Le Quotidien du 15 novembre 2019 : Droit médical

[Brèves] Illégalité de l’arrêté de 1962 relatif au monopole de la pratique de l’épilation au laser ou à la lumière pulsée par les docteurs en médecine

Réf. : CE 1° et 4° ch.-r., 8 novembre 2019, n° 424954, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A4266ZUK)

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[Brèves] Illégalité de l’arrêté de 1962 relatif au monopole de la pratique de l’épilation au laser ou à la lumière pulsée par les docteurs en médecine. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/54667266-brevesillegalitedelarretede1962relatifaumonopoledelapratiquedelepilationaulaseroua
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par Laïla Bedja

le 13 Novembre 2019

► La protection de la santé publique est au nombre des raisons impérieuses d'intérêt général qui peuvent justifier des restrictions à la liberté d'établissement et à la libre prestation de services garanties par les articles 49 (N° Lexbase : L2697IPL) et 56 (N° Lexbase : L2705IPU) du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) ; ainsi, eu égard aux risques qu'elle comporte pour la santé des personnes et aux précautions qu'elle nécessite pour prévenir ces risques, la restriction de la pratique de l'épilation au laser ou à la lumière pulsée repose sur des raisons impérieuses d'intérêt général ; en revanche, il ne ressort pas des éléments de l’espèce que seul un médecin puisse manipuler sans risque pour la santé des appareils à laser ou à lumière pulsée et que des mesures mieux adaptées, tenant, par exemple, à l'examen préalable des personnes concernées par un médecin et à l'accomplissement des actes par des professionnels qualifiés sous la responsabilité et la surveillance d'un médecin, ne puissent garantir la réalisation de l'objectif de protection de la santé publique poursuivi par la mesure prévue à l’article 2 de l’arrêté du 6 janvier 1962, fixant la liste des actes médicaux ne pouvant être pratiqués que par des médecins ou pouvant être pratiqués également par des auxiliaires médicaux.

Telle est la solution retenue par le Conseil d’Etat dans une décision rendue le 8 novembre 2019 (CE 1° et 4° ch.-r., 8 novembre 2019, n° 424954, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A4266ZUK).

En l’espèce, M. B et sa société demandaient l’annulation pour excès de pouvoir du refus implicite opposé par la ministre des Solidarités et de la Santé à leur demande du 16 mars 2018 d'abroger les dispositions du 5° de l'article 2 de l'arrêté du 6 janvier 1962. Eu égard aux moyens qu'ils invoquent, ils doivent être regardés comme contestant ce refus en tant qu'il porte sur l'épilation pratiquée au laser ou à la lumière pulsée et maintient ainsi ces modes d'épilation au nombre de ceux ne pouvant être pratiqués que par les docteurs en médecine.

Le Conseil d’Etat accède à la demande de M. B et annule la décision par laquelle la ministre des Solidarités et de la Santé a refusé d’abroger, en tant qu’elles réservent aux docteurs en médecine l'épilation au laser et à la lumière pulsée, les dispositions du 5° de l’article 2 de l’arrêté en cause. La décision pouvant avoir pour effet de porter atteinte à la protection de la Santé publique, le Conseil d’Etat demande aux autorités compétentes, dans un délai raisonnable, non seulement d’abroger la disposition en cause, mais aussi d’encadrer ces pratiques d’épilation par des mesures de nature à garantir dans le respect des règles du droit de l'Union européenne relatives au libre établissement et à la libre prestation de services, la protection de la santé publique.

Contexte. Concernant l’épilation définitive à la lumière intense pulsée, l’ANSES, dans un avis rendu en décembre 2016, a recommandé d'adapter la réglementation actuelle pour sortir d'une incohérence. L'ANSES explique que «l'arrêté de 1962 interdit aux esthéticiens l'utilisation des appareils à lumière pulsée pour la photo-épilation, alors qu'ils ont la possibilité d'utiliser ces appareils pour réaliser des soins de photorajeunissement». Tirant les conséquences de cet avis, deux projets de décret et d'arrêté modifiant l'arrêté du 6 janvier 1962 ont été mis en consultation auprès des professionnels concernés, prévoyant la fin du monopole des dermatologues pour la pratique de l'épilation à lumière intense pulsée et encadrant la responsabilité des praticiens.

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