Jurisprudence : CE 1/2 SSR., 03-03-2003, n° 229581

CE 1/2 SSR., 03-03-2003, n° 229581

A3927A7L

Référence

CE 1/2 SSR., 03-03-2003, n° 229581. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1132587-ce-12-ssr-03032003-n-229581
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Abstract

Aux termes de l'article 2 du décret du 13 janvier 1947 modifié relatif aux attributions des chefs de poste consulaire et des chefs de mission diplomatique en matière de passeports et de visas,"aucun passeport ne sera délivré aux insoumis et aux déserteurs, auxquels seul un laissez-passer à destination de la France pourra être remis lorsqu'ils auront signé un procès-verbal de présentation volontaire" .

ARRÊT DU CONSEIL D'ETAT

CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux


N° 229581

M.DEPERTHES

Mme Imbert-Quaretta, Rapporteur
Mme de Silva, Commissaire du gouvernement

Séance du 3 février 2003
Lecture du 3 mars 2003

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 2ème et 1ère sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 2ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête, enregistrée le 25 janvier 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. David-Luc DEPERTHES, demeurant 88, rue de la Servette, 1202 Genève (Suisse); M. DEPERTHES demande au Conseil d'Etat

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 23 novembre 2000 du consul général de France à Genève refusant le renouvellement de son passeport ;

2°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 3 000 F (457,35 euros) pour les frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier;

Vu la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que son protocole additionnel n° 4 ;

Vu le décret des 1er février et 28 mars 1792 ;

Vu le code du service national ;

Vu le décret n° 47-77 du 1 3 janvier 1947 modifié

Vu le code de justice administrative;

Après avoir entendu en séance publique

- le rapport de Mme Imbert-Quaretta, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 13 janvier 1947 modifié relatif aux attributions des chefs de poste consulaire et des chefs de mission diplomatique en matière de passeports et de visas : "Aucun passeport ne sera délivré aux insoumis et aux déserteurs, auxquels seul un laissez-passer à destination de la France pourra être remis lorsqu'ils auront signé un procès-verbal de présentation volontaire" ; que, par la décision attaquée en date du 23 novembre 2000, le consul général de France à Genève a, sur le fondement des dispositions précitées, refusé le renouvellement du passeport de M. DEPERTHES, ressortissant français résidant en Suisse ;

Considérant qu'aux termes du 2 de l'article 2 du protocole n° 4 additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

"Toute personne est libre de quitter n'importe quel pays, y compris le sien" ; qu'aux termes du 3 du même article, l'exercice de ce droit "ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au maintien de l'ordre public, à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort des stipulations précitées que les mots "restrictions... prévues par la loi" doivent s'entendre des conditions posées par des textes généraux pris en conformité avec les prescriptions constitutionnelles ; qu'aux termes de l'article L. 111-1 du code du service national : "Les citoyens concourent à la défense de la Nation. Ce devoir s'exerce notamment par l'accomplissement du service national universel" ; que les dispositions de l'article 2 du décret du 13 janvier 1947 ont notamment pour but d'assurer le respect des obligations auxquelles les personnes regardées comme des insoumis sont tenues en vertu de la législation relative au service national ; qu'ainsi, M. DEPERTHES n'est pas fondé à soutenir que ces dispositions seraient contraires aux stipulations conventionnelles précitées en ce qu'elles n'ont pas été édictées par le législateur;

Considérant, d'autre part, que les dispositions de l'article 2 du décret du 13 janvier 1947, applicables à des personnes en situation d'insoumission ou de désertion, ont leur fondement dans les exigences de la sécurité nationale, de la sûreté publique et du maintien de l'ordre public ; qu'elles ne portent pas, eu égard à leur objet, une atteinte excessive au droit de quitter le territoire national reconnu par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et confirmé par les stipulations du 2 de l'article 2 du protocole additionnel n° 4 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. DEPERTHES n'est pas fondé à prétendre que les dispositions de l'article 2 du décret du 13 janvier 1947 seraient entachées d'illégalité, ni, dès lors, à demander l'annulation de la décision du consul général de France à Genève en date du 23 novembre 2000 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer la somme que M. DEPERTHES demande pour les frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE:

Article 1er : La requête de M. DEPERTHES est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. David-Luc DEPERTHES et au ministre des affaires étrangères.

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