Le Quotidien du 20 janvier 2022 : Baux commerciaux

[Brèves] Clause d’échelle mobile : confirmation du réputé non écrit sanctionnant l’absence de réciprocité de la variation et caractérisation de l'indivisibilité de la stipulation

Réf. : Cass. civ. 3, 12 janvier 2022, n° 21-11.169, FS-B N° Lexbase : A01987I8

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N0106BZX

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[Brèves] Clause d’échelle mobile : confirmation du réputé non écrit sanctionnant l’absence de réciprocité de la variation et caractérisation de l'indivisibilité de la stipulation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/77415373-0
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par Vincent Téchené

le 20 Janvier 2022

► En application de l'article L. 145-39 du Code de commerce N° Lexbase : L5037I3X, est réputée non écrite toute clause d'indexation du loyer ne jouant qu'en cas de variation à la hausse de l'indice de référence et seule la stipulation prohibée doit être réputée non écrite ;

Ne caractérise pas l'indivisibilité de la clause l'intention du bailleur d'en faire, sans distinction de ses différentes parties, une condition essentielle et déterminante de son consentement.

Faits et procédure. Une société a donné en location des locaux à usage commercial. Le contrat comporte une clause d'indexation annuelle du loyer stipulant que celle-ci ne s'appliquera qu'en cas de variation à la hausse de l'indice de référence. La locataire a assigné la bailleresse en annulation de la clause d'indexation, restitution des sommes payées au titre de celle-ci et remboursement d'honoraires et de divers frais.

La cour d’appel ayant fait droit aux demandes de la locataire, la bailleresse a formé un pourvoi en cassation.

Décision. La Cour de cassation rappelle le caractère non écrit de la clause d’échelle mobile ne variant qu’à la hausse et que seule la stipulation prohibée doit être réputée non écrite.

  • Sur le caractère non écrit de la clause d’échelle mobile ne variant qu’à la hausse

La bailleresse soutenait, d’abord, que la stipulation, qui se borne à écarter l'application de la clause d'indexation en cas de baisse de l'indice sur lequel l'indexation est fondée, ne fait échec ni aux dispositions de l'article L. 145-39 du Code de commerce, ni à celles de l’article L. 112-1 du Code monétaire et financier N° Lexbase : L5471ICM.

La Cour de cassation rejette le moyen.

Elle rappelle que selon l’article L. 145-15 du Code de commerce N° Lexbase : L5032I3R, dans sa rédaction issue de la loi « Pinel » (loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 N° Lexbase : L4967I3D), qui a substitué à la nullité des clauses ayant pour effet de faire échec aux dispositions des articles L. 145-37 N° Lexbase : L5765AID à L. 145-41 du Code de commerce leur caractère réputé non écrit, est applicable aux baux en cours lors de l'entrée en vigueur de cette loi (v. déjà, Cass. civ. 3, 19 novembre 2020, n° 19-20.405, FS-P+B+I N° Lexbase : A9460347 ; J. Prigent, Lexbase Affaires, novembre 2021, n° 656 N° Lexbase : N5448BYG – Cass. civ. 3, 30 juin 2021, n° 19-23.038, FP-B+C N° Lexbase : A20224YK ; M. L. Besson, Lexbase Affaires, juillet 2021, n° 685 N° Lexbase : N8425BYP).

En outre, aux termes de l'article L. 145-39 du Code de commerce, dans sa rédaction applicable, par dérogation à l'article L. 145-38 N° Lexbase : L5034I3T, si le bail est assorti d'une clause d'échelle mobile, la révision peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d'un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire.

La Cour rappelle alors que, d'une part, le propre d'une clause d'échelle mobile est de faire varier à la hausse et à la baisse, de sorte que la clause figurant au bail et écartant toute réciprocité de variation, si elle ne crée pas la distorsion prohibée par l'article L. 112-1 du Code monétaire et financier, fausse le jeu normal de l'indexation (v. déjà Cass. civ. 3., 14 janvier 2016, n° 14-24.681, FS-P+B N° Lexbase : A9444N38 ; J. Prigent, Lexbase Affaires, janvier 2016, n° 451 N° Lexbase : N0987BWH – Cass. civ. 3, 30 juin 2021, n° 19-23.038, FP-B+C, préc. et les obs. préc.). D'autre part, la neutralisation des années de baisse de l'indice de référence a mathématiquement pour effet de modifier le délai d'atteinte du seuil de variation du quart, conditionnant la révision du loyer, tel qu'il résulterait de l'évolution réelle de l'indice.

Dès lors, pour la Haute juridiction, la cour d'appel a exactement retenu que la clause d'indexation excluant toute réciprocité de la variation en prévoyant que l'indexation ne s'effectuerait que dans l'hypothèse d'une variation à la hausse contrevenait aux dispositions de l'article L. 145-39 du Code de commerce et devait être réputée non écrite par application de l'article L. 145-15 du même code.

La Cour de cassation confirme donc sa jurisprudence en ce qui concerne les clauses d’échelle mobile stipulée dans les contrats de baux commerciaux. Il en va différemment dans les contrats de prêt pour lesquels elle a affirmé qu’aucune disposition légale ou réglementaire, ni aucun principe jurisprudentiel, n’interdit aux parties à un contrat de prêt de prévoir une clause d’indexation du taux d'intérêt excluant la réciprocité de la variation de ce taux (Cass. com., 4 novembre 2021, n° 20-11.099, FS-B N° Lexbase : A07077BS ; J. Lasserre Capdeville, Lexbase Affaires, novembre 2021, n° 695 N° Lexbase : N9402BYU).

  • Sur l’indivisibilité de la clause dans son ensemble

En second lieu, la bailleresse soutenait que contrairement à ce qu’ont retenu les juges d’appel la stipulation interdisant la variation à la baisse pouvait être seule réputée non écrite, sans pour autant remettre en cause le principe de l'indexation du loyer, seule déterminante du consentement du bailleur à la conclusion du bail.

La Cour de cassation accueille ce moyen et censure sur ce point l’arrêt d’appel au visa de l’article L. 145-39 du Code de commerce.

Elle relève que pour réputer la clause d'indexation non écrite en son entier, l'arrêt d’appel a retenu que l'intention du bailleur était d'en faire, sans distinction de ses différentes parties, une condition essentielle et déterminante de son consentement, toutes les stipulations de cette clause revêtant un caractère essentiel, conduisant à l'indivisibilité de celles-ci et empêchant d'opérer un choix entre elles pour n'en conserver que certaines.

Pour la Haute juridiction, en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'indivisibilité, alors que seule la stipulation prohibée doit être réputée non écrite, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Elle confirme donc ici sa position selon laquelle seule la stipulation qui crée la distorsion prohibée est réputée non écrite (v. déjà, Cass. civ. 3, 29 novembre 2018, n° 17-23.058, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A9158YNI ; J. Prigent, Lexbase affaires, décembre 2018, n° 575 N° Lexbase : N6697BXC – Cass. civ. 3, 6 février 2020, n° 18-24.599, FS-P+B+I N° Lexbase : A39713DG ; J. Prigent, Lexbase Affaires, février 2020, n° 624 N° Lexbase : N2211BYK – Cass. civ. 3, 30 juin 2021, n° 19-23.038, FP-B+C, préc. et les obs. préc.).

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La clause d'indexation ou clause d'échelle mobile du bail commercial, L'irrégularité de la clause d'indexation "à la hausse", in Baux commerciaux, (dir. J. Prigent), Lexbase N° Lexbase : E0759E9Y.

 

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