative, voir
N° Lexbase : E4638ETX.
3-4-5. Les passages et corridors
Dans le silence ou la contradiction des titres, sont réputées parties communes les passages et corridors.
Les couloirs, descentes et dégagements des caves peuvent constituer des parties communes en application de l'article 3 de la loi du 10 juillet 1965.
3-4-6. Les éléments incorporés dans les parties communes
Dans le silence ou la contradiction des titres, sont réputées parties communes tout élément incorporé dans les parties communes.
PrécisionsL’article 208 de la loi «ELAN» amende l’article 3 de la loi du 10 juillet 1965 et étend la présomption de parties communes «dans le silence et la contradiction des titres» à «tout élément incorporé dans les parties communes». Il s’agit là d’une disposition technique et générique qui vise de nombreuses situations (canalisations encastrées, balcons, bow-window, équipements divers…). Compte tenu de ce caractère très général, il appartiendra au syndic, saisi par un copropriétaire d’une demande d’autorisation de travaux à soumettre à l’assemblée générale, d’attirer l’attention des copropriétaires sur la qualification à retenir relativement à l’installation incorporée dans les parties communes.
Ce qui est certain, c’est que la nouvelle disposition permet de mettre fin à l’incertitude relative à la nature juridique des éléments d’amélioration créés par les copropriétaires à leurs frais exclusifs en application des articles 25 b ([LXB=L4825AH8) et 30 dernier alinéa ([LXB=L4837AHM) de la loi du 10 juillet 1965, comme par exemple l’installation d’un ascenseur dans les parties communes [7]. Jusqu’alors il n’y avait aucune disposition particulière concernant la nature de ces éléments réalisés aux frais de certains copropriétaires et l’on se demandait si les décisions les concernant devaient être prises dans le cadre d’assemblées générales ou de réunions informelles où seuls participaient les copropriétaires financeurs. Dorénavant, en l’absence de précision contraire, l’élément incorporé aura la nature d’une partie commune générale ou spéciale selon qu’elle sera à l’usage ou l’utilité de tous les copropriétaires ou de certains d’entre eux, les décisions y afférentes seront prises en assemblée générale et les frais s’y rapportant considérés comme des charges de copropriété.
[7] Cass. civ. 3, 16 septembre 2003, Revue Administrer, n° 363, février 2004, p. 55, obs. J.-R. Bouyeure.
Florence Bayard-Jammes, extrait de La loi «ELAN» et la copropriété, article paru dans Lexbase, éd. priv., n° 767, 2019 (N° Lexbase : N7025BXH).
3-4-7. Les balcons, balustrades et garde-corps
Les balcons et garde-corps doivent être qualifiés de "parties communes" s'ils sont ainsi caractérisés par le règlement de copropriété.
Le caractère privatif d'une balustrade ne saurait être retenu dès lors que le financement de son entretien ou de son remplacement incombe au syndicat des copropriétaires sous forme de charges communes.
Depuis la loi "ELAN", les balcons, balustrades et gardes-corps entrent désormais dans le cadre de l'énumération légale de l'article 3 de la loi du 10 juillet 1965, qui prévoit dorénavant que, dans le silence ou la contradiction des titres, sont réputées parties communes tout élément incorporé dans les parties communes (N° Lexbase : E3180YTX).
3-4-8. Les combles
Pour apprécier si des combles constituent une partie privative ou commune, il convient de rechercher à l'usage ou à l'utilité de qui cette partie de l'immeuble est réservée.
Dès lors que l'escalier d'accès aux combles se situe en parties communes, permettant un accès sans avoir à pénétrer dans une partie privative, les combles peuvent être qualifiées de "parties communes".
Dès lors que la configuration des lieux, telle qu'elle résultait de la construction de l'immeuble, ne prévoyait pas un accès et un usage privatif des combles, ceux-ci peuvent être qualifiés de "parties communes".
Un comble constitue une partie commune dès lors qu'il n'est pas affecté, à raison de sa disposition, à l'usage exclusif d'un copropriétaire mais au contraire qu'il permet la visite et l'entretien de la toiture et loge l'installation de chauffage central.
A défaut de disposition contraire dans le règlement de copropriété, un comble qui ne peut servir qu'à la réparation de la toiture, partie commune, constitue lui-même une partie commune, même si la trappe d'accès se situe dans une partie privative.
3-4-9. Les terrasses et toitures-terrasses
Une toiture-terrasse constitue une partie commune dès lors que la terrasse sert de toiture à la conciergerie et que le règlement de copropriété prévoit que les toitures sont des parties communes.
Le droit de jouissance privatif accordé à un copropriétaire sur une terrasse ne fait pas perdre à celle-ci son caractère de partie commune.
3-4-10. Les escaliers
Les escaliers et la cage d'escalier constituent en principe des parties communes. Le coût de ravalement et des travaux d'entretien doit donc être réparti dans les charges communes entre tous les copropriétaires.
Voir pour un arrêt estimant que l'escalier est un élément d'équipement commun.
Les frais d'éclairage et de nettoyage d'un escalier, partie commune, constituent des charges générales auxquelles tous les copropriétaires sont tenus de participer.
Si un règlement de copropriété classe le tapis d'un escalier parmi les parties communes, les dépenses afférentes devront alors être réparties entre les copropriétaires en fonction de leur quote-part dans les parties communes.
3-4-11. Les portes et paliers
A défaut d'être réservés à l'usage exclusif d'un copropriétaire, une porte et un palier doivent recevoir la qualification de "partie commune".
Un palier constitue une partie commune, nonobstant le droit de jouissance exclusif conféré à un copropriétaire déterminé, droit qui s'était éteint du fait de la cession des lots.
3-4-13. Les vide-sanitaires
Un vide-sanitaire, ayant pour objet la protection du gros oeuvre du bâtiment en isolant l'immeuble du versant de la montagne à laquelle il était accolé, et traversé par de nombreuses canalisations communes, peut être qualifié de "partie commune".
3-5. Les droits accessoires aux parties communes
3-5-1. La définition des droits accessoires aux parties communes
- Droits réputés accessoires par la loi
Droit de surélévation. Est réputé droit accessoire aux parties communes dans le silence ou la contradiction des titres le droit de surélever un bâtiment affecté à l'usage commun ou comportant plusieurs locaux qui constituent des parties privatives différentes.
Droit d'affouiller. Est réputé droit accessoire aux parties communes dans le silence ou la contradiction des titres le droit d'affouiller le sol d'un bâtiment affecté à l'usage commun ou comportant plusieurs locaux qui constituent des parties privatives différentes.
Est réputé droit accessoire aux parties communes dans le silence ou la contradiction des titres le droit d'affouiller des cours, parcs ou jardins constituant des parties communes.
Le copropriétaire qui veut affouiller le sol en vue d'y implanter une piscine doit obtenir, préalablement, l'autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires.
Droit d'édifier des bâtiments nouveaux. Est réputé droit accessoire aux parties communes dans le silence ou la contradiction des titres le droit d'édifier des bâtiments nouveaux dans des cours, parcs ou jardins constituant des parties communes.
Droit de mitoyenneté. Est réputé droit accessoire aux parties communes dans le silence ou la contradiction des titres le droit de mitoyenneté afférent aux parties communes.
Droit d'affichage. Depuis la loi "ELAN" du 23 novembre 2018, est désormais réputé droit accessoire aux parties communes, dans le silence ou la contradiction des titres, le droit d'affichage sur les parties communes.
PrécisionsS’agissant du droit d’affichage, la Cour de cassation a admis dès 2006 que l’énumération des droits accessoires aux parties communes figurant à l’article 3 n’était pas limitative [8] et, malgré quelques controverses doctrinales, les juridictions du fond ont jugé que le droit d’affichage sur les façades de l’immeuble devait être qualifié de droit accessoire aux parties communes. L’article 3 l’affirme désormais clairement. Remarquons par ailleurs qu’alors que la doctrine dominante et la jurisprudence [9]refusent de considérer qu’un droit d’affichage puisse constituer la partie privative d’un lot de copropriété [10], analyse qui se confirme aujourd’hui à la lecture de l’article 6-3 nouveau de la loi de 1965 qui prévoit que «le droit de jouissance privative sur parties communes ne peut en aucun cas constituer la partie privative d’un lot», il pourra en revanche faire l’objet d’une réserve au profit d’un copropriétaires ou d’un tiers en application de l’article 37 de la loi de 1965 ([LXB=L4843AHT).
[8] Cass. civ. 3, 24 mai 2006, n° 05-14.038, FS-P+B ([LXB=A7604DPC), Bull. civ. III, n° 134.
[9] Cass. civ. 3, 5 octobre 1994, n° 92-15.926 ([LXB=A7051ABR), qui considère que le droit d’affichage ne confère à son titulaire qu’un droit d’usage et de jouissance sur une partie délimitée du mur ; Cass. civ. 3, 8 octobre 2008 n° 07-16.540, FS-P+B ([LXB=A7199EAU).
[10] Cette analyse se confirme aujourd’hui à la lecture de l’article 6-3 nouveau de la loi de 1965 qui prévoit que «le droit de jouissance privative sur parties communes ne peut en aucun cas constituer la partie privative d’un lot».
Florence Bayard-Jammes, extrait de La loi ELAN et la copropriété, paru dans Lexbase, éd. priv., n° 767, 2019 (N° Lexbase : N7025BXH).
Droit de construire. Depuis la loi "ELAN" du 23 novembre 2018, est désormais réputé droit accessoire aux parties communes, dans le silence ou la contradiction des titres, le droit de construire afférent aux parties communes.
PrécisionsLa loi nouvelle ajoute également à la liste des droits accessoires «le droit de construire afférent aux parties communes» sans pour autant supprimer de la liste de l’article 3, comme le proposait le GRECCO à l’article 6 de son avant-projet, les mentions relatives «au droit de surélever un bâtiment à l’usage commun» et d’«édifier des bâtiments nouveaux». La clarification apportée par la loi nouvelle apparaît donc quelque peu redondante avec les dispositions existantes et l’on ne comprend pas son utilité.
Florence Bayard-Jammes, extrait de La loi ELAN et la copropriété, paru dans Lexbase, éd. priv., n° 767, 2019 (N° Lexbase : N7025BXH).
- Enumération légale non limitative
La liste des droits accessoires aux parties communes dressée par l'article 3 de la loi du 10 juillet 1965 n'est pas limitative.
PrécisionsConstitue un droit accessoire à une partie commune la faculté de clore une terrasse.
Constitue un droit accessoire aux parties communes la réalisation par un copropriétaire de modifications dans l'utilisation de locaux existants ayant une incidence sur le coefficient d'occupation des sols (COS).
Le droit accordé à un copropriétaire de construire sur des parties communes sans l'accord des autres copropriétaires ne peut lui être conféré que par le règlement de copropriété.
3-5-2. Les conventions de réserve
Objet de la convention. Les copropriétaires ou des tiers peuvent se réserver l'exercice de l'un des droits accessoires aux parties communes listés à l'article 3 de la loi du 10 juillet 1965.
PrécisionsUn copropriétaire ou un tiers peut bénéficier d'une réserve concernant l'exercice d'un droit accessoire à une partie commune. La réserve de ce droit, telle que prévue à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1965, ne peut porter que sur un droit accessoire à une partie commune et non sur un droit accessoire à une partie privative.
En cas de difficulté sur l'exercice d'un droit accessoire aux parties communes, le juge des référés est compétent pour suspendre provisoirement les travaux, lesquels sont susceptibles de constituer un dommage imminent pour le syndicat des copropriétaires (CA Paris, 15 novembre 1989, Loyers & copr., 1990, n° 61).
La convention de réserve d'un droit accessoire peut porter sur des parties communes à jouissance privative.
Exclusions : depuis la loi "ELAN" du 23 novembre 2018, par dérogation à l'article 37, les droits de construire, d'affouiller et de surélever ne peuvent faire l'objet d'une convention par laquelle un propriétaire ou un tiers se les réserverait. Ces droits peuvent toutefois constituer la partie privative d'un lot transitoire.
A titre transitoire, l’article 208 II de la loi «ELAN» dispose que les conventions réservant l’exercice d’un droit de construire, de surélever ou d’affouiller à un copropriétaire ou un tiers consenties avant l’entrée en vigueur de la loi nouvelle demeurent valables jusqu’à l’expiration du délai décennal prévu à l’article 37.
Mentions de la convention. Toute convention postérieure à la promulgation de la présente loi doit indiquer, à peine de nullité, l'importance et la consistance des locaux à construire et les modifications que leur exécution entraînerait dans les droits et charges des copropriétaires.
Etablissement de la convention. Le règlement de copropriété peut comporter la (ou les) convention(s) de réserve relatives à l'exercice de l'un des droits accessoires aux parties communes.
La convention de réserve peut être stipulée dans le règlement de copropriété.
Délai d'exercice. Toute convention par laquelle un propriétaire ou un tiers se réserve l'exercice de l'un des droits accessoires autre que le droit de mitoyenneté devient caduque si ce droit n'a pas été exercé dans les dix années qui suivent ladite convention.
Lorsque le droit accessoire s'exerce sur une partie commune à jouissance privative, il n'acquiert pas de caractère perpétuel et devient caduc en l'absence d'exercice dans le délai de dix ans car il reste un droit accessoire aux parties communes.
Si la convention est antérieure à la promulgation de la loi du 10 juillet 1965, le délai de dix ans court à compter de ladite promulgation.
Exemple d'application jurisprudentielle de la caducité de la convention de réserve à l'expiration du délai de dix ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 10 juillet 1965.
Le point de départ du délai de dix ans peut se situer à la réception par le Notaire de l'acte authentique portant règlement de copropriété, voire à compter de la publication de ce règlement à la Conservation des hypothèques.
Rien n'empêche un copropriétaire dont le droit de surélévation est devenu caduc de solliciter de la copropriété qu'elle lui accorde à nouveau ledit droit.
L'absence d'exercice par un copropriétaire d'un droit de surélévation dans le délai de dix ans n'implique pas automatiquement une modification de ses quote-parts de parties communes à la baisse après que ce droit est devenu caduc.
PrécisionsL'octroi d'un droit accessoire, type droit de surélever, a une incidence sur les quote-parts de parties communes attribuée aux copropriétaires bénéficiant de ce droit.
Le fait qu'ils ne l'exercent pas dans le délai de dix ans peut leur donner le sentiment que ces quote-parts sont devenues injustifiées.
Or, la Cour d'appel de Paris a précisé que dans une telle hypothèse, ils ne peuvent s'en prendre qu'à eux-mêmes et, dès lors que le règlement de copropriété ne prévoit pas une modification des quote-parts en cas de renonciation expresse ou tacite à exercer le droit accessoire, ils sont tenus, sauf à faire voter une modification desdites quote-parts, de supporter celles attribuées en contrepartie du bénéfice du droit devenu caduc.
"Les copropriétaires qui ont bénéficié d'un droit de surélévation sans l'exercer sont dans la même situation, mutatis mutandis, que les copropriétaires de lots transitoires qui participent aux charges de copropriété même s'ils ont finalement renoncé à construire leurs lots (cas classique du propriétaire de plusieurs étages de parking en sous-sol qui ne construit que trois niveaux et non sept du fait de l'apparition de la nappe phréatique et du surcoût que constituerait sa neutralisation)" (CA Paris, 34e ch. B, 15 mars 2007, n° 06/11267 N° Lexbase : A1956DWD).
Le règlement de copropriété peut prévoir une modification des charges dès lors que le droit accessoire est devenu caduc ou en cas de renonciation par le copropriétaire bénéficiaire dudit droit.
Droit de veto du syndicat. Avant l'expiration du délai de dix ans, le syndicat peut s'opposer à l'exercice de ce droit, sauf à en indemniser le titulaire dans le cas où ce dernier justifie que la réserve du droit comportait une contrepartie à sa charge.
L'opposition du syndicat des copropriétaires doit être votée à la majorité de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965.
En l'absence de contrepartie à la charge du syndicat des copropriétaires, ce dernier peut s'opposer à l'exercice d'un droit accessoire sans être tenu d'indemniser le copropriétaire titulaire de ce droit.
3-6. La détermination de la quote-part de partie commune afférente à chaque lot
Pour la constitution d'un lot de copropriété, il ne suffit pas qu'il y ait une coexistence de partie privative et commune. Il faut en outre qu'une quote-part des parties communes soit affectée au lot constitué.
PrécisionsLa détermination des tantièmes de parties communes affectés à chaque lot présente un intérêt notamment dans les hypothèses suivantes :
- pour déterminer le nombre de voix dont dispose chaque copropriétaire dans les assemblées générales (art. 22 de la loi du 10 juillet 1965) ;
- en cas de sinistre emportant destruction de l'immeuble sans reconstruction : l'indemnité d'assurance pourra être répartie en fonction des tantièmes des parties communes affectés à chaque lot ;
- en cas d'acquisition d'une nouvelle partie commune : le prix d'achat pourra être réparti en proportion des tantièmes ;
- en cas de versement d'une indemnité à la copropriété en suite d'un sinistre ayant affecté les parties communes ou à la suite de la constitution d'un droit réel sur les parties communes : l'indemnité pourra être répartie en fonction des tantièmes.
Voir sur la question : Dalloz Action, La Copropriété, 2010-2011, n° 106, p. 52.
Détermination par le règlement de copropriété. Tout règlement de copropriété publié à compter du 31 décembre 2002 indique les éléments pris en considération et la méthode de calcul permettant de fixer les quotes-parts de parties communes.
La répartition des tantièmes de parties communes est matérialisée dans l'état descriptif de division. Voir
N° Lexbase : E4541ETD.
Règles légales supplétives. Dans le silence ou la contradiction des titres, la quote-part des parties communes, tant générales que spéciales, afférente à chaque lot est proportionnelle à la valeur relative de chaque partie privative par rapport à l'ensemble des valeurs desdites parties.
PrécisionsL'article 5 de la loi du 10 juillet 1965 préconise une méthode de calcul des tantièmes afférents à chaque lot, tout en précisant que cette méthode ne s'applique que "dans le silence ou la contradiction des titre".
Ces valeurs résultent lors de l'établissement de la copropriété, de la consistance, de la superficie et de la situation des lots, sans égard à leur utilisation.
PrécisionsL'article 5 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit trois critères d'évaluation de la quote-part des parties communes afférentes à chaque lot : la consistance, la superficie et la situation des lots.
"La consistance d'un lot correspond à l'état matériel, à la structure physique de ce lot, en sorte que la valeur d'un lot est fonction du point de savoir s'il s'agit de locaux d'habitation, d'une cave, d'un garage, de toute catégorie d'emplacement réservé à un copropriétaire. (...) La valeur des lots est, enfin, fonction de leur situation, c'est-à-dire de l'étage, de l'orientation, de la vue dont ils jouissent, de l'ensoleillement dont ils profitent" (Dalloz Action, La Copropriété, 2010-2011, n° 110, p. 54).
En pratique, la méthode la plus simple et la plus couramment utilisée consiste "à partir des surfaces réelles des locaux, et à pondérer le chiffre qui en résulte par des coefficients, dont les plus courants sont les suivants :
- locaux accessoires : garages, 0,3 à 0,5 de la superficie réelle ; caves, 0,1 d la superficie réelle ou forfait égal pour toutes les caves ;
- parkings extérieurs : ramenés en général à un forfait égal pour tous, de l'ordre de 0,1 de la superficie réelle ;
- coefficient d'élévation : en général 5% d'augmentation par étage. Il peut varier sensiblement dans certains cas, par exemple lorsque à un certain étage commence la jouissance d'une vue ;
- coefficient d'ensoleillement (orientation), de calme, etc. Il dépend de chaque cas particulier (...) ;
- accessoire des lots : terrasses en jouissance privative, jardins en jouissance privative, balcons, loggias, etc. : en générale, 0,1 à 0,2 d la superficie réelle (...).
Source : MM. Lafond, Roux et Stemmer, Code de la copropriété 2010, Litec, note 6 sous article 5, p. 37.
La destination des parties privatives ne doit pas être prise en considération pour la détermination de la quote-part des parties communes afférente à un lot. L'utilisation commerciale d'un lot ne doit donc pas être prise en considération.
Le prix de vente des lots peut être considéré comme le reflet de leur consistance, de leur superficie et de leur situation.
Caractère intangible. La quote-part des parties communes afférente à chaque lot est en principe intangible et ne peut faire l'objet d'une modification judiciaire.
PrécisionsLa détermination des tantièmes de copropriété étant effectuée à l'occasion du règlement de copropriété, sa modification implique en principe l'unanimité des copropriétaires puisqu'il s'agira de modifier le règlement ayant valeur contractuelle entre lesdits copropriétaires.
Ainsi, un lot devenu inconstructible reste valablement affecté des tantièmes de copropriété qui lui ont été attribués lors de l'établissement du règlement de copropriété, à une époque où il était encore constructible.
3-7. La modification de la quote-part de partie commune afférente à chaque lot
En cas de modification dans les quotes-parts des parties communes, quelle qu'en soit la cause, les droits soumis ou admis à publicité dont les lots sont l'objet s'éteignent sur les quotes-parts qui en sont détachées.
Les droits soumis ou admis à publicité dont les lots sont l'objet s'étendent alors aux quotes-parts qui y sont rattachées.
Cette extension, qui s'opère avec le rang attaché à la publicité primitive, n'a lieu que par la publication au fichier immobilier de la déclaration faite par le syndic ou un créancier que le bien acquis est libre de tout droit de même nature au jour de la mutation ou qu'il est devenu libre de ces mêmes droits. L'inexactitude de cette déclaration entraîne le rejet de la formalité de publicité.
Ce changement d'emprise peut résulter de l'aliénation volontaire ou forcée ou de l'acquisition de parties communes.
3-8. L'acquisition ou l'aliénation de parties communes
Tous actes d'acquisition ou d'aliénation des parties communes ou de constitution de droits réels immobiliers au profit ou à la charge de ces dernières sont valablement passés par le syndicat lui-même et de son chef.
Il faut toutefois que ces actes aient été décidés conformément aux dispositions des articles 6, 25 et/ou 26 de la loi du 10 juillet 1965.
Aliénation de partie commune. Il a été jugé que la vente d'une partie commune était parfaite dès lors que son objet est déterminable, peu important qu'elle ait été précédée de l'établissement d'un état descriptif de division créant le ou les lots nouveaux.
Il a été ensuite décidé que si la détermination de la quote-part de parties communes afférente au bien vendu constitue pour les parties un élément essentiel de la convention, celle-ci ne peut être parfaite en l'absence d'objet déterminé.
Préalablement à la cession d’une partie commune bâtie, il convient de s’assurer que, dans le règlement de copropriété, la fraction d’immeuble dont il est envisagé la cession constitue une partie commune générale ou spéciale.
La cession de parties communes spéciales bâties suppose de répondre à plusieurs questions qui suscitent des pratiques divergentes, et sur lesquelles le GRECCO propose d’apporter ses réponses à travers sa préconisation n° 17 : qui décide de la cession ? Que cède-t-on ? Quelles sont les modalités de la cession ? Quelles sont les conséquences de la cession ?
Après analyse détaillée (lire le texte intégral de la préconisation n° 17), le groupe de travail parvient aux conclusions suivantes, en l’état actuel du droit :
- seuls les copropriétaires ayant des droits indivis dans une partie commune spéciale peuvent décider de l’aliénation de celle-ci. La vente est parfaite dès lors que la partie d’immeuble à céder est suffisamment déterminée, et que l’accord des parties est intervenu, indépendamment de la création d’un lot ;
- pour autant, il demeure nécessaire de faire valider par une assemblée la modification apportée à l’état descriptif de division du fait de la création d’un lot. Lorsque la méthode par adjonction est utilisée, la décision doit être soumise à l’assemblée générale de tous les copropriétaires. Lorsque la méthode par retrait est utilisée, seuls les copropriétaires ayant des droits indivis dans la partie commune spéciale se prononcent ;
- la modification des charges et du règlement de copropriété consécutive à la cession relève d’une décision de l’assemblée générale de tous les copropriétaires. Faute d’adoption, tout copropriétaire peut saisir le juge pour faire fixer une nouvelle répartition des charges.
Répartition du produit de la vente des parties communes. Les sommes représentant le prix des parties communes cédées se divisent de plein droit entre les copropriétaires dans les lots desquels figuraient ces parties communes et proportionnellement à la quotité de ces parties afférentes à chaque lot.
La part du prix revenant à chaque copropriétaire lui est remise directement par le syndic, après déduction des sommes exigibles par le syndicat des copropriétaires.
PrécisionsAfin d’améliorer le recouvrement des charges, l’ordonnance (du 30 octobre 2019 portant réforme du droit de la copropriété) a modifié l’article 16-1 de la loi du 10 juillet 1965 afin de permettre une déduction par compensation entre la quote-part du prix de cession de parties communes revenant à un copropriétaire et les sommes exigibles par le syndicat des copropriétaires.
L’ordonnance comporte des dispositions transitoires spécifiques à ce texte : les sommes exigibles par le syndicat des copropriétaires seront déduites sur la part du prix revenant à chaque copropriétaire pour les ventes conclues postérieurement à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance, soit le 1er juin 2020 (article 41 de l’ordonnance).
J. Prigent, extrait de Les modifications des règles relatives aux travaux et aux charges par l’ordonnance du 30 octobre 2019, paru dans Lexbase, éd. priv., n° 806, 2019 (N° Lexbase : N1579BY7).
Pour un exemple d'application en cas de copropriété composée de deux immeubles.
Modification de la répartition des charges. Sur la modification de la répartition des charges faisant suite à des actes d'acquisition ou de disposition décidés par l'assemblée générale des copropriétaires, voir
N° Lexbase : E8046ET8.
Modification de l'EDD. Sur la modification de l'état descriptif de division faisant suite à la vente de parties communes, voir
N° Lexbase : E4751ET7.
3-9. L'accès du commissaire de justice aux parties communes
Le propriétaire ou, en cas de copropriété, le syndicat des copropriétaires représenté par le syndic permet aux commissaires de justice d'accéder, pour l'accomplissement de leurs missions de signification, d'exécution ou d'affichage, aux parties communes des immeubles d'habitation, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.
Les commissaires de justice ont accès aux boîtes aux lettres particulières selon les mêmes modalités que les agents chargés de la distribution au domicile agissant pour le compte des opérateurs mentionnés à l'article L. 126-12.
Pour l'application de l'article L. 126-14, lorsque les parties communes d'un bâtiment d'habitation ne sont pas accessibles librement depuis la voie publique, l'huissier de justice, ou le clerc assermenté, adresse, par tout moyen, une demande d'accès à celles-ci au propriétaire ou, en cas de copropriété, au syndic représentant le syndicat des copropriétaires concerné en justifiant de son identité, de sa qualité professionnelle ainsi que de la mission de signification ou d'exécution qui lui a été confiée.