ETUDE : Le champ d'application du statut de la copropriété
E4532ETZ
avec cacheDernière modification le 26-03-2025
Le champ d'application du statut de la copropriété a été profondément modifié par l'ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019, qui prévoit désormais de prendre en considération l'usage de l'immeuble (usage partiel ou exclusif d'habitation) pour déterminer l'application impérative du statut de la copropriété.
Pour présenter le champ d’application du statut de la copropriété, il convient de distinguer entre les conditions communes à l’application impérative au statut de la copropriété et à l’application facultative au statut, les conditions propres à l’application impérative au statut de la copropriété et les conditions propres à l’application facultative au statut de la copropriété.
Ainsi que le prévoit son article premier, tel que modifié par la loi "ELAN" du 23 novembre 2018, la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis (N° Lexbase : L4818AHW), "régit tout immeuble bâti ou groupe d'immeubles bâtis dont la propriété est répartie, entre plusieurs personnes, par lots.
Le lot de copropriété comporte obligatoirement une partie privative et une quote-part de parties communes, lesquelles sont indissociables.
Ce lot peut être un lot transitoire. Il est alors formé d'une partie privative constituée d'un droit de construire précisément défini quant aux constructions qu'il permet de réaliser sur une surface déterminée du sol, et d'une quote-part de parties communes correspondante.
La création et la consistance du lot transitoire sont stipulées dans le règlement de copropriété.
A défaut de convention contraire créant une organisation différente, la présente loi est également applicable aux ensembles immobiliers qui, outre des terrains, des aménagements et des services communs, comportent des parcelles, bâties ou non, faisant l'objet de droits de propriété privatifs».
Le statut de la copropriété des immeubles bâtis s'applique donc de plein droit dès lors que sont remplies les seules conditions prévues par l'article 1er, alinéa 1er, de la loi du 10 juillet 1965 (Cass. civ. 3, 15 novembre 1989, n° 87-15213, publié au bulletin N° Lexbase : A6237CHH). La jurisprudence rappelle d'ailleurs régulièrement que ces conditions sont nécessaires et suffisantes, peu importe l'absence d'établissement d'un règlement de copropriété (Cass. civ. 3, 29 mai 2002, n° 00-17.542, FS-P+B N° Lexbase : A7975AYZ).
En visant les immeubles bâtis, la loi exclut de son champ d'application les parcelles non bâties ; pour les immeubles à construire, le fonctionnement de la copropriété découlant de la personnalité morale du syndicat de copropriétaires prend effet lors de la livraison du premier lot.
Le statut de la copropriété s'applique non seulement aux immeubles bâtis mais également aux groupes d'immeubles bâtis ; on parle dans ce cas de copropriété horizontale.
Le cas des lots transitoires : la loi "ELAN" du 23 novembre 2018 introduit à l’article 1er de la loi de 1965 la notion de lot transitoire en précisant sa définition et ses modalités d’application. Le lot transitoire est une création de la pratique (dénommé également lot d’attente ou macro-lot) dans le cadre des programmes immobiliers construits par tranches successives. Sa particularité réside dans le fait que sa partie privative est composé d’un droit de construire et qu’il a donc vocation à disparaître et à être remplacé par les lots qui seront édifiés dans le cadre de ce droit. Il a été considéré par la jurisprudence comme un véritable lot de copropriété avec pour corollaire l’obligation pour son propriétaire de participer aux charges de conservation, d’entretien et d’administration prévues à l’article 10, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965 ([LXB=L4803AHD]). Le lot transitoire est dorénavant défini à l’article 1, alinéa 3, de la loi de 1965 avec cependant une définition plus stricte que celle retenue pas la Cour de cassation puisque le nouveau texte prévoit que le droit de construire qui constitue la partie privative du lot transitoire doit être «précisément défini quant aux constructions qu’il permet de réaliser». Si cette exigence permettra aux autres copropriétaires d’être informés de la future consistance du lot à construire, elle interdit dorénavant de créer des lots à construire offrant toute possibilité à son propriétaire.
L'application du statut de la copropriété suppose que la propriété est répartie, entre plusieurs personnes, par lots comprenant obligatoirement chacun une partie privative et une quote-part de parties communes, lesquelles sont indissociables..
Aussi, en présence de locaux simplement imbriqués, sans qu'il y ait de division de l'immeuble en lots de copropriété, le régime de la copropriété ne s'applique pas (Cass. civ. 1, 2 avril 1962, n° 60-12.199 N° Lexbase : A8391ETX). Il en est de même dans le cas d'un immeuble en indivision simple ou dont la seule jouissance est divisée ou encore d'un immeuble appartenant à une société d'attribution jusqu'à son partage ou du moins jusqu'au premier retrait d'associé.
Il convient de préciser que la division en volumes est permise en application de l'article premier de la loi du 10 juillet 1965 et de l'article 533 du Code civil (N° Lexbase : L9487I7I).
Le statut de la copropriété est applicable de plein droit dès lors qu'un immeuble a une structure homogène, autrement dit qui confère aux copropriétaires des droits identiques et concurrents sur l'ensemble du sol qui est commun, par opposition aux ensembles immobiliers définis à l'article 1er, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965, qui eux comportent des parcelles, bâties ou non faisant l'objet de droits privatifs.
A défaut de convention contraire créant une organisation différente, le statut de la copropriété peut s'appliquer aux ensembles immobiliers, qui sont définis comme des ensembles composés de parcelles, bâties ou non, faisant l'objet de droit de propriété privatifs, devant gérer des terrains, des aménagements ou des services communs.
Pour qu'un ensemble immobilier soit constitué il faut donc la réunion des deux conditions suivantes. D'une part, les parcelles doivent faire l'objet de droits de propriété privatifs ; on parle dans ce cas d'appropriation hétérogène du sol. D'autre part, l'ensemble doit comporter des terrains, des aménagements et des services communs.
Quoi qu'il en soit, dès lors qu'il existe une convention contraire créant une organisation différente, le statut de la copropriété n'est pas applicable aux ensembles immobiliers. La constitution d'une association syndicale libre fait ainsi échapper l'ensemble immobilier au statut de la copropriété. Il en est de même de la constitution d'une association foncière urbaine ou d'une union de syndicats.
Dans certains cas, l'application du statut de la copropriété est exclue, parce qu'elle découle d'une interdiction prévue par la loi, ou d'une incompatibilité avec le statut de la domanialité publique.
Il existe ainsi des situations dans lesquelles la loi prévoit l'interdiction de vendre ou de diviser certains immeubles pour les soumettre au statut de la copropriété. Ces interdictions sont prévues par le Code de la construction et de l'habitation, à l'article L. 111-6-1 (N° Lexbase : L9117IZP) qui vise :
- toute division par appartements d'immeubles qui sont frappés d'une interdiction d'habiter, ou d'un arrêté de péril, ou sont déclarés insalubres, ou comportent pour le quart au moins de leur superficie totale des logements loués ou occupés classés dans la catégorie IV visée par la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 (N° Lexbase : L4772AGT). La division d'un immeuble bâti ou d'un groupe d'immeubles bâtis, entre plusieurs personnes, par lots comprenant chacun une partie privative et une quote-part de parties communes est néanmoins autorisée lorsqu'il s'agit d'y réaliser des travaux de restauration immobilière déclarés d'utilité publique en application de l'article L. 313-4 du Code de l'urbanisme (N° Lexbase : L3402HZZ) ;
- toute division d'immeuble en vue de mettre à disposition des locaux à usage d'habitation d'une superficie et d'un volume habitables inférieurs respectivement à 14 m² et à 33 m³ ou qui ne sont pas pourvus d'une installation d'alimentation en eau potable, d'une installation d'évacuation des eaux usées ou d'un accès à la fourniture de courant électrique, ou qui n'ont pas fait l'objet de diagnostics amiante et risque de saturnisme ;
- toute division par appartements d'immeuble de grande hauteur à usage d'habitation ou à usage professionnel ou commercial et d'habitation dont le contrôle exercé par la commission de sécurité a donné lieu à un avis défavorable de l'autorité compétente ou à des prescriptions qui n'ont pas été exécutées.
Ces interdictions prévues sont édictées à peine de sanctions pénales.
Par ailleurs, le Conseil d'Etat a posé le principe selon lequel les règles essentielles du régime de la copropriété, telles qu'elles sont fixées par la loi du 10 juillet 1965, sont incompatibles tant avec le régime de la domanialité publique qu'avec les caractères des ouvrages publics (CE Contentieux, 11 février 1994, n° 109564 N° Lexbase : A9375ARN).
Afin de faciliter la connaissance des pouvoirs publics sur l'état des copropriétés et la mise en oeuvre des actions destinées à prévenir la survenance des dysfonctionnements, la loi "ALUR" du 24 mars 2014 (N° Lexbase : L8342IZY) institue un registre auquel sont immatriculés les syndicats de copropriétaires, qui administrent des immeubles à destination partielle ou totale d'habitation.
E95683MC
Les conditions communes à l’application du statut de la copropriété, qu’elle soit impérative ou facultative, sont au nombre de deux : il faut, d’une part, qu’existe un bâtiment, et d’autre part, que la propriété soit répartie entre parties communes et parties privatives. Qu’il s’agisse de l’une ou de l’autre de ces conditions, elles n'ont pas été modifiées par l’ordonnance du 30 octobre 2019, portant réforme du droit de la copropriété.
L’application des critères de l’article 1er ne pose pas difficulté lors de la mise en copropriété d’un immeuble bâti existant pour lequel le nouvel article 1-1 de la loi précise que le statut s’applique «à compter du premier transfert de propriété du lot». C’est en effet à cette occasion (vente, donation, partage) que les lots de l’immeuble bâti appartiennent à deux propriétaires différents et que, dès lors, l’ensemble du statut s’applique.
La situation est plus complexe pour les immeubles à construire ayant fait l’objet d’une commercialisation en VEFA. Si la condition de répartition de la propriété de l’immeuble entre plusieurs personnes est remplie dès la première vente en état futur d’achèvement [4], le caractère bâti de l’immeuble fait indéniablement défaut et ni les dispositions relatives à la copropriété, ni celles relatives à la VEFA ne donnent d’indications sur les conditions à réunir pour considérer que l’immeuble est bâti au sens de l’article 1er de la loi de 1965. Ce constat a conduit la jurisprudence à décider que le statut ne s’applique pas pendant la période de construction [5] de l’immeuble mais seulement à compter de son achèvement. La difficulté est alors de définir ce qu’est l’achèvement de l’immeuble à défaut de définition légale exceptée celle prévue à l’article R. 261-1 du CCH (N° Lexbase : L3167K7G) qui règlemente l’achèvement de l’immeuble vendu à terme ou en état futur d’achèvement c’est-à-dire du lot de copropriété lorsque qu’il s’agit d’un immeuble collectif et qui fait référence à «l’exécution des ouvrages et l’installation des éléments d’équipement qui sont indispensables à l’utilisation de l’immeuble conformément à sa destination» ; constat qui permet dans la pratique d’effectuer la livraison du lot à l’acquéreur. C’est justement ce fait précis et concret qu’est la «la livraison du premier lot» que retient dorénavant le législateur pour fixer la date d’entrée en vigueur du statut pour les immeubles à construire. Ainsi, le syndicat des copropriétaires existe dès la première vente en état futur d’achèvement car c’est à ce moment-là que la propriété de l’immeuble est répartie par lots entre plusieurs personnes mais son fonctionnement, ce que la loi appelle «les conséquences découlant de la personnalité morale du syndicat», est retardé jusqu’à la livraison du premier lot. A cette date, le statut s’appliquera à la totalité des lots qui composent l’immeuble y compris à ceux qui ne sont pas encore livrés par le vendeur et ceux qui ne sont pas encore construits avec toutes les conséquences qui en découlent et notamment le paiement des charges de copropriété [6].
[4] CCH, art. L. 261-3 (N° Lexbase : L1958HP9), qui prévoit le transfert immédiat à l’acquéreur des droits sur le sol ainsi que la propriété des constructions existantes.
[5] La lecture des travaux préparatoires de la loi de 1965 atteste que le législateur avait exclu que le statut s’applique à la période de construction.
[6] Les actes de vente contiennent déjà des clauses qui précisent que le vendeur restera débiteur des charges tant que le lot ne sera pas livré à l’acquéreur.
Florence Bayard-Jammes, extrait de La loi «ELAN» et la copropriété, Lexbase, éd. priv., n° 767, 2019 (N° Lexbase : N7025BXH).
La question s'est posée du moment de la naissance de la copropriété lorsqu'un groupe d'immeubles est bâti par tranches.
En effet, la copropriété naît-elle qu'à l'achèvement du dernier immeuble, ce qui peut poser des problèmes juridiques concernant les immeubles antérieurement achevés (à quel statut sont-ils soumis en attendnt l'achèvment définitif du programme ? Quid en cas d'inachèvement ? etc.) ?
La Cour de cassation a opté pour une solution plus souple qui consiste à appliquer le statut de la copropriété lors de la première attribution ou de la première vente d'un lot caractérisant le partage de la propriété entre deux personnes (le promoteur propriétaire vendeur et l'acquéreur ou l'attributaire).
Le lot transitoire est dorénavant défini à l’article 1, alinéa 3, de la loi de 1965 avec cependant une définition plus stricte que celle retenue jusque-là par la Cour de cassation puisque le nouveau texte prévoit que le droit de construire, qui constitue la partie privative du lot transitoire, doit être «précisément défini quant aux constructions qu’il permet de réaliser».
Si cette exigence permettra aux autres copropriétaires d’être informés de la future consistance du lot à construire, elle interdit dorénavant de créer des lots à construire offrant toute possibilité à son propriétaire. Elle aura également des conséquences en cas de modifications du projet de construction initial par le propriétaire du lot transitoire qui devra les faire autoriser préalablement par l’assemblée générale en application de l’article 25 b de la loi de 1965 ([LXB=L4825AH8).
Par ailleurs, on peut regretter une certaine incohérence des nouveaux textes. En effet, l’article 1er limite le droit de construire du lot transitoire à des constructions réalisées «sur une surface déterminée du sol» alors que l’article 37-1 nouveau de la loi de 1965 ([LXB=L6783LNK) dispose que le droit de surélever, droit accessoire aux parties communes visé à l’article 3 de la loi de 1965 ([LXB=L4836AHL), peut «constituer la partie privative d’un lot transitoire».
Florence Bayard-Jammes, extrait de La loi «ELAN» et la copropriété, paru dans Lexbase, éd. priv., n° 767, 2018 (N° Lexbase : N7025BXH).
Cette disposition soulève un certain nombre d’interrogations. En premier lieu, dans la mesure où seul le règlement de copropriété est visé par la mise en conformité et non l’état descriptif de division ; faut-il considérer que, pour le législateur, l’expression «règlement de copropriété» vise le document contenant à la fois le règlement de copropriété et l’état descriptif de division ? Par ailleurs, doit-on envisager qu’un lot transitoire existant mais non précisément défini quant aux constructions à réaliser soit redéfini sans l’accord de son propriétaire [3] à la simple majorité de l’article 24 de la loi de 1965 ? Que se passera-t-il pour les lots à construire existant mais non précisément définis si l’assemblée générale refuse de procéder à la mise en conformité dans le délai légal ? Les copropriétaires titulaires d’un lot à construire ne répondant pas aux exigences de l’article 1er de la loi de 1965 doivent donc se préoccuper sérieusement de la mise en conformité à peine de prendre le risque de voir l’existence de leur lot menacé.
[3] Voir Vivien Zalewski-Sicard, Construction et copropriété : les apports du projet de loi ELAN, Construction - Urbanisme n° 11, Novembre 2018 ; J.-M. Roux, La copropriété à l’épreuve de la loi ELAN, IRC n° 644, Décembre 2018, p. 17 et s..
Florence Bayard-Jammes, extrait de La loi "Elan" et la copropriété, paru dans Lexbase, éd. priv., n° 767, 2019 (N° Lexbase : N7025BXH)
Il résulte de la définition du "lot de copropriété" que la loi du 10 juillet 1965 ne s'applique pas :
Source : Mémento Francis Lefebvre, Gestion immobilière, 2010-2011, n° 35055 ; Code de la copropriété 2010, LITEC, p. 6, n° 10.
La division d'un ensemble immobilier en volumes est possible en application de l'article 533 du Code civil et de l'article 1er alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965.
Pour cela, il faut que le sol soit divisé en propriétés distinctes (appropriation hétérogène).
"Cette technique de division (...) consiste à distinguer des fractions d'immeuble définies en trois dimensions par référence à des plans (notamment cadastraux), à des coupes horizontales et verticales, ces dernières par références aux cotes 'Nivellement général de la France' (NGF) ; mais aucune quote-part de parties communes n'est affectée à ces fraction qui, de ce fait, sont autonomes les unes par rapport aux autres, mais avec des superstructures communes.
(...) Le statut de la copropriété ne leur est donc pas applicable au moins automatiquement". (Dalloz Action, La copropriété, 2010-2011, n° 55).
E4538ETA
C’est dans les conditions propres à l'application impérative au statut de la copropriété que réside la modification majeure réalisée par l’ordonnance du 30 octobre 2019 portant réforme du droit de la copropriété : la réduction du champ d’application impératif du statut de la copropriété aux seuls immeubles à usage partiel ou exclusif d’habitation. N’est pas modifiée, en revanche, la condition d’une propriété du sol homogène permettant de distinguer le groupe d’immeubles de l’ensemble immobilier.
Partant du postulat que la loi du 10 juillet 1965 est trop rigide pour s’appliquer à tous les immeubles quel que soit leur usage, l’ordonnance du 30 octobre 2019 réduit l’application impérative du statut de la copropriété aux seuls immeubles ou groupes d’immeubles bâtis à usage total ou partiel d’habitation.
Une telle réduction du champ d’application impérative du statut de la copropriété créera inévitablement des problèmes de frontière qui doivent, néanmoins, être relativisés.
Le critère à retenir pour déterminer si l’immeuble est à usage partiel ou total d’habitation n’est pas précisé dans le I de l’article 1er de la loi du 10 juillet 1965. A notre sens, il n’est pas possible de s’en tenir à la seule volonté des parties. En effet, il serait trop simple de contourner le statut de la copropriété en mettant en place une organisation différente pour un immeuble pour lequel les parties déclareraient qu’il n’est pas à usage d’habitation. Il conviendra de prendre en compte, également, des éléments objectifs, des caractéristiques matérielles, permettant d’établir l’usage qui est ou qui sera fait de l’immeuble. Ainsi, dès lors que l’immeuble comprend ou doit comprendre tous les éléments d’équipement d’un immeuble à usage d’habitation, l’application du statut de la copropriété sera impérative.
Par ailleurs, il est suffisant que le bâtiment contienne un lot à usage d’habitation pour que l’application du statut de la copropriété soit impérative. Il importe peu, en effet, de déterminer si les lots à usage d’habitation sont majoritaires par rapport aux lots à un autre usage. Ainsi, un lot à usage d’habitation dans un bâtiment comprenant 99 lots à un usage autre que d’habitation suffira pour considérer que le bâtiment est à usage partiel d’habitation et que le statut de la copropriété soit impérativement applicable. De même, il est suffisant qu’un bâtiment dans un groupe de bâtiments soit à usage partiel ou total d’habitation pour que le statut de la copropriété soit applicable impérativement.
Il est parfaitement possible, au demeurant, que l’usage d’un lot évolue dans le temps. En cette hypothèse, il faudra régler la situation conventionnellement. En effet, si un lot passe d’un usage d’habitation à un usage de commerce et qu’il n’existe plus de lot à usage d’habitation dans le bâtiment concerné, les copropriétaires pourront user du deuxième alinéa du 2° du II de l’article 1er de la loi du 10 juillet 1965 qui précise que la convention mettant en place une organisation dotée de la personne morale est adoptée par l'assemblée générale à l'unanimité des voix de tous les copropriétaires composant le syndicat. A l’inverse, l’usage d’un lot à usage autre que d’habitation pourrait être transformée par son propriétaire. En cette hypothèse, la convention prévoyant l’organisation différente pourrait faire obstacle à une telle modification. Chaque propriétaire ne pourrait ainsi, sans l’accord unanime des autres, modifier l’usage de son lot.
Si, ainsi, des problèmes de frontière vont surgir, celles-ci ne sont pas pour autant inédites. En effet et tout d’abord, différentes dispositions du droit de la copropriété ne sont applicables qu’aux bâtiments à usage d’habitation. Ainsi et par exemple, le dernier alinéa de l’article 8-2 de la loi du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L3651I4Y), qui n’est pas modifié par l’ordonnance du 30 octobre 2019, précise que l’établissement d’une fiche synthétique ne s’impose pas lorsque l’immeuble est à destination totale autre que d’habitation. Il est vrai, toutefois, que, dans cette hypothèse, le syndic va être conduit à prendre en considération les stipulations du règlement de copropriété pour déterminer s’il est tenu ou non d’établir ladite fiche.
D’autre part, ces problèmes de frontière apparaissent également dans d’autres domaines notamment celui du droit de la construction lorsqu’il s’agit de déterminer si les règles du secteur protégé doivent être appliquées. Ainsi, pour les résidences de tourisme et les résidences-services, la Cour de cassation a été conduite à préciser que le mode de gestion desdites copropriétés n’était pas dirimant et que les appartements situés dans ces résidences devaient être considérés comme étant à usage d’habitation (Cass. civ. 3, 23 mai 2019, n° 17-17.908, FS-P+B+I N° Lexbase : A1907ZCM). Il nous semble que la même solution devra être retenue lorsqu’il s’agira de déterminer si le statut de la copropriété est impérativement applicable aux résidences de tourisme et aux résidences-services.
Vivien Zalewski-Sicard, extrait de Le statut de la copropriété : un champ d’application révolutionné par l’ordonnance du 30 octobre 2019, article paru dans Lexbase, éd. priv., n° 806, 2019 (N° Lexbase : N1559BYE).
"Le statut de la copropriété doit s'appliquer, à l'exclusion de tout autre mode d'organisation, dès lors qu'un immeuble, dont la propriété est répartie entre plusieurs personnes, est de structure suffisamment 'homogène' pour que chaque lot comprenne nécessairement une partie privative et une quote-part des parties communes.
En particulier, il ne serait pas possible, dans un immeuble à élévation homogène, de faire de chaque appartement un volume immobilier et d'organiser cet ensemble en s'affranchissant de la loi du 10 juillet 1965 au prétexte qu'il n'y aurait pas, dans cette présentation, de parties communes réparties entre tous les lots. Ce serait éluder de façon artificielle le statut d'ordre public résultant de cette loi" (Mémento Francis Lefebvre, Gestion immobilière, 2010-2011, n° 35050).
E4539ETB
Les conditions propres à l'application facultative au statut de la copropriété sont énoncées au II de l’article 1er de la loi du 10 juillet 1965. Le statut de la copropriété s’appliquera de manière facultative aux immeubles ou groupe d’immeubles à usage autre que d’habitation, ainsi qu’aux ensembles immobiliers, mais uniquement lorsqu’une organisation différente n’aura pas été mise en place.
Sont visés par le II de l’article 1er de la loi du 10 juillet 1965 tous les immeubles ou groupe d’immeubles à usage autre que d’habitation, même partiellement. Ainsi et désormais, un immeuble à usage de commerce, à usage industriel, à usage artisanal, à usage professionnel… , à usage mixte, dès lors que l’un des usages n’est pas l’habitation, peut ne pas être soumis au statut de la copropriété. Des parties communes et des parties privatives existeront bien. C’est, alors, aux parties qu’il va revenir d’organiser conventionnellement la gestion desdites parties communes et les rapports entre les copropriétaires et entre les copropriétaires et les tiers. Aux parties, donc, de créer une nouvelle organisation.
L’article 2 de l’ordonnance du 30 octobre 2019 n’a d’ailleurs pas omis d’envisager la situation de ces immeubles qui seraient soumis au statut de la copropriété, soit antérieurement à l’entrée en vigueur de ladite ordonnance soit ultérieurement en l’absence de mise en place d’une organisation différente, et dont les copropriétaires voudraient sortir. En cette hypothèse, la convention créant une organisation différente répondant aux exigences du II de l’article 1er de la loi du 10 juillet 1965.
Vivien Zalewski-Sicard, extrait de Le statut de la copropriété : un champ d’application révolutionné par l’ordonnance du 30 octobre 2019, article paru dans Lexbase, éd. priv., n° 806, 2019 (N° Lexbase : N1559BYE).
Vivien Zalewski-Sicard, extrait de Le statut de la copropriété : un champ d’application révolutionné par l’ordonnance du 30 octobre 2019, paru dans Lexbase, éd. priv., n° 806, 2019 (N° Lexbase : N1559BYE)
Une réponse ministérielle précise que "par opposition à l'homogénéité prévue par l'alinéa 1er de l'article 1er (de la loi du 10 juillet 1965) de la répartition de la propriété par lots de l'immeuble ou du groupe d'immeubles bâtis, pour lesquels le statut de la copropriété est impératif, l'ensemble immobilier présente une structure hétérogène et des aménagements ou des services communs pour la gestion desquels une organisation est nécessaire. Si l'on peut regretter l'inexistence d'un statut spécifique aux ensembles immobiliers, il convient d'observer que le régime de la copropriété ne s'applique à ces ensembles qu'à défaut d'une organisation différente, telle que la constitution d'une association syndicale libre des propriétaires (...), d'une association foncière urbaine régie par l'article L. 322-2 du Code de l'urbanisme, ou encore d'une union de syndicats prévue par l'article 29 de la loi du 10 juillet 1965 (...). Même s'il semble préférable, pour des raisons pratiques, que l'organisation différente soit créée en même temps que l'ensemble immobilier, il apparaît possible de procéder à cette création ultérieurement" (Rép. min. n° 28921, JO Sénat, 1er mars 2001, p. 756).
L'ensemble immobilier est défini comme un ensemble composé de parcelles, bâties ou non, faisant l'objet de droits de propriété privatifs, devant gérer des terrains, des aménagements ou des services communs. Pour qu'un ensemble immobilier soit constitué il faut donc la réunion des deux conditions suivantes : des parcelles faisant l'objet de droit de propriété privatif (appropriation hétérogène) et des terrains, des aménagements et des services communs.
Vivien Zalewski-Sicard, extrait de Le statut de la copropriété : un champ d’application révolutionné par l’ordonnance du 30 octobre 2019, paru dans Lexbase, éd. priv., n° 806, 2019 (N° Lexbase : N1559BYE)
E4627ETK
E4570ETG
E3206E4I