Le Quotidien du 15 février 2024 : Avocats/Périmètre du droit

[Brèves] Activité illicite d’une société de recours en réparation du dommage corporel

Réf. : CA Grenoble, 30 janvier 2024, n° 22/01746 N° Lexbase : A97992IR

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N8454BZ7

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[Brèves] Activité illicite d’une société de recours en réparation du dommage corporel. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/104883671-0
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par Marie Le Guerroué

le 15 Février 2024

► Seul un professionnel du droit ou relevant d'une profession assimilée est autorisé à exercer, à titre habituel et rémunéré, une activité d'assistance à la victime pendant la phase non contentieuse de la procédure d'offre obligatoire, si elle comporte des prestations de conseil en matière juridique au sens de l'article 54 de la loi du 31 décembre 1971 ; tel n’est pas le cas de la SAS SOS Recours dont l’activité doit être considérée comme illicite.

Faits et procédure. Une victime d'un accident de la circulation avait donné mandat à la SAS SOS Recours de procéder au recouvrement des sommes dues au titre de l'indemnisation de ses préjudices. Elle lui a, par la suite, retiré son dossier pour le confier à un cabinet d'avocats. La SAS SOS Recours a pris acte de la résiliation du mandat et a adressé à la cliente une facture de 1 200 euros. Faute de règlement et après mise en demeure infructueuse, la SAS SOS Recours l'a fait citer en paiement de la somme de 1 200 euros. L'Ordre des avocats du barreau de Lyon est intervenu volontairement à la procédure aux fins de dissolution de la SAS SOS Recours et en paiement de dommages-intérêts. La SAS SOS Recours a relevé appel de la décision rendue par tribunal judiciaire de Vienne disant notamment que la SAS exerçait illicitement une activité principale de consultation juridique.


Réponse de la CA/sur la licéité de l'activité de la SAS. Par application de l'article 1844-10 du Code civil N° Lexbase : L8683LQN, la nullité de la société ne peut résulter que de la violation des articles 1832 N° Lexbase : L2001ABQ, 1832-1 N° Lexbase : L2002ABR et 1833 N° Lexbase : L8681LQL ou de l'une des causes de nullité des contrats en général. La convention datant d'avant 2016 doit présenter, conformément aux dispositions de l’article 1108 ancien du Code civil N° Lexbase : L8972K3P, une cause licite dans l'obligation. Aux termes de l'article 1133 ancien du Code civil N° Lexbase : L1233ABB, la cause est illicite, notamment, quand elle est prohibée par la loi. Une consultation juridique se définit comme la fourniture d'un avis juridique personnalisé sur une question juridique afin d'aider son bénéficiaire. Il ressort des statuts que la SAS SOS Recours a pour objet social en France et à l'étranger, l'expertise en assurances avec à titre accessoire, le recours en réparation du dommage corporel et responsabilité médicale. Il résulte de son site internet, selon ses propres termes, « face à la gestion souvent approximative et les conséquences pécuniaires d'accident corporel, a su mettre en place une structure médicale, juridique et sociale performante au service des victimes d'accident ». Le site précise « notre activité est évidemment juridique ». Le site traite exclusivement du recours en cas de dommage corporel ce dont il s'ensuit que, contrairement aux derniers statuts mis à jour, l'activité au titre de l'assistance au dommage corporel est bien principale et non accessoire. La convention entre la SAS SOS Recours et la cliente a pour objet de « procéder au recouvrement par le mandataire des sommes dues au mandant par le débiteur ou son assureur en réparation de l'ensemble des éléments de préjudices, matériels, corporels ou immatériels subis par le mandant à la suite de l'accident dont il a été victime le 3 janvier 2015 ». L'indemnisation du préjudice corporel d'une victime est un contentieux particulièrement complexe nécessitant un examen du dossier dans toutes ses composantes médicales et juridiques, la détermination des chefs de préjudices indemnisables, l'évaluation monétaire de l'indemnisation et un avis personnalisé, ce qui sous-entend nécessairement une analyse puis un conseil juridique. Seul un professionnel du droit ou relevant d'une profession assimilée est autorisé à exercer, à titre habituel et rémunéré une activité d'assistance à la victime pendant la phase non contentieuse de la procédure d'offre obligatoire, si elle comporte des prestations de conseil en matière juridique au sens de l'article 54 de la loi du 31 décembre 1971 N° Lexbase : L4398IT3. Par voie de conséquence, pour la cour, il est démontré que la SAS SOS Recours, qui n'est pas un professionnel du droit ou qui ne relève pas d'une profession assimilée, fournit à ses clients des consultations rémunérées nécessairement juridiques à titre principal. Ainsi, pour les juges du fond, c'est à bon droit que le tribunal a retenu que la SAS SOS Recours, ne respectant pas les dispositions susvisées, a une activité illicite.

Sur la demande en paiement de la facture. Au regard des considérations précédentes sur la fourniture d'une prestation illicite, la cour considère que la convention conclue est nulle. L'annulation de ce contrat implique de replacer les parties dans la situation antérieure à la conclusion de celui-ci de sorte que la cour d'appel estime que c'est à bon droit que le tribunal a condamné la SAS SOS Recours à restituer la somme versée à titre de provision sur honoraires et l'a déboutée de sa demande en paiement.

Sur les dommages et intérêts. Au regard de l'absence de formation, d'obligation de souscrire une assurance professionnelle et de satisfaire à l'obligation de cotisations auprès d'un ordre professionnel, il est constant que la SAS SOS Recours exerce une concurrence déloyale à l'égard des avocats du barreau de Lyon ainsi qu'une atteinte à l'image de la profession d'avocat. L'exercice d'une activité illicite par la SAS SOS Recours étant en lien de causalité directe et certain avec les préjudices susvisés, c'est, pour les juges du fond, à bon droit que le tribunal l'a condamnée à payer à l'Ordre des avocats des dommages-intérêts de 5 000 euros. La décision entreprise est donc confirmée à ce titre.

Pour en savoir plus : v. ÉTUDE : Le conseil et la rédaction d’actes, Les personnes habilitées sur autorisation ou agrément à délivrer un conseil ou à rédiger un acte juridique : exemples d'habilitation (ou non), in La profession d'avocat, (dir. H. Bornstein), Lexbase N° Lexbase : E36623R3.

 

 

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