Jurisprudence : Cass. crim., 30-04-1996, n° 95-82217, publié au bulletin, Cassation partielle

Cass. crim., 30-04-1996, n° 95-82217, publié au bulletin, Cassation partielle

A9154ABN

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Cour de Cassation
Chambre criminelle
Audience publique du 30 Avril 1996
Cassation partielle
N° de pourvoi 95-82.217
Président M. Milleville, conseiller le plus ancien faisant fonction.

Demandeur Procureur général près la cour d'appel de Versailles
Rapporteur M. ....
Avocat général M. Cotte.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par le procureur général près la cour d'appel de Versailles, contre l'arrêt de ladite cour d'appel, 8e chambre, du 17 mars 1995 qui, dans les poursuites exercées contre Hassan ... des chefs de vol et usage illicite de stupéfiants, a annulé la procédure.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 63, 63-1, 171 et 802 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé la décision du tribunal correctionnel d'annulation de la procédure ;
" aux motifs que Hassan ... a été interpellé sur la voie publique le 11 juillet 1994 à 23 h 35 et ne s'est vu notifier une mesure de garde à vue et les droits qui s'y attachent que le 12 juillet à 2 h 15, qu'ainsi la décision de placement en garde à vue et, par conséquent, la notification de ses droits à la personne, a été différée sans justifications particulières au-delà du délai nécessaire à sa mise à la disposition d'un officier de police judiciaire, et qu'une formalité substantielle a été de ce fait méconnue dont il est résulté une atteinte aux intérêts de cette personne ;
" alors que l'article 63-1 du Code de procédure pénale prescrit que toute personne placée en garde à vue est immédiatement informée, par un officier de police judiciaire ou sous le contrôle de celui-ci par un agent de police judiciaire, des droits mentionnés aux articles 63-2, 63-3 et 63-4, ainsi que des dispositions relatives à la durée de la garde à vue ;
" que cette prescription a été respectée en l'espèce puisque les droits attachés par la loi à la garde à vue ont été notifiés à Hassan ... concomitamment avec la décision de placement en garde à vue, et que l'intéressé a fait usage de ces droits ;
" que cependant l'article 63 du Code de procédure pénale ne prescrit à l'officier de police judiciaire aucun délai pour prendre et notifier une décision de placement en garde à vue ;
" qu'en l'espèce, Hassan ... a été interpellé en flagrant délit sur la voie publique le 11 juillet à 23 h 35, conduit au commissariat de police et interrogé le 12 juillet à 2 heures par un agent de police judiciaire ; que l'officier de police judiciaire responsable de la permanence judiciaire sur l'ensemble de la circonscription des Hauts-de-Seine, a pris le 12 juillet à 2 h 15 une décision de placement en garde à vue, cette mesure prenant effet à compter du 11 juillet à 23 h 35 ;
" que, compte tenu des contraintes du service de nuit, le délai écoulé entre l'interpellation et la décision de placement en garde à vue ne présente aucun caractère d'anomalie ;
" que les droits conférés par la loi à la personne placée en garde à vue ne s'en sont pas trouvés compromis, puisque Hassan ... a pu s'en prévaloir 2 h 40 minutes après son interpellation sur la voie publique ;
" qu'enfin il ne saurait être fait grief à l'agent de police judiciaire d'avoir interrogé Hassan ... avant qu'il fût placé en garde à vue, aucune disposition de la loi n'y faisant obstacle ; qu'au demeurant, une mesure de garde à vue peut n'apparaître nécessaire qu'au cours ou au terme de l'audition de la personne suspectée d'avoir commis ou tenté de commettre une infraction ; qu'il y a lieu d'ailleurs d'observer que l'article 63, alinéa 2, du Code de procédure pénale introduit par la loi du 24 août 1993, prévoit que, dans le cadre d'une enquête de flagrance, les personnes à l'encontre desquelles il n'existe aucun indice faisant présumer qu'elles ont commis ou tenté de commettre une infraction peuvent être retenues le temps nécessaire à leur déposition, qu'il en est de même a fortiori d'une personne surprise en flagrant délit " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme que Hassan ... a été interpellé le 11 juillet 1994 vers 23 h 35 en flagrant délit de vol ; que, conduit au commissariat, il a été entendu par un agent de police judiciaire, puis, le 12 juillet 1994 à 2 h 15, s'est vu notifier, par un officier de police judiciaire, son placement en garde à vue ainsi que les droits découlant de cette mesure ;
Attendu que, pour annuler la procédure diligentée contre lui, la cour d'appel retient qu'en différant sans nécessité, au-delà du temps que justifiaient le transfert et l'accomplissement des diligences normales de mise à disposition de l'officier de police judiciaire, le placement en garde à vue de Hassan ... et son information immédiate sur ses droits, les services de police ont méconnu l'obligation définie par l'article 63-1 du Code de procédure pénale ; qu'ils ajoutent que ce retard a porté atteinte aux intérêts du prévenu dont l'état de santé n'a pas été jugé compatible avec la mesure de garde à vue et qui a dû être hospitalisé ;
Attendu qu'en cet état, les juges ont justifié leur décision sans encourir les griefs allégués ;
Qu'en effet, selon l'article 63-1 du Code de procédure pénale, l'officier de police judiciaire ou, sous son contrôle, l'agent de police judiciaire, a le devoir de notifier les droits attachés au placement en garde à vue dès que la personne retenue se trouve en état d'en être informée ; que tout retard injustifié dans la mise en uvre de cette obligation porte nécessairement atteinte aux intérêts de la partie qu'elle concerne ;
D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;
Mais sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 458 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse aux réquisitions du ministère public, défaut de motifs, motifs insuffisants
" en ce que l'arrêt attaqué s'est borné à indiquer que les premiers juges avaient suffisamment précisé que la nullité affectait la procédure et en avaient tiré les conséquences exactes ;
" alors que le ministère public avait développé à l'audience des réquisitions subsidiaires, sommairement rapportées par l'arrêt, tendant à faire constater, à supposer établi que le délai écoulé entre l'interpellation et la décision de placement en garde à vue ait porté atteinte aux droits de l'intéressé, que le jugement déféré avait omis de préciser les conséquences de sa décision d'annulation et les actes ou pièces de la procédure qui s'en trouvaient viciées " ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 174, alinéa 2, 385 et 802 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale
" en ce que l'arrêt attaqué n'a pas précisé les conséquences de l'annulation qu'il confirmait ni les actes et pièces de la procédure qui se trouvaient viciées, et n'a pas jugé devoir le faire ;
" alors qu'il résulte de la combinaison des articles 385, 802 et 174, alinéa 2, du Code de procédure pénale que la juridiction qui prononce une annulation doit décider si cette annulation est limitée à tout ou partie des actes ou pièces de la procédure viciée ou doit s'étendre à tout ou partie de la procédure ultérieure ;
" qu'en l'espèce et en tout état de cause, la validité du procès-verbal établi le 11 juillet à 23 h 35 par Silvère ..., agent de police judiciaire en résidence à Colombes, et relatant l'interpellation sur la voie publique d'Hassan ... ainsi que différentes constatations, ne pouvait être affectée par la nullité s'attachant à un acte de la procédure ultérieure " ;
Les moyens étant réunis ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que la nullité d'une garde à vue est sans effet sur les actes relatifs à l'interpellation régulière de la personne concernée ;
Attendu que, saisie de conclusions tendant à l'annulation du procès-verbal d'audition de Hassan ... et des actes ultérieurs accomplis au cours de sa garde à vue, la cour d'appel a annulé l'intégralité de la procédure ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que la régularité du procès-verbal d'interpellation en flagrant délit de l'intéressé n'était pas en cause et ne pouvait être affectée par l'annulation d'actes postérieurs, les juges ont excédé leurs pouvoirs ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs
CASSE ET ANNULE, en ses seules dispositions relatives à l'étendue de la nullité, l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, en date du 17 mars 1995, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris.

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