Le Quotidien du 17 mars 2021 : Électoral

[Le point sur...] Comptes de campagne élections présidentielles : dépenses et modalités de dépôt

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[Le point sur...] Comptes de campagne élections présidentielles : dépenses et modalités de dépôt. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/65938466-0
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par Yann Le Foll

le 17 Mars 2021

Chaque candidat à l’élection présidentielle doit respecter des règles précises quant à la désignation d’un mandataire, la présentation du compte de campagne ou l’équilibre financier de celui-ci.

Mandataire unique : chaque candidat doit désigner un mandataire chargé de recueillir des fonds pour le financement de sa campagne. À chaque recette, à chaque dépense de la campagne doit correspondre au moins une pièce justificative, établissant la réalité, la nature et le montant de la dépense ou de la recette à laquelle elles se rapportent.

Présentation du compte : le compte de campagne comporte le relevé et les justificatifs des dépenses payées et des recettes perçues par le mandataire ; le relevé et les justificatifs des dépenses payées par les partis politiques ; et les évaluations des concours en nature consentis par le candidat, par des personnes physiques ou par des partis politiques.

Il est présenté par un membre de l’Ordre des experts-comptables dans le délai imparti (au plus tard à 18 heures le onzième vendredi suivant le premier tour de scrutin) sous peine de non-remboursement des dépenses de campagne.

Il ne peut être en déficit. En cas de possible déficit lors du dépôt du compte, celui-ci doit être couvert par une contribution d’un parti politique, soit par un apport personnel du candidat lui-même, soit par des dons de personnes physiques. L’État ne peut couvrir ce déficit postérieurement au dépôt via son remboursement forfaitaire.

Les dons : interdiction de dons des personnes morales de droit privé ou public sauf partis politiques. Les dons sont limités à 4 600 euros pour une seule personne physique et pour toute l’élection présidentielle, quel que soit le nombre de candidats soutenus (dons financiers et dons en nature hors bénévolat) et 150 euros par donateur pour les dons en espèces.

Autres recettes : chaque candidat perçoit une avance forfaitaire de 153 000 euros versée par l’État. Peuvent s’y ajouter l’apport personnel du candidat, produit d’opérations commerciales, des produits financiers, les contributions des partis politiques, les concours en nature du candidat, des personnes physiques ou des partis politiques.

Plafond de dépenses : le plafond des dépenses électorales prévu par l'article L. 52-11 du Code électoral (N° Lexbase : L1146KME) est fixé à 13,7 millions d'euros pour un candidat à l'élection du Président de la République. Il est porté à 18,3 millions d'euros pour chacun des candidats présents au second tour (loi n° 62-1292, du 6 novembre 1962, relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel N° Lexbase : L5341AGW).

Dépenses interdites : interdiction d’émission publicitaire à caractère politique sur les chaînes de radio et de télévision ; interdiction de dons ou libéralités par un candidat soit à des électeurs, soit à une commune, soit à une collectivité quelconque de citoyens. Veille du scrutin : interdiction de diffusion au public de tout message ayant le caractère de propagande électorale.

Dépenses exclues du compte (prise en charge par l’État) : frais de campagne radio et TV, frais d’impression et de mise en place des professions de foi, frais d’impression et d’apposition des affiches destinées aux emplacements officiels. Il en est de même des honoraires et frais d’avocat, d’huissier ou de justice, s’agissant de contentieux engagés à l’occasion de la campagne électorale.

À l’inverse, doivent y figurer les frais de déplacement et d’hébergement de représentants de formations politiques soutenant le candidat, avec réintégration en cas d’omission (Cons. constit., décision n° 2009-4533 du 14 octobre 2009 N° Lexbase : A9835ELT). Il en est de même des dépenses exposées par le candidat désigné à l’issue d’une primaire, ouverte ou non, visant à sa promotion personnelle et à celle de ses idées auprès de personnes autres que les seuls adhérents du ou des partis organisateurs de cette primaire (ouvrages, tracts, organisation de réunions).

Prestations facturées par les partis politiques : sont éligibles au remboursement les prestations facturées par les partis politiques dès lors que le parti établit à l’intention du candidat une facture spécifique à l’élection, individualisée et quantifiée selon le prix normal du marché.

Toutefois, elles doivent impérativement concerner des dépenses supplémentaires spécifiquement liées à la campagne électorale concernée, ou des dépenses pour lesquelles le parti a joué un rôle d’intermédiaire entre le candidat et le fournisseur de services. Sont donc exclues les charges afférentes au parti hors élection (locaux, équipements ou personnel permanent).

Décision de la CNCCFP : La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques rend une décision pour chaque compte de campagne après contrôle des recettes et des dépenses et arrête le montant du remboursement forfaitaire dû par l’État dans un délai de six mois à compter de la date de dépôt du compte.

Elle peut, après procédure contradictoire, soit approuver le compte de campagne, soit le réformer, soit le rejeter. Parmi les causes de rejet figure le dépassement du plafond légal des dépenses autorisées. Le respect du plafond applicable au candidat (selon qu’il est présent au premier ou au second tour) est apprécié au regard du montant des dépenses électorales engagées en vue de l’élection. Des sanctions pécuniaires et pénales sont prévues en cas d’infraction. Ainsi un candidat ayant dépassé le plafond des dépenses doit verser au Trésor public le montant du dépassement.

Le rôle du Conseil constitutionnel : la décision de la CNCCFP peut faire l’objet d’un recours de pleine juridiction formé par le candidat devant le Conseil constitutionnel dans le délai d’un mois suivant leur notification. Les Sages ont alors la possibilité d’annuler le scrutin. Pourtant, il est maintenant démontré qu’ils ont sciemment validé les comptes de campagne irréguliers de Jacques Chirac et Édouard Balladur lors de la campagne présidentielle de 1995 pour éviter une crise politique majeure. Les griefs retenus étaient le dépassement des plafonds des dépenses de comptes de campagne et le soupçon de versements d'argent liquide, même si M. Balladur a été récemment blanchi dans cette affaire par la Cour de justice de la République (soupçons sur des financements par des rétrocommissions dans le cadre de contrats d’armement).

Toutefois, d’après Romain Rambaud, professeur de droit public à l’université de Grenoble Alpes, spécialiste de droit électoral, le problème reste entier puisqu’« on ne peut rien faire si un compte de campagne d'un candidat élu est irrégulier puisqu'il ne peut pas être déclaré inéligible […] cette idée qu'on ne peut pas déclarer un président élu inéligible, elle est liée à cette idée qu'en France, il faut absolument préserver la stabilité du système institutionnel et que la préservation de la stabilité du système institutionnel passe à la préservation presque à tout prix de la stabilité de la fonction présidentielle ».

Quant à la possibilité de poursuites pénales, il ajoute que les Sages « sont tenus par le secret de l'examen des comptes de campagne. Donc, la non-dénonciation d'un certain nombre de choses a priori, ne pourrait pas constituer une infraction. Il faudrait trouver l'infraction pénale dont se seraient rendus coupables les membres du Conseil constitutionnel - ce serait probablement assez compliqué » [1].

Les sanctions applicables au délit de financement illégal de campagne électorale. L’article L. 113-1 du Code électoral (N° Lexbase : L7424LG3) punit de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende (amende de 3750 euros et peine d’un emprisonnement d’un an à l’époque des faits) tout candidat en cas de scrutin uninominal, ou tout candidat tête de liste en cas de scrutin de liste, qui : aura, en vue de financer une campagne électorale, recueilli des fonds en violation de l'article L. 52-4 du Code électoral (N° Lexbase : L7432LGD) ; aura accepté des fonds en violation des articles L. 52-7-1 (N° Lexbase : L7385LGM), L. 52-8 (N° Lexbase : L7612LT4) ou L. 308-1 (N° Lexbase : L7864IYW) du même code ; aura dépassé le plafond des dépenses électorales fixé en application de l'article L. 52-11 du même code.

 

[1] Présidentielle de 95 : pourquoi le Conseil Constitutionnel a-t-il validé des comptes de campagne irréguliers ?, France-Culture, 21 octobre 2020.

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