Le Quotidien du 18 août 2023 : Accident du travail - Maladies professionnelles (AT/MP)

[Panorama] Panorama d’actualités jurisprudentielles relatif au contentieux accident du travail / maladie professionnelle (mai – juin 2023)

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par Yann Bougenaux, Avocat associé, cabinet Oren Avocats

le 28 Juillet 2023

Mots-clés : accident du travail • émission de réserves motivées • arrêt de travail • malaise • tarification • faute inexcusable • incapacité permanente partielle • procédure

La revue Lexbase Social vous propose de retrouver, tous les deux mois, le panorama d’actualités jurisprudentielles dédié aux juridictions du fond, de Yann Bougenaux, Avocat associé du cabinet Oren Avocats, relatif au contentieux des accidents du travail et maladies professionnelles.


Sommaire

I. Émission de réserves motivées

- CA Dijon, 25 mai 2023, n° 21/00212

II. Continuité des arrêts de travail

- CA Amiens, 16 mai 2023, n° 22/00005

III. Accident en télétravail

- CA Saint Denis de la Réunion, 4 mai 2023, n° 22/00884
- CA Amiens, 15 juin 2023, n° 22/00474

IV. Malaise et accident du travail

- CA Dijon, 11 mai 2023, n° 21/00187

V. Tarification et compte spécial

- CA Amiens, 5 mai 2023, n° 22/02921
- CA Amiens, 2 juin 2023, n° 23/00643
- CA Amiens, 2 juin 2023, n° 22/02277

VI. Faute inexcusable

- CA Rennes, 3 mai 2023, n° 22/01923

VII. Incapacité permanente partielle

- CA Nancy, 10 mai 2023, n° 22/02620

VIII. Procédure

- CA Amiens, 2 mai 2023, n° 22/01308
- CA Rouen, 26 mai 2023, n° 21/00610
- CA Montpellier, 28 juin 2023, n° 18/00351


I. Émission de réserves motivées

CA Dijon, 25 mai 2023, n° 21/00212 N° Lexbase : A57049XK : la mention « absence de témoin » dans la case relative aux réserves motivées impose une instruction contradictoire par la CPAM.

Un employeur procède à une déclaration d’accident du travail en cochant la case réserve motivée et en y ajoutant la mention « absence de témoin ».

La caisse procède à une prise en charge d’emblée considérant que les réserves ne sont pas motivées dans la mesure où elles ne remettent pas en cause la matérialité de l’accident.

La cour d‘appel censure ce raisonnement considérant que le simple fait de préciser qu’il n’y avait pas de témoin implique que l’employeur contestait le caractère professionnel de l’accident concernant les circonstances de temps et de lieux de celui-ci.

Pour aller plus loin : ÉTUDE : La procédure de reconnaissance de l’accident du travail, L’obligation de déclaration de l’accident à la caisse, in Droit de la protection sociale, Lexbase N° Lexbase : E069834M

II. Continuité des arrêts de travail

CA Amiens, 16 mai 2023, n° 22/00005 N° Lexbase : A22899WP : un rapport circonstancié d’un médecin expert, démontrant l’existence d’un état antérieur et excluant tout lien avec l’accident du travail permet de déclarer inopposable à l’employeur une partie des arrêts de travail.

La cour d’appel d’Amiens fait droit à la demande d’un employeur de se voir déclarer inopposable une partie des arrêts de travail.

Le médecin expert de la société avait très clairement identifié un état antérieur et mis en avant qu’une intervention chirurgicale était exclusivement destinée à traiter cet état antérieur.

Ainsi les arrêts qui courent à compter de ladite intervention chirurgicale sont inopposables.

Pour aller plus loin : ÉTUDE : La définition de l’accident du travail, Le principe de la présomption d’imputabilité, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E95553WS

III. Accident en télétravail

CA Saint-Denis de la Réunion, 4 mai 2023, n° 22/00884 N° Lexbase : A84699U9 : un salarié qui sort de son lieu de télétravail et qui est victime d’un accident ne peut se voir reconnaitre un accident du travail.

Un salarié qui se trouvait en situation de télétravail à son domicile sort sur la voie publique afin de tenter de comprendre l’origine de la panne informatique (panne de réseau) qui l’empêche de travailler.

Ce salarié est victime d’un accident alors même qu’il se trouve sur la voie publique.

La cour d’appel rejette la qualification d’accident de travail dans la mesure où, selon elle, le salarié s’est volontairement soustrait à l’autorité de son employeur en se rendant sur la voie publique dans la mesure où « il ne relevait pas de sa mission inhérente au contrat de travail d'identifier l'origine de la panne informatique ».

CA Amiens, 15 juin 2023, n° 22/00474 N° Lexbase : A932793T : une salariée qui est victime d’une chute à la fin de sa journée en quittant la pièce aménagée pour le télétravail ne peut bénéficier de la présomption d’imputabilité.

Une salariée qui termine sa journée de travail à 16h01 et qui chute à 16h02 en remontant les escaliers du local aménagé pour le télétravail ne peut bénéficier de la présomption d’imputabilité puisque l’accident s’est déroulé en dehors de l’exercice de l’activité professionnelle.

Il appartient dès lors au salarié de démontrer que son accident avait un lien avec le travail.

Or, selon la cour, cette preuve ne peut résulter des seules déclarations de la salariée.

La Cour rejette la qualification d’accident de travail.

Pour aller plus loin : ÉTUDE : La définition de l’accident du travail, Un accident survenu pendant le temps et sur le lieu de travail, in Droit de la protection sociale, Lexbase N° Lexbase : E95493WL, voir 2) L’exécution normale du travail

IV. Malaise et accident du travail

CA Dijon, 11 mai 2023, n° 21/00187 N° Lexbase : A84759UG : le malaise d’un salarié au temps et au lieu du travail déclaré dans le cadre d’un accident du travail avec un courrier de réserves n’impose pas à la caisse de solliciter son médecin-conseil.

Un employeur reprochait à la caisse ne n’avoir pas interrogé son médecin-conseil sur le lien entre le malaise du salarié et son activité professionnelle.

La Cour rejette cette argumentation considérant que le malaise qui est survenu au temps et eu lieu du travail bénéficie de la présomption d’imputabilité.

La caisse n’a donc pas l’obligation d’interroger son médecin-conseil quand bien même les réserves porteraient sur l’existence d’une pathologie préexistante.

Pour aller plus loin : ÉTUDE : La définition de l’accident du travail, Le principe de la présomption d’imputabilité, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E95553WS

V. Tarification et compte spécial

CA Amiens, 5 mai 2023, n° 22/02921 N° Lexbase : A87749T7 : un rapport circonstancié d’un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles permet la démonstration de l’exposition aux risques d’un salarié au sein de plusieurs entreprises.

Un employeur sollicitait d’inscription au compte spécial de la rupture de la coiffe des rotateurs de son salarié.

Il soutenait que ce salarié avait été exposé aux risques chez ses précédents employeurs et qu’il était dès lors impossible de déterminer celle dans laquelle l’exposition avait provoqué la maladie.

La cour constate que le rapport du CRRMP est dénué d’ambiguïté en ce sens qu’il constate que le salarié avait bien été exposé durant toute sa carrière et que c’était cette accumulation qui avait provoqué la pathologie.

Ainsi la démonstration de l’exposition chez plusieurs employeurs est satisfaite, imposant dès lors l’inscription au compte spécial.

Pour aller plus loin : ÉTUDE : La tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles, Les règles de principe de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles, in Droit de la protection sociale, Lexbase N° Lexbase : E2151388

CA Amiens, 2 juin 2023, n° 23/00643 N° Lexbase : A11239ZM : il appartient à la CARSAT de démontrer que le salarié a été exposé au risque chez son dernier employeur pour faire peser le coût de la pathologie à ce dernier.

Un employeur sollicite le retrait du coût d’une maladie professionnelle considérant que le salarié n’était pas exposé au risque.

La cour rappelle que la maladie doit être considéré comme contractée au service du dernier employeur chez lequel la victime a été exposée au risque avant sa constatation médicale.

C’est sur la CARSAT que pèse la charge de la preuve de cette exposition au risque chez le dernier employeur.

En l’occurrence la CARSAT échoue à démontrer l’exposition au risque du salarié chez le dernier employeur.

Le coût de la pathologie est retiré du compte employeur.

CA Amiens, 2 juin 2023, n° 22/02277 N° Lexbase : A11329ZX : les seules déclarations du salarié ne suffisent pas pour apporter la démonstration d’une exposition au risque chez le dernier employeur.

Un employeur sollicite également le retrait du coût de la maladie (amiante) considérant que le salarié n’était pas exposé au risque.

La CARSAT se fonde sur l’instruction contradictoire menée par la CPAM pour démontrer l’exposition au risque du salarié.

Or, la cour constate que l’exposition au risque ne repose que sur les seules déclarations du salarié, lesquelles sont insuffisantes.

Ainsi la cour ordonne le retrait du coût de la pathologie du compte employeur.

VI. Faute inexcusable

CA Rennes, 3 mai 2023, n° 22/01923 N° Lexbase : A19409TZ : une consolidation sans séquelles ne permet pas une indemnisation du déficit fonctionnel permanent et n’impose donc pas de complément d’expertise.

Une salariée, qui a obtenu gain de cause s’agissant d’une faute inexcusable de son employeur, sollicite un complément d’expertise afin de faire évaluer son déficit fonctionnel permanent.

La cour rejette cette demande considérant que le déficit fonctionnel permanent suppose « la persistance de séquelles non-susceptibles d'évolution en dépit des traitements et des soins et la fixation d'un taux d'incapacité permanente partielle ».

En l’occurrence la salariée avait été consolidée sans séquelles.

Pour la cour il est donc inutile de sollicite un complément d’expertise, la salariée ne pouvant prétendre à l’indemnisation d’un déficit fonctionnel permanent.

VII. Incapacité permanente partielle

CA Nancy, 10 mai 2023, n° 22/02620 N° Lexbase : A37449U9 : un taux d’incapacité permanente partielle (IPP) doit être justifié par des éléments médicaux démontrant une répercussion fonctionnelle et non seulement sur la base d’un barème.

Un employeur conteste le taux d’IPP alloué à un salarié pour des plaques pleurales.

La caisse soutient que le barème évalue les plaques pleurales à un taux d’IPP compris entre 1 % et 5 %.

Pour la caisse, la seule existence de plaques pleurales doit conduire à l’allocation d’un taux d’IPP.

La cour rejette ce raisonnement rappelant que les barèmes ne sont qu’indicatifs et qu’il convient de démontrer l’existence d’une répercussion fonctionnelle pour allouer un taux, ce que la caisse échoue à faire.

VIII. Procédure

CA Amiens, 2 mai 2023, n° 22/01308 N° Lexbase : A09209TA : une plainte pénale avec constitution de partie civile pour harcèlement moral contre inconnu constitue un évènement interruptif de prescription de l’action en reconnaissance de faute inexcusable.

Un employeur soutient que l’action en reconnaissance de faute inexcusable de sa salariée est prescrite dans la mesure où elle a saisi la CPAM d’une demande plus de deux ans après la date de fin de versement des indemnités journalières.

La cour rejette ce raisonnement considérant que la salariée avait déposé une plainte pénale pour harcèlement moral contre personne inconnu et qu’un jugement de relaxe était intervenu moins d’un an avant la saisine de la CPAM relative à la faute inexcusable de l’employeur.

Ainsi la cour juge à la recevabilité de l’action.

CA Rouen, 26 mai 2023, n° 21/00610 N° Lexbase : A81009XB : la cour rejette l’intervention volontaire de la société qui souhaitait intervenir volontairement à l’instance dirigé par son salarié contre la CPAM à la suite de la décision de refus de prise en charge de l’accident du travail.

À la suite d’une décision de refus de prise en charge par la CPAM, un salarié saisi le tribunal afin de contester ladite décision.

L’employeur intervient volontairement à la procédure sur le fondement des articles 325 N° Lexbase : L1992H4K et 330 N° Lexbase : L2007H44 du Code de procédure civile.

La cour rejette cette intervention volontaire rappelant l’existence de l’indépendance des rapports caisse/employeur et caisse/salarié.

Pour la cour l’employeur n’a aucun intérêt à intervenir volontairement à l’instance et rejette dès lors celle-ci.

CA Montpellier, 28 juin 2023, n° 18/00351 N° Lexbase : A996097Z : la péremption d’instance de l’article 386 du Code de procédure civile N° Lexbase : L2277H44 applicable en procédure d’appel en matière de Sécurité sociale porte une atteinte disproportionné au droit d’accès à un juge et doit être écartée.

La péremption de l’instance d’une partie était en jeu dans la mesure où l’employeur n’avait accompli aucune diligence entre la déclaration d’appel du 12 janvier 2018 et ses la rédaction de ses écritures le 11 avril 2023.

La Cour rejette l’argumentation relative à la péremption d’instance constatant la différence de traitement entre la procédure de première instance, qui impose que des diligences soient mises à la charge d’une partie pour soulever la péremption, et la procédure d’appel, qui n’impose plus de telles diligences.

Pour la cour cette différence de traitement ne se justifie pas et porte une atteinte disproportionné a droit d’accès à un juge.

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