Réf. : Cass. com., 15 mars 2023, n° 21-23.335, F-D N° Lexbase : A69969IX
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par Vincent Téchené
le 28 Mars 2023
► Afin d'apprécier si l'engagement de caution d'une personne physique était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, il convient, lorsque cette personne était propriétaire indivis d'un bien, d'imputer la dette qu'elle avait contractée pour acquérir ce bien, non sur la valeur dudit bien, mais sur celle de sa part dans l'indivision.
Faits et procédure. Une banque a consenti à une société un prêt de 255 000 euros, destiné à financer la création d'un fonds de commerce de boulangerie-pâtisserie. En garantie de ce prêt, M. G. s'est rendu caution de la société dans la limite de 331 500 euros. La société ayant été mise en liquidation judiciaire, la banque a assigné en paiement la caution, qui lui a opposé la disproportion manifeste de son engagement à ses biens et revenus.
La cour d’appel (CA Rouen, 8 juillet 2021, n° 19/04357 N° Lexbase : A57044YW) retient la disproportion du cautionnement et juge en conséquence que la banque ne pouvait se prévaloir de celui-ci. La banque se pourvoit alors en cassation.
Décision. La Cour de cassation opère ici une triple censure de la décision de la cour d’appel, l’intérêt principal de l’arrêt résidant toutefois dans les modalités de prise en compte du bien indivis acquis à l’aide d’un prêt.
Elle rappelle ainsi que le crédit contracté par des indivisaires pour acquérir un bien indivis est une dette personnelle de ces derniers, et non une dette de l'indivision, dont ils sont, lorsqu'ils se sont engagés solidairement, chacun tenus pour le tout.
Il en résulte, pour la Haute juridiction, qu’afin d'apprécier si l'engagement de caution d'une personne physique était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, il convient, lorsque cette personne était propriétaire indivis d'un bien, d'imputer la dette qu'elle avait contractée pour acquérir ce bien, non sur la valeur dudit bien, mais sur celle de sa part dans l'indivision.
Observations. Si avec la réforme du droit des sûretés par l’ordonnance du 15 septembre 2021, l’exigence de proportionnalité est passée dans le Code civil (C. civ., art. 2300 N° Lexbase : L0174L8X), la décision dégagée dans l’arrêt rapporté est pleinement reconductible pour les cautionnements soumis aux nouveaux textes. L’appréciation de l’actif et du passif de la caution suit en effet les mêmes règles que le cautionnement ait été souscrit avant ou après le 1er janvier 2022 (date d’entrée en vigueur de la réforme). On rappellera toutefois que la sanction du cautionnement disproportionné a été modifiée : à l’impossibilité pour le créancier de se prévaloir du cautionnement, a été préférée une réduction de celui-ci « à hauteur duquel elle [la caution] pouvait s'engager […] ».
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