CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 17972
M. xxxxx
Lecture du 24 Juillet 1981
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Sur le rapport de la 7ème Sous-section
Vu, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 21 mai 1979 et 24 mars 1980, la requête sommaire et le mémoire complémentaire présentés pour M. xxxxx demeurant à xxxxx et tendant à obtenir du Conseil d'Etat: - qu'il annule un jugement du tribunal administratif du Limoges du 20 mars 1979, en tant que par ledit jugement. après avoir renvoyé l'exposant devant le directeur des services fiscaux de la xxxxx pour le calcul de la réduction d'impôt correspondant à la déduction d'une provision de 70 000 F constituée à la clôture de l'exercice 1967, dit que les frais de timbre exposés par lui pour 110,50 F lui seront remboursés et prescrit une expertise avant-dire-droit sur la question des provisions constituées pour les travaux du dépôt de xxxxx, le tribunal administratif a rejeté le surplus des conclusions de l'exposant tendant à la réduction des cotisations supplémentaires auxquelles il a été assujetti à l'impôt sur le revenu et à la taxe complémentaire au titre des années 1967, 1968 et 1969 et à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1970;
Vu le code général des impôts;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953;
Vu la loi du 30 décembre 1977.
Sur la régularité de la procédure d'imposition et la charge de la preuve:
Considérant, d'une part, que, si la commission départementale des impôts a formulé un avis sur le différend qui opposait l'administration au contribuable sans distinguer des questions de fait les questions de droit sur lesquelles elle n'avait pas qualité pour se prononcer, cette circonstance n'affecte ni la régularité de la procédure d'imposition, ni la charge de la preuve qui, l'imposition ayant été établie conformément à l'avis de la commission, incombe, sur les questions de fait, au contribuable;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts: "2. le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période... L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés"; qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions que, pour pouvoir déduire une provision, le contribuable doit en justifier que, dès lors, en opposant à l'entreprise qu'elle n'avait pas justifié de certaines des provisions dont elle avait opéré la déduction, la commission départementale n'a pas mis illégalement la preuve à la charge du contribuable;
Sur la réintégration des provisions:
Considérant qu'aux termes de l'article 39-1 du code général des impôts: "le bénéfice net est établi sur déduction de toutes charges, celles-ci comprenant... notamment: ... 5° les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des évènements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice et figurent au relevé des provisions prévu à l'article 54";
En ce qui concerne la provision pour expropriation:
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, si la commune de la xxxxx avait manifesté l'intention d'ouvrir une nouvelle voie dont le tracé aurait pu, selon l'un des projets envisagés, obliger l'entreprise xxxxx à déplacer le dépôt qu'elle possède sur le territoire de ladite commune, il résulte de l'instruction que ce projet n'est resté qu'à l'état de pure intention et qu'aucun acte laissant présager sa mise en oeuvre n'a été pris; que, dès lors, la charge eventuelle correspondante, n'ayant pas un caractère probable, ne pouvait pas justifier la constitution d'une provision au bilan de clôture de l'exercice 1967;
Considérant que, si M. xxxxx a fait valoir en cours d'instance que cette provision pouvait aussi se justi fier par la mise en demeure, qui à la même époque aurait été adressée à l'entreprise par les services de sécurité, de réaliser certains travaux dans le dépôt, cette nouvelle justification, à la supposer pertinente, doit être écartée comme inopérante dès lors qu'elle équivaut à modifier l'objet de la provision litigieuse et qu'elle conduirait donc, si elle était admise, à substituer, postérieurement à l'expiration du délai de déclaration, une provision nouvelle à celle qui a été initialement déclarée dans les formes prescrites à l'article 39.1.5° précité;
En ce qui concerne les provisions pour créances douteuses:
Considérant que, si, pour justifier une provision de 150 000 F constituée à la clôture de l'exerciee 1968 et correspondant à un prêt consenti à un pompiste client de l'entreprise xxxxx, qui a pour activité l'importation et la distribution de produits pétroliers, M. xxxxx allègue que ce débiteur se trouvait alors dans une situation financière difficile, il n'apporte aucun élément permettant de connaître avec une précision suffisante le risque de non recouvrement de ladite créance; que le requérant ne justifie donc pas du caractère de probabilité de la perte à laquelle cette provision a pour objet de faire face;
Considérant, de même, que, si pour justifier une provision de 25 000 F constituée à la clôture de l'exercice 1970 pour un prêt consenti à un constructeur d'avions de tourisme, en vue de la constitution d'une société destinée à l'implantation d'une petite industrie aéronautique A xxxxx, le requérant fait état de difficultés financières rencontrées par ce débiteur, il ne justifie pas du caractère improbable du recouvrement de ce prêt;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il y soit besoin d'examiner si le second des deux prêts susmentionnés a été consenti dans le cadre d'une gestion normale, que c'est à bon droit que l'administration a prononcé la réintégration des provisions correspondantes;
En ce qui concerne la provision pour travaux:
Considérant que les frais d'entretien et de réparation constituent normalement une charge de l'exercice au cours duquel ils sont exposés; que, par suite, ils ne peuvent, avant que les travaux ne soient engagés, faire l'objet de provisions constituées sur le fondement de l'article 39-1-5° précité que si les travaux à prévoir excèdent, par leur nature et par leur importance, et sans pour autant procurer à l'entreprise une augmentation de ses valeurs d'actif, les travaux d'entretien ou de réparation dont le coût entre dans les charges annuelles et normales de l'entreprise;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les travaux que l'entreprise xxxxx projetait d'exécuter dans la station service qu'elle possédait au xxxxx et en vue desquels elle a constitué une provison à la clôture de l'exercice 1967 aient excédé, par leur nature et par leur importance, les travaux d'entretien ou de réparation compris dans les charges annuelles et normales de l'entreprise; qu'ainsi, c'est à bon droit que l'administration a réintégré la provision dont il s'agit dans les bases d'imposition litigieuses;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. xxxxx n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers, après lui avoir donné satisfaction sur certains points, a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la réduction des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu des personnes physiques et à la taxe complémentaire au titre des années 1967, 1968 et 1969 et à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1970 auxquelles il a été assujetti à raison de la part lui revenant dans les résultats de l'entreprise xxxxx, dont il est copropriétaire indivis.
DECIDE
Article 1er - La requête de M. xxxxx est rejetée.