Directive communautaire
DIRECTIVE 92/96/CEE DU CONSEIL
du 10 novembre 1992
portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe sur la vie, et modifiant les directives 79/267/CEE et 90/619/CEE (troisième directive assurance vie)
LE CONSEIL DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 57 paragraphe 2 et son article 66,
vu la proposition de la Commission (1),
en coopération avec le Parlement européen (2),
vu l'avis du Comité économique et social (3),
(1) considérant qu'il est nécessaire d'achever le marché intérieur dans le secteur de l'assurance directe sur la vie, sous le double aspect de la liberté d'établissement et de la libre prestation de services, afin de faciliter aux entreprises d'assurance ayant leur siège dans la Communauté la prise d'engagements à l'intérieur de la Communauté;
(2) considérant que la deuxième directive (90/619/CEE) du Conseil, du 8 novembre 1990, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe sur la vie, fixant les dispositions destinées à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services et modifiant la directive 79/267/CEE (4) a largement contribué à la réalisation du marché intérieur dans le secteur de l'assurance directe sur la vie, en accordant déjà aux preneurs d'assurance qui, du fait qu'ils prennent l'initiative de souscrire un engagement avec une entreprise d'assurance dans un autre État membre, n'ont pas besoin d'une protection particulière dans l'État membre de l'engagement, la pleine liberté de faire appel au marché le plus large de l'assurance;
(3) considérant que la directive 90/619/CEE constitue, par conséquent, une étape importante vers le rapprochement des marchés nationaux dans un seul marché intégré, étape qui doit être complétée par d'autres instruments communautaires dans le but de permettre à tous les preneurs d'assurance, qu'ils prennent l'initiative eux-mêmes ou non, de faire appel à tout assureur ayant son siège social dans la Communauté et y exerçant son activité en régime d'établissement ou en régime de libre prestation de services, tout en leur garantissant une protection adéquate;
(4) considérant que la présente directive s'inscrit dans l'oeuvre législative communautaire déjà réalisée, notamment par la première directive (79/267/CEE) du Conseil, du 5 mars 1979, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité de l'assurance directe sur la vie, et son exercice (5), ainsi que la directive 91/674/CEE du Conseil, du 19 décembre 1991, concernant les comptes annuels et consolidés des entreprises d'assurance (6);
(5) considérant que la démarche retenue consiste à réaliser l'harmonisation essentielle, nécessaire et suffisante pour parvenir à une reconnaissance mutuelle des agréments et des systèmes de contrôle prudentiel, qui permette l'octroi d'un agrément unique valable dans toute la Communauté et l'application du principe du contrôle par l'État membre d'origine;
(6) considérant que, en conséquence, l'accès à l'activité d'assurance et l'exercice de cette activité sont dorénavant subordonnés à l'octroi d'un agrément administratif unique, délivré par les autorités de l'État membre où l'entreprise d'assurance a son siège social; que cet agrément permet à l'entreprise de se livrer à des activités partout dans la Communauté, soit en régime d'établissement, soit en régime de libre prestation de services; que l'État membre de la succursale ou de la libre prestation de services ne pourra plus demander de nouvel agrément aux entreprises d'assurance qui souhaitent y exercer leurs activités d'assurance et qui ont déjà été agréés dans l'État membre d'origine; qu'il convient, pour en tenir compte, de modifier en ce sens les directives 79/267/CEE et 90/619/CEE;
(7) considérant qu'il incombe désormais aux autorités compétentes de l'État membre d'origine d'assurer la surveillance de la solidité financière de l'entreprise d'assurance, notamment en ce qui concerne son état de solvabilité et la constitution de provisions techniques suffisantes ainsi que leur représentation par des actifs congruents;
(8) considérant que la réalisation des opérations auxquelles se réfère l'article 1er paragraphe 2 point c) de la directive 79/267/CEE ne pourra impliquer, en aucun cas, une atteinte aux pouvoirs conférés aux autorités respectives vis-à-vis des entités titulaires des actifs envisagés dans ladite disposition;
(9) considérant que certaines dispositions de la présente directive définissent des normes minimales; que l'État membre d'origine peut édicter des règles plus strictes à l'égard des entreprises d'assurance agréées par ses propres autorités compétentes;
(10) considérant que les autorités compétentes des États membres doivent disposer des moyens de contrôle nécessaires pour assurer un exercice ordonné des activités de l'entreprise d'assurance dans l'ensemble de la Communauté, qu'elles soient effectuées en régime d'établissement ou en régime de libre prestation de services; que, en particulier, elles doivent pouvoir adopter des mesures de sauvegarde appropriées ou imposer des sanctions ayant pour but de prévenir des irrégularités et des infractions éventuelles aux dispostions en matière de contrôle des assurances;
(11) considérant qu'il est nécessaire d'adapter les dispositions concernant le transfert de portefeuille au régime juridique de l'agrément unique introduit par la présente directive;
(12) considérant qu'il convient de prévoir un assouplissement de la règle de spécialisation établie par la directive 79/267/CEE de telle manière que les États membres qui le souhaitent aient la possibilité d'accorder à une même entreprise des agréments pour les branches visées à l'annexe de la directive 79/267/CEE et pour les opérations d'assurance relevant des branches 1 et 2 de l'annexe de la directive 73/239/CEE (7); que, toutefois, cette faculté peut être soumise à certaines conditions en matière de respect des règles comptables et des règles de liquidation;
(13) considérant qu'il est nécessaire, pour la protection des assurés, que chaque entreprise d'assurance constitue des provisions techniques suffisantes; que le calcul de ces provisions repose pour l'essentiel sur des principes actuariels; qu'il convient de coordonner ces principes afin de faciliter la reconnaissance mutuelle des dispositions prudentielles applicables dans les différents États membres;
(14) considérant qu'il est souhaitable, dans un souci de prudence, d'établir une coordination minimale des règles en matière de limitation du taux d'intérêt utilisé dans le calcul des provisions techniques et que, pour cette limitation, les méthodes actuellement existantes étant toutes également correctes, prudentielles et équivalentes, il semble approprié de donner aux États membres la possibilité de choisir librement la méthode à utiliser;
(15) considérant qu'il y a lieu de coordonner les règles concernant le calcul, la diversification, la localisation et la congruence des actifs représentatifs des provisions techniques afin de faciliter la reconnaissance mutuelle des dispositions des États membres; que cette coordination doit tenir compte des mesures adoptées en matière de libération des mouvements de capitaux par la directive 88/361/CEE du Conseil, du 24 juin 1988, pour la mise en oeuvre de l'article 67 du traité (8), ainsi que des progrès de la Communauté en vue de l'achèvement de l'union économique et monétaire;
(16) considérant toutefois que l'État membre d'origine ne peut exiger des entreprises d'assurance qu'elles placent les actifs représentatifs de leurs provisions techniques dans des catégories d'actifs déterminées, de telles exigences étant incompatibles avec les mesures en matière de libération des mouvements de capitaux prévues par la directive 88/361/CEE;
(17) considérant que, dans l'attente d'une directive sur les services d'investissement harmonisant entre autres la définition de la notion de marché réglementé, il est nécessaire, pour les besoins de la présente directive et sans préjudice de cette harmonisation à venir, de donner une définition provisoire de cette notion, à laquelle se substituera la définition ayant fait l'objet d'une harmonisation communautaire qui confiera à l'État membre d'origine du marché les responsabilités confiées en la matière et transitoirement par la présente directive à l'État membre d'origine de l'entreprise d'assurance;
(18) considérant qu'il convient de compléter la liste des éléments susceptibles d'être utilisés pour constituer la marge de solvabilité, exigée par la directive 79/267/CEE, afin de tenir compte des nouveaux instruments financiers et de facilités accordées aux autres institutions financières pour l'alimentation de leurs fonds propres;
(19) considérant que l'harmonisation du droit du contrat d'assurance n'est pas une condition préalable de la réalisation du marché intérieur des assurances; que, en conséquence, la possibilité laissée aux États membres d'imposer l'application de leur droit aux contrats d'assurance comportant des engagements situés sur leur territoire est de nature à apporter des garanties suffisantes aux preneurs d'assurance;
(20) considérant que, dans le cadre d'un marché intérieur, il est dans l'intérêt du preneur d'assurance que celui-ci ait accès à la plus large gamme de produits d'assurance offerts dans la Communauté pour pouvoir choisir parmi eux celui qui convient le mieux à ses besoins; qu'il incombe à l'État membre de l'engagement de veiller à ce qu'il n'y ait aucun obstacle sur son territoire à la commercialisation de tous les produits d'assurance offerts dans la Communauté, pour autant que ceux-ci ne soient pas contraires aux dispositions légales d'intérêt général en vigueur dans l'État membre de l'engagement et dans la mesure où l'intérêt général n'est pas sauvegardé par les règles de l'État membre d'origine, étant entendu que ces dispositions doivent s'appliquer de façon non discriminatoire à toute entreprise opérant dans cet État membre et être objectivement nécessaire et proportionnées à l'objectif poursuivi;
(21) considérant que les États membres doivent être en mesure de veiller à ce que les produits d'assurance et la documentation contractuelle utilisée pour la couverture des engagements pris sur leur territoire, en régime d'établissement ou en régime de libre prestation de services, respectent les dispositions légales spécifiques d'intérêt général applicables; que les systèmes de contrôle à employer doivent s'adapter aux exigences du marché intérieur sans pouvoir constituer une condition préalable à l'exercice de l'activité d'assurance; que, dans cette perspective, les systèmes d'approbation préalable des conditions d'assurance n'apparaissent pas justifiés; qu'il convient, en conséquence, de prévoir d'autres systèmes mieux appropriés aux exigences du marché intérieur et permettant à tout État membre de garantir la protection essentielle des preneurs d'assurance;
(22) considérant qu'il est néanmoins admis que l'État membre d'origine, pour l'application des principes actuariels conformes à la présente directive, peut exiger la communication systématique des bases techniques applicables au calcul des tarifs des contrats et des provisions techniques, cette communication des bases techniques excluant la notification des conditions générales et particulières des contrats ainsi que celle des tarifs commerciaux de l'entreprise;
(23) considérant que, dans le cadre d'un marché unique de l'assurance, le consommateur aura un choix plus grand et plus diversifié de contrats; que, afin de profiter pleinement de cette diversité et d'une concurrence accrue, il doit disposer des informations nécessaires pour choisir le contrat qui convient le mieux à ses besoins; que cette nécessité d'informations est d'autant plus importante que la durée des engagements peut être très longue; qu'il convient, en conséquence, de coordonner les dispositions minimales pour que le consommateur reçoive une information claire et précise sur les caractéristiques essentielles des produits qui lui sont proposés et sur les coordonnées des organismes habilités à connaître des réclamations des preneurs, assurés ou bénéficiaires du contrat;
(24) considérant que la publicité des produits d'assurance est essentielle pour faciliter l'exercice effectif des activités d'assurance dans la Communauté; qu'il importe de laisser aux entreprises d'assurance la possibilité de recourir à tous les moyens normaux de publicité dans l'État membre de la succursale ou de la prestation de services; que, néanmoins, les États membres peuvent exiger le respect de leurs règles régissant la forme et le contenu de cette publicité et découlant soit des actes communautaires adoptés en matière de publicité, soit des dispositions adoptées par les États membres pour des raisons d'intérêt général;
(25) considérant que, dans le cadre du marché intérieur, aucun État membre ne peut plus interdire l'exercice simultané de l'activité d'assurance sur son territoire en régime d'établissement et en régime de libre prestation de services; qu'il convient, dès lors, de supprimer la faculté accordée à ce sujet aux États membres par la directive 90/619/CEE;
(26) considérant qu'il convient de prévoir un régime de sanctions applicables lorsque l'entreprise d'assurance ne se conforme pas, dans l'État membre où l'engagement est pris, aux dispositions d'intérêt général qui lui sont applicables;
(27) considérant que certains États membres ne soumettent les opérations d'assurance à aucune forme d'imposition indirecte tandis que la majorité d'entre eux leur appliquent des taxes particulières et d'autres formes de contribution; que, dans les États membres où ces taxes et contributions sont perçues, la structure et le taux de celles-ci divergent sensiblement; qu'il convient d'éviter que les différences existantes ne se traduisent par des distorsions de concurrence pour les services d'assurance entre les États membres; que, sous réserve d'une harmonisation ultérieure, l'application du régime fiscal, ainsi que d'autres formes de contributions prévues par l'État membre où l'engagement est pris, est de nature à remédier à un tel inconvénient et qu'il appartient aux États membres d'établir les modalités destinées à assurer la perception de ces taxes et contributions;
(28) considérant qu'il est important de réaliser une coordination communautaire en matière de liquidation des entreprises d'assurance; que, dès à présent, il est essentiel de prévoir en cas de liquidation d'une entreprise d'assurance que le système de garantie mis en place dans chaque État membre assure une égalité de traitement entre tous les créanciers d'assurance, sans distinction quant à la nationalité de ces créanciers et quelle que soit la modalité de souscription de l'engagement;
(29) considérant que des modifications techniques des règles détaillées figurant dans la présente directive peuvent être nécessaires, à certains intervalles de temps, pour prendre en compte l'évolution future du secteur de l'assurance; que la Commission procédera à de telles modifications, pour autant qu'elles seront nécessaires, après avoir consulté le comité des assurances, institué par la directive 91/675/CEE (9), dans le cadre des pouvoirs d'exécution conférés à la Commission par les dispositions du traité;