Le Quotidien du 18 janvier 2019 : Procédure pénale

[Brèves] Procédure de retrait d’une habilitation à exercer les fonctions d’OPJ et respect des droits de la défense

Réf. : Cass. crim., 8 janvier 2019, n° 18-82.353, FS-P+B (N° Lexbase : A9739YSI)

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par June Perot

le 16 Janvier 2019

► La procédure, prévue aux articles R. 15-2 (N° Lexbase : L0721ACP) et R. 15-6 (N° Lexbase : L0725ACT) du Code de procédure pénale et mise en oeuvre par le procureur général près la cour d’appel, si elle peut conduire ce magistrat à prononcer une mesure de suspension ou de retrait d’habilitation, constitue une procédure disciplinaire spécifique accordant à l’officier de police judiciaire concerné par ladite procédure, dans le respect du principe du contradictoire, l’assistance d’un avocat lors des auditions et l’accès au dossier ;

 

► le recours formé contre la décision prise en première instance relève de la compétence d’une commission, composée par trois magistrats de la Cour de cassation, qui, conformément aux articles R. 15-7 (N° Lexbase : L0771ACK) à R. 15-16 (N° Lexbase : L0780ACU) du Code de procédure pénale, procède à un réexamen en fait comme en droit du dossier et exerce un contrôle de l’arrêté pris par le procureur général et dont la décision est elle-même soumise au contrôle de la Cour de cassation pour violation de la loi, de sorte que l’intéressé bénéficie de garanties suffisantes de nature à préserver ses droits, conformément à l'article 6 § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme (N° Lexbase : L7558AIR), notamment eu égard à l’exigence d’impartialité.

 

Ainsi statue la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 8 janvier 2019 (Cass. crim., 8 janvier 2019, n° 18-82.353, FS-P+B N° Lexbase : A9739YSI).

 

Les faits de l’espèce concernaient un officier de police judiciaire du service de l’Office central de répression du trafic illicite de stupéfiants (OCRTIS) qui, dans le cadre d’une affaire de trafic de stupéfiants, s’est vu ordonner le retrait de son habilitation à exercer les fonctions d’officier de police judiciaire. Le procureur général lui reprochait son manque de discernement, des manquements à la loyauté de l’autorité judiciaire, des négligences graves et répétées, un manque de professionnalisme et une confiance excessive en l’informateur impliqué. Cette décision de retrait a été confirmée après qu’il eut formé un recours préalable. L’intéressé a alors déposé une requête devant la commission prévue à l’article 16-2 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7030A47).

 

Dans sa décision, la commission de recours des officiers de police judiciaire a, d’une part, rejeter la demande du requérant tendant à l’annulation de l’arrêté du procureur général lui retirant son habilitation. Elle a toutefois infirmé l'arrêté du procureur général prononçant le retrait de l’habilitation et ordonné la suspension de ladite habilitation pendant une durée de deux ans.

 

Pour rejeter la demande d’annulation, prise du défaut de conformité à l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme de la procédure prévue aux articles R.15-2 et R.15-6 du Code de procédure pénal devant le procureur général près la cour d’appel, la décision a énoncé qu’une mesure de retrait ou de suspension de l’habilitation à exercer des fonctions d’officier de police judiciaire ne saurait être assimilée à une accusation en matière pénale dès lors que les effets de ladite mesure se limitent à constituer un empêchement à l'accomplissement de certains actes de procédure pénale directement liés à cette habilitation, sans modifier la position statutaire du policier, ni son grade, sauf à lui faire occuper un emploi compatible avec le retrait ou la suspension intervenue et que cette mesure, indépendante des poursuites pénales et qui ne vise pas à sanctionner des infractions, ne comporte ni mesure privative de liberté, ni sanction financière. Les juges ont relevé que l'exercice des attributions liées à la qualité d'officier de police judiciaire impliquait une relation spéciale de confiance et de loyauté vis à vis de l'autorité judiciaire qui assure la direction et le contrôle de la police judiciaire. Ils ont ajouté que le requérant avait bénéficié d’une procédure contradictoire, prévue par la loi, garantissant ses droits qui prévoit, outre la mise à sa disposition du dossier, son audition préalable, avec l'assistance d'un avocat, par le procureur général, et lui octroie la faculté d’exercer un recours contre l’arrêté, motivé, pris par ce dernier devant une formation de trois magistrats de la Cour de cassation, ainsi que la possibilité de former un pourvoi en cassation contre la décision rendue par la commission de recours, laquelle est également motivée.

 

Pour infirmer l'arrêté du procureur général prononçant le retrait de l’habilitation de l’intéressé et ordonner la suspension de ladite habilitation pendant une durée de deux ans, la décision a retenu l’existence de griefs tirés, d’une part, de manquements à la loyauté à l'égard de l'autorité judiciaire, d’autre part, de négligences graves et répétées, d’un manque de professionnalisme et d’une confiance excessive manifestée par l’intéressé envers l’informateur. Les juges, afin de caractériser les premiers, ont relevé l’absence d’information donnée au procureur de la République sur les quantités de stupéfiants transportées lors des deux livraisons surveillées, l’affirmation mensongère fournie à ce magistrat quant à la connaissance que l’OCRTIS avait de la localisation des points de stockage et des phases de livraison une fois la seconde livraison surveillée réalisée, la transmission au juge d’instruction de fausses informations, relatives tant à l’évolution immédiate de la procédure à la veille de la saisie douanière opérée à Paris, qu’à l’importance réelle de l’informateur dans ces opérations et la dissimulation au procureur de la République de Rouen d’un lieu de stockage de stupéfiants situé dans son ressort, faisant suite à la première livraison surveillée de résine de cannabis.

 

Les juges ont énoncé que les autres griefs ont été établis, outre par la remise par l’informateur de trois téléphones cryptés au requérant, par la cessation de la surveillance des stupéfiants objet de la dernière livraison surveillée depuis leur départ de l’entrepôt utilisé en région lyonnaise, alors qu’aux fins d'identifier et, le cas échéant, d'interpeller les destinataires et commanditaires de cette opération, il incombait à l’intéressé d’assurer le suivi de cette cargaison, sans se fier exclusivement à son informateur, y compris, en déléguant l’exécution à son adjoint compte tenu de son déplacement en Colombie.

 

Saisie d’un pourvoi, la Haute juridiction énonce la solution susvisée et rejette le pourvoi. S’agissant de la suspension de l’habilitation qui était contestait pas le requérant dans son pourvoi, elle retint qu’en statuant par ces motifs, dont il résulte qu'après avoir souverainement apprécié les éléments de la cause, contradictoirement débattus, elle a procédé à une analyse de chacun des griefs imputés à l’intéressé au regard de la qualité hiérarchique de ce fonctionnaire de police et de la gravité des faits qui lui étaient reprochés, la commission de recours des officiers de police judiciaire, qui n'avait pas à suivre le demandeur dans le détail de son argumentation, a justifié sa décision. Elle en déduit que le moyen qui manque en fait dès lors que décision attaquée ne reproche pas à l'intéressé d’avoir limité l’information relative à une livraison surveillée au seul bénéfice du procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel les opérations de surveillances étaient susceptibles de commencer, doit être écarté (cf. l’Ouvrage «Procédure pénale», Le retrait ou la suspension de l'habilitation N° Lexbase : E4174EU7).

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