Dans un arrêt du 2 juillet 2015 le Tribunal de l'Union européenne a retenu que l'avance d'actionnaire proposée à France Télécom par les autorités françaises alors que l'opérateur connaissait une crise importante ne peut pas être qualifiée d'aide d'Etat, la Commission n'ayant pas correctement appliqué le critère de l'"investisseur privé avisé" (TPIUE, 2 juillet 2015, aff. T-425/04 Renv.
N° Lexbase : A2291NMS). Face à la situation financière de France Télécom, l'Etat français, actionnaire de cette société, a publié l'annonce d'un projet d'avance d'actionnaire qu'il envisageait à son profit, à savoir l'ouverture d'une ligne de crédit sous la forme d'un contrat d'avance. Cette offre n'a été ni acceptée, ni exécutée, mais la Commission a conclu que cette avance, placée dans le contexte des déclarations faites depuis juillet 2002, constituait une aide d'Etat incompatible avec le droit de l'Union. Le 19 mars 2013, la CJUE a censuré l'arrêt du Tribunal qui avait annulé la décision de la Commission mais a renvoyé l'affaire à ce dernier pour qu'il statue sur certains arguments de l'Etat français et de France Télécom (CJUE, 19 mars 2013, aff. jointes C-399/10 P et C-401/10 P
N° Lexbase : A0110KBP). Le Tribunal considère, au regard des arguments sur lesquels il ne s'était pas penché dans le cadre du premier arrêt, que la Commission a eu tort de qualifier d'aide d'Etat l'offre d'avance proposée à France Télécom et annule donc la décision de la Commission. Le Tribunal rappelle que ce sont l'annonce du 4 décembre 2002 et l'offre d'avance d'actionnaire, prises ensemble, qui ont été qualifiées d'aide d'Etat par la Commission, ce qui implique que le critère de l'investisseur privé avisé doit être appliqué à ces deux mesures et à elles seules. Or, le Tribunal constate que, pour considérer l'offre d'avance d'actionnaire comme une aide d'Etat, la Commission a essentiellement appliqué le critère de l'investisseur privé aux déclarations faites à partir du mois de juillet 2002. Une telle application du critère est d'autant plus erronée que la Commission ne disposait pas d'éléments suffisants pour déterminer si les déclarations faites à partir du mois de juillet 2002 étaient, en elles-mêmes, susceptibles d'engager des ressources d'Etat et, partant, de constituer une aide d'Etat. Par ailleurs, le Tribunal rappelle que la Commission était tenue d'analyser le critère de l'investisseur privé avisé en se plaçant dans le contexte de l'époque à laquelle les mesures en cause (annonce du 4 décembre 2002 et offre d'avance d'actionnaire) avaient été prises par l'Etat français, à savoir en décembre 2002. Or, le Tribunal relève que la Commission s'est en réalité placée dans le contexte de la situation préalable au mois de juillet 2002. En outre, le Tribunal souligne que les déclarations faites à partir du mois de juillet 2002 ne comportaient pas en elles-mêmes l'anticipation d'un soutien financier spécifique à l'instar de celui qui s'est finalement concrétisé au mois de décembre 2002.
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