Chambre commerciale
Audience publique du 16 janvier 2001
Pourvoi n° 97-20.041
directeur général des Impôts
COMM.
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 16 janvier 2001
Rejet
M. DUMAS, président
Arrêt n° 80 F D
Pourvoi n° N 97-20.041
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par le directeur général des Impôts, domicilié Paris,
en cassation d'un jugement rendu le 24 juillet 1997 par le tribunal de grande instance de Bernay, au profit
1°/ de M. Marcel Z,
2°/ de Mme ZY, épouse ZY,
demeurant Courbépine,
défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 21 novembre 2000, où étaient présents M. Dumas, président, M. Huglo, conseiller référendaire rapporteur, M. Poullain, conseiller, M. Lafortune, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Huglo, conseiller référendaire, les observations de Me Thouin-Palat, avocat du directeur général des Impôts, de la SCP Delaporte et Briard, avocat des époux Z, les conclusions de M. Lafortune, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches
Attendu, selon le jugement déféré (tribunal de grande instance de Bernay, 24 juillet 1997), que, par acte des 25 juin et 30 juillet 1981, M. et Mme Z Z ont acquis de Mme Irène Z la nue-propriété d'un immeuble sis à Courbépine (Eure), pour un prix de 48 000 francs pour sa valeur en nue-propriété, converti en une rente viagère annuelle de 3 200 francs ; que, par testament olographe du 5 mars 1986, Mme Irène Z a légué ses biens à M. Marcel Z, son neveu, et est décédée le 18 juin 1994 ; qu'estimant applicable la présomption de l'article 751 du Code général des impôts, l'administration fiscale a notifié à M. et à Mme Z un redressement, les 13 décembre 1995 et 16 janvier 1996, portant sur les droits de mutation estimés dus ; qu'un avis de mise en recouvrement a été émis ultérieurement ; qu'après le rejet de leur réclamation présentée le 25 juin 1996, les époux Z ont assigné le directeur des services fiscaux de l'Eure devant le tribunal de grande instance en dégrèvement des impositions et pénalités ainsi mises à leur charge ;
Attendu que le directeur général des Impôts fait grief au jugement d'avoir accueilli la demande des époux Z, alors, selon le moyen
1°/ que l'article 751 du Code général des impôts créé une présomption de fictivité de l'acte qui a opéré le démembrement de propriété ; que cette présomption légale instituée au profit de l'Administration est une présomption simple qui supporte la preuve contraire ; que celle-ci est à la charge du redevable qui revendique la sincérité du démembrement ; qu'en considérant que la conversion du prix de vente de la nue-propriété, tel que figurant dans l'acte litigieux, en valeur de la pleine propriété, suffisait auxépoux Bequet pour apporter la preuve contraire à ladite présomption, le tribunal a, en réalité, dispensé les redevables de la charge de la preuve qui leur incombait et a, ce faisant, violé les dispositions de l'article 751 du Code général des impôts ;
2°/ que le nu-propriétaire, qui entend combattre la présomption de l'article 751 du Code général des impôts, doit justifier de la sincérité et de la réalité du démembrement ; qu'après avoir souligné que la sincérité de l'opération devait résulter notamment de la réalité de la valeur de l'immeuble retenue dans l'acte de démembrement, le tribunal s'est borné à convertir le prix de la nue-propriété tel que stipulé dans l'acte, en valeur de la pleine propriété ; que, sans indiquer en quoi le résultat de cette conversion mathématique établissait la sincérité du démembrement, les juges en ont pourtant conclu que les époux Z apportaient ainsi la preuve contraire prévue par l'article 751 du Code général des impôts ; qu'en statuant de la sorte, le tribunal n'a pas donné la base légale à sa décision ;
Mais attendu qu'ayant constaté que la cession de la nue-propriété avait été effectuée par acte authentique des 25 juin et 30 juillet 1981, que la rente viagère stipulée en paiement du prix avait été effectivement acquittée jusqu'au décès de Mme Irène Z survenu en 1994, que le bien litigieux était un immeuble composé de deux chambres et d'une cuisine sans sanitaires et que la conversion du prix de vente de la nue-propriété en pleine propriété produisait une valeur de l'immeuble de 60 000 francs, le tribunal, ayant ainsi nécessairement retenu que la valeur déclarée en 1981 était la valeur vénale réelle de l'immeuble litigieux, en a déduit souverainement, sans inverser la charge de la preuve, que les époux Z apportaient la preuve contraire à la présomption édictée par l'article 751 du Code général des impôts ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le directeur général des Impôts aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize janvier deux mille un.