ETUDE : La clôture de l’instruction
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avec cacheDernière modification le 19-03-2024
Cette étude est rédigée par Nicolas Catelan, Maître de conférences à l'Université Paris Cité, Directeur ajoint de l'IEJ et Directeur scientifique de la revue Lexbase Pénal.
La fin de l’instruction préparatoire constitue un moment important tant en termes de droits qu’au regard de la suite judiciaire que le magistrat instructeur entend donner à l’affaire pour laquelle il est saisi. Les parties vont en effet apprendre quel sort est réservé au(x) mis en examen tout en pouvant formuler observations et demandes d’actes. Si en réaction à la célèbre affaire d’« Outreau », la loi n° 2007-291 du 5 mars 2007 tendant à renforcer l’équilibre de la procédure pénale avait fait en sorte de nettement favoriser le contradictoire au stade de la clôture, difficile de nier que la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a considérablement obscurci la procédure applicable, semblant vouloir tendre un véritable piège aux avocats. Quelle que soit la volonté du législateur contemporain, l’article 175 du Code de procédure pénale ne constitue plus une garantie destinée à assurer à l’issue de l’information judiciaire un échange équitable et contradictoire entre les différentes parties prenantes. Il y a dès lors de quoi être inquiet quand un législateur ne cherche plus à faire de la procédure pénale un espace de véridiction gouverné par l’échange et la contradiction. Assumer le risque que le dossier ne soit pas équilibré et éclairé par la défense atteste que la procédure pénale tend vers de nombreux objectifs au premier rang desquels ne se trouve pas l’égalité des armes ; ce qui est sans doute logique si le droit répressif est perçu tel un ordre destiné à punir ceux qui par leur infraction ont brisé le lien social.
La fin de l’instruction préparatoire constitue un moment important tant en termes de droits qu’au regard de la suite judiciaire que le magistrat instructeur entend donner à l’affaire pour laquelle il est saisi. Les parties vont en effet apprendre quel sort est réservé au(x) mis en examen tout en pouvant formuler observations et demandes d’actes. Si en réaction à la célèbre affaire d’ « Outreau », la loi du 5 mars 2007 (N° Lexbase : L5932HUA) avait fait en sorte de nettement favoriser le contradictoire au stade de la clôture, difficile de nier que la loi du 23 mars 2019 (N° Lexbase : L6740LPC) a considérablement obscurci la procédure applicable, semblant vouloir tendre un véritable piège aux avocats. Quelle que soit la volonté du législateur contemporain, l’article 175 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7482LPS) ne constitue plus une garantie destinée à assurer à l’issue de l’information judiciaire un échange équitable et contradictoire entre les différentes parties prenantes. Il y a dès lors de quoi être inquiet quand un législateur ne cherche plus à faire de la procédure pénale un espace de véridiction gouverné par l’échange et la contradiction. Assumer le risque que le dossier ne soit pas équilibré et éclairé par la défense atteste que la procédure pénale tend vers de nombreux objectifs au premier rang desquels ne se trouve pas l’égalité des armes ; ce qui est sans doute logique si le droit répressif est perçu tel un ordre destiné à punir ceux qui par leur infraction ont brisé le lien social.
Maître du temps. Le juge d’instruction maitrise évidemment la temporalité de l’information judiciaire ; la fin d’information n’échappe pas à son emprise. La clôture de l’instruction dépend peu ou prou, en pratique, du seul rythme qu’il donne à la procédure conformément à la loi (C. proc. pén., art. 175 N° Lexbase : L7482LPS). Toutefois, l’article 175-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7476LPL) permet au mis en examen, au témoin assisté ou à la partie civile de demander au juge d'instruction de prononcer le renvoi ou la mise en accusation devant la juridiction de jugement ou de déclarer qu'il n'y a pas lieu à suivre. Cette demande peut d’ailleurs également être formée lorsque aucun acte d'instruction n'a été accompli pendant un délai de quatre mois. A cet effet, et fort opportunément, l’article 175-2 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2992IZT) rappelle que la durée de l'instruction ne peut excéder un délai raisonnable au regard de la gravité des faits reprochés au mis en examen, de la complexité des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité et de l'exercice des droits de la défense.
Enfin, l'article 221-2 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3611AZR) permet aux parties, lorsqu'un délai de quatre mois (ramené à deux mois pour la personne en détention provisoire) s'est écoulé depuis le dernier acte d'instruction, de saisir la chambre de l'instruction dans les conditions de l'article 173, alinéa 3, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7455LPS) par déclaration au greffe. Cette juridiction pourra éventuellement dessaisir le magistrat instructeur du dossier.
Délai et notification. Il résulte de l’article 175, I, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7482LPS) qu’aussitôt que l'information lui paraît terminée, le juge d'instruction communique le dossier au procureur de la République et en avise en même temps les avocats des parties ou, si elles ne sont pas assistées par un avocat, les parties. Il est ajouté que cet avis de fin d’information est notifié soit verbalement avec émargement au dossier, soit par lettre recommandée. Lorsque la personne est détenue, il peut également être notifié par les soins du chef de l'établissement pénitentiaire, qui adresse sans délai au juge d'instruction l'original ou la copie du récépissé signé par l'intéressé. Le II de l’article 175 du Code de procédure pénale précise alors qu’une fois l’avis envoyé, le procureur de la République dispose d'un délai d'un mois si une personne mise en examen est détenue ou de trois mois dans les autres cas pour adresser ses réquisitions motivées au juge d'instruction. Copie de ce réquisitoire définitif est adressée dans le même temps par lettre recommandée aux avocats des parties ou, si elles ne sont pas assistées par un avocat, aux parties directement.
Délai de préservation des droits. Désormais, aux termes du III de l’article 175 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7482LPS), dans un délai de quinze jours à compter soit de chaque interrogatoire ou audition réalisé au cours de l'information, soit de l'envoi de l'avis prévu au I du présent article, les parties peuvent faire connaître au juge d'instruction, selon les modalités prévues à l'avant-dernier alinéa de l'article 81 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7468LPB), qu'elles souhaitent exercer l'un ou plusieurs des droits prévus aux IV et VI du présent article. L’article 175, VIII, du Code de procédure pénale dispose que ce délai s’impose également au témoin assisté.
1er délai : réponse au « 175 ». Selon le IV de l’article 175 du Code de procédure pénale, si les parties ont indiqué souhaiter exercer ces droits, elles disposent, selon les cas mentionnés au II, d'un même délai d'un mois ou de trois mois à compter de l'envoi de l'avis prévu au I pour adresser des observations, formuler des demandes ou présenter des requêtes. A l'expiration du délai de trois mois si le mis en examen est libre, un mois s’il est détenu, les parties ne sont plus recevables à adresser de telles observations ou à formuler ou présenter de telles demandes ou requêtes. Le VIII de l’article 175 du Code de procédure pénale précise que le témoin assisté peut formuler ces observations.
2ème délai : réplique au réquisitoire définitif. En vertu de l’article 175, VI, du Code de procédure pénale, si les parties ont indiqué qu'elles souhaitaient exercer ce droit conformément au III, elles disposent d'un délai de dix jours si une personne mise en examen est détenue ou d'un mois dans les autres cas pour adresser au juge d'instruction des observations complémentaires, pour répliquer aux réquisitions du procureur, et ce « à compter de la date à laquelle les réquisitions leur ont été communiquées ». Le témoin assisté a également la possibilité de répliquer en application de l’alinéa VIII de l’article 175 du Code de procédure pénale.
3ème délai : réplique du procureur par réquisitions complémentaires. La loi distingue désormais dans un alinéa spécifique le cas où le procureur répond aux observations formulées par les parties dans le cadre du 1er délai. L’article 175, V, du Code de procédure pénale énonce ainsi que si les parties ont adressé des observations en application du 1° du IV, le procureur de la République dispose d'un délai de dix jours si une personne mise en examen est détenue ou d'un mois dans les autres cas pour adresser au juge d'instruction des réquisitions complémentaires, et ce à compter de la date à laquelle ces observations lui ont été communiquées.
Ordonnance de règlement. Le VII de l’article 175 du Code de procédure pénale dispose qu’à l'issue, selon les cas, du délai d'un mois ou de trois mois prévu aux II et IV (observations primaires des parties et réquisitions du procureur), ou du délai de dix jours ou d'un mois prévu aux V et VI (répliques), le juge d'instruction peut rendre son ordonnance de règlement. Selon l’article 385, alinéa 3, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3791AZG), lorsque l'ordonnance de renvoi du juge d'instruction a été rendue sans que les conditions prévues par l'article 175 du code aient été respectées, les parties demeurent recevables à soulever devant le tribunal correctionnel les nullités de la procédure.
Droit nouveau (similarité avec le droit ancien). Aux termes de l’article 175, IV, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7482LPS), il est acquis que, si elles « ont indiqué souhaiter exercer ces droits dans les conditions prévues au III, les parties disposent, selon les cas mentionnés au II, d'un même délai d'un mois ou de trois mois à compter de l'envoi de l'avis prévu au I pour :
2° Formuler des demandes ou présenter des requêtes, selon les mêmes modalités, sur le fondement du neuvième alinéa de l'article 81, des articles 82-1 et 82-3, du premier alinéa de l'article 156 et du troisième alinéa de l'article 173, sous réserve qu'elles ne soient pas irrecevables en application des articles 82-3 et 173-1 ».
Appréciation souveraine des charges. Une fois les délais épuisés à la suite de l’avis d’information, le juge d’instruction doit « régler » l’affaire. Il doit en effet rendre une ordonnance de règlement par laquelle il doit examiner, conformément à l’article 176 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2972IZ4), s'il existe contre la personne mise en examen des charges constitutives d'infraction, dont il détermine la qualification juridique.
Qualification. En vertu de l’article 184 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2974IZ8), l'ordonnance doit préciser la qualification légale du fait imputé et pourquoi il existe ou non des charges suffisantes. Depuis la loi n° 2007-291 du 5 mars 2007 (N° Lexbase : L5930HU8), le texte ajoute que la motivation est prise au regard des réquisitions et observations des parties, en précisant les éléments à charge et à décharge. L’article 176 du Code de procédure pénale renvoie également à la qualification juridique.
Validité formelle et couverture des vices. Si la validité formelle de l’ordonnance est acquise, il en résulte par effet de la loi (C. proc. pén., art. 178 N° Lexbase : L6709LGL, 179 N° Lexbase : L8054LAK et 181 N° Lexbase : L2990IZR) que lorsqu'elle devient définitive, l'ordonnance de renvoi couvre, s'il en existe, les vices de la procédure.
Ordonnances partielles. Les dispositions de l’article 182 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2973IZ7) précisent que des ordonnances de non-lieu partiel peuvent intervenir en cours d'information. Peuvent intervenir, pareillement, des ordonnances de renvoi partiel ou de transmission partielle des pièces en cas de charges suffisantes.
Dessaisissement. L'ordonnance de clôture de l'information entraîne ipso jure le dessaisissement du magistrat instructeur : celui-ci ne peut plus procéder au moindre acte d'instruction (v. Cass. crim., 24 juill. 1961 : Bull. crim. 1961, n° 353).
Fondement. Le non-lieu est envisagé à l’article 177 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2988IZP). Ainsi, dès lors que le juge d'instruction estime que les faits ne constituent aucune infraction, ou si l'auteur est resté inconnu, ou s'il n'existe pas de charges suffisantes contre la personne mise en examen, il déclare, par une ordonnance, qu'il n'y a lieu à suivre.
Autorité relative et citation directe. Sur le plan pénal, aux termes de l’article 188 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2975IZ9), « la personne mise en examen à l'égard de laquelle le juge d'instruction a dit n'y avoir lieu à suivre ne peut plus être recherchée à l'occasion du même fait, à moins qu'il ne survienne de nouvelles charges ».
Effets du non-lieu. Les personnes mises en examen qui sont provisoirement détenues sont fort naturellement mises en liberté. L'ordonnance met similairement fin au contrôle judiciaire en application de l’article 177 du Code de procédure pénale. Surtout, il résulte des dispositions de l’article 188 du Code de procédure pénale que « la personne mise en examen à l'égard de laquelle le juge d'instruction a dit n'y avoir lieu à suivre ne peut plus être recherchée à l'occasion du même fait, à moins qu'il ne survienne de nouvelles charges ».
Autres effets. Lors d’un non-lieu, le juge doit statuer par la même ordonnance sur la restitution des objets placés sous main de justice. Enfin, aux termes de l’article 177-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L8710GQN), le juge d'instruction peut ordonner, d'office ou à la demande de l'intéressé soit la publication intégrale ou partielle de la décision de non-lieu, soit la publication d'un communiqué. L'ordonnance de refus, également susceptible d'appel, doit être motivée.
Amende civile. Le non-lieu à l'issue d'une information ouverte sur constitution de partie civile, considérée comme abusive ou dilatoire, peut conduire le juge d'instruction, à prononcer contre la partie civile une amende civile ne pouvant excéder 15 000 euros en vertu de l’article 177-2 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L4539AZ7). Cette décision peut être frappée d'appel par la partie civile dans les mêmes conditions que l'ordonnance de non-lieu. L’appel est également ouvert au procureur de la République si le juge d'instruction ne suit pas ses réquisitions.
La loi n° 2015-993 du 17 août 2015 portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne (N° Lexbase : L2620KG7) a inséré un nouvel article 183-1 dans le Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2761KGD) aux termes duquel : « à la demande de la victime qui a déposé plainte sans s'être toutefois constituée partie civile, l'ordonnance de non-lieu, une fois devenue définitive, est portée à sa connaissance par tout moyen ».
Dommages et intérêts. En vertu de l’article 91 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7165A47), quand, après une information ouverte sur constitution de partie civile, une décision de non-lieu a été rendue, la personne mise en examen et toutes personnes visées dans la plainte, et sans préjudice d'une poursuite pour dénonciation calomnieuse, peuvent, si elles n'usent de la voie civile, demander des dommages-intérêts au plaignant devant la juridiction répressive.
Irresponsabilité pénale ou décès. Si le non-lieu se fonde sur l’article 122-2 (force majeure N° Lexbase : L2167AM9), 122-3 (erreur sur le droit N° Lexbase : L2316AMQ), 122-4 (autorisation de la loi ou commandement de l’autorité légitime N° Lexbase : L7158ALP), 122-5 (état de nécessité N° Lexbase : L2171AMD), 122-7 du Code pénal (légitime défense N° Lexbase : L2248AM9) ou le décès du mis en examen, l'ordonnance doit selon l’article 177 alinéa 2 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2988IZP) préciser s'il existe des charges suffisantes établissant que l'intéressé a commis les faits qui lui sont reprochés.
Surtout, la loi n° 2008-174 du 25 février 2008 (N° Lexbase : L8204H3A) a créé un cadre spécifique de règlement en cas de trouble mental : l'ordonnance d'irresponsabilité pénale qui relève du juge d'instruction (C. proc. pén., art. 706-120 N° Lexbase : L6266H9X), ou l'arrêt de déclaration d'irresponsabilité pénale qui ressort à la chambre de l'instruction (C. proc. pén., art. 706-124 N° Lexbase : L6262H9S] : pour une analyse différentielle de ces procédures v. S. Detraz, La création d'une nouvelle décision de règlement de l'instruction : la décision d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, RSC, 2008, p. 873). La situation visée par la loi est la suivante : malgré l'existence de charges suffisantes à l'encontre d'une personne, cette dernière doit être déclarée irresponsable en raison de troubles psychiques ou neuropsychiques ayant aboli son discernement conformément à l’article 122-1 du Code pénal (N° Lexbase : L9867I3T).
ORTC et mesures de contrainte. L’article 179 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L8054LAK) définit le cadre juridique de l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel (ORTC). Si le juge estime que les faits constituent un délit, il prononce, par ordonnance, le renvoi de l'affaire devant le tribunal correctionnel. Cette ordonnance précise, s'il y a lieu, que le prévenu bénéficie des dispositions de l'article 132-78 du Code pénal (N° Lexbase : L0432DZZ) afférent aux causes de diminution ou d’exemption de peine en cas de collaboration avec la justice. Surtout la loi ajoute que l'ordonnance de règlement met fin à la détention provisoire, à l'assignation à résidence avec surveillance électronique ou au contrôle judiciaire.
Détention provisoire. Le juge d'instruction peut, par ordonnance distincte spécialement motivée, maintenir le prévenu en détention, sous assignation à résidence avec surveillance électronique ou encore sous contrôle judiciaire jusqu'à sa comparution devant le tribunal. La loi exige que l'ordonnance de maintien en détention provisoire soit exclusivement motivée par référence aux 2°, 4°, 5° et 6° de l'article 144 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L9485IEZ).
Mandats. Si le mandat d'arrêt conserve sa force exécutoire, en revanche, les mandats d'amener ou de recherche cessent de pouvoir recevoir exécution. Le juge d'instruction a toutefois la possibilité de délivrer un mandat d'arrêt contre le prévenu.
Purge des vices. L’article 179 du Code de procédure pénale en son dernier alinéa consacre la purge des vices de la procédure jusqu’ici suivie : « lorsqu'elle est devenue définitive, l'ordonnance mentionnée au premier alinéa couvre, s'il en existe, les vices de la procédure ». Cette disposition trouve son pendant à l’article 385 du code (N° Lexbase : L3791AZG) qui dispose en son alinéa 1er que : « Le tribunal correctionnel a qualité pour constater les nullités des procédures qui lui sont soumises sauf lorsqu'il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d'instruction ou la chambre de l'instruction ». L’alinéa 4 poursuit ainsi : « Lorsque la procédure dont il est saisi n'est pas renvoyée devant lui par la juridiction d'instruction, le tribunal statue sur les exceptions tirées de la nullité de la procédure antérieure ».
Limite à la purge : irrégularité de l’ORTC. Nonobstant la purge des nullités, l’article 385, alinéa 2, du Code de procédure pénale ouvre à la défense la possibilité d’attaquer la régularité de l’ordonnance de renvoi.
Exception à la purge : irrégularité de la fin d’information. En revanche, l’article 385 du Code de procédure pénale contient une véritable exception à l’article 179, dernier alinéa, du code : lorsque l'ordonnance de renvoi du juge d'instruction a été rendue sans que les conditions prévues par l'article 175 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7482LPS) aient été respectées, le prévenu est autorisé à soulever devant le tribunal correctionnel les nullités de la procédure.
Exception à l’exception : personne en fuite. Selon la Cour de cassation, il se déduit de l'article 134 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7628IP9) qu'une personne en fuite et vainement recherchée au cours de l'information n'a pas la qualité de partie au sens de l'article 175 du Code de procédure pénale relatif à l’avis de fin d’information. Dès lors, elle ne saurait se prévaloir des dispositions de l'article 385, alinéa 3, du Code de procédure pénale (permettant de soulever les nullités devant le tribunal correctionnel), l'ordonnance de renvoi ayant, comme le prévoit l'article 179 du code, purgé les vices de la procédure (Cass. crim., 3 avril 2007, n° 06-89.315, F-P+F+I N° Lexbase : A9203DUE ; Cass. crim., 3 octobre 2007, n° 07-81.030, F-P+F N° Lexbase : A8638DYL ; Cass. crim., 15 mai 2018, n° 17-82.866, F-P+B N° Lexbase : A4499XNX).
Exception à la purge : presse. La spécificité du droit de la presse affecte également le jeu de l’article 179, alinéa 6, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L8054LAK). En principe, lorsque la juridiction correctionnelle est saisie par l'ordonnance de renvoi du juge d'instruction, les parties sont irrecevables à soulever les exceptions tirées de la nullité de la procédure antérieure.
Dessaisissement du juge d’instruction. Bien que la loi ne le mentionne pas expressément, il est évident que l’ordonnance de renvoi dessaisit le magistrat instructeur.
Pour finir, précisons que toute ordonnance renvoyant le mis en examen devant les tribunaux de police ou correctionnel l'informe en application de l’article 179-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L5357LCE), qu'il doit signaler par lettre recommandée avec accusé de réception auprès du procureur, jusqu'au jugement définitif, tout changement d'adresse, et que toute citation, notification ou signification faite à la dernière adresse déclarée sera réputée faite à sa personne.
Correctionnalisation judiciaire et légale. La correctionnalisation permet à l’institution judiciaire de recourir à une qualification délictuelle quand bien même la réalité des faits commis imposerait une dimension criminelle.
Surtout ces dispositions vont de pair avec l’article 469, alinéa 4, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3000IZ7). Le 1er alinéa permet certes au tribunal correctionnel, s’il estime que le fait déféré sous la qualification de délit est de nature à entraîner une peine criminelle, de renvoyer le ministère public à se pourvoir ainsi qu'il avisera. Toutefois, l’alinéa 4ème ajoute : « lorsqu'il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d'instruction ou la chambre de l'instruction, le tribunal correctionnel ne peut pas faire application, d'office ou à la demande des parties, des dispositions du premier alinéa, si la victime était constituée partie civile et était assistée d'un avocat lorsque ce renvoi a été ordonné ». Le texte réserve toutefois le cas de poursuites exercées pour un délit non intentionnel s'il résulte des débats que les faits sont de nature à entraîner une peine criminelle parce qu'ils ont été commis de façon intentionnelle. L’affaire peut alors être renvoyée au procureur aux fins de mieux se pourvoir.
Contenu de l’appel contre la correctionnalisation. Outre ce risque, la Cour a longtemps fait peser une incertitude quant au sort réservé à l’appel de l’ordonnance de renvoi.
En son dernier état, la Cour de cassation estime donc que « la recevabilité, au regard des dispositions de l'article 186-3 du code de procédure pénale, de l'appel d'une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel, portant requalification des faits, peut être appréciée, non seulement au vu des indications figurant dans l'acte d'appel, mais aussi en fonction des motifs de ce recours exposés par mémoire devant la chambre de l'instruction » (Cass. crim., 29 novembre 2017, n° 17-84.566, FS-P+B, (N° Lexbase : A4616W4Q).
CRPC : variation autour de l’action publique. Depuis la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 (N° Lexbase : L3703IRL), une innovation a pénétré le Code de procédure pénale. Alors que l’action publique a été déclenchée par la saisine d’un magistrat instructeur, il est possible en cours d’information d’emprunter une voie de dérivation en ayant recours à une comparution sur reconnaissance de culpabilité.
CJIP : dépassement. Suivant la logique initiée par la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 avec la « CRPC-instruction », la loi du n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 (N° Lexbase : L6482LBP) a également opté pour un mécanisme de dérivation de l’action publique en permettant de recourir à une convention judiciaire d’intérêt public, nouvellement créée, au cours de l’information judiciaire. Toutefois, si le mécanisme intégré à l’article 180-2 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L0497LTL) se rapproche par l’esprit de la CRPC, il s’en éloigne sur un point cardinal : si la CRPC reste une poursuite (certes hétérodoxe), la CJIP constitue une alternative aux poursuites n’entraînant aucune condamnation pénale, donc aucune inscription au casier judiciaire (C. proc. pén., art. 41-1-2, II, al. 4 et 5 N° Lexbase : L0484LT4). Pire : « l'exécution des obligations prévues par la convention éteint l'action publique » (C. proc. pén., art. 41-1-2, IV, al. 2). La célèbre (légendaire ?) indisponibilité de l’action publique en sort évidement affaiblie.
Pour conclure, il n’est pas inutile d’observer qu’au 1er janvier 2020, sur huit CJIP conclues, cinq furent des dérivations d’instruction (v. ainsi les CJIP « HSBC » du 30 octobre 2017 (N° Lexbase : L5191LI4) ; « EGIS AVIA » 28 novembre 2019 (N° Lexbase : L7864LUS) ; « SAS Poujaud » du 4 mai 2018 (N° Lexbase : L7866LUU) ; « Kaefer Wanner » du 15 février 2018 (N° Lexbase : L5193LI8) ; et « SAS Set Environnement » du 14 février 2018 (N° Lexbase : L5195LIA).
La CJIP est donc pour le moment davantage une alternative aux poursuites engagées qu’une alternative à l’engagement des poursuites !
« OMA ». A l’instar de l’article 179 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L8054LAK), l’article 181 du même code (N° Lexbase : L2990IZR) dispose que, « si le juge d'instruction estime que les faits retenus à la charge des personnes mises en examen constituent une infraction qualifiée crime par la loi, il ordonne leur mise en accusation devant la cour d'assises ».
Contraintes. Le contrôle judiciaire ou l'assignation à résidence avec surveillance électronique dont fait l'objet l'accusé continuent à produire leurs effets.
Si l'accusé est placé en détention provisoire, le mandat de dépôt décerné contre lui conserve sa force exécutoire et l'intéressé reste détenu jusqu'à son jugement par la cour d'assises, sous réserve des dispositions des deux alinéas suivants et de l'article 148-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L1744IPB).
En revanche, la détention provisoire, l'assignation à résidence avec surveillance électronique ou le contrôle judiciaire des personnes renvoyées pour délit connexe prend fin, sauf pour le juge à recourir à ordonnance distincte spécialement motivée conformément à l’article 179, alinéa 3, du Code de procédure pénale. Le délai de comparution devant la juridiction criminelle est porté à six mois.
Transmission. Le juge d'instruction transmet le dossier avec son ordonnance au procureur de la République. Celui-ci est tenu de l'envoyer sans retard au greffe de la cour d'assises. Les pièces à conviction, dont il est dressé état, sont transmises au greffe de la cour d'assises si celle-ci siège dans un autre tribunal que celui du juge d'instruction.
Appel sans recours en nullité. La particularité de l’ordonnance de mise en accusation est la possibilité pour le mis en examen de l’attaquer par la voie de l’appel.
Autorité relative de l’ordonnance de non-lieu. On a pu voir que l’ordonnance par laquelle un magistrat instructeur dit n’y avoir lieu à suivre bénéficie d’une autorité relative de chose jugée. Aux termes en effet de l’article 188 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2975IZ9), « la personne mise en examen à l'égard de laquelle le juge d'instruction a dit n'y avoir lieu à suivre ne peut plus être recherchée à l'occasion du même fait, à moins qu'il ne survienne de nouvelles charges ». L’ordonnance a autorité… jusqu’à apparition de nouvelles charges.
Monopole de la réouverture attribué au procureur : constitutionnalité. Selon l’article 190 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L4325AZ9), « il appartient au ministère public seul de décider s'il y a lieu de requérir la réouverture de l'information sur charges nouvelles ».
Généralités. La lettre du Code de procédure pénale limite l’appel à l’endroit des ordonnances de règlement. L’article 186, alinéa 1er, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2763KGG) interdit ainsi en principe l’appel par les parties privées d’une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel. L’ordonnance de mise en accusation peut en revanche être querellée par le biais de l’appel devant la chambre de l’instruction. L’article 186-2 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L4956K83) précise que « la chambre de l'instruction statue dans les quatre mois suivant la date de déclaration d'appel, faute de quoi, si la personne est détenue, elle est mise d'office en liberté ».
Enfin l’alinéa deuxième dispose que la « partie civile peut interjeter appel des ordonnances de non-informer, de non-lieu et des ordonnances faisant grief à ses intérêts civils. Toutefois, son appel ne peut, en aucun cas, porter sur une ordonnance ou sur la disposition d'une ordonnance relative à la détention de la personne mise en examen ou au contrôle judiciaire ».
Appel d’une « ORTC » complexe. Si le principe est l’interdiction de l’appel à l’endroit d’une « ORTC, » par exception l’appel est parfois ouvert. Cette ouverture est parfois le fait de la loi. Il en est ainsi des ordonnances portant correctionnalisation (C. proc. pén., art. 186-3, al. 1 N° Lexbase : L7478LPN) ou encore en cas de cosaisine, en l'absence de signature par tous les juges d'instruction cosaisis (C. proc. pén., art. 186, al. 2). Hors ces deux cas, la loi précise que « l'appel formé par la personne mise en examen ou la partie civile contre une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel est irrecevable et donne lieu à une ordonnance de non admission de l'appel par le président de la chambre de l'instruction conformément au dernier alinéa de l'article 186 ». Il en est de même s'il est allégué que l'ordonnance de règlement statue également sur une demande formée avant l'avis de fin d’information (C. proc. pén., art. 175 N° Lexbase : L7482LPS) mais à laquelle il n'a pas été répondu, ou sur une demande d’actes formée en application du 2° du IV du même article 175, alors que cette demande était irrecevable ou que le président considère qu'il n'y a pas lieu d'en saisir la chambre de l'instruction conformément à l'article 186-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L8650HWB).
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♦ Modèle ♦ pour un exemple de demande aux fins de clôture de l'instruction, téléchargez notre modèle : (N° Lexbase : X4023AMX)
La loi semble d’ailleurs imposer au juge d’instruction de rendre des comptes quant à sa gestion de l’infirmation. L’article 175-2 du Code de procédure pénale poursuit en effet en affirmant que, si deux ans après son ouverture, l'instruction n'est pas terminée, le juge rend une ordonnance motivée expliquant les raisons de cette durée, comportant les indications justifiant la poursuite de l'information et précisant les perspectives de règlement. Cette ordonnance est communiquée au président de la chambre de l'instruction qui peut, par requête, saisir cette juridiction conformément aux dispositions de l'article 221-1 du Code de procédure. Par la suite, l’ordonnance doit être renouvelée tous les six mois.
Au demeurant, la Chambre criminelle a exclu que ce texte présente le moindre caractère contraignant. Selon la Cour de cassation, l'obligation de rendre l'ordonnance prévue par l'article 175-2, alinéa 2, du Code de procédure pénale, à l'issue du délai de deux ans à compter de l'ouverture d'une information, si celle-ci n'est pas terminée, n'est pas prescrite à peine de nullité (Cass. crim., 17 janvier 2006, n° 05-82.197, F-P+F+I N° Lexbase : A6685DMK). La normativité virtuelle de l’article 175-2 du Code de procédure pénale témoigne ainsi du fait que le juge d’instruction est le véritable garde-temps de l’information judiciaire. Par conséquent, de l’avis d’information aux différentes ordonnances qu’il peut édicter, il est évident que le magistrat instructeur demeure en fin d’information le chef d’orchestre qu’il a toujours été jusqu’ici. Il en découle que « l'ordonnance prévue par l'article 175-2 du Code de procédure pénale, qui relève de la surveillance des cabinets d'instruction, est un acte d'administration judiciaire qui ne peut faire l'objet d'un quelconque recours » (Cass. crim., 15 janvier 2008, n° 07-87.460, F-P+F+I N° Lexbase : A1086D4Y).
Enfin, l'article 221-2 du Code de procédure pénale permet aux parties, lorsqu'un délai de quatre mois (ramené à deux mois pour la personne en détention provisoire) s'est écoulé depuis le dernier acte d'instruction, de saisir la chambre de l'instruction dans les conditions de l'article 173, alinéa 3, du Code de procédure pénale par déclaration au greffe. Cette juridiction pourra éventuellement dessaisir le magistrat instructeur du dossier.
Délai et notification. Il résulte de l’article 175, I, du Code de procédure pénale qu’aussitôt que l'information lui paraît terminée, le juge d'instruction communique le dossier au procureur de la République et en avise en même temps les avocats des parties ou, si elles ne sont pas assistées par un avocat, les parties. Il est ajouté que cet avis de fin d’information est notifié soit verbalement avec émargement au dossier, soit par lettre recommandée. Lorsque la personne est détenue, il peut également être notifié par les soins du chef de l'établissement pénitentiaire, qui adresse sans délai au juge d'instruction l'original ou la copie du récépissé signé par l'intéressé.
Le II de l’article 175 du Code de procédure pénale précise alors qu’une fois l’avis envoyé, le procureur de la République dispose d'un délai d'un mois si une personne mise en examen est détenue ou de trois mois dans les autres cas pour adresser ses réquisitions motivées au juge d'instruction. Copie de ce réquisitoire définitif est adressée dans le même temps par lettre recommandée aux avocats des parties ou, si elles ne sont pas assistées par un avocat, aux parties directement.
La Cour de cassation a eu à se prononcer sur le dépassement du délai de trois mois par le procureur. Pour dire n'y avoir lieu à annulation, un cour d’appel avait affirmé : « ledit réquisitoire est régulier en la forme et au fond, étant motivé et signé, que le dépassement du délai de trois mois ouvert au procureur de la République par l'article 175 du Code de procédure pénale est sans incidence sur la régularité de la procédure et que l'alinéa 6 de ce texte prévoit seulement que le juge d'instruction peut rendre l'ordonnance de règlement sans attendre de telles réquisitions ; que les juges relèvent qu'il n'existe pas d'atteinte au caractère équitable de la procédure et au principe d'égalité des armes dès lors que les parties conservent la faculté d'invoquer la nullité d'actes postérieurs à l'avis de fin d'information et disposent, en application de l'article 175, alinéa 5, du code précité, du droit d'adresser des observations complémentaires à compter de la notification du réquisitoire du procureur de la République quelle qu'en soit la date ». Selon la Chambre criminelle « en statuant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision » sans méconnaître entre autres les articles 175 du Code de procédure pénale et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme (Cass. crim., 27 mai 2015, n° 14-88.154, F-D N° Lexbase : A8124NIQ).
La jurisprudence a en outre été amenée à prendre position quant à la notification de ces réquisitions. La Cour de cassation a ainsi affirmé qu’il incombait au procureur de la République qui a transmis dans le délai ses réquisitions motivées au juge d'instruction, d'en adresser, dans le même temps, une copie aux avocats des parties (Cass. crim., 4 décembre 2007, n° 07-87.203, F-P+F+I N° Lexbase : A2915D3D). Par la suite, le Conseil constitutionnel a jugé que le principe du contradictoire et les droits de la défense interdisent que le juge puisse statuer sur le règlement de l'instruction sans que les demandes formées par le procureur aient été portées à la connaissance de toutes les parties même non représentées (Cons. const., décision n° 2011-160 QPC, 9 septembre 2011 N° Lexbase : A5328HXM). La Cour de cassation en avait alors tiré la conclusion que la communication aux parties du réquisitoire définitif du procureur de la République n'était prévue que dans le cas où elles n’étaient pas assistées ou représentées par un avocat (Cass. crim., 25 juin 2013, n° 13-82.765, P+B N° Lexbase : A3893KIZ). Ainsi, en cas de représentation, seuls les avocats étaient destinataires du réquisitoire définitif. La loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale n’avait semble-t-il pas réellement tranché en affirmant simplement que « copie de ces réquisitions est adressée dans le même temps aux parties par lettre recommandée ». La loi du 23 mars 2019 a avalisé la position de la Chambre criminelle : la copie est adressée « aux avocats des parties ou, si elles ne sont pas assistées par un avocat, aux parties ».
Surtout, la loi du 23 mars 2019 a considérablement modifié la suite de l’article 175 du Code de procédure pénale, rendant sa lecture pour le moins délicate.
Délai de préservation des droits. Désormais, aux termes du III de l’article 175 du Code de procédure pénale, dans un délai de quinze jours à compter soit de chaque interrogatoire ou audition réalisé au cours de l'information, soit de l'envoi de l'avis prévu au I de l’article 175, les parties peuvent faire connaître au juge d'instruction, selon les modalités prévues à l'avant-dernier alinéa de l'article 81 du Code de procédure pénale, qu'elles souhaitent exercer l'un ou plusieurs des droits prévus aux IV et VI du présent article. Toutefois, selon l'article D. 40-2, les demandes et observations peuvent être faites par un moyen de communication électronique selon les modalités prévues par l'article D. 591 lorsque les dispositions de cet article sont applicables à la suite du protocole passé par les chefs de la juridiction et le barreau.
L’article 175, VIII du Code de procédure pénale dispose que le délai de quinze jours s’impose également au témoin assisté. Surtout, il résulte de l'article D. 40-1 que l'avis de fin d'information adressé aux parties doit comporter une mention informant celles-ci de leur droit de demander, si elles ne l'ont pas déjà fait, à exercer l'un ou plusieurs des droits prévus aux IV et VI de l'article 175.
Évidemment, et la pratique l’a confirmé, il est opportun pour l’avocat de réserver ces droits dans le délai. Le contradictoire lié à la fin d’information est à ce prix. Se pose évidemment la question de savoir pourquoi le législateur désire priver une partie du droit au contradictoire si elle oublie malheureusement de réserver ses droits dans ce premier temps. La volonté de préserver la régularité des procédures est une chose ; diminuer les droits de la défense en est une autre. Et il est bien difficile de comprendre pourquoi dans l’esprit du législateur l’un se fait nécessairement au détriment de l’autre… Sauf évidemment à postuler que pour le Parlement, la défense est un adversaire qu’il convient de désarmer pour s’assurer d’une victoire, fût-elle déloyale car le combat fut faussé.
Il est toutefois important d'observer que le décret n° 2019-508 du 24 mai 2019 a utilement précisé (C. proc. pén., art. D. 40-1-1) que si une partie a demandé d'exercer l'un ou plusieurs des droits prévus aux IV et VI de l'article 175, les dispositions concernées de cet article sont applicables à l'ensemble des parties.
1er délai : réponse au « 175 ». Selon le IV de l’article 175 du Code de procédure pénale, si les parties ont indiqué souhaiter exercer ces droits, elles disposent, selon les cas mentionnés au II du même article, d'un même délai d'un mois ou de trois mois à compter de l'envoi de l'avis prévu au I pour adresser des observations, formuler des demandes ou présenter des requêtes. L’avis de fin d’information est évidemment significatif de clôture imminente, les parties ont donc en principe tout intérêt à solliciter le magistrat instructeur ou la chambre de l’instruction si elles estiment qu’une nullité est encourue.
Concernant ce premier délai, de manière fort prévisible, la Chambre criminelle a affirmé que l'assignation à résidence avec surveillance électronique est une mesure alternative à la détention provisoire, à laquelle elle ne peut être assimilée au cours de l'information pour le calcul de ces délais (Cass. crim., 17 mars 2015, n° 14-88.310, FS-P+B N° Lexbase : A1769NEA). De plus, sous l’empire du droit antérieur, avait déjà été jugé que le délai imparti pour présenter une requête en annulation court à compter de la notification de l'avis de fin d'information (Cass. crim., 12 mai 2010, n° 10-80.482, F-P+F N° Lexbase : A1220E3L).
A l'expiration du délai de trois mois si le mis en examen est libre, un mois s’il est détenu, les parties ne sont plus recevables à adresser de telles observations ou à formuler ou présenter de telles demandes ou requêtes. Le VIII de l’article 175 du Code de procédure pénale précise que le témoin assisté peut formuler ces observations.
2ème délai : réplique au réquisitoire définitif. En vertu de l’article 175, VI, du Code de procédure pénale, si les parties ont indiqué qu'elles souhaitaient exercer ce droit conformément au III du même article, elles disposent d'un délai de dix jours si une personne mise en examen est détenue ou d'un mois dans les autres cas pour adresser au juge d'instruction des observations complémentaires, pour répliquer aux réquisitions du procureur, et ce « à compter de la date à laquelle les réquisitions leur ont été communiquées ». Le témoin assisté a également la possibilité de répliquer en application de l’alinéa VIII de l’article 175 du Code de procédure pénale.
Il est difficile de savoir si cette précision légale, qui n’existait pas auparavant, modifiera la position de la Cour de cassation. La Chambre criminelle avait en effet construit une jurisprudence subtile permettant aux parties de bénéficier du plus longtemps possible pour répliquer. Deux situations étaient alors à distinguer. Si le procureur avait rendu et notifié son réquisitoire définitif dans les délais légaux (un ou trois mois donc), la Chambre criminelle estimait que le délai pour répliquer commençait à courir à l’issue du premier délai (1 ou 3 mois) et non à partir de la notification des réquisitions. Les délais prévus par la loi devaient donc se succéder sans se chevaucher. Cela avait pour conséquence de permettre aux parties de répliquer dans un délai de 4 mois (mis en examen libre), ou un mois et 10 jours (mis en examen détenu), à partir de la notification de l’avis de fin d’information : « le délai de dix jours ou d'un mois ouvert au ministère public et aux parties pour présenter, respectivement, des réquisitions et observations complémentaires ne commence à courir qu'à l'issue du premier délai d'un mois ou de trois mois prévu par ce texte » (Cass. crim., 15 novembre 2016 ; n° 15-86.940, FS-P+B N° Lexbase : A2270SIW ; adde Cass. crim., 17 mars 2015, n° 14-88.310, FS-P+B N° Lexbase : A1769NEA).
A l’inverse, si le réquisitoire définitif intervenait après délai, dans ce cas, le délai de réplique devait être calculé à partir de la notification des réquisitions afin de permettre aux parties de disposer du délai légal pour répondre au réquisitoire : « lorsque le juge d'instruction ayant estimé l'information terminée, le ministère public communique ses réquisitions à l'avocat d'une partie après l'expiration du délai d'un mois ou de trois mois qui lui est imparti pour le faire, le délai de dix jours ou d'un mois dont dispose cette partie pour présenter des observations complémentaires a pour point de départ la date de cette communication et est calculé, quel qu'en soit le mode, à compter du lendemain » (Cass. crim., 17 septembre 2008, n° 08-84.928, F-P+F N° Lexbase : A5076EAA) .
Reste donc à savoir si nonobstant la nouvelle précision légale, cette construction prétorienne protectrice des droits de la défense sera maintenue par la Chambre criminelle.
Actualisation jurisprudence Cass. crim., 26 janvier 2022, n° 21-86.230, F-B N° Lexbase : A67917KQ. Lorsqu’une personne mise en examen est détenue, le délai de dix jours accordé aux parties qui ont indiqué qu’elles souhaitaient exercer ce droit conformément au III de l’article 175 du Code de procédure pénale, pour adresser au juge d’instruction des observations complémentaires, court à compter de la date à laquelle les réquisitions leur ont été communiquées. |
3ème délai : réplique du procureur par réquisitions complémentaires. La loi distingue désormais dans un alinéa spécifique le cas où le procureur répond aux observations formulées par les parties dans le cadre du 1er délai. L’article 175 V du Code de procédure pénale énonce ainsi que si les parties ont adressé des observations en application du 1° du IV du même article, le procureur de la République dispose d'un délai de dix jours si une personne mise en examen est détenue ou d'un mois dans les autres cas pour adresser au juge d'instruction des réquisitions complémentaires, et ce à compter de la date à laquelle ces observations lui ont été communiquées.
Ordonnance de règlement. Le VII de l’article 175 du Code de procédure pénale dispose qu’à l'issue, selon les cas, du délai d'un mois ou de trois mois, prévu aux II et IV du même article (observations primaires des parties et réquisitions du procureur), ou du délai de dix jours ou d'un mois prévu aux V et VI (répliques), le juge d'instruction peut rendre son ordonnance de règlement. La Cour de cassation estime ici que seul un acte entrepris postérieurement « au 175 » par le juge d’instruction et destiné à la manifestation de la vérité est de nature à rendre caduque un avis de fin d’information. Et il n’en va pas ainsi d’une saisie pénale d’une créance (Cass. crim., 21 juin 2016, n° 16-81.084, F-P+B N° Lexbase : A2365RU7). En revanche, lorsque l'information est reprise ou poursuivie postérieurement à la notification de l'avis de fin d'information, le juge d'instruction doit renouveler la procédure préalable au règlement, et réitérer la communication au procureur de la République ainsi que la notification de l'avis de fin d'information aux parties (Cass. crim., 6 janvier 2015, n° 13-88.227, FS-P+B N° Lexbase : A0768M9C).
Selon l’article 385, alinéa 3, du Code de procédure pénale, lorsque l'ordonnance de renvoi du juge d'instruction a été rendue sans que les conditions prévues par l'article 175 du Code de procédure pénale aient été respectées, les parties demeurent recevables à soulever devant le tribunal correctionnel les nullités de la procédure. La jurisprudence a prima facie considéré que la nullité de l’ordonnance de renvoi pouvait être soulevée. L’irrégularité a alors eu pour effet d’amener le procureur par réquisitions supplétives à demander au juge d'instruction de régulariser la procédure (Cass. crim., 29 septembre 2010, n° 10-84.003 N° Lexbase : A4463GCB). Par la suite, la Cour de cassation a validé l’idée selon laquelle le tribunal correctionnel était valablement saisi malgré le non-respect de l’article 175 du Code de procédure pénale et pouvait simplement renvoyer l’affaire en attendant que le procureur sollicite la régularisation de la procédure auprès du juge d’instruction, et ce donc sans obtenir la nullité de l’ordonnance de renvoi (Cass. crim., 9 avril 2014, n° 14-80.470, F-D N° Lexbase : A6117MPA). Ce retour à l’orthodoxie a surtout permis à la Chambre criminelle de confirmer que le tribunal correctionnel pouvait maintenir le prévenu en détention.
Le texte de l’article 175 du Code de procédure pénale précise par ailleurs que l’ordonnance peut être rendue même si le juge n'a pas reçu de réquisitions ou d'observations dans les délais légaux. Cette mention fait écho à l’arrêt rendu par la Chambre criminelle le 20 juin 2012 (Cass. crim., 20 juin 2012, n° 12-90.017, F-D N° Lexbase : A5133IPS). Était en l’espèce soulevée la question prioritaire de constitutionnalité suivante : « L'alinéa 6 de l'article 175 du Code de procédure pénale est-il conforme à l'article 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen garantissant le droit au procès équitable et le respect des droits de la défense, en ce qu'il permet au juge d'instruction de rendre son ordonnance de règlement après l'expiration des délais prévus aux alinéas 2 et 5 de l'article 175 du Code de procédure pénale, en l'absence de réquisitions définitives du ministère public, sans en avoir préalablement informé les parties et leur avoir donné, dans ce cas également, la possibilité de présenter leurs observations ? ».
Selon la Chambre criminelle, la question est dépourvue de caractère sérieux en ce qu'aucune atteinte au principe du procès équitable ou aux droits de la défense ne saurait résulter du dispositif de l'article 175 du Code de procédure pénale, dès lors qu'il appartient aux parties, dans le délai qui leur est imparti, de prendre l'initiative de présenter au juge d'instruction leurs observations sur l'entier dossier de l'information obligatoirement mis à leur disposition. La Cour de cassation ajoute que leur droit de répliquer aux réquisitions du ministère public part du jour où elles leur sont communiquées, quel qu'en soit le moment. Enfin, c'est seulement à l'expiration de tous les délais prévus par la loi que le magistrat instructeur rend son ordonnance de règlement en précisant, conformément aux exigences posées par l'article 184 du Code de procédure pénale, les éléments à charge et à décharge concernant les personnes mises en examen, en tenant compte des observations qui lui ont été éventuellement présentées par les parties, nonobstant la carence du ministère public. Il n'y avait donc pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel.
Droit nouveau (similarité avec le droit ancien). Aux termes de l’article 175, IV, du Code de procédure pénale, il est acquis que, si elles « ont indiqué souhaiter exercer ces droits dans les conditions prévues au III, les parties disposent, selon les cas mentionnés au II, d'un même délai d'un mois ou de trois mois à compter de l'envoi de l'avis prévu au I pour :
[…]
2° Formuler des demandes ou présenter des requêtes, selon les mêmes modalités, sur le fondement du neuvième alinéa de l'article 81, des articles 82-1 et 82-3, du premier alinéa de l'article 156 et du troisième alinéa de l'article 173, sous réserve qu'elles ne soient pas irrecevables en application des articles 82-3 et 173-1 ».
Observons que ce 2° aurait pu gagner en clarté. Le texte reprend le droit ancien tel que modifié par la loi du 3 juin 2016. Sa lecture ne permet toujours pas en première intention de cerner les demandes recevables en fin d’information. Tâchons donc de clarifier ce que le législateur continue à draper du manteau de la fausse technicité.
L’article 81, alinéa 9, du Code de procédure pénale, renvoie (par renvoi !) à une demande d’examen médical, d’examen psychologique ou de toutes mesures utiles.
L’article 82-1 du Code de procédure pénale vise toute demande écrite et motivée des parties tendant à ce qu'il soit procédé à leur audition ou à leur interrogatoire, à l'audition d'un témoin, à une confrontation ou à un transport sur les lieux, à ce qu'il soit ordonné la production par l'une d'entre elles d'une pièce utile à l'information, ou à ce qu'il soit procédé à tous autres actes qui leur paraissent nécessaires à la manifestation de la vérité.
Les dispositions de l’article 82-3 du Code de procédure pénale sont relatives à une demande des parties tendant à constater la prescription de l'action publique. L’article 175 du Code de procédure pénale précise que les conditions de recevabilité ad hoc de cette demande doivent être respectées. La personne soutenant que la prescription de l'action publique était acquise au moment de sa mise en examen ou de sa première audition comme témoin assisté doit formuler sa demande dans les six mois suivant cet acte.
L’article 156 du Code de procédure pénale concerne la demande des parties tendant à ordonner une expertise.
Quant à l’article 173-1 du Code de procédure pénale, il envisage les demandes en nullité d’actes de l’instruction. Ce sont les seules demandes qu’un témoin assisté peut d’ailleurs formuler au titre de l’alinéa IV, 2° de l’article 173-1 du Code de procédure pénale (C. proc. pén., art. 173-1, alinéa VIII). Surtout, les conditions de recevabilité imposées par la loi doivent ici également être respectées : ainsi « sous peine d'irrecevabilité, la personne mise en examen doit faire état des moyens pris de la nullité des actes accomplis avant son interrogatoire de première comparution ou de cet interrogatoire lui-même dans un délai de six mois à compter de la notification de sa mise en examen, sauf dans le cas où elle n'aurait pu les connaître. Il en est de même s'agissant des moyens pris de la nullité des actes accomplis avant chacun de ses interrogatoires ultérieurs ou des actes qui lui ont été notifiés en application du présent code.
Il en est de même pour le témoin assisté à compter de sa première audition puis de ses auditions ultérieures.
Il en est de même pour la partie civile à compter de sa première audition puis de ses auditions ultérieures ».
Survie envisageable de la jurisprudence antérieure : liste exhaustive des actes. Sous l’empire de l’ancien article 175 du Code de procédure pénale, la jurisprudence s’était livrée à une lecture restrictive du texte en estimant qu’une partie ne pouvait demander un acte non-expressément visé par la loi : « en application de l'article 175, alinéa 5, du Code de procédure pénale, les parties auxquelles des réquisitions ont été communiquées ne peuvent présenter que des observations complémentaires, à l'exclusion des demandes énumérées par l'alinéa 4 de cet article et des demandes tendant à constater la prescription de l'action publique » (Cass. crim., 27 avril 2011, n° 10-87.256, F-P+B N° Lexbase : A2731HSX).
Le texte n’ayant pas évolué quant à l’objet des demandes, on peut, sans trop de risque, imaginer que cette approche se maintiendra à la lumière des « nouvelles » dispositions. A titre d’exemple, il a ainsi été estimé que le mis en examen ne saurait, sur le fondement de l'article 80-1-1 du Code de procédure pénale, demander au juge d'instruction que lui soit octroyé le statut de témoin assisté puisque cette demande ne fait pas partie des droits limitativement énumérés par l'article 175 du Code de procédure pénale (Cass. crim., 9 juin 2009, n° 09-82.269, F-P+F+I N° Lexbase : A4480EIR).
Enfin, il a été utilement précisé que lorsque le juge d'instruction se prononce sur un éventuel maintien en détention provisoire, s'il doit spécialement motiver sa décision, n'est pas pour autant tenu de répondre expressément aux observations formulées par la défense dans le cadre de l'article 175 du Code de procédure pénale (Cass. crim., 20 décembre 2017, n° 17-85.882, F-P+B N° Lexbase : A1964XAY).
Il faut enfin observer que depuis la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016, l’article 87, alinéa 4, du Code de procédure pénale dispose que, « si la contestation d'une constitution de partie civile est formée après l'envoi de l'avis de fin d'information prévu à l'article 175, elle ne peut être examinée ni par le juge d'instruction, ni, en cas d'appel, par la chambre de l'instruction, sans préjudice de son examen, en cas de renvoi, par la juridiction de jugement ». La Cour de cassation en a déduit qu’une contestation de la constitution de partie civile de l'agent judiciaire de l'État ne pouvait être examinée par les juges d'instruction après l'envoi de l'avis de fin d'information, dès lors l'ordonnance déférée ne contient pas de rejet implicite de cette contestation, et qu’elle ne revêt pas à ce titre un caractère complexe (Cass. crim., 5 décembre 2018, n° 17-84.967, FS-P+B N° Lexbase : A7830YPP).
Actualisation jurisprudence Cass. crim., 8 février 2022, n° 21-82.237, F-B |
E85143CC
En outre, et sous réserve des exigences du délai raisonnable, aucun délai n’est imposé au magistrat instructeur pour rendre son ordonnance de règlement. Aux termes de l’article 220 du Code de procédure pénale, le président de la chambre de l’instruction doit simplement s'employer « à ce que les procédures ne subissent aucun retard injustifié ».
Si la validité formelle de l’ordonnance est acquise, il en résulte par effet de la loi (C. proc. pén., art. 178, 179 et 181) que lorsqu'elle devient définitive, l'ordonnance de renvoi couvre, s'il en existe, les vices de la procédure. Ce mécanisme a été déclaré conforme à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme : « les articles 179 et 385 du Code de procédure pénale ne portent aucune atteinte au principe du procès équitable prévu par l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme dés lors que, d'une part, la défense peut contester la régularité d'une procédure d'instruction en saisissant en temps utile la chambre de l'instruction, d'autre part, en cas de pourvoi formé contre l'arrêt de cette juridiction rejetant une requête en nullité, les articles 570 et 571 dudit code ont pour seul effet d'en différer le cas échéant, l'examen jusqu'à un éventuel pourvoi contre la décision statuant sur la culpabilité, la constatation d'une irrégularité ayant nécessairement pour effet de remettre en cause la décision sur le fond » (Cass. crim., 11 juillet 2017, n° 16-83.588, FS-P+B N° Lexbase : A9827WMW).
Pareillement, il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article 179 du Code de procédure pénale en ce que ses dispositions « destinées à éviter une remise en cause tardive de l'information de nature à fragiliser les procédures, sont justifiées par l'objectif à valeur constitutionnelle de bonne administration de la justice, et alors qu'au surplus, d'une part, la chambre de l'instruction a le pouvoir de relever d'office tout moyen de nullité à l'occasion de l'examen de la régularité des procédures qui lui sont soumises, et, d'autre part, la personne mise en examen a toujours la faculté de contester la valeur probante des pièces de procédure devant la juridiction de jugement » (Cass. crim., 12 février 2013, n° 12-90.072, F-D N° Lexbase : A4388I8Z).
Autorité relative et citation directe. Se pose inexorablement la question de l’autorité d’une telle ordonnance. Il est tout d’abord acquis que l'ordonnance de non-lieu dont bénéficie un mis en cause quant aux infractions pénales est sans autorité sur sa qualité de civilement responsable (Cass. crim., 15 mars 1982, n° 80-90.031 N° Lexbase : A5420CH9). A cet égard, il a été affirmé que l'appel formé par la partie civile contre une ordonnance de non-lieu du juge d'instruction a pour effet de remettre en question devant la chambre de l'instruction le sort de l'action publique (Cass. crim., 17 septembre 2003, n° 02-87.391, F-P+F N° Lexbase : A6727C9Z). Cette précision est d’importance car il s’agit de la seule voie de recours pouvant être intentée par la partie civile et ayant pour effet (objet ?) de remettre en cause le sort réservé à la culpabilité.
Sur le plan pénal, aux termes de l’article 188 du Code de procédure pénale, « la personne mise en examen à l'égard de laquelle le juge d'instruction a dit n'y avoir lieu à suivre ne peut plus être recherchée à l'occasion du même fait, à moins qu'il ne survienne de nouvelles charges ». L’autorité est donc relative puisque, en cas de découvertes d’éléments nouveaux, l’information peut être reprise. Sauf charges nouvelles, l’identité de faits et de personnes rend l’ordonnance de non-lieu définitive. La question de l’étendue de l’autorité est d’importance puisqu’elle conditionne, outre l’ouverture d’une nouvelle information, la possibilité pour un plaignant de citer directement un individu devant le tribunal correctionnel.
La Chambre criminelle considère que cette autorité bénéficie de manière générale aux mis en cause (Cass. crim., 26 février 2008, n° 07-87.865, F-P+F N° Lexbase : A4129D73). Outre évidemment le mis en examen, il en va ainsi des personnes nommément désignées dans une plainte avec constitution de partie civile (Cass. crim., 14 juin 1994, n° 94-81.675 N° Lexbase : A8766ABB ; Cass. crim., 22 janvier 1997, n° 96-80.533 N° Lexbase : A1107ACY), des personnes désignées dans un réquisitoire introductif ou supplétif et toutes celles entendues en tant que témoin assisté (Cass. crim., 12 novembre 2008, n° 07-88.222, F-P+F N° Lexbase : A2481EBI). La Cour de cassation a fini par affirmer que cette autorité, susceptible de rendre irrecevable une citation directe, peut être invoquée par toute personne ayant fait l’objet « d'une mise en cause explicite » (Cass. crim., 2 décembre 2008, n° 08-80.066, F-P+F N° Lexbase : A1633ECH). Tel est le cas en l’espèce d’un préfet ayant été mis en cause dans une plainte avec constitution de partie civile sans pourtant être nommé. L’ordonnance de non-lieu rendue dans le cadre d’un instruction ouverture du chef d’homicide et blessures involontaires, en raison d’un grave éboulement, fait alors échec à sa citation devant la juridiction correctionnelle.
Autorité, citation directe et requalification. Évidemment, on ne saurait, pour faire échec à l’autorité de chose jugée, procéder à une requalification des faits pour lesquels une ordonnance de non-lieu a été rendue. La Chambre criminelle l’a explicitement rappelé dans une décision en date du 24 janvier 2001 (Cass. crim., 24 janvier 2001, n° 00-84.408, inédit N° Lexbase : A4569CZA).
En l’espèce, une plainte avec constitution de partie civile fut déposée à l’endroit du maire de la commune de La Flotte en Ré, pour concussion par recouvrement de participations financières lors de la délivrance d'un permis de construire. Cette plainte a fait l'objet d'une ordonnance de non-lieu confirmée en appel, au motif que l'erreur de droit qu'avait pu commettre le maire ne pouvait constituer le délit de concussion. Or, plus tard, le même plaignant fit citer directement le maire devant le tribunal correctionnel notamment pour escroquerie. Pour retenir l'exception d'autorité de chose jugée et déclarer l'action civile irrecevable, la juridiction du second degré énonce qu'il existe bien une identité d'objet, de cause et de parties entre les deux procédures précitées en ce qui concerne les faits visés par l'infraction de concussion dénoncée par la partie civile, qu'il est à nouveau invoqué que le maire aurait, en toute connaissance de cause, poursuivi le recouvrement de taxes qu'il savait n'être pas dues et que, pour cela, il aurait accompli des manœuvres frauduleuses assimilables à l'escroquerie. |
Absence d’autorité : témoin, personne non mise en cause, et faits distincts. En revanche, l’ordonnance de non-lieu ne saurait bénéficier au simple témoin qui n'a été ni visé dans la plainte ni mis en examen quand bien même le juge d’instruction aurait, dans son ordonnance de renvoi, dit n’y avoir lieu à suivre « contre quiconque » (Cass. crim., 22 janvier 1997, n° 96-80.533 N° Lexbase : A1107ACY). Il en va pareillement si le juge a implicitement dit n'y avoir lieu à suivre « contre tous autres » (Cass. crim., 31 mars 1998, n° 97-82.257 N° Lexbase : A5200ACL).
Enfin, puisque l’identité de faits est l’autre condition de l’autorité de chose jugée attachée à une ordonnance de non-lieu, une information peut être ouverte à raison de faits distincts. La Cour de cassation en a fait l’illustration dans une célère affaire liée à la mort d’une princesse anglaise à Paris. Ici, le procureur de la République avait dans un premier temps requis l'ouverture d'une information des chefs de non-assistance à personne en danger à l'égard de sept photographes, et d'homicides et de blessures involontaires contre personne non dénommée. Bien que dix personnes aient été mises en examen des chefs d'homicides involontaires, blessures involontaires et non-assistance à personne en péril, le 3 septembre 1999, les juges d'instruction prononcèrent un non-lieu au motif que l'accident survenu le 31 août 1997 « ne résultait pas d'un acte volontaire mais des imprudences commises par le conducteur du véhicule et que ni les infractions d'homicides et blessures involontaires visées ni aucune autre qualification pénale n'étaient susceptibles d'être relevées ». Le pourvoi intenté par les parties civiles fut rejeté par la Cour de cassation. Cinq ans plus tard, un des plaignants se constituait à nouveau partie civile contre personne non dénommée, du chef d'assassinat commis sur son fils. Le juge d'instruction déclarait la plainte irrecevable en raison de l'autorité de la chose jugée, décision confirmée par la cour d’appel. Au visa des articles 188 et 190 du Code de procédure pénale, la Cour de cassation censurait les juges du fond. Après avoir rappelé en amorce que ces dispositions « ne s'appliquent pas lorsque les faits dénoncés par une nouvelle plainte sont distincts de ceux qui ont fait l'objet d'une autre procédure clôturée par une décision de non-lieu », la Chambre criminelle affirme « que les faits dénoncés sous la qualification d'assassinat n'étaient pas identiques, à ceux qui avaient fait l'objet de la précédente information ». Par conséquent, l’ordonnance de non-lieu n’avait aucune autorité de chose jugée quant aux faits nouvellement dénoncés (Cass. crim. 3 février 2010, n° 09-82.864, F-D N° Lexbase : A4545ES7 ; Cass. crim., 3 février 2010, n°09-82.865, F-D N° Lexbase : A4545ES7).
Effets du non-lieu. Les personnes mises en examen qui sont provisoirement détenues sont fort naturellement mises en liberté. L'ordonnance met similairement fin au contrôle judiciaire en application de l’article 177 du Code de procédure pénale. A cet égard, la Chambre criminelle a affirmé que même si une chambre de l’instruction infirme une ordonnance de non-lieu, elle ne peut « maintenir » le mis en examen sous contrôle judiciaire jusqu’au jugement, et ce après avoir évoqué. Puisque l'ordonnance de non-lieu met fin au contrôle judiciaire du mis en examen, le contrôle judiciaire ne saurait être maintenu (Cass. crim., 27 mars 2008, n° 07-86.261, F-P+F N° Lexbase : A9805D7B ; adde Cass. crim., 24 avril 2013, n° 12-82.409, F-P+B N° Lexbase : A5098KD8). Comme l’a précisé par la suite la Cour, en cas d'infirmation, existe simplement la possibilité pour la chambre de l'instruction de prononcer à nouveau une telle mesure (Cass. crim., 20 juin 2017, n° 17-82.215, F-D N° Lexbase : A1016WKT).
Surtout, il résulte des dispositions de l’article 188 du Code de procédure pénale que « la personne mise en examen à l'égard de laquelle le juge d'instruction a dit n'y avoir lieu à suivre ne peut plus être recherchée à l'occasion du même fait, à moins qu'il ne survienne de nouvelles charges ». L’autorité relative de la décision de non-lieu est ici patente puisque la découverte de charges nouvelles permet de rouvrir l’information judiciaire.
Autres effets. Lors d’un non-lieu, le juge doit statuer par la même ordonnance sur la restitution des objets placés sous main de justice. Il peut opportunément la refuser si celle-ci présente un danger pour les personnes ou les biens. En ce que cette décision est susceptible de causer un grief, l’article 177 du Code de procédure pénale indique qu’elle peut être déférée à la chambre de l'instruction. Enfin, aux termes de l’article 177-1 du Code de procédure pénale, le juge d'instruction peut ordonner, d'office ou à la demande de l'intéressé soit la publication intégrale ou partielle de la décision de non-lieu, soit la publication d'un communiqué. L'ordonnance de refus, également susceptible d'appel, doit être motivée.
Amende civile. Le non-lieu à l'issue d'une information ouverte sur constitution de partie civile, considérée comme abusive ou dilatoire, peut conduire le juge d'instruction, à prononcer contre la partie civile une amende civile ne pouvant excéder 15 000 euros en vertu de l’article 177-2 du Code de procédure pénale. La loi employant le terme « peut », il est logique que la jurisprudence estime que le prononcé de l'amende civile, contre la partie civile poursuivante relève pour le juge d'une simple faculté (Cass. crim., 26 février 2002, n° 01-82.579, F-P+F N° Lexbase : A2299AYS). Pour la Cour de cassation, une condamnation pour dénonciation calomnieuse peut être prononcée à l’endroit de celui qui a déjà été judiciairement contraint à payer une amende civile au visa de l’article 177-2 du Code procédure pénale, sans méconnaître la règle non bis in idem, prévue à l'article 4 du Protocole n° 7 additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (N° Lexbase : L4679LAK). Les intérêts protégés respectivement par les articles 177-2 du Code de procédure pénale et 226-10 du Code pénal sont distincts, le premier sanctionnant une atteinte à une bonne administration de la justice tandis que le second réprime un comportement destiné à nuire à autrui (Cass. crim., 22 septembre 2015, n° 14-84.029, F-P+B N° Lexbase : A8242NPX). La Cour de cassation estime cependant qu’il se déduit de l’article 177-2 du Code de procédure pénale que la juridiction d’instruction qui prononce une condamnation à une amende civile doit motiver sa décision en tenant compte des ressources et des charges du plaignant (Cass. crim., 5 septembre 2018, n° 17-84.980, FS-P+B N° Lexbase : A7116X3X).
L’alinéa 2 de l’article 177-2 du Code de procédure pénale ajoute que cette décision ne peut intervenir qu'à l'issue d'un délai de vingt jours à compter de la communication des réquisitions du procureur général à la partie civile et à son avocat, par lettre recommandée ou par télécopie avec récépissé (pour la chambre de l’instruction v. C. proc. pén., art. 212-2, et Cass. crim., 9 janvier 2007, n° 06-84.064, F-P+F N° Lexbase : A6974DTH). L'article 177-2 du Code de procédure pénale n'exige pas pour autant que la condamnation soit précédée d'un débat contradictoire, ce qu’a confirmé la Chambre criminelle en 2004 (Cass. crim., 9 novembre 2004, n° 04-81.068, F-P+F N° Lexbase : A9383DDU).
Cette décision peut être frappée d'appel par la partie civile dans les mêmes conditions que l'ordonnance de non-lieu. Selon la Chambre criminelle, du moment que l'ordonnance confirmée a été rendue, conformément aux prescriptions de l'article 177-2 du Code de procédure pénale, à l'issue d'un délai de vingt jours à compter de la communication à la partie civile des réquisitions prises par le procureur de la République, une chambre de l'instruction, n'avait pas à faire application de l'article 212-2 du même code, relatif au caractère abusif d'une constitution de partie civile (Cass. crim., 5 novembre 2014, n° 13-84.956, F-P+B N° Lexbase : A9268MZB). Il faut donc en conclure que la procédure de l’article 212-2 du Code de procédure pénale (très proche au demeurant de celle prévue à l’article 177-2 du Code de procédure pénale) ne s’impose que si l’amende civile n’a pas été prononcée par le juge d’instruction, et relève donc d’une initiative de la chambre.
L’appel est également ouvert au procureur de la République si le juge d'instruction ne suit pas ses réquisitions.
La loi n° 2015-993 du 17 août 2015 portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne a inséré un nouvel article 183-1 dans le Code de procédure pénale aux termes duquel : « à la demande de la victime qui a déposé plainte sans s'être toutefois constituée partie civile, l'ordonnance de non-lieu, une fois devenue définitive, est portée à sa connaissance par tout moyen ».
Dommages et intérêts. En vertu de l’article 91 du Code de procédure pénale, quand, après une information ouverte sur constitution de partie civile, une décision de non-lieu a été rendue, la personne mise en examen et toutes personnes visées dans la plainte, et sans préjudice d'une poursuite pour dénonciation calomnieuse, peuvent, si elles n'usent de la voie civile, demander des dommages-intérêts au plaignant devant la juridiction répressive. L'action en dommages-intérêts doit être introduite dans les trois mois du jour où l'ordonnance de non-lieu est devenue définitive, par voie de citation devant le tribunal correctionnel où l'affaire a été instruite. Ce tribunal est immédiatement saisi du dossier de l'information terminée par une ordonnance de non-lieu, en vue de sa communication aux parties. Si les débats ont lieu en chambre du conseil, les parties, ou leurs conseils, et le ministère public étant alors entendus, le jugement est quant à lui rendu en audience publique. Les voies de recours classiques sont ici ouvertes aux parties.
En cas de condamnation, le tribunal peut ordonner la publication intégrale ou par extraits de son jugement dans un ou plusieurs journaux qu'il désigne, aux frais du condamné (après avoir fixé le coût maximum de chaque insertion).
Surtout, la loi ajoute que lorsqu'une décision définitive rendue en application de l'article 177-2 du Code de procédure pénale a déclaré que la constitution de partie civile était abusive ou dilatoire, cette décision s'impose au tribunal correctionnel saisi dans les conditions prévues aux alinéas précédents. Par conséquent, tout arrêt rejetant les conclusions d’une telle décision s’exposerait à la cassation (Cass. crim., 2 mai 2012, n° 11-85.120, F-P+B N° Lexbase : A0763IM9 : v. M. Sanchez, Chronique de procédure pénale, juin 2012 N° Lexbase : N2744BTS).
Surtout, la loi n° 2008-174 du 25 février 2008 a créé un cadre spécifique de règlement en cas de trouble mental : l'ordonnance d'irresponsabilité pénale qui relève du juge d'instruction (C. proc. pén., art. 706-120), ou l'arrêt de déclaration d'irresponsabilité pénale qui ressort à la chambre de l'instruction (C. proc. pén., art. 706-124 : pour une analyse différentielle de ces procédures v. S. Detraz, La création d'une nouvelle décision de règlement de l'instruction : la décision d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, RSC, 2008, p. 873). La situation visée par la loi est la suivante : malgré l'existence de charges suffisantes à l'encontre d'une personne, cette dernière doit être déclarée irresponsable en raison de troubles psychiques ou neuropsychiques ayant aboli son discernement conformément à l’article 122-1 du Code pénal.
A l’inverse, l'ordonnance de transmission de pièces dans le cadre de la saisine de la chambre de l’instruction ne met pas fin à la détention provisoire ou au contrôle judiciaire, qui se poursuit jusqu'à l'audience de la chambre de l'instruction. Le juge a néanmoins la possibilité, par ordonnance distincte, d'ordonner la mise en liberté ou la levée du contrôle judiciaire. S'il n'a pas été mis fin à la détention provisoire, la chambre de l'instruction a l’obligation de statuer dans un délai de six mois en matière criminelle ou quatre mois en matière correctionnelle à compter de la date de l'ordonnance de transmission de pièces. A défaut, la personne mise en examen est remise en liberté si elle n'est évidemment pas détenue pour une autre cause.
Chambre de l’instruction : décision. Trois options sont alors ouvertes à la chambre de l’instruction. Si elle estime qu'il n'existe pas de charges suffisantes contre la personne mise en examen d'avoir commis les faits qui lui sont reprochés, la chambre de l'instruction déclare, conformément à l’article 706-123 du Code de procédure pénale, qu'il n'y a lieu à suivre. En revanche, l’article 706-124 du Code de procédure pénale dispose que, si elle estime qu'il existe des charges suffisantes contre la personne mise en examen d'avoir commis les faits qui lui sont reprochés et que le premier alinéa de l'article 122-1 du Code pénal n'est pas applicable, la chambre de l'instruction ordonne le renvoi de la personne devant la juridiction de jugement compétente.
Dans les autres cas, la chambre de l'instruction rend en application de l’article 706-125 du Code de procédure pénale un arrêt de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental. Cet arrêt met fin à la détention provisoire ou au contrôle judiciaire en vertu de l’article 706-126 du Code de procédure pénale. Il peut en outre faire l'objet d'un pourvoi en cassation.
Surtout, par cet arrêt de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, la chambre de l’instruction :
La chambre peut également ordonner à l'encontre de la personne les mesures de sûreté prévues à l’article 706-136 du Code de procédure pénale, pendant une durée qu'elle fixe et qui ne peut excéder dix ans en matière correctionnelle et vingt ans si les faits commis constituent un crime ou un délit puni de dix ans d'emprisonnement. Ces mesures sont les suivantes :
1° Interdiction d'entrer en relation avec la victime de l'infraction ou certaines personnes ou catégories de personnes, et notamment les mineurs, spécialement désignées ;
2° Interdiction de paraître dans tout lieu spécialement désigné ;
3° Interdiction de détenir ou de porter une arme ;
4° Interdiction d'exercer une activité professionnelle ou bénévole spécialement désignée, dans l'exercice de laquelle ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise ou impliquant un contact habituel avec les mineurs, sans faire préalablement l'objet d'un examen psychiatrique déclarant la personne apte à exercer cette activité ;
5° Suspension du permis de conduire ;
6° Annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis.
Deux précisions sont formulées par la loi : ces interdictions ne peuvent être prononcées qu'après une expertise psychiatrique et ne doivent pas constituer un obstacle aux soins dont la personne est susceptible de faire l'objet. Enfin, si la personne est hospitalisée en application des articles L. 3213-1 et L. 3213-7 du Code de la santé publique, les interdictions dont elle fait l'objet sont applicables pendant la durée de l'hospitalisation et se poursuivent après la levée de cette hospitalisation, pendant la durée fixée par la décision.
Évidemment, la nature de ces mesures a pu interroger. A telle enseigne d’ailleurs que la Cour de cassation a pu dire tout et son contraire quant à leur application dans le temps cette application dépendant, on le sait, de la nature des lois pénales en conflit (v. ainsi Cass. crim., 21 janvier 2009, n° 08-83.492, F-P+F [LXB=6539EC8] ; contra v. Cass. crim., 16 décembre 2009, n° 09-85.153, FP-P+F N° Lexbase : A7290EPP ; dans le même sens CEDH, 3 septembre 2015, Req. 42875/10, Berland c/ France N° Lexbase : A3760NNL).
Or ces « mesures » rappellent à s’y méprendre les peines complémentaires mentionnées à l’article 131-10 du Code pénal, ou les obligations ou interdictions prononcées dans le cadre d’un sursis avec mise à l’épreuve (C. pén., art. 132-44 et 132-45). Que ces mesures soient indexées sur la dangerosité et tournées vers la prévention de la récidive ne change selon nous rien à la réponse. Les peines prennent évidemment en considération ces mêmes critères fussent-ils nommés « personnalité » et prévention de « la commission de nouvelles infractions ». N’oublions pas en effet qu’aux termes de l’article 130-1 du Code pénal, la peine a pour fonctions de sanctionner l'auteur de l'infraction et de favoriser son amendement, son insertion ou sa réinsertion. En ce que les réponses apportées au comportement de celui dont le discernement est aboli sont ab initio causées par la suspicion d’une infraction qualifiée à ce stade de la procédure de « charges suffisantes », elles ne devraient échapper à la qualification de sanctions pénales fussent-elles plus ou moins « déguisées ».
Concluons avez Nietzsche : « Pendant la plus longue période de l’histoire humaine, ce ne fut absolument pas parce que l’on tenait le malfaiteur pour responsable de son acte qu’on le punissait ; on n’admettait donc pas que seul le coupable devait être puni : - on punissait plutôt comme aujourd’hui encore les parents punissent leurs enfants, poussés par la colère qu’excite un dommage causé et qui tombe sur l’auteur du dommage, - mais cette colère est maintenue dans certaines limites et modifiée par l’idée que tout dommage trouve quelque part son équivalent, qu’il est susceptible d’être compensé, fût-ce même par une douleur que subirait l’auteur du dommage. D’où a-t-elle tiré sa puissance, cette idée primordiale, si profondément enracinée ? cette idée peut-être indestructible, aujourd’hui que le dommage et la douleur sont des équivalents ? Je l’ai déjà révélé plus haut : des rapports de contrats entre créanciers et débiteurs qui apparaissent aussitôt qu’il existe des « sujets de droit », des rapports qui, à leur tour, ramènent aux formes primitives de l’achat, de la vente, de l’échange, du trafic en un mot » (F. Nietzsche, Généalogie de la morale, « 2ème dissertation », § 4).
Il résulte des dispositions combinées des articles 82, 179 et 207 du Code de procédure pénale que le juge d'instruction est tenu de statuer, par une ordonnance motivée sur les réquisitions de maintien en détention provisoire du mis en examen dont il ordonne le renvoi devant le tribunal correctionnel. A défaut d'une telle ordonnance, la Chambre criminelle estime, praeter legem, que le procureur de la République peut, dans les dix jours, saisir directement la chambre de l'instruction (Cass. crim., 9 juillet 2014, n° 14-82.761, F-P+B+I N° Lexbase : A4138MUS). En l'espèce, un mis en examen détenu fut renvoyé devant le tribunal correctionnel du chef de violences aggravées en récidive. Le juge d'instruction n'avait cependant pas statué, par ordonnance distincte, sur les réquisitions de maintien en détention du mis en examen prises par le procureur de la République. Ce dernier saisit directement la chambre de l'instruction mais sa requête fut rejetée motif pris qu'aucune disposition de procédure pénale ne leur permet d'ordonner, après le renvoi du mis en examen, devant le tribunal correctionnel, le placement en détention de ce dernier. La Cour leur donne donc tort au prix d’une lecture combinée des articles 82, 179 et 207 du Code de procédure pénale bien qu’aucun de ces textes ne porte trace d’une telle possibilité.
Concernant l’ordonnance spéciale de maintien en détention, la Cour de cassation a considéré que la question portant sur la constitutionnalité de la possibilité pour le juge d'instruction, de décider, sans débat contradictoire, par une ordonnance distincte spécialement motivée, de maintenir le prévenu en détention provisoire, n'était pas sérieuse. Elle a donc refusé de renvoyer une question prioritaire de constitutionnalité sur ce point au Conseil constitutionnel (Cass. crim., 15 février 2011, n° 10-90.122, F-P+B N° Lexbase : A7438GZI). L’argumentation de la Cour de cassation fut la suivante : « l'application des dispositions contestées de l'article 179 du Code de procédure pénale intervient après que le juge d'instruction auquel l'information paraît terminée a délivré, en application de l'article 175 du même code, l'avis prévu par cet article, le mis en examen pouvant ensuite présenter des observations, de sa propre initiative ou après les réquisitions du procureur de la République ; qu'ainsi, la défense peut soumettre son argumentation au juge avant que celui-ci ne prenne sa décision sur un éventuel maintien en détention de la personne renvoyée devant le tribunal correctionnel ; qu'il résulte de ces dispositions que, contrairement à ce que soutient le demandeur, les principes constitutionnels » de droits de la défense, d'accès effectif à un juge et à un procès équitable, principes qui résultent de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, « ne sont à l'évidence pas méconnus par la procédure en vigueur ».
La loi exige que l'ordonnance de maintien en détention provisoire soit exclusivement motivée par référence aux 2°, 4°, 5° et 6° de l'article 144 du Code de procédure pénale. La détention doit ainsi constituer l’unique moyen d’empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille, de protéger la personne mise en examen, de garantir le maintien de la personne mise en examen à la disposition de la justice, ou encore de mettre fin à l'infraction ou prévenir son renouvellement. Au demeurant, le prévenu en détention est immédiatement remis en liberté si le tribunal correctionnel n'a pas commencé à examiner au fond à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la date soit de l'ordonnance de renvoi ou, en cas d'appel, de l'arrêt de renvoi non frappé de pourvoi, de l'arrêt déclarant l'appel irrecevable, de l'ordonnance de non-admission rendue en application du dernier alinéa de l'article 186 du Code de procédure pénale ou de l'arrêt de la Chambre criminelle rejetant le pourvoi, soit de la date à laquelle il a été ultérieurement placé en détention provisoire.
Toutefois, si l'audience sur le fond ne peut se tenir avant l'expiration de ce délai, le tribunal peut, à titre exceptionnel, par une décision mentionnant les raisons de fait ou de droit faisant obstacle au jugement de l'affaire, ordonner la prolongation de la détention pour une nouvelle durée de deux mois. La comparution personnelle du prévenu est alors de droit si lui-même ou son avocat en font la demande. Cette décision peut être renouvelée une fois dans les mêmes formes. Si le prévenu n'a toujours pas été jugé à l'issue de cette nouvelle prolongation, il est remis immédiatement en liberté. Il résulte de la jurisprudence de la Chambre criminelle que ces délais imposés par la loi ne concernent toutefois pas la chambre de l’instruction lorsqu’elle est saisie par le mis en examen, maintenu en détention par une ordonnance distincte, de l'appel de la seule ordonnance le renvoyant devant le tribunal correctionnel. Cela a deux conséquences. Tout d’abord, la chambre de l'instruction qui déclare cet appel irrecevable et ordonne le maintien en détention provisoire de l'appelant, n'a ni à en fixer la durée, ni à en ordonner la prolongation à l'issue d'un délai de deux mois. Ensuite, le délai de comparution du prévenu devant le tribunal correctionnel, prévu par l'article 179, alinéa 4 du Code de procédure pénale, ne commence à courir qu'à partir du jour où l'ordonnance de renvoi est devenue définitive (Cass. crim., 19 mars 2014, n° 13-88.586, F-P+B+I N° Lexbase : A0788MHN).
La constitutionnalité de l’encadrement des recours en nullité au cours de l’information judiciaire fut interrogée à la lueur des articles 7, 9 et 16 de la Déclaration des droits de l'Homme de 1789. Pour s’opposer au renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité, la Cour a ainsi expliqué le défaut de sérieux de la question posée : « les dispositions contestées, qui sont destinées à éviter une remise en cause tardive de l'information de nature à fragiliser les procédures, étant justifiées par l'objectif à valeur constitutionnelle de bonne administration de la justice et ne portant pas atteinte aux droits de la défense, dès lors que, d'une part, la chambre de l'instruction a le pouvoir de relever d'office tout moyen de nullité à l'occasion de l'examen de la régularité des procédures qui lui sont soumises, d'autre part, la personne mise en examen a toujours la faculté de contester la valeur probante des pièces de procédure devant la juridiction de jugement » (Cass. crim., 2 octobre 2013, n° 13-85.036, F-D N° Lexbase : A3263KMS).
Le renvoi au parquet pour saisine de la juridiction d’instruction s’impose ainsi si le tribunal correctionnel constate que le prévenu n'a pas fait l'objet d'une mise en examen (Cass. crim. 15 septembre 2004, n° 04-83.670, F-P+F+I N° Lexbase : A5814DDP). Il en est de même si l’ordonnance de renvoi fait référence à des pièces annulées par la chambre de l'instruction (Cass. crim., 13 juin 2019, n° 19-82.32, FS-P+B+I N° Lexbase : A5815ZE4). Cette dernière décision a d’ailleurs le mérite de rappeler que le texte n’autorise pas le tribunal à annuler l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel : « les juridictions de jugement n'ont pas qualité pour annuler l'ordonnance de renvoi ». La Cour de cassation ajoute qu’une « telle impossibilité n'est pas susceptible de porter atteinte aux droits de la défense, dès lors que, par application de l'article 174, dernier alinéa, du Code de procédure pénale, aucune condamnation ne peut être prononcée sur le fondement d'actes ou de pièces annulés » (pour une hésitation v. Cass. crim., 5 mars 2003, n° 01-87.045, F-P+F N° Lexbase : A4243A7B). Cette absence de nullité n’est pas sans incidence puisque, malgré le renvoi de la procédure au ministère public pour lui permettre de saisir à nouveau la juridiction d'instruction aux fins de régularisation, les actes faits en application de ladite ordonnance demeurent valables selon la Chambre criminelle. Un mandement de citation est donc susceptible d’interrompre la prescription de l’action publique (Cass. crim., 1er octobre 2013, n° 12-83.143, F-P+B N° Lexbase : A3275KMA). Il en résulte également que le tribunal n’est pas dessaisi par le renvoi ; il demeure donc compétent pour se prononcer sur l’éventuelle détention provisoire (Cass. crim., 21 février 2007, n° 06-89.043, F-P+F N° Lexbase : A4241DUM). Pareillement, la décision de la cour d’appel de renvoyer la procédure au ministère public, aux fins de régularisation, dans les cas prévus par l'article 385, alinéa 2, du Code de procédure pénale n'implique pas son dessaisissement. Cette fois-ci, il lui appartient, si le jugement est annulé pour violation ou omission non réparée des formes prescrites par la loi à peine de nullité, d'évoquer, de renvoyer au fond à une audience ultérieure, en application de l'article 520 du même code, et de prononcer, le cas échéant, sur le maintien en détention du prévenu (Cass. crim., 3 mars 2015, n° 14-88.472, F-P+B N° Lexbase : A3361NDT, Dalloz actualité, 3 avril 2015, note S. Fucini).
Si l’irrégularité de l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel est constatée par la chambre des appels correctionnels, elle ne peut évoquer en vertu de l’article 520 du Code de procédure pénale : elle doit conformément à l’article 385, alinéa 2, du Code de procédure pénale renvoyer la procédure au ministère public pour lui permettre de saisir à nouveau la juridiction d'instruction (Cass. crim., 20 octobre 1998, n° 97-81.276 N° Lexbase : A5184ACY). La Chambre criminelle a par ailleurs estimé que les dispositions de l’article 385, alinéa 2, du Code de procédure pénale devaient être étendues aux juridictions pour mineurs saisies par ordonnance de renvoi du juge des enfants. Il en résulte qu’une cour d'appel, en sa chambre spéciale des mineurs, ne peut constater la nullité de l'ordonnance de renvoi du juge des enfants et décider de renvoyer directement l'affaire à ce magistrat. En effet, seul le ministère public est alors habilité à saisir le juge des enfants à cet effet (Cass. crim., 7 octobre 1997, n° 96-85.599 N° Lexbase : A1347ACU).
A la question de savoir quel sort devait être réservé à une ordonnance n’ayant pas statué sur certains des faits dont le juge d’instruction fut régulièrement saisi, la jurisprudence a pu varier dans sa réponse. La Cour de cassation a tout d’abord affirmé que, cette question n'entrait pas dans les prévisions des articles 184 et 385, alinéa 2, du Code de procédure pénale. Une cour d’appel méconnaissait alors ces dispositions en annulant une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel pour ce motif et en renvoyant le dossier de la procédure au ministère public pour lui permettre de saisir à nouveau le juge d'instruction afin de régulariser la procédure (Cass. crim., 22 janvier 2003, n° 01-87.297, FS-P+F N° Lexbase : A0018A7S). La Cour de cassation a par la suite infléchi sa position : « la juridiction de jugement, qui constate que le juge d'instruction n'a pas statué, comme il en a le devoir, dans son ordonnance de renvoi, sur tous les faits dont il est saisi, si elle n'est pas autorisée par la loi à annuler ladite ordonnance, a néanmoins la faculté de renvoyer l'examen de l'affaire à une audience ultérieure et de transmettre le dossier de la procédure au ministère public, habilité à saisir le juge d'instruction de toutes réquisitions appropriées visant les faits sur lesquels il n'a pas été statué dans l'ordonnance de règlement » (Cass. crim., 4 mars 2004, n° 03-85.983, FP-P+F+I N° Lexbase : A6103DBN). Par conséquent, désormais, un juge d’instruction ne peut refuser de faire droit aux réquisitions du ministère public si le tribunal correctionnel a renvoyé la procédure aux fins de régularisation au motif que le magistrat instructeur n’aurait pas vidé sa saisine (Cass. crim., 21 novembre 2007, n° 07-85.922, F-P+F+I N° Lexbase : A0501D3X).
Actualisation de jurisprudence Const. const., décision n° 2023-1062 QPC, du 28 septembre 2023 N° Lexbase : Z1975628 : par cette décision, le Conseil constitutionnel a partiellement censuré l'alinéa 1 de l'article 385 du Code de procédure pénale. Lorsque des faits sont renvoyés devant le tribunal correctionnel à la suite d’une instruction l’absence d’exception au mécanisme de purge des nullités dans le cas où le prévenu n’a pu avoir connaissance de l’irrégularité avant la clôture de l’instruction méconnait le droit à un recours juridictionnel effectif et les droits de la défense. L'abrogation des mots « sauf lorsqu’il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d’instruction ou la chambre de l’instruction » est reportée au 1er octobre 2024. Jusqu’à l’entrée en vigueur d’une nouvelle loi ou, au plus tard, au 1er octobre 2024, la déclaration d’inconstitutionnalité pourra être invoquée dans les instances en cours ou à venir lorsque la purge des nullités a été ou est opposée à un moyen de nullité qui n’a pu être connu avant la clôture de l’instruction. |
Pour finir, précisons que toute ordonnance renvoyant le mis en examen devant les tribunaux de police ou correctionnel l'informe en application de l’article 179-1 du Code de procédure pénale, qu'il doit signaler par lettre recommandée avec accusé de réception auprès du procureur, jusqu'au jugement définitif, tout changement d'adresse, et que toute citation, notification ou signification faite à la dernière adresse déclarée sera réputée faite à sa personne.
Surtout ces dispositions vont de pair avec l’article 469, alinéa 4, du Code de procédure pénale. Le 1er alinéa permet certes au tribunal correctionnel, s’il estime que le fait déféré sous la qualification de délit est de nature à entraîner une peine criminelle, de renvoyer le ministère public à se pourvoir ainsi qu'il avisera. Toutefois, l’alinéa 4 ajoute : « lorsqu'il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d'instruction ou la chambre de l'instruction, le tribunal correctionnel ne peut pas faire application, d'office ou à la demande des parties, des dispositions du premier alinéa, si la victime était constituée partie civile et était assistée d'un avocat lorsque ce renvoi a été ordonné ». Le texte réserve toutefois le cas de poursuites exercées pour un délit non intentionnel s'il résulte des débats que les faits sont de nature à entraîner une peine criminelle parce qu'ils ont été commis de façon intentionnelle. L’affaire peut alors être renvoyée au procureur aux fins de mieux se pourvoir.
La prérogative offerte par l’article 186-3 du Code de procédure pénale doit donc être sous-pesée avec attention par les parties. Et ce d’autant plus que la Cour de cassation applique le texte à la lettre considérant qu’une partie est irrecevable à soulever l'incompétence du tribunal correctionnel en raison de la qualification criminelle des faits qui lui sont soumis, dès lors qu'elle était constituée partie civile et assistée d'un avocat lorsque le renvoi a été ordonné, et qu'elle avait alors la faculté d'interjeter appel de l'ordonnance en application de l'article 186-3 du Code de procédure pénale (Cass. crim., 20 novembre 2013, n° 12-85.185, F-P+B N° Lexbase : A0519KQB).
Saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité quant à cette limitation des droits des parties, la Cour de cassation a jugé la question dépourvue de sérieux, motif pris que « les dispositions de l’article 469, alinéa 4, du Code de procédure pénale qui interdisent aux parties civiles de soulever l’incompétence du tribunal correctionnel lorsque des faits de nature criminelle ont été correctionnalisés par le juge d’instruction, à condition que la victime ait été constituée au moment du renvoi et qu’elle ait été assistée par un avocat, se combinent avec celles de l’article 186-3, alinéa 1, dudit code qui permettent aux parties civiles d’interjeter appel de cette ordonnance si elles n’acquiescent pas à cette correctionnalisation et en ce que des considérations d’intérêt général imposent, pour une bonne administration de la justice, que d’autres parties civiles que la victime directe ne puissent faire obstacle à l’application de ces principes en déclinant la compétence du tribunal correctionnel » (Cass. crim., 4 avril 2013, n° 12-85.185, F-D N° Lexbase : A8668KBN). Dont acte !
« 42. La Cour relève que l'obligation d'indiquer l'objet du recours exercé n'est nullement prévue par l'article 186-3 Code de procédure pénale, ni par aucune autre disposition de ce code.
43. Elle considère qu'à la lecture des informations contenues dans l'acte d'appel, le président de la chambre de l'instruction ne pouvait ignorer que le recours de la requérante était exercé en application de l'article 186-3 du Code de procédure pénale, seule disposition autorisant la partie civile à interjeter appel d'une ordonnance de renvoi du juge d'instruction.
44. Partant, si la Cour admet que les autorités nationales sont les mieux placées pour interpréter leur législation et que la règlementation relative aux formalités et délais à observer pour exercer un recours vise à assurer la bonne administration de la justice, et notamment à désengorger les tribunaux, elle estime que l'interprétation faite par les juridictions internes des règles procédurales en l'espèce est excessivement formelle, eu égard au fait qu'il s'agit d'une exception dans le régime des appels des actes du juge d'instruction prévu à l'article 186 du Code de procédure pénale.
45. La Cour constate en outre qu'en déclarant non admis son appel, les autorités ont non seulement privé la requérante d'un examen au fond de son recours par la chambre de l'instruction, mais également d'un contrôle par la Cour de cassation, l'ordonnance de non-admission étant insusceptible de recours.
46. Eu égard à ce qui précède, la Cour estime qu'en déclarant non admis l'appel de la requérante, les autorités ont fait preuve d'un formalisme excessif et ont porté une atteinte disproportionnée à son droit d'accès au tribunal.
47. Partant, il y a eu violation de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme ».
En son dernier état, la Cour de cassation estime donc que « la recevabilité, au regard des dispositions de l'article 186-3 du Code de procédure pénale, de l'appel d'une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel, portant requalification des faits, peut être appréciée, non seulement au vu des indications figurant dans l'acte d'appel, mais aussi en fonction des motifs de ce recours exposés par mémoire devant la chambre de l'instruction » (Cass. crim., 29 novembre 2017, n° 17-84.566, FS-P+B N° Lexbase : A4616W4Q). En l’espèce, la Cour de cassation amorce son raisonnement en rappelant, au visa de l'article 186-3 du Code de procédure pénale, que la personne mise en examen et la partie civile peuvent interjeter appel des ordonnances prévues par le premier alinéa de l'article 179 du Code de procédure pénale dans le cas où elles estiment que les faits renvoyés devant le tribunal correctionnel constituent un crime qui aurait dû faire l'objet d'une ordonnance de mise en accusation devant la cour d'assises. Elle censure par la suite la décision du président d’une chambre de l’instruction ayant déclaré l’appel d’un mis en examen non-admis au motif qu'il ne résulte d'aucun élément porté à sa connaissance que l'appel avait été formé dans l'un des cas prévus par l'article 186-3 du Code de procédure pénale.
Évidemment, la détention provisoire, l'assignation à résidence sous surveillance électronique ou le contrôle judiciaire de la personne prend fin. Il n’en va autrement que s’il est fait application du troisième alinéa de l'article 179 du Code de procédure pénale : il s’agit de l’ordonnance distincte de maintien sous contrainte lors du renvoi.
De plus, en cas d'accord, la loi prévoit que les dispositions de l'article 175 du Code de procédure pénale ne sont pas applicables et, par dérogation aux dispositions de l'article 184 du Code de procédure pénale, l'ordonnance de renvoi ne mentionne, outre des précisons quant aux mesures de contrainte et aux délais de mise en œuvre (éléments prévus aux deuxième et troisième alinéas), que l'identité de la personne et la qualification retenue, sans avoir besoin d'être motivée.
A l’instar de la « comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité-instruction », la demande ou l'accord du procureur de la République en vue de la mise en œuvre de la procédure prévue audit article 41-1-2 du Code de procédure pénale peut être exprimé ou recueilli au cours de l'information ou à l'occasion de la procédure de règlement prévue à l'article 175 du Code de procédure pénale. Fort opportunément, la loi précise que les représentants légaux de la personne morale mise en cause sont informés, dès la proposition du procureur de la République, qu'ils peuvent se faire assister d'un avocat avant de donner leur accord à la convention.
L'instruction est, selon la loi, « suspendue » à l’endroit de la personne morale faisant l'objet de la transmission pour mise en œuvre de la procédure prévue à l'article 41-1-2 du Code de procédure pénale. Les mesures prononcées, le cas échéant, au titre du contrôle judiciaire sont néanmoins maintenues jusqu'à la validation de la convention. Aux termes de l’article 180-2, « l'instruction se poursuit à l'égard des autres parties à la procédure ». Il en est logiquement du Code de procédure pénale ainsi des éventuelles personnes physiques éventuellement mises en cause. La convention judiciaire d’intérêt public est un mécanisme ne bénéficiant qu’aux personnes morales. Ita est…
Pour conclure, il n’est pas inutile d’observer qu’au 1er janvier 2020, sur huit conventions judiciaires d’intérêt public conclues, cinq furent des dérivations d’instruction (v. ainsi les conventions judiciaires d’intérêt public « HSBC » du 30 octobre 2017 N° Lexbase : L5191LI4 ; « EGIS AVIA » 28 novembre 2019 N° Lexbase : L7864LUS ; « SAS Poujaud » du 4 mai 2018 N° Lexbase : L7866LUU ; « Kaefer Wanner » du 15 février 2018 N° Lexbase : L5193LI8 ; et « SAS Set Environnement » du 14 février 2018 N° Lexbase : L5195LIA).
La convention judiciaire d’intérêt public est donc pour le moment davantage une alternative aux poursuites engagées qu’une alternative à l’engagement des poursuites !
Formellement, le texte précise que l’ordonnance doit contenir « à peine de nullité, l'exposé et la qualification légale des fait, objet de l'accusation, et précise l'identité de l'accusé. Elle précise également, s'il y a lieu, que l'accusé bénéficie des dispositions de l'article 132-78 du Code pénal ». Il s’agit une fois de plus des réductions de peine accordées aux repentis.
Logiquement, l’ordonnance de mise en accusation, lorsqu'elle est devenue définitive, couvre, s'il en existe, les vices de la procédure. Un mis en cause ne saurait se faire un grief de ce que, par arrêt incident, la cour a rejeté sa requête aux fins de retrait ou de cancellation des procès-verbaux et pièces critiqués, dès lors qu'en application de l'article 181 du Code de procédure pénale, il ne peut invoquer d'éventuelles nullités résultant d'un défaut d'enregistrement des auditions en garde à vue après que la décision de mise en accusation est devenue définitive (Cass. crim., 10 février 2016, n° 15-80.622, F-P+B N° Lexbase : A0314PL9).
Observons enfin qu’au visa de l'article 6 § § 1 et 3 a et c de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et l'article préliminaire du Code de procédure pénale, la Cour de cassation a estimé que lorsque l'altération des facultés d'une personne mise en examen est telle que celle-ci se trouve dans l'impossibilité absolue d'assurer effectivement sa défense, il doit être sursis à son renvoi devant la juridiction de jugement (Cass. crim., 11 juillet 2007, n° 07-83.056, F-P+F N° Lexbase : A4631DXS). Depuis une loi en date du 25 février 2008, une procédure ad hoc existe cependant pour remédier à cette impossibilité de trancher le litige répressif.
Actualisation jurisprudence Cass. crim., 15 juin 2021, n° 21-81.843, FS-P (N° Lexbase : A00944WE) : la notification de l’ordonnance de mise en accusation traduite dans une langue étrangère comprise par l’accusé, permettant à celui-ci d’exercer une voie de recours et les droits de la défense, reporte la date à laquelle l’ordonnance devient définitive, sauf lorsque la traduction n’a pas été effectuée dans le délai raisonnable prévu par l’article D. 594-8 du Code de procédure pénale. Cass. crim., 2 février 2022, n° 21-86.715, F-B Accès au dossier après mise en accusation : le caractère incomplet du dossier de la chambre de l’instruction n’est pas une cause de nullité - Cass. crim., 15 septembre 2021, n° 21-83.763, F-B (N° Lexbase : A917744N) : après dessaisissement du juge d’instruction à la suite de la mise en accusation, le caractère incomplet du dossier de la chambre de l’instruction ne peut constituer une cause de nullité dans la mesure où les avocats des parties ont accès à l’intégralité du dossier détenu au greffe de la cour d’assises. |
Si l'accusé est placé en détention provisoire, le mandat de dépôt décerné contre lui conserve sa force exécutoire et l'intéressé reste détenu jusqu'à son jugement par la cour d'assises, sous réserve des dispositions des deux alinéas suivants et de l'article 148-1 du Code de procédure pénale. S'il a été décerné, le mandat d'arrêt conserve sa force exécutoire : selon la Cour de cassation, « ces dispositions ne portent atteinte ni au principe d'égalité devant la loi découlant de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'Homme qui ne s'oppose pas à ce que le législateur règle, de façon différente, des situations différentes, ni au droit de l'accusé à un recours juridictionnel effectif, garanti par l'article 16 de ce texte, dès lors que les dispositions de l'article 148-1 dudit code lui permettent de demander sa mise en liberté à tout moment jusqu'à sa comparution devant la juridiction de jugement » (Cass. crim., 31 octobre 2012, n° 12-85.470, F-D N° Lexbase : A6863IW4).
En revanche, la détention provisoire, l'assignation à résidence avec surveillance électronique ou le contrôle judiciaire des personnes renvoyées pour délit connexe prend fin, sauf pour le juge à recourir à ordonnance distincte spécialement motivée conformément à l’article 179, alinéa 3, du Code de procédure pénale. Le délai de comparution devant la juridiction criminelle est porté à six mois.
L'accusé détenu en raison des faits criminels pour lesquels il est renvoyé devant la cour d'assises est immédiatement remis en liberté s'il n'a pas comparu devant celle-ci à l'expiration d'un délai d'un an à compter soit de la date à laquelle la décision de mise en accusation est devenue définitive s'il était alors détenu, soit de la date à laquelle il a été ultérieurement placé en détention provisoire. Toutefois, si l'audience sur le fond ne peut débuter avant l'expiration de ce délai, la chambre de l'instruction peut, à titre exceptionnel, par une décision rendue conformément à l'article 144 du Code de procédure pénale et mentionnant les raisons de fait ou de droit faisant obstacle au jugement de l'affaire, ordonner la prolongation de la détention provisoire pour une nouvelle durée de six mois. La comparution de l'accusé est de droit si lui-même ou son avocat en font la demande. Cette prolongation peut être renouvelée une fois dans les mêmes formes. Si l'accusé n'a pas comparu devant la cour d'assises à l'issue de cette nouvelle prolongation, il doit être immédiatement remis en liberté en application de l’alinéa 9ème de l’article 181 du Code de procédure pénale.
S'ils ont été décernés, les mandats d'amener ou de recherche cessent de pouvoir recevoir exécution, sans préjudice de la possibilité pour le juge d'instruction de délivrer mandat d'arrêt contre l'accusé.
La Cour de cassation a utilement précisé que l'autorité de la chose jugée ne s'attachant qu'aux décisions sur le fond, l'arrêt de la chambre d'accusation en ce qu'il prononce le renvoi des accusés devant la cour d'assises n'a pas ce caractère (Cass. crim., 7 mai 1987, n° 87-80.822 N° Lexbase : A8447AA4).
L’article 186, alinéa 1er, du Code de procédure pénale ouvrant l’appel, il en résulte selon la Chambre criminelle que la requête en nullité ne peut valablement être mobilisé à l’encontre d’une ordonnance de mise en accusation. Il est vrai que selon l'article 173, alinéa 4, du Code de procédure pénale, la procédure de requête aux fins d'annulation n'est pas applicable aux actes contre lesquels la voie de l'appel est ouverte. Encourt dès lors la cassation l'arrêt qui annule une telle ordonnance, devenue définitive en l'absence d'appel, après avoir été saisie par le procureur de la République d'une requête aux fins d'annulation alors que cette requête était irrecevable (Cass. crim., 31 mars 2016, n° 16-80.095, F-P+B N° Lexbase : A1665RBB).
Ont été considérés comme des charges nouvelles justifiant la réouverture de l'instruction :
A l'inverse, ne constituent pas des charges nouvelles la simple arrestation de la personne poursuivie ou la confirmation, par de nouveaux témoins, de faits déjà connus.
Ajoutons que la partie civile, qui ne pouvait forcer la reprise d’informations pour charges nouvelles, recouvre néanmoins la qualité qu'elle avait à l'origine à la suite des réquisitions du procureur. Elle est donc recevable, selon la Chambre criminelle, à relever appel de la décision par laquelle le juge d'instruction refuse d'informer sur ces réquisitions dès lors qu'une telle ordonnance fait grief à ses intérêts civils (Cass. crim., 23 juin 2009, n° 08-87.679, F-P+F+I N° Lexbase : A7596EI8).
La Cour de cassation a livré une lecture pour le moins extensive non pas de l’article 196 du Code de procédure pénale, mais à partir de cette disposition. En effet, selon la Chambre criminelle, aucune disposition légale ne fait obstacle à ce que le procureur général puisse requérir de la chambre de l'instruction la reprise d'une information lorsque des éléments nouveaux lui sont communiqués après décision de non-lieu prononcée par cette juridiction et alors que personne n’avait été mis en examen durant l’information. En pareil cas, le procureur général dispose, auprès de la juridiction d'instruction du second degré, des mêmes pouvoirs que ceux que l'article 80 du Code de procédure pénale confère au procureur de la République (Cass. crim., 4 décembre 2007, n° 06-88.286 N° Lexbase : A2904D3X). En d’autres termes, puisque le procureur général dispose des mêmes prérogatives que le procureur de la République lorsque des charges nouvelles apparaissent contre un ancien mis en cause, il est logique a fortiori que le procureur général dispose comme son homologue de première instance du droit de demander à ce qu’une information judiciaire soit reprise à l’encontre d’un individu ne bénéficiant pas d’un non-lieu. Qui peut le plus peut donc le moins puisqu’aucun texte ne s’y oppose … même si aucun texte ne le permet…
Actualisation jurisprudence L’accusé non appelant ne peut se prévaloir des dispositions de l’article 186-2 du Code de procédure pénale - Cass. crim., 3 février 2021, n° 20-86.338, F-P+I (N° Lexbase : A81574ET) : l'application des dispositions de l’article 186-2 du Code de procédure pénale, lesquelles font obligation à la chambre de l'instruction, saisie d’un appel d’une ordonnance de règlement, de statuer dans les quatre mois suivant la date de déclaration d'appel, faute de quoi, si la personne est détenue, elle est mise d'office en liberté, ne peut être revendiquée par l’accusé détenu non appelant en cas d’appel de ses co-accusés de l’ordonnance de mise en accusation. |
Enfin l’alinéa deuxième dispose que la « partie civile peut interjeter appel des ordonnances de non-informer, de non-lieu et des ordonnances faisant grief à ses intérêts civils. Toutefois, son appel ne peut, en aucun cas, porter sur une ordonnance ou sur la disposition d'une ordonnance relative à la détention de la personne mise en examen ou au contrôle judiciaire ».
Actualisation jurisprudence Appel contre une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel et pouvoirs de la chambre de l'instruction - Cass. crim., 13 janvier 2021, n° 20-85.791, FS-P+B+I (N° Lexbase : A73414CU) : les chambres de l’instruction peuvent modifier et compléter les qualifications données aux faits par le ministère public ou le juge d’instruction sans ordonner une nouvelle information si les chefs de poursuite qu’elles retiennent ont été compris dans les faits pour lesquels la personne a été mise en examen ; les juridictions d’instruction apprécient souverainement si les faits retenus à la charge du mis en examen constituent une infraction, la Cour de cassation n’ayant, quant à elle, qu’à vérifier si, à supposer les faits établis, la qualification justifie la saisine de la juridiction de jugement. |
Cet alinéa ajouté par la loi du 3 juin 2016 avait pour objectif de consacrer et encadrer la jurisprudence antérieure relative aux ordonnances complexes. Relèvent de cette qualification les ordonnances par lesquelles le juge d’instruction répond implicitement mais négativement à une demande formulée par une partie, en décidant de renvoyer le(s) mis en examen devant la juridiction de jugement. Il va de soi en effet qu’un juge auprès duquel une demande est formulée la rejette s’il décide plutôt de clôturer l’information judiciaire. Afin de permettre au justiciable de contester ce rejet implicite, la jurisprudence l’autorise à attaquer l’ordonnance de renvoi par la voie de l’appel. Ainsi, par exemple, « lorsqu'elle est saisie d'une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel intervenue sans que le juge d'instruction ait statué sur la contestation de la recevabilité d'une constitution de partie civile, la chambre de l'instruction est tenue d'annuler cette ordonnance qui présente un caractère complexe, d'évoquer et de procéder au règlement de l'entier dossier de la procédure d'information à l'égard de toutes les personnes mises en examen » (Cass. crim., 10 février 2016, n° 15-84.152, FS-P+B N° Lexbase : A0348PLH).
La loi n’ouvrant pas l’appel contre l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel, la Cour limitait toutefois l’exercice de cette voie de recours au mis en examen ayant saisi directement le président de la chambre de l’instruction à raison du défaut de réponse du magistrat instructeur. La Chambre criminelle estime ainsi « qu'il résulte de l'article 82-1 du Code de procédure pénale que, lorsque le juge d'instruction n'a pas statué dans le délai d'un mois sur une demande d'actes présentée en application de ce texte, la partie a la faculté de saisir directement le président de la chambre d'accusation dans les conditions prévues par l'article 81, dernier alinéa, du même code ; il s'ensuit que la personne mise en examen qui n'a pas usé de cette faculté ne saurait être admise à interjeter appel de l'ordonnance la renvoyant devant le tribunal correctionnel pour contester le rejet implicite de sa demande d'acte ». Faute pour le mis en examen d’avoir saisi directement le président, la Cour refuse donc que l’ordonnance de renvoi soit qualifiée de « complexe » (Cass. crim., 30 novembre 1999, n° 99-80.679 N° Lexbase : A6088CKP ; Cass. crim., 25 avril 2006, n° 05-86.248, F-P+F N° Lexbase : A8686DPE). L’ordonnance n’est pas davantage « complexe » si la demande n’a pas été formulée conformément à l’article 82-1 du Code de procédure pénale (Cass. crim., 3 mars 2015, n° 14-84.501, F-D (N° Lexbase : A8890NCA).
La modification opérée par la loi du 3 juin 2016 avait donc pour objectif de permettre au président de la chambre de se prononcer sur la demande d’acte par la saisine directe, et par ricochet sur l’appel à l’endroit de l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel. En rejetant la saisine directe pour défaut de réponse à une demande d’acte, le président de la chambre de l’instruction rend en effet irrecevable l’appel. Comme le rappelle la Chambre criminelle : « le président de la chambre de l'instruction tient de l'article 186-3, alinéa 3, du Code de procédure pénale, le pouvoir, après avoir énoncé les motifs qui le portent à considérer qu'il n'y a pas lieu de saisir la chambre de l'instruction des demandes d'acte, de rendre une ordonnance de non-admission de l'appel, en ce que, hors les cas prévus par les deux premiers alinéas de l'article 186-3 du Code de procédure pénale, l'appel formé par la personne mise en examen contre une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel est irrecevable » (Cass. crim., 28 mars 2017, n° 17-80.382, F-P+B N° Lexbase : A0961UTR). Et il faut préciser que cette ordonnance n’est pas susceptible de recours en application de l’article 186-1, alinéa 3, du Code de procédure pénale.
Cette disposition a toutefois fait l’objet d’une précision assez compréhensive de la Cour de cassation selon laquelle « il se déduit des dispositions de l'article 186-3, alinéa 3, du Code de procédure pénale, dans leur rédaction issue de la loi du 3 juin 2016, que l'appel contre l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel est recevable lorsqu'un précédent appel du mis en examen contre une ordonnance du juge d'instruction ayant rejeté une demande d'acte est pendant devant la chambre de l'instruction ». La Chambre criminelle permet ainsi au mis en examen de regrouper « par greffe » les appels devant la chambre.
La Cour a néanmoins précisé par la suite que « si l'appel contre l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel est recevable lorsqu'un précédent appel du mis en examen contre une ordonnance du juge d'instruction ayant rejeté une demande d'acte est pendant devant la chambre de l'instruction, le principe d'égalité n'impose pas qu'il en soit de même en cas de requête en nullité en cours de traitement devant cette juridiction, dès lors que ces demandes, ayant un objet différent, ne sont pas soumises aux mêmes règles de compétence » (Cass. crim., 18 juin 2019, n° 19-82.572, F-P+B+I N° Lexbase : A2868ZGC : Dalloz actualité, 17 juillet 2019 note W. Azoulay). Ce que l’appel contre une décision du juge d’instruction permet quant au recours contre une ordonnance de renvoi du tribunal correctionnel, n’est donc pas permis en cas de requête en nullité.
La Cour a par ailleurs ajouté que « les restrictions au droit d'appel d'une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel, même lorsqu'une requête en nullité est pendante devant la chambre de l'instruction, ne portent atteinte ni au droit à un recours effectif, ni aux droits de la défense, puisqu'aucune personne ne peut être jugée sans qu'il n'ait été statué sur sa requête en nullité et, qu'en cas d'annulation de pièces du dossier ne s'étendant pas à l'ordonnance de règlement, l'article 174, dernier alinéa, du Code de procédure pénale énonce qu'il est interdit de tirer des actes et des pièces ou parties de pièces annulées aucun renseignement contre les parties en sorte qu'aucune condamnation ne peut être prononcée sur leur fondement par la juridiction saisie » (idem). Cette solution doit évidemment être mise en parallèle avec la décision n° 2018-705 QPC du 18 mai 2018 (Cons. const., décision n° 2018-705 QPC, 18 mai 2018 N° Lexbase : A9686XMP). Le Conseil y a en effet estimé que les dispositions de l’article 187 du Code de procédure pénale, permettant de clôturer l'instruction en dépit d'un appel pendant devant la chambre de l'instruction, qui « ont pour objet d'éviter les recours dilatoires provoquant l'encombrement des juridictions et l'allongement des délais de jugement des auteurs d'infraction et mettent ainsi en œuvre l'objectif de bonne administration de la justice, ne méconnaissent pas le droit à un recours juridictionnel effectif » (§ 11°).
Enfin observons que le législateur a toutefois jugé opportun (C. proc. pén., art. 186-4) qu’en « cas d'appel, même irrecevable, formé contre une ordonnance prévue au premier alinéa de l'article 179 du Code de procédure pénale, la chambre de l'instruction statue dans les deux mois suivant la date de déclaration d'appel, faute de quoi la personne détenue est remise d'office en liberté ».
Actualisation jurisprudence Droits du mis en examen au cours des débats devant la chambre de l’instruction : pas d’obligation d’information si l’intéressé n’est pas entendu sur les faits reprochés ou la nature des charges - Cass. crim., 27 janvier 2021, n° 20-86.037, F-P+I (N° Lexbase : A65984DQ) : la chambre de l’instruction qui examine l’appel formé contre une ordonnance de mise en accusation en présence de la personne mise en examen n’a pas à informer cette dernière de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire si l’intéressée n’a pas comparu au sens de l’article 199 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L4955K8Z) et n’a à aucun moment, au cours des débats, été entendue sur les faits qui lui sont reprochés ou sur la nature des charges pesant sur elle. |