ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Cass. civ. 1
28 Mars 1995
Pourvoi N° 93-15.150
M. ...
contre
Mme ....
Sur le moyen unique, pris en ses diverses branches
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 3 mars 1993), que Mme ... et M. ..., docteurs en médecine, ayant décidé de s'associer, ont signé, le 31 janvier 1986, différentes conventions, notamment un acte par lequel Mme ... s'est engagée envers M. ... à le présenter à une partie de sa clientèle et de ses principaux correspondants et à lui céder la moitié du matériel et de l'outillage, des agencements et des installations du cabinet ; qu'après la rupture de leurs relations professionnelles, auxquelles M. ... a mis fin en 1990, celui-ci a assigné Mme ... en nullité du contrat de cession et en remboursement de la somme correspondant au " droit à la présentation de partie de la clientèle " ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la demande de M. ..., alors, selon le moyen, que, d'une part, la clientèle médicale, attachée exclusivement et de façon toujours précaire à la personne du médecin est hors commerce et ne peut faire l'objet d'une convention ; qu'en l'espèce, en affirmant que l'atteinte au libre choix du médecin par le malade, pouvant résulter de la cession du droit de présentation de partie de la clientèle, était sans incidence sur la validité de la cession, la cour d'appel a violé les articles 1128 et 1131 du Code civil ; alors que, d'autre part, la nullité des contrats portant sur les choses hors du commerce est d'ordre public ; qu'en l'espèce, en affirmant que l'exécution par M. ... d'un contrat portant atteinte au libre choix du médecin le privait du droit de demander la nullité de ce contrat, la cour d'appel a violé les articles 6, 1128 et 1133 du Code civil ; alors qu'enfin, le contrat de présentation de clientèle, qui entrave le libre choix du médecin par le malade, constitue une cession de clientèle, nulle pour défaut d'objet et de cause ; qu'en l'espèce, en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par les conclusions d'appel de M. ..., si les contrats signés le même jour, prévoyant, d'une part, l'obligation pour le cédant de présenter une partie de sa clientèle au cessionnaire, d'autre part, une répartition entre le cédant et le cessionnaire des jours de consultation et des gardes de nuit, pour mettre en oeuvre le partage de clientèle, ne portaient pas atteinte au libre choix du médecin par les malades, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1128 et 1131 du Code civil ;
Mais attendu que le contrat par lequel, dans le cadre d'une association entre médecins, l'un d'eux s'engage à présenter l'autre à une partie de sa clientèle, contrat qui, en lui-même, ne porte pas atteinte au libre choix du médecin par le malade, n'est pas nul ; et que la cour d'appel relève souverainement que M. ... n'apporte aucun élément déterminant à l'appui de son affirmation selon laquelle " le droit à présentation de partie de la clientèle " constituait en fait une cession véritable de la clientèle ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi.