Jurisprudence : Cass. soc., 12-10-2011, n° 10-30.712, F-D, Rejet

Cass. soc., 12-10-2011, n° 10-30.712, F-D, Rejet

A7637HYI

Référence

Cass. soc., 12-10-2011, n° 10-30.712, F-D, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/5613145-cass-soc-12102011-n-1030712-fd-rejet
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SOC. PRUD'HOMMES CB
COUR DE CASSATION
Audience publique du 12 octobre 2011
Rejet
M. TRÉDEZ, conseiller le plus ancien faisant fonction de président
Arrêt no 2017 F-D
Pourvoi no Q 10-30.712
Aide juridictionnelle partielle en demande
au profit de M. Patrick Z.
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 18 mars 2010.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par M. Patrick Z, domicilié Crêches-sur-Saône,
contre l'arrêt rendu le 8 octobre 2009 par la cour d'appel de Dijon (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Simire, société anonyme, dont le siège est Mâcon cedex 9,
défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 14 septembre 2011, où étaient présents M. Trédez, conseiller le plus ancien faisant fonction de président et rapporteur, M. Chollet, Mme Vallée, conseillers, M. Lalande, avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Trédez, conseiller, les observations de la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat de M. Z, de Me Blondel, avocat de la société Simire, l'avis de M. Lalande, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 8 octobre 2009), que M. Z a été engagé par la société Simire en 1972 en qualité de soudeur ; qu'à la suite de problèmes de santé, le salarié, qui exerçait ses fonctions dans le cadre d'un mi-temps thérapeutique, a été déclaré le 19 mars 1997 par le médecin du travail apte à reprendre son emploi à mi-temps avec possibilité de s'asseoir ou poste assis alterné ; que le médecin du travail ayant prescrit divers aménagements, le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant notamment à la condamnation de l'employeur pour manquement à l'obligation de sécurité ;

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes indemnitaires, alors, selon le moyen
1o/ que lorsque le salarié fait valoir que l'employeur n'a pas adapté son poste de travail conformément aux recommandations du médecin du travail, il appartient à l'employeur de justifier qu'il a procédé à une telle adaptation ; qu'en retenant, pour considérer que la société Simire n'avait pas manqué à son obligation de sécurité de résultat, qu'aucune des pièces produites par Patrick Z, salarié, ne démontrait les manquements qu'il dénonçait la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 du code civil ;
2o/ qu'à titre subsidiaire, l'employeur est tenu d'une obligation de sécurité envers ses salariés en vertu du contrat de travail et lorsque le médecin du travail a prescrit des mesures individuelles en raison de l'état de santé d'un salarié, il lui appartient de les mettre en oeuvre et en cas de contestation d'en rapporter la preuve ; qu'en retenant que la société Simire apportait la preuve qu'elle avait satisfait à son obligation de sécurité de résultat quand aucun des éléments visés n'était de nature à en justifier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 4121-1 et L. 4624-1 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel a constaté que pour aménager le poste de travail du salarié qui avait été déclaré par le médecin du travail apte à reprendre son emploi avec possibilité de s'asseoir ou d'avoir un poste assis alterné, l'employeur justifiait avoir fait l'acquisition de quatre gabarits à hauteur variable avec roulettes directionnelles, d'un gerbeur à traction et à levée électrique, d'un conteneur à fond remontant, d'une table élévatrice et d'un siège réglable en hauteur avec roulettes auto-bloquantes, que le médecin du travail avait confirmé à l'AGEFIPH qu'il avait été régulièrement informé des projets d'aménagement du poste et que ce médecin avait constamment déclaré le salarié apte à son poste, que les photographies produites montraient un poste de travail muni de tous les équipements préconisés par le médecin du travail, que seul le tabouret réglable était dépourvu de roulettes mais que le salarié les avait refusées au motif qu'il ne pouvait pas prendre appui, que l'intéressé effectuait les soudures des petites pièces pendant les 4/5 de son temps de travail et que s'il lui arrivait de travailler sur des pièces plus grosses, il pouvait avoir de l'aide ; qu'ayant, sans inverser la charge de la preuve, pu déduire de ses constatations que l'employeur avait satisfait à son obligation de sécurité de résultat, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Z aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de la SCP Hémery et Thomas-Raquin ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze octobre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils pour M. Z
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Z de ses demandes indemnitaires ;
AUX MOTIFS QUE " Tenu d'une obligation de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, l'employeur doit en assurer l'effectivité en prenant en considération les propositions de mesures individuelles telles que transformations de postes, justifiées par des considérations relatives à l'état de santé physique des travailleurs que le médecin du travail est habilité à faire en application de l'article L.241-10-1 du code du travail. L'article L.241-10-1 du code du travail, devenu l'article L.4624-1, dispose notamment que le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que des transformations de postes, justifiées par des considérations relatives à l'état de santé physique des travailleurs, et que l'employeur est tenu de prendre ces propositions en considération. Les mesures individuelles proposées par le médecin du travail en ce qui concerne Patrick Z ont successivement été les suivantes -éviter le port de charges lourdes en position de flexion du tronc (fiche du 17 novembre 1999), -pas de charges répétitives ni de flexion répétée du tronc (17 novembre 1999), -soudures petites pièces si possible (3 mars 2003), -gerbeur à traction dédié au poste, siège réglable en hauteur adapté à l'opérateur, assistance pour manutention des gabarits lourds à la demande (18 octobre 2004), -à ménager, avec possibilité de s'asseoir régulièrement (18 novembre 2004), -minimum d'activité en réparation, doit pouvoir s'asseoir dans son activité de soudeur (25 avril 2005), -possibilité d'effectuer certains travaux en position assise en cours de poste (15 novembre 2005). L'étude d'aménagement de poste réalisée en 1998 par la SARL Envirronne'Tech Ergonomie n'est pas produite. La SA SIMIRE justifie de ce que, pour l'aménagement du poste de travail de Patrick Z, elle a fait l'acquisition, au début de l'année 1999, de quatre gabarits à hauteur variable avec roulettes directionnelles et freins, d'un gerbeur à traction et à levée électrique, d'un conteneur à fond remontant, d'une table élévatrice et d'une siège réglable en hauteur avec roulette auto-bloquantes. Le 25 février 1999, le médecin du travail a confirmé à l'AGEFIPH qu'il avait été régulièrement informé des projets d'aménagement du poste de Patrick Z ainsi que de celui d'une autre salariée de l'entreprise. Le 2 mars 2000, la SA SIMIRE a demandé au médecin de travail la validation des aménagements apportés au poste de Patrick Z. Nul ne précise la suite donnée à cette demande. Quoiqu'il en soit, le médecin du travail a constamment déclaré Patrick Z apte à son poste. Manuel DE ABREU, agent de maîtrise, atteste de ce que Patrick Z soude les plus petites pièces, qu'il a été invité à solliciter l'aide de ses collègues lorsqu'il devait manipuler des gabarits qu'il jugeait d'un poids excessif et que pour réaliser son travail, il avait à sa disposition une table réglable en hauteur et inclinable ainsi qu'un siège réglable en hauteur de sorte qu'il pouvait travailler assis sans se pencher vers l'avant. Les cadres de la SA SIMIRE qui ont été entendus par le conseil de prud'hommes ont confirmé les écrits de Manuel DE ABREU en précisant que Patrick Z soudait des petites pièces pendant les quatre cinquièmes de son temps de travail. Michel ... et Mahmed ... rapportent qu'en plus de la petite soudure, Patrick Z travaillait sur des pièces plus grosses et qu'il allait chercher les gabarits nécessaires à la production. Leurs attestations, irrégulières en la forme, préremplies et émanant de personnes dont les coordonnées et qualités ne sont pas précisées, n'infirment en rien les déclarations des cadres de l'entreprise en ce qu'elles ne précisent pas le pourcentage de pièces plus grosses susceptibles d'avoir été confiées à Patrick Z. Au dessus de sa signature et à la suite de la phrase prédactylographiée relative au port de gabarits, Michel ... a ajouté la mention " ceci avec l'aide d'un collègue ? ", donnant à penser que Patrick Z pouvait ne pas porter les gabarits tout seul. Devant les membres du conseil de prud'hommes, Manuel DE ABREU a ajouté que Patrick Z lui avait précisé que ses collègues de travail le rejetaient lorsqu'il leur demandait un coup de main mais qu'étant toujours avec lui, il aurait nécessairement eu connaissance d'un éventuel refus et qu'il ne l'aurait pas supporté. Les photos produites par les parties montrent un poste de travail muni de tous les équipements précités. Seul le tabouret réglable est dépourvu de roulettes. Sur ce point, Thierry ..., chef d'atelier, a expliqué que les embouts de tabouret étant cassés, il avait été proposé à Patrick Z de mettre des roulettes mais que l'intéressé avait refusé au motif qu'il ne pouvait pas prendre appui sur une tabouret muni de roulettes. Au demeurant, le médecin du travail a proposé que Patrick Z ait la possibilité de s'asseoir et non pas qu'il travaille constamment en position assise. La SA SIMIRE apporte la preuve qu'elle a satisfait à son obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité de Patrick Z. Aucune des pièces produites par Patrick Z ne démontre que la table élévatrice ait été remplacée par une table moins adaptée de celle qui était prévue ou qu'elle aurait été affectée à une autre salariée, ni que la transpalette susceptible d'avoir remplacé le gerbeur l'ait contraint à se pencher plus que le gerbeur ne l'aurait fait, ni que le matériel acquis dans le cadre de l'aménagement de son poste n'ait été mis à sa disposition, ni qu'il ait fréquemment été affecté à l'exécution de pièces relativement lourdes, ni qu'aucun dispositif ne lui ait facilité la manutention de gabarits lourds. Les certificats médicaux versés aux débats par l'intimé émanent de praticiens qui n'ont pas une connaissance personnelle des conditions de travail du salarié. Ils sont insusceptibles, eux aussi, de prouver les manquements imputés à l'employeur. " (cf. arrêt p.3 in fine à 5)
ALORS QUE, d'une part, lorsque le salarié fait valoir que l'employeur n'a pas adapté son poste de travail conformément aux recommandations du médecin du travail, il appartient à l'employeur de justifier qu'il a procédé à une telle adaptation ; qu'en retenant, pour considérer que la SA SIMIRE n'avait pas manqué à son obligation de sécurité de résultat, qu'aucune des pièces produites par Patrick Z, salarié, ne démontrait les manquements qu'il dénonçait la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 du Code civil ;
ALORS QUE, d'autre part, et à titre subsidiaire, l'employeur est tenu d'une obligation de sécurité envers ses salariés en vertu du contrat de travail et lorsque le médecin du travail a prescrit des mesures individuelles en raison de l'état de santé d'un salarié, il lui appartient de les mettre en oeuvre et en cas de contestation d'en rapporter la preuve ; qu'en retenant que la SA SIMIRE apportait la preuve qu'elle avait satisfait à son obligation de sécurité de résultat quand aucun de éléments visés n'était de nature à en justifier, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.4121-1 et L.4624-1 du Code du travail.

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