Le Quotidien du 2 août 2023 : Droit pénal spécial

[Brèves] Loi sur la protection des logements contre l’occupation illicite : quels apports en matière pénale ?

Réf. : Loi n° 2023-668, du 27 juillet 2023, visant à protéger les logements contre l'occupation illicite N° Lexbase : L2872MI9

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par Adélaïde Léon

le 20 Septembre 2023

► Promulguée le 27 juillet 2023, la loi visant à protéger les logements contre l’occupation illicite crée un nouveau délit de squat de locaux autres que le domicile, sanctionne le maintien sans droit ni titre dans un local d’habitation en violation d’une décision de justice, renforce les peines encourues par les auteurs de violation de domicile. Elle vient également sanctionner « la propagande ou la publicité » en faveur du squat et durcit la sanction des personnes se prétendant propriétaires pour louer le bien d’autrui.

Contexte. En 2007, une nouvelle procédure d’évacuation forcée était créée par la loi n° 2007-290, du 5 mars 2007 N° Lexbase : L5929HU7. La loi n° 2020-1525, du 7 décembre 2020, d’accélération et de simplification de l’action publique N° Lexbase : L9872LYB est venue renforcer le droit de propriété face aux situations de « squat » en simplifiant et en accélérant la procédure administrative d’évacuation forcée en cas d’occupation illicite du domicile d’autrui par un tiers qui s’y est introduit et maintenu à l’aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte. La proposition de loi visant à protéger les logements contre l’occupation illicite avait pour objectif de « conforter les possibilités à la main des propriétaires » en sanctionnant « mieux » le « squat », en accélérant les procédures dans le litige de loyer, en rendant opération la possibilité de résilier le bail pour manquements aux obligations contractuelles du locataire et en pénalisant le fait de rester dans le logement en dépit d’une décision de justice défavorable.

Texte.

Le squat de locaux autres qu’un domicile. L’article 1er de la loin crée un nouveau délit de squat de locaux autres que le domicile d’un tiers. Est ainsi introduite dans le Code pénal la notion d’occupation frauduleuse d’un local à usage d’habitation ou à usage commercial, agricole ou professionnel. L’introduction est punie de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. Le maintien est sanctionné par les mêmes peines.

Cette nouvelle notion vise également le maintien sans droit nit titre dans un local à usage d’habitation en violation d’une décision de justice définitive et exécutoire ayant donné lieu à un commandement régulier de quitter les lieux depuis plus de deux mois. Ce délit est puni de 7 500 euros d’amende. Ces dispositions ne sont toutefois pas applicables aux personnes concernées par le régime de la trêve hivernale ou bénéficiant d’une décision de sursis à expulsion ou lorsque le logement appartient à un bailleur social ou à une personne morale de droit public.

Le squat de domicile. Le texte renforce les sanctions encourues par les auteurs de violation de domicile. Alors qu’elle était d'un an de prison et 15 000 euros d’amende, la peine encourue devient de trois ans de prison et 45 000 euros d’amende.

La notion de domicile est élargie par la précision que constitue le domicile d’une personne « tout local d’habitation contenant les biens meubles lui appartenant, que celle-ci y habite ou non et qu’il s’agisse de sa résidence principale ou non ». Saisi par plus de soixante députés, le Conseil constitutionnel a exprimé une réserve d’interprétation au sujet de ces dispositions en précisant que « la présence de tels meubles ne saurait, sans méconnaître le principe de nécessité des délits et des peines, permettre, à elle seule, de caractériser le délit de violation de domicile ». Il appartient au juge d’apprécier si la présence de ces meubles permet de considérer que leur propriétaire a le droit de se dire chez lui dans le lieu qu’ils occupent.

La promotion du squat. Introduisant un nouvel article 225-4-2-1 dans le Code pénal, la loi vient punir la propagande ou la publicité, quel qu’en soit le mode, en faveur de méthodes visant à faciliter ou à inciter au squat d’une peine de 3 740 euros d’amende.

La sanction location à un tiers, afin qu’il y établisse son habitation, d’un bien immobilier appartenant à autrui est durcie et devient de trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.

Réserve et censure partielle du Conseil constitutionnel. L’article 7 de la loi soumise au Conseil constitutionnel réformait le régime de responsabilité applicable en cas de dommage résultant d’un défaut d’entretien d’un bâtiment en ruine ou d’un vice de construction (Const. const., décision n° 2023-853 DC, du 26 juillet 2023 N° Lexbase : Z9705823). Le Conseil a jugé qu’en instituant un régime de responsabilité de plein droit, le législateur a entendu faciliter l’indemnisation des victimes, objectif reconnu d’intérêt général. Toutefois, les sages ont jugé que les dispositions de cet article portaient une atteinte disproportionnée au droit des victimes d’obtenir réparation du préjudice résultant du défaut d’entretien d’un bâtiment en ruine, et ce pour deux raisons :

  • le propriétaire du bien était exonéré de responsabilité pour tout dommage survenu au cours de la période d’occupation illicite sans qu’il soit nécessaire que la cause du dommage trouve son origine dans un défaut d’entretien dont la responsabilité incomberait à l’occupant illicite. Le propriétaire disposait de cette exonération sans qu’il ait à démontrer que le comportement de l’occupant illicite ait fait obstacle à la réalisation des travaux de réparations ;
  • durant l’occupation sans titre ni droit, l’article exonérait également le propriétaire de sa responsabilité à l’égard des tiers lesquels ne pouvaient obtenir réparation de préjudice qu’en se retournant contre l’occupant illicite. Or, son identité peut ne pas être connue et ses garanties en matière d’assurance sont sans conteste différentes de celles du propriétaire.

Pour ces raisons, le Conseil constitutionnel a déclaré les dispositions de l’article 7 de la loi contraires à la Constitution.

Fait rare, le 29 juillet 2023, le Conseil constitutionnel a publié sur son internet un communiqué visant à « infirme[r] de fausses interprétations données à sa décision du 26 juillet 2023 sur la loi visant à protéger les logements contre l’occupation illicite ». Cette communication visait spécifiquement les commentateurs affirmant que le Conseil aurait décidé que, désormais, tout occupant illicite d’un logement pourrait obtenir réparation du propriétaire si le bien occupé était mal entretenu.

Le Conseil dément ces affirmations et affirme que les motifs de la censure se fondent sur la nécessité que demeurent protégés les droits des tiers victimes de dommages. Ils ne privent pas le législateur de la possibilité de réformer le droit pour aménager la répartition des responsabilités entre propriétaire et occupants illicites.

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