COUR DE CASSATION
Chambre sociale
Audience publique du 9 mai 2001
Pourvoi n° 98-42.615
M. Maurice ...
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société Bureau Véritas
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par M. Maurice ..., demeurant Lyon,
en cassation d'un arrêt rendu le 22 janvier 1998 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale), au profit de la société Bureau Véritas, société anonyme, dont le siège est Courbevoie,
défenderesse à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 13 mars 2001, où étaient présents M. Gélineau-Larrivet, président, M. Brissier, conseiller rapporteur, MM. ..., ..., ........., ..., ..., Mmes ........., ..., conseillers, M. ..., Mmes ..., ..., MM. ..., ..., ..., Mmes ..., ..., conseillers référendaires, M. Kehrig, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Brissier, conseiller, les observations de Me ..., avocat de M. ..., de Me ..., avocat de la société Bureau Véritas, les conclusions de M. Kehrig, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique
Attendu que M. ... exerçait, en dernier lieu, au service de la société Bureau Véritas, les fonctions de représentant en chef en Italie ; que le 20 novembre 1989, le 18 décembre 1990 et le 12 septembre 1992, l'employeur a consenti à M. ... un droit de souscription d'actions de la société à un prix préférentiel ; qu'à l'offre de souscriptions d'actions était annexée une notice d'information prévoyant que "la levée des options est soumise à la condition que le bénéficiaire ne soit ni démissionnaire ni révoqué ou licencié à la date de l'exercice de l'option" ; que le 10 septembre 1991, a été conclue entre les parties une convention qualifiée de transaction concernant les conditions de la rupture du contrat de travail ; que M. ... a été licencié par lettre du 26 septembre 1991 ; que par lettre du 5 juillet 1994, il a informé la société Bureau Véritas de sa décision de lever les options d'actions ; que la société Bureau Véritas lui a opposé un refus au motif qu'en application de la note d'information précitée, son licenciement, qui lui a été notifié par lettre du 26 septembre 1991, lui avait fait perdre le droit d'exercer la levée des options d'actions ; que M. ... a saisi le conseil de prud'hommes d'une instance tendant à faire déclarer valables ses levées d'options d'actions ou, à défaut, à obtenir le paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que M. ... fait grief à l'arrêt attaqué (Lyon, 22 janvier 1998) d'avoir décidé que son licenciement avait mis fin "contractuellement" au droit d'option d'actions dont il était bénéficiaire et de l'avoir, en conséquence, débouté de ses demandes précitées, alors, selon le moyen, que, en vertu de l'article 1134 du Code civil, les parties peuvent, par leur consentement mutuel, mettre fin à leur convention ; que, selon l'article 2044 du même Code, la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître ; qu'il en résulte que, si les parties à un contrat de travail décident d'un commun accord d'y mettre fin, elles se bornent à organiser les conditions de la cessation de leurs relations de travail, tandis que la transaction consécutive à une rupture du contrat de travail par l'une ou l'autre des parties a pour objet de mettre fin, par des concessions réciproques, à toute contestation née ou à naître résultant de cette rupture ; qu'il s'ensuit que la transaction ayant pour objet de mettre fin au litige résultant d'un licenciement ne peut valablement être conclue qu'une fois la rupture intervenue et définitive ; qu'en l'espèce, l'accord signé par les parties le 10 septembre 1991 constitue une rupture amiable et non une transaction consécutive à un licenciement puisque celui-ci n'est intervenu que postérieurement, le 26 septembre 1991 ; qu'ainsi, dès lors qu'il n'y a pas eu licenciement, les conditions d'exécution prévues par la note BNP ne peuvent être opposées à M. ... ; que M. ... est donc fondé à demander la délivrance forcée de l'attestation nécessaire à la levée des options ou à prétendre au paiement de dommages-intérêts correspondant à la valeur des actions ; que, pour en avoir autrement décidé, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 2044 du Code civil ;
Mais attendu que la convention litigieuse du 10 septembre 1991 ne peut valablement constituer ni une rupture d'un commun accord en raison du litige opposant les parties tel qu'il résulte des termes mêmes de ladite convention, ni une transaction dès lors qu'elle a pour objet, à la fois, de rompre le contrat de travail et d'en régler les conséquences, en sorte que la cour d'appel a exactement décidé que la rupture du contrat de travail résultait du licenciement prononcé le 26 décembre 1991 et que la condition, acceptée par le salarié et subordonnant le droit de lever les options d'actions à l'absence de rupture du contrat de travail par un licenciement, faisait obstacle à l'exercice de ce droit ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. ... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Bureau Véritas ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mai deux mille un.