Le Quotidien du 21 septembre 2023 : Bancaire

[Brèves] Précisions sur le régime applicable à la condition suspensive liée au crédit immobilier

Réf. : Cass. civ. 3, 14 septembre 2023, n° 22-18.642, FS-B N° Lexbase : A57311GD

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[Brèves] Précisions sur le régime applicable à la condition suspensive liée au crédit immobilier. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/99918793-0
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par Jérôme Lasserre Capdeville

le 20 Septembre 2023

► La règle suivant laquelle l’engagement affecté d’une condition suspensive sans terme fixe subsiste aussi longtemps que la condition n’est pas défaillie et ne peut prendre fin par la volonté unilatérale de l’une des parties ne prive pas celles-ci du bénéfice des stipulations du contrat prévoyant une faculté de résiliation unilatérale. Dans ce cas, le sort de la condition s’apprécie à la date de la résiliation.

Il arrive, en matière de crédit immobilier, que l’acte « principal » soit conclu « sous la condition suspensive de l'obtention du ou des prêts qui en assument le financement » (C. consom., art. L. 313-41 N° Lexbase : L3381K7D). Des règles de formes, figurant aux articles L. 313-40 N° Lexbase : L3380K7C et L. 313-42 N° Lexbase : L3382K7E du Code de la consommation, sont alors à respecter. La décision sélectionnée vient nous donner une précision sur le régime juridique applicable à cette condition suspensive.

Faits et procédure. En l’espèce, par un contrat en date du 24 octobre 2017, Mme O. avait confié à la société DCA une mission de maîtrise d’œuvre portant sur l’aménagement de son domicile personnel et sur la mise en conformité d’un cabinet médical aux normes d’accessibilité des personnes à mobilité réduite. Cependant, le 12 juin 2018, la société DCA avait indiqué à Mme O. qu’elle entendait mettre fin au contrat.

Soutenant que le contrat d’architecte méconnaissait les dispositions des articles L. 313-1 N° Lexbase : L3398K7Y et suivants du Code de la consommation et devait être considéré comme conclu sous la condition suspensive d’obtention d’un prêt destiné à financer les travaux et faisant valoir que celle-ci ne s’était pas réalisée à la date de la résiliation, Mme O. avait sollicité le remboursement des sommes versées à titre d'honoraires et le rejet des demandes de la société DCA.

La cour d’appel de Douai, avait, par une décision du 12 mai 2022 (CA Douai, 12 mai 2022, n° 20/01975 N° Lexbase : A80877WG), condamné la société DCA à payer une certaine somme à Mme O. au titre des honoraires versés et rejeté ses demandes. Cette société avait alors formé un pourvoi en cassation.

Moyens. Elle prétendait, par ce dernier, que l'engagement affecté d'une condition suspensive sans terme fixe ne peut prendre fin par la volonté unilatérale de l'une des parties et subsiste jusqu'à la défaillance de la condition, qui peut être retenue seulement quand il est certain que l’événement érigé en condition n'aura pas lieu. Or, en l’espèce, pour rejeter la demande de la société DCA en paiement d'honoraires dirigée contre Mme O., la cour d’appel avait retenu que le contrat d'architecte qui les liait était conclu sous condition suspensive de l’obtention d’un prêt, lequel n’avait été obtenu qu'en 2020, soit postérieurement à la résiliation du contrat d'architecte par la société DCA le 12 juin 2018, de sorte que la condition suspensive de l'obtention du prêt n'était pas réalisée. Dès lors, en statuant de la sorte, alors que les engagements issus du contrat d'architecte n'avaient pu prendre fin du seul fait de la volonté de la société DCA et que le fait que Mme O. soit parvenue ultérieurement à obtenir un financement excluait que la condition suspensive de l'obtention d'un prêt soit regardée comme défaillie, la cour d'appel aurait violé les articles 1304 N° Lexbase : L0955KZE et 1304-6 N° Lexbase : L0655KZB du Code civil, dans leur rédaction issue de l'ordonnance du 10 février 2016.

Décision. Le pourvoi est cependant rejeté par la Haute juridiction.

Celle-ci commence par observer que la cour d’appel avait retenu que le contrat d’architecte, qui méconnaissait les dispositions des articles L. 312-2 et suivants du Code de la consommation relatives à la protection des emprunteurs dans le domaine immobilier (plus vraisemblablement les articles L. 313-1 du Code et suivants), devait, par application de l’article L. 313-42 du même code, être considéré comme conclu sous la condition suspensive d’obtention du prêt destiné au financement de l'opération.

Il est ensuite noté que la règle suivant laquelle l’engagement affecté d’une condition suspensive sans terme fixe subsiste aussi longtemps que la condition n’est pas défaillie et ne peut prendre fin par la volonté unilatérale de l’une des parties ne prive pas celles-ci du bénéfice des stipulations du contrat prévoyant une faculté de résiliation unilatérale. Dans ce cas, le sort de la condition s’apprécie à la date de la résiliation.

Or, ayant retenu que la société DCA avait résilié le contrat le 12 juin 2018 et qu’à cette date la condition suspensive d’obtention du prêt immobilier ne s’était pas réalisée, la cour d’appel en avait déduit, à bon droit, sans être tenue de procéder à une recherche sur une éventuelle défaillance de la condition prise du comportement du débiteur en ayant empêché la réalisation, que ses constatations rendaient inopérante, que les honoraires versés par le maître de l’ouvrage devaient être remboursés et la demande en paiement d'un solde d’honoraires rejetée. Le moyen n'était donc pas fondé.

La résiliation du contrat décidée par l’une des parties, conformément à la convention, aura ainsi des incidences sur la condition suspensive qui ne pourra plus être jugée comme s’étant réalisée si un crédit est finalement conclu par la suite.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Le crédit immobilier, Les liens entre le contrat de crédit et le contrat principal (dir. J. Lasserre Capdeville), Lexbase N° Lexbase : E8568B44.

 

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