ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Civile 1
03 Juillet 1996
Pourvoi N° 94-13.239
M. ...
contre
M. ....
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 26 octobre 1993) que, en janvier 1986, M. ..., médecin-radiologue, et un de ses confrères, qui exerçaient en commun dans un cabinet à Verdun et au sein de la Clinique Saint-Joseph, se sont associés avec M. ... ; que, par une lettre du 30 septembre 1988, M. ... a demandé une réduction de son " droit d'entrée " ; que, en juin 1989, M. ... a approuvé le principe d'une réduction, mais a estimé que le montant de celle-ci devait être négocié ; que, postérieurement, après le retrait du troisième associé, MM ... et ... se sont séparés, et que M. ... a assigné en liquidation des droits des parties ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses diverses branches
Attendu que M. ... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande tendant à obtenir une réduction du prix de cession, alors, selon le moyen, qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que, en vertu d'un accord passé entre les deux médecins, M. ... s'était engagé à rembourser à son confrère une partie des parts surestimées, qu'il résulte en outre de l'arrêt que M. ... a refusé d'exécuter cette convention puisqu'il n'a proposé aucune restitution et n'a pas davantage accompli un quelconque acte tendant à l'exécution de ses obligations, et qu'en refusant de sanctionner ce comportement du cocontractant récalcitrant au seul motif inopérant qu'il n'appartenait pas au juge de se substituer aux parties, la cour d'appel a violé par refus d'application les articles 1134 et 1147 du Code civil ; alors que, d'autre part, l'erreur sur la valeur est une cause de nullité lorsqu'elle est la conséquence d'une erreur sur les qualités substantielles, qu'en posant en principe que l'erreur sur la valeur ne constitue pas un vice du consentement pouvant entraîner l'annulation ou la révision du contrat sans même constater que si M. ... avait connu la situation réelle du cabinet médical, il n'aurait pas contracté un emprunt de 3 000 000 francs car il n'aurait pas pu le rembourser, la cour d'appel a violé l'article 1110 du Code civil ; alors que, enfin, toute contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs, que la cour d'appel a déclaré d'une part que la baisse du chiffre d'affaires ne peut s'expliquer que par une perte de clientèle due aux poursuites de la Sécurité sociale, fondées sur les surcotations pratiquées par M. ... et l'ancien associé, et d'autre part que la preuve ne serait pas rapportée que ces surcotations aient été à l'origine de la baisse du chiffre d'affaires, de sorte que la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui ne s'est pas contredite, a exactement jugé que la reconnaissance de principe d'une réduction du prix assortie de l'expression d'un désaccord sur le montant du remboursement éventuel ne constituait pas un engagement de payer, faute de détermination de l'objet de l'engagement, et que l'erreur sur la valeur de ce qui est l'objet du contrat ne constitue pas un vice du consentement pouvant entraîner l'annulation ou la révision du contrat ; que le moyen n'est pas fondé ; Et sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en ses deux branches
Attendu que M. ... reproche à l'arrêt d'avoir exclu de la mission des experts nommés pour évaluer les éléments d'actif existant au 1er janvier 1990 entre MM ... et ..., la prise en considération de la valeur patrimoniale de la clientèle de " l'association " entre ces médecins, répartie entre le cabinet et la clinique, lieux d'exercice en commun de leur profession avant cette date ;
Mais attendu que les malades jouissant d'une liberté absolue de choix de leur médecin, la clientèle qu'ils constituent, attachée exclusivement et de façon toujours précaire à la personne de ce praticien, est hors du commerce, et ne peut faire l'objet d'une convention ; que le moyen est, dès lors, inopérant en ses deux branches ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE les pourvois principal et incident.