N° R 21-83.220 F-B
N° 01504
MAS2
8 DÉCEMBRE 2021
CASSATION PARTIELLE SANS RENVOI
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 8 DÉCEMBRE 2021
Le procureur général près la cour d'appel de Cayenne a formé un pourvoi contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre correctionnelle, en date du 22 avril 2021, qui a relaxé M. [B] [E] du chef de violences aggravées, et a prononcé sur les intérêts civils.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de Mme Leprieur, conseiller, et les conclusions de Mme Bellone, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 10 novembre 2021 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Leprieur, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'
article 567-1-1 du code de procédure pénale🏛, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. M. [B] [E] a été cité devant le tribunal correctionnel du chef de violences suivies d'incapacité n'excédant pas huit jours, commises le 6 janvier 2020, à [Localité 1] (Guyane) sur la personne de Mme [M] [W], avec cette circonstance que les faits ont été commis par une personne étant ou ayant été son conjoint ou son concubin.
3. Par jugement du 17 septembre 2020, le tribunal correctionnel a déclaré M. [Aa] coupable et l'a condamné à un an d'emprisonnement et à cinq ans d'interdiction de détenir ou porter une arme. Il a délivré un mandat d'arrêt à son encontre et a statué sur les intérêts civils.
4. Le 29 octobre 2020, le prévenu a formé appel de cette décision et le ministère public appel incident.
5. Le prévenu s'est désisté de son appel le 3 février 2021.
6. Le 5 février 2021, le président de la chambre des appels correctionnels a rendu une ordonnance constatant le désistement d'appel du prévenu et du ministère public.
7. Cette ordonnance a été notifiée au prévenu le 8 février 2021.
8. Le même jour, le prévenu s'est rétracté de son désistement.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
9. Le moyen est pris de la violation de l'
article 500-1 du code de procédure pénale🏛.
10. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit l'appel du prévenu recevable, alors que l'ordonnance rendue par le président de la chambre des appels correctionnels tendant à donner acte du désistement d'appel est une mesure d'administration judiciaire qui ne peut faire l'objet d'un recours ; que, dès lors, c'est à la date à laquelle l'ordonnance est rendue qu'elle produit son effet, et non lors de sa notification à l'appelant, ladite notification ne lui ouvrant aucun droit ; qu'en conséquence, le désistement était devenu parfait le 5 février 2021 et le prévenu ne pouvait se rétracter après cette date.
Réponse de la Cour
Vu l'
article 500-1 du code de procédure pénale🏛 :
11. Il se déduit de cet article que le prévenu ne peut plus rétracter son désistement d'appel après qu'il a été constaté par ordonnance du président de la chambre des appels correctionnels.
12. Pour dire les appels recevables, l'arrêt attaqué relève que, si l'ordonnance de non-admission de l'appel, par laquelle est constaté le désistement, n'est pas susceptible de voie de recours, sauf en cas d'excès de pouvoir du président, il n'en demeure pas moins établi que ce désistement n'est parfait que s'il en a été donné acte par une ordonnance du président de la chambre des appels correctionnels et que la nécessité d'en donner acte implique nécessairement que l'ordonnance soit portée à la connaissance du prévenu.
13. Les juges ajoutent qu'il ne serait pas conforme à l'exigence d'équité de la procédure de priver un justiciable de la possibilité de se rétracter d'un acte important comme le désistement d'appel par une décision dont il n'aurait pas eu connaissance.
14. La cour conclut que l'ordonnance du président de la chambre des appels correctionnels du 5 février 2021, ayant pris acte du désistement d'appel du prévenu, n'ayant été notifiée à celui-ci que le 8 février 2021, le désistement n'était pas devenu parfait au moment de la rétractation puisque rien ne permet d'établir que l'ordonnance du président ait été portée à la connaissance du prévenu avant cette rétractation.
15. En prononçant ainsi, alors qu'aucune disposition n'impose que l'ordonnance du président de la chambre des appels correctionnels constatant un désistement d'appel, qui est insusceptible de recours sauf excès de pouvoir, soit notifiée, et qu'une telle décision produit effet dès sa signature, en l'absence de toute règle contraire, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
16. La cassation est par conséquent encourue.
Portée et conséquences de la cassation
17. Le pourvoi du procureur général, limité aux dispositions pénales, ne peut avoir d'effet sur les dispositions civiles de l'arrêt, qui sont devenues définitives.
18. La cassation aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'
article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire🏛. L'annulation partielle de la décision de la cour d'appel rend définitives les dispositions pénales du jugement rendu par le tribunal correctionnel de Cayenne le 17 septembre 2020.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Cayenne, en date du 22 avril 2021, mais en ses seules dispositions relatives à la recevabilité des appels et à l'action publique, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
DIT que les dispositions pénales du jugement rendu par le tribunal correctionnel de Cayenne le 17 septembre 2020 sont définitives ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Cayenne et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé.
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit décembre deux mille vingt et un.