SOC. PRUD'HOMMES LG
COUR DE CASSATION
Audience publique du 12 octobre 2011
Cassation partielle
M. LACABARATS, président
Arrêt no 2012 FS-D
Pourvoi no C 10-26.699
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par l'association École supérieure de journalisme, dont le siège est Lille cedex,
contre l'arrêt rendu le 29 octobre 2010 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale), dans le litige l'opposant à Mme Marie-Hélène Y, domiciliée Boulogne-sur-Mer,
défenderesse à la cassation ;
Mme Y a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 13 septembre 2011, où étaient présents M. Lacabarats, président, M. Hénon, conseiller référendaire rapporteur, Mme Mazars, conseiller doyen, MM. Trédez, Blatman, Chollet, Gosselin, Ballouhey, Mmes Goasguen, Vallée, M. Méricq, conseillers, Mmes Mariette, Sommé, M. Flores, Mme Wurtz, M. Becuwe, Mmes Ducloz, Brinet, conseillers référendaires, M. Lalande, avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Hénon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Baraduc et Duhamel, avocat de l'association École supérieure de journalisme, de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de Mme Y, l'avis de M. Lalande, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Y a été engagée le 1er octobre 1976 par l'association École supérieure de journalisme ( ESJ) en qualité de secrétaire générale ; qu'étant placée en arrêt maladie depuis le 13 juin 2006, elle a demandé à son employeur de programmer une visite de reprise ; qu'après deux examens réalisés les 18 mars et 3 avril 2008, le médecin du travail l'a reconnu inapte à reprendre son poste et apte à un travail à temps très partiel dans un environnement différent ; que la salariée a été licenciée le 29 avril 2008, pour inaptitude et impossibilité de reclassement ; que contestant le bien-fondé de son licenciement, elle a saisi la juridiction prud'homale en paiement de diverses sommes ;
Sur le second moyen du pourvoi incident, qui est préalable
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l' admission du pourvoi ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal
Vu l'article L. 7112-3 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
Attendu que la cour d'appel a retenu que Mme Y relève de l'application de la convention collective des journalistes pour le calcul de l'indemnité de licenciement et l'a renvoyé à saisir la commission arbitrale des journalistes pour le calcul de cette indemnité ;
Attendu cependant que si une application volontaire de la convention collective des journalistes, au bénéfice d'un salarié qui n'exerce pas cette activité, ouvre droit au paiement de l'indemnité de licenciement déterminée par l'article L. 7112-3 du code du travail, dont l'article 44 de ladite convention précise l'assiette, elle n'a pas pour effet de soumettre le litige auquel donne lieu cette indemnité au pouvoir de la commission arbitrale des journalistes prévue par l'article L. 7112-4 de ce code ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le premier moyen du pourvoi incident
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour dire que le licenciement de la salariée est fondé et débouter cette dernière de ses demandes de dommages-intérêts et d'indemnité compensatrice de préavis, l'arrêt retient que l'employeur a proposé un poste correspondant aux prescriptions du médecin du travail qui a été refusé par la salariée et que celle-ci ne peut faire reproche à son employeur de ne pas avoir effectué de recherches de reclassement au sein des antennes de Bondy, Paris, Montpellier ainsi que dans les sociétés IMFA et ACTA, en sorte que c'est à bon droit que le conseil de prud'hommes a considéré que l'ESJ avait respecté loyalement son obligation de rechercher un reclassement ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la salariée soutenant que l'employeur n'avait pas recherché de solution de reclassement au sein des sociétés ESJ Média et ESJ entreprises qui faisaient partie du groupe auquel appartient l'entreprise, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté Mme Y de ses demandes à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a renvoyé Mme Y à saisir la commission arbitrale des journalistes pour le calcul de son indemnité de licenciement, l'arrêt rendu le 29 octobre 2010, entre les parties par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne l'association École supérieure de journalisme aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à verser la somme de 2 500 euros à Mme Y ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze octobre deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils, pour l'association École supérieure de journalisme, demanderesse au pourvoi principal
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit que pour le calcul de l'indemnité de licenciement madame Y relevait de l'application de la convention collective des journalistes et d'avoir renvoyé en conséquence la salariée à saisir la commission arbitrale des journalistes pour le calcul de cette indemnité ;
AUX MOTIFS QUE madame Y a perçu une indemnité conventionnelle de licenciement de 28.893,54 euros, soit six mois de salaire, calculée sur la base de la convention collective de la formation ; que, s'agissant de l'application de la convention collective des journalistes, iI ressort de la lettre d'engagement du 7 février 1977, que madame Y a été "recrutée à la qualification de chef de service littéraire indice 200, conformément aux dispositions de la convention collective des journalistes" ; que le 1er septembre 1991, un avenant au contrat de travail de madame Y a été signé, précisant que le "contrat est rattaché à la convention collective nationale de travail des journalistes" ; que ces documents font ressortir sans contestation possible que l'ESJ a entendu faire bénéficier madame Y de la convention collective des journalistes et que ce bénéfice a été contractualisé ; qu'il convient à ce stade de rappeler que si dans les relations collectives de travail, la convention applicable est celle déterminée par l'activité principale de l'entreprise, l'employeur peut décider d'appliquer volontairement dans les relations individuelles une autre convention collective de sorte que l'ESJ, malgré son activité relevant par nature de la convention collective de la formation, a pu faire le choix de faire bénéficier madame Y des dispositions de la convention collective des journalistes ; qu'il doit également être observé que si les journalistes professionnels bénéficient d'un statut résultant de la loi auquel il ne peut être dérogé (article L 7111-2 du Code du travail), il n'en demeure pas moins qu'un employeur est en droit de prévoir dans le contrat de travail de faire bénéficier un salarié des dispositions de la convention collective des journalistes, quand bien même ce salarié ne serait pas journaliste ; qu'il est établi que l'accord collectif signé le 28 juin 1999 a entendu généraliser l'application de la convention nationale des organismes de formation à l'ensemble des salariés permanents de l'ESJ, à l'exception des journalistes professionnels embauchés à ce titre par l'école ; que cependant, si un accord collectif se substitue, dès son entrée en vigueur, aux clauses du contrat de travail en cours, ce principe ne vaut pas pour les dispositions plus favorables prévues au contrat de travail ; dans cette hypothèse, la signature d'un avenant au contrat de travail s'avère nécessaire ; que la comparaison des deux conventions collectives fait apparaître des dispositions relatives à l'indemnité de licenciement beaucoup plus favorables au sein de la convention des journalistes ; que contrairement à ce que soutient l'ESJ, cette convention comporte des dispositions précises de calcul de l'indemnité de licenciement, en l'occurrence "1 mois minimum par année ou fraction d'année avec maximum de 15 mois. Après 15 ans d'ancienneté, une commission arbitrale est obligatoirement saisie pour déterminer l'indemnité due" ; que l'indemnité de licenciement versée à madame Y, en vertu de la convention collective de la formation, a correspondu à six mois de salaire ; que l'intéressée est donc fondée à solliciter l'application de la convention collective mentionnée dans son contrat de travail ; que madame Y comptait trente et un an d'ancienneté au moment de son licenciement ; que la convention collective applicable prévoit qu' "après 15 ans d'ancienneté, une commission arbitrale est obligatoirement saisie pour déterminer l'indemnité due" ; qu'il convient dès lors de renvoyer madame Y à saisir la commission arbitrale des journalistes pour déterminer le montant de son indemnité de licenciement ;
1o) ALORS QUE les seules dispositions de la convention collective des journalistes relatives à l'indemnité de licenciement se bornent à déterminer le salaire servant de base au calcul de cette indemnité, sans indiquer les modalités de ce calcul, lesquelles ne sont fixées que par l'article L 7112-3 du Code du travail qui prévoit également que l'indemnité est déterminée par la commission arbitrale des journalistes lorsque l'ancienneté est supérieure à 15 ans ; que dès lors, en affirmant que la convention collective des journalistes prévoit que cette indemnité est d'un mois par année ou fraction d'année d'ancienneté, avec un maximum de 15 mois et qu'après 15 ans d'ancienneté l'indemnité est fixée par une commission arbitrale, la cour d'appel a violé l'article 44 de la convention collective des journalistes ;
2o) ALORS QUE les dispositions de l'article L 7112-3 du Code du travail, fixant l'indemnité de licenciement à un mois de salaire par année ou fraction d'ancienneté dans la limite de 15 mois et prévoyant que l'indemnité est fixée par la commission arbitrale lorsque l'ancienneté est supérieure à 15 ans, sont réservées aux seuls journalistes professionnels employés par une entreprise de presse ; que dès lors, en décidant que madame Y, qui n'occupait pas un emploi de journaliste, devait saisir la commission arbitrale pour que cette instance fixe le montant de l'indemnité de licenciement due par l'ESJ, tout en constatant que celle-ci n'exerçait qu'une activité de formation, la cour d'appel a violé le texte en cause, ensemble l'article L 7112-1 du Code du travail ;
3o) ALORS QUE la seule stipulation dans le contrat de travail de l'application de la convention collective des journalistes, dont ne relèvent normalement ni l'entreprise ni le salarié, n'emporte pas l'application des dispositions légales réservées aux journalistes professionnels ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, sans constater que l'employeur aurait eu la volonté de faire bénéficier madame Y, non seulement de la convention collective des journalistes, mais également des dispositions légales relatives à l'indemnité de licenciement des journalistes, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
4o) ALORS QU' en tout état de cause la compétence de la commission arbitrale, limitée à la détermination de l'indemnité de licenciement due aux journalistes professionnels ayant plus de 15 ans d'ancienneté ou licenciés pour faute grave, ne peut être étendue par la volonté des parties à la fixation de l'indemnité de licenciement due à un salarié non journaliste ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles L 7112-4, D 7112-2 à D 7112-6 du Code du travail ;
5o) ALORS QUE lorsque la convention collective visée dans le contrat de travail ne contient pas de disposition relative au calcul de l'indemnité de licenciement, cette indemnité doit être déterminée en fonction de la convention collective applicable dans l'entreprise ou, à défaut, des dispositions légales ; qu'en statuant comme elle l'a fait, tout en constatant que madame Y avait perçu une indemnité de licenciement de 28.893,54 euros, calculée conformément à la convention collective des organismes de formation dont dépendait l'employeur, la cour d'appel a violé l'article L 1234-9 du Code du travail, ensemble l'article 9 de ladite convention collective.
Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour Mme Y, demanderesse au pourvoi incident
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR jugé le licenciement de Madame Y fondé et de l'avoir déboutée de ses demandes d'indemnité compensatrice de préavis et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE "Sur le bien-fondé du licenciement
En vertu de l'article L1226-2 du code du travail, "lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin de travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail".
A la suite de la deuxième visite organisée le 3 avril 2008, le médecin du travail a confirmé son premier avis du 18 mars 2008 en considérant Mme Marie-Hélène Y inapte définitivement à son poste et "apte à un travail à temps très partiel dans un environnement différent".
Il n'est pas contesté par la salariée que cet avis devait s'entendre comme n'autorisant une reprise d'activité que selon un rythme limité à quelques heures dans la semaine et hors des locaux de l'ESJ.
Les dispositions de l'article L1226-2 du code du travail invitent l'employeur à formuler une proposition d'un emploi approprié aux capacités du salarié et compatibles avec les préconisations du médecin du travail.
Si en principe, l'emploi de reclassement ne doit pas entraîner de modification du contrat de travail, dans l'hypothèse où le seul poste envisageable emporte une telle modification, il doit être proposé au salarié.
En l'occurrence, compte tenu de l'avis du médecin du travail, la proposition devait nécessairement entraîner une modification de la durée du travail puisqu'un temps plein n'aurait pas été compatible avec les réserves médicales.
Dans la perspective du reclassement de Mme Marie-Hélène Y, l'ESJ a spécialement crée un poste.
L'école supérieure de journalisme a souhaité confier à Mme Marie-Hélène Y l'animation d'un réseau des anciens étudiants étrangers, mission à exercer à domicile, sans aucune contrainte horaire, au moyen de matériel informatique et de télécommunication mis à sa disposition par l'employeur, pour un temps de travail de heures hebdomadaires.
Cette proposition, dont il n'est pas contesté par la salariée qu'elle correspondait aux prescriptions du médecin du travail, a, il est vrai, été l'aboutissement de démarches effectuées avant la deuxième visite médicale.
Il est exact également que l'offre de reclassement a été formulée une première fois entre les deux visites médicales cependant, l'offre a été réitérée dans la lettre de convocation à l'entretien préalable ainsi qu'au cours dudit entretien, soit à des dates postérieures au deuxième examen médical.
Mme Marie-Hélène Y soutient que l'ESJ aurait dû rechercher une solution de reclassement au sein des antennes de Bondy, Paris, Montpellier ainsi que dans les sociétés IMFA et ACTA.
A cet égard, l'ESJ fait observer, et elle n'est pas démentie sur ce point par Mme Marie-Hélène Y, que l'antenne de BONDY a été ouverte en septembre 2009 et que les sociétés IMFA et ACTA ont été créées en décembre 2009, soit à des dates postérieures au licenciement de l'intéressée.
Mme Marie-Hélène Y qui a refusé, sans s'en expliquer, une proposition de travail à domicile et sans contraintes horaires peine à convaincre qu'elle aurait accepté de travailler quelques heures par semaine dans une antenne parisienne ou montpelliéraine.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, c'est à bon droit que le conseil de prud'hommes considéré que l'ESJ avait respecté loyalement son obligation de rechercher un reclassement pour éviter le licenciement de Mme Marie-Hélène Y.
Il convient dès lors de confirmer le jugement frappé d'appel en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande tendant à déclarer son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ainsi que sa demande de dommages-intérêts"
ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTES QUE "Sur la demande visant le licenciement de Madame Y réputé dénué de cause réelle et sérieuse
Vu l'article 12 du CPC qui enjoint au juge de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables,
Attendu que le litige qu'il est demandé au Conseil de trancher met en jeu simultanément la notion d'invalidité, qui relève du droit de la sécurité sociale, et celle d'inaptitude qui a trait au droit du travail,
Attendu qu'il est avéré qu'après une incapacité de travail de 18 mois, Madame Y a fait l'objet d'une décision de classement en invalidité de 2ème catégorie par la CPAM.
Attendu que l'article L.341-4 du Code de la sécurité sociale dispose que son classés en invalidité de 2ème catégorie les invalides absolument incapables d'exercer une activité quelconque,
Vu les articles R.4624-21 et 4624-22 du code du travail qui d'une part prévoient un examen de reprise du travail par le médecin du travail après une absence d'au moins 21 jours pour une maladie ou un accident non professionnel, et d'autre part précisent que cette visite doit avoir lieu "lors de la reprise du travail et au plus tard dans le délai de huit jours",
Vu l'article L.1226-4 du même code qui prévoit que lorsqu'un salarié jugé définitivement inapte à son poste au terme de deux examens par le médecin du travail, n'est ni reclassé, ni licencié, dans le mois du second examen, l'employeur est tenu de reprendre le paiement du salaire,
Attendu que par leur combinaison, ces différentes dispositions visent à éviter qu'un salarié se trouve, par la négligence ou simplement la passivité de son employeur, maintenu en situation d'être privé de ressources, tant salariales qu'indemnitaires,
Attendu qu'au cas d'espèce, la salariée bénéficiait d'une pension d'invalidité de la CPAM, abondée par une rente d'un régime de prévoyance complémentaire, l'une et l'autre servies jusqu'à l'âge auquel elle était en mesure de faire valoir ses droits à la retraite,
Qu'en fonction des règles régissant les différents risques couverts par la Sécurité Sociale, une personne titulaire d'une pension d'invalidité voit celle-ci automatiquement remplacée par une pension de retraite lorsqu'elle atteint son soixantième anniversaire,
Que Madame Y ne se trouvait donc pas dans la situation d'être privée de toute ressource telle que l'ensemble des textes ci-dessus mentionnés vise à palier.
Attendu par ailleurs que c'est à la demande de Madame Y qu'ont été organisées les visites médicales de reprise auprès de la médecine du travail, indépendamment de toute reprise effective de travail.
Attendu que l'employeur s'est conformé aux dispositions ci-dessus et a effectivement procédé au licenciement de Madame Y dans le mois du second examen médical de reprise.
Attendu que la solution du litige qui oppose les parties suppose que le Conseil apprécie et qualifie la manière dont l'employeur s'est acquitté de son obligation de reclassement,
Que s'agissant d'une obligation de moyens, il apparaît utile de prendre en compte pour déterminer si l'employeur s'en est acquitté de manière satisfaisante, outre le caractère très restrictif des réserves d'aptitude émises par le médecin du travail et la taille de l'entreprise, les éléments factuels ci-dessus exposés,
Attendu qu'il résulte de la formulation des avis d'aptitude par le médecin du travail et des précisions complémentaires que celui-ci a apportées à l'employeur que les capacités de Madame Y à tenir un emploi se trouvaient considérablement réduites, que les préconisations du médecin du travail imposaient à l'employeur de lui proposer un poste à temps partiel et "dans un environnement différent",
Attendu que le poste offerte par l'ESJ à Madame Y, spécialement créé en vue de lui ouvrir une possibilité de reclassement, à savoir un emploi à concurrence de 5 H hebdomadaires, effectuées à son domicile et sans aucune contrainte horaire, au moyen de matériel informatique et de télécommunication mis à sa disposition, répondait à l'évidence aux critères définis par le médecin du travail,
Attendu qu'il ne saurait être fait grief à l'ESJ d'avoir anticipé la démarche de reclassement en faisant officiellement à Madame Y la proposition de reclassement avant même le second examen médical, dès lors que cette proposition a en suite été confirmée après ce second examen,
Attendu qu'au regard tant de la taille de l'entreprise que de l'importance des restrictions d'aptitudes posées par le médecin du travail il ne saurait être fait grief à l'ESJ de ne pas avoir proposé à Madame Y d'autres postes,
Que d'ailleurs Madame Y ne démontre ni même ne soutient aucunement que d'autres postes susceptibles de répondre aux préconisations du médecin du travail, même après adaptation, se trouvaient disponibles.
Compte tenu de ces constats, il convient de dire qu'aucun élément ne permet d'imputer à l'ESJ un manquement à son obligation légale de reclassement telle qu'elle résulte des dispositions de l'article L.1226-4 du code du travail.
Madame Y doit en conséquence être déboutée de sa demande visant à voir déclarer son licenciement sans cause réelle ni sérieuse, de même que de sa demande de dommages et intérêts en découlant".
1o) ALORS QU'en cas de litige, il appartient à l'employeur d'apporter la preuve qu'il a satisfait à son obligation de reclassement en établissant qu'outre le poste proposé, il n'existait aucun autre poste disponible dans l'entreprise ou dans le groupe compatible avec l'état de santé et les compétences du salarié ; qu'en mettant à la charge de la salariée le soin de démontrer qu'outre celui qu'elle a refusé d'autres postes susceptibles de répondre aux préconisations du médecin du travail, même après adaptation, se trouvaient disponibles, lorsqu'il appartenait à l'ESJ de démontrer de l'absence de tels postes, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 du code civil ;
2o) ALORS QUE tenu de motiver leur décision, les juges du fond ne peuvent procéder par voie de simple affirmation sans indiquer l'origine de leurs constatations ; qu'en l'espèce, Madame Y soulignait, avec offres de preuve, que l'ESJ n'avait pas recherché un poste de reclassement dans toutes les sociétés du groupe, notamment dans les sociétés IMFA et ACTA reprises par l'ESJ en 2007 (conclusions p.6) ; qu'en affirmant péremptoirement que "les sociétés IMFA et ACTA ont été créées en décembre 2009, soit à des dates postérieures au licenciement de l'intéressée" (conclusions adverses p.7 in fine et arrêt p.5 § 8) sans indiquer les éléments lui permettant de procéder à cette "constatation", la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
3o) ALORS QUE les juges sont tenus de répondre aux moyens des parties ; qu'en l'espèce, la salariée faisait valoir dans ses conclusions d'appel (p.6) que l'ESJ n'avait pas recherché de solution de reclassement au sein des sociétés ESJ Medias SA et SARL ESJ Entreprise dont elle prouvait l'appartenance au groupe ESJ ; qu'en s'abstenant de répondre au moyen de la salariée qui soutenait un manquement de l'employeur à son obligation de reclassement, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
4o) ALORS QUE l'employeur ne satisfait à son obligation de reclassement du salarié déclaré inapte que s'il est établi qu'outre le poste proposé, il n'existait aucun autre poste disponible dans l'entreprise ou dans le groupe compatible avec l'état de santé et les compétences du salarié ; que pour dire que l'employeur avait satisfait à son obligation, la Cour d'appel a affirmé d'une part que la salariée "qui a refusé, sans s'en expliquer une proposition de travail à domicile et sans contraintes horaires peine à convaincre qu'elle aurait accepté de travailler quelques heures par semaine dans une antenne parisienne ou montpelliéraine" (arrêt p.5 § 9) et d'autre part qu' "au regard tant de la taille de l'entreprise que de l'importance des restrictions d'aptitudes posées par le médecin du travail il ne saurait être fait grief à l'ESJ de ne pas avoir proposé à Madame Y d'autres postes" (jugement p.7 § 4) ; qu'en statuant ainsi, sans à aucun moment constater l'absence de poste disponible outre celui proposé, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-2 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que pour le calcul de l'indemnité de licenciement, Madame Y relève de l'application de la convention collective des journalistes, rejetant ainsi sa demande de complément d'indemnité de licenciement formée à hauteur de 144.643,39 euros.
AUX MOTIFS QUE "- sur l'application de l'engagement unilatéral du 22 septembre 1989
Mme Marie-Hélène Y fait observer que l'ESJ a, en 1989, pris l'engagement unilatéral de verser aux "journalistes et cadres" une indemnité de licenciement correspondant à "un mois plus un douzième de mois de salaire par année de présence à l'école" et que cet engagement n'a pas fait l'objet d'une dénonciation individuelle.
Cependant, lorsqu'un accord d'entreprise, ayant le même objet qu'un engagement unilatéral ou un usage, est conclu entre l'employeur et une ou plusieurs organisations syndicales représentatives de l'entreprise, cet accord a pour effet de mettre fin à l'engagement ou l'usage, sans qu'il y ait besoin de procéder à sa dénonciation régulière.
Or, le 28 juin 1999, un accord collectif applicable au personne de l'ESJ a été signé entre l'école représentée par son directeur et la délégation du personnel salarié de l'association.
L'article A1 stipule que "les présentes dispositions annulent et remplacent toutes dispositions et/ou accords précédents".
Il en est ainsi de l'engagement unilatéral de 1989, spécifiquement visé dans le préambule de l'accord.
Au vu de ces éléments, Mme Marie-Hélène Y n'est pas fondée à revendiquer l'application des dispositions contenues dans le document de 1989.
Il convient dès lors de rejeter sa demande de complément d'indemnité de licenciement formée à hauteur de 144.643,39 euros".
1o) ALORS QUE le juge ne peut relever d'office un moyen sans provoquer les observations préalables des parties ; qu'en l'espèce, l'employeur n'avait à aucun moment soutenu que l'accord collectif du 28 juin 1999 avait eu pour effet de mettre fin à son engagement unilatéral du 22 septembre 1989 de verser aux "journalistes et cadres" une indemnité de licenciement correspondant à "un mois plus un douzième de mois de salaire par année de présence à l'école" ; qu'en relevant ce moyen d'office sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations sur ce point, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
2o) ALORS QUE les partenaires sociaux étaient expressément convenus de subordonner l'abrogation des accords antérieurs à une dénonciation individuelle des avantages antérieurs accordés par note unilatérale de la direction ; que cette dénonciation n'est jamais intervenue, de sorte que les avantages antérieurs ont été maintenus malgré l'accord du 28 juin 1999 ; qu'en faisant application de l'accord du 28 juin 1999 malgré l'absence d'une dénonciation individuelle, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil et l'article L. 2261-9 du Code du travail.