Réf. : Cass. civ. 3, 27 mars 2008, n° 07-11.721, Société Ogic, FS-D (N° Lexbase : A6102D77)
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par David Bakouche, Professeur agrégé des Facultés de droit
le 07 Octobre 2010
L'arrêt de la troisième chambre civile du 27 mars dernier, en consacrant la possibilité pour les parties d'insérer dans leurs contrats, et en l'occurrence dans leurs avant-contrats, une clause d'exécution forcée en nature, confère toute sa vigueur à la liberté contractuelle et devrait permettre d'atténuer la rigueur de ces solutions. La Cour énonce, en effet, que "les parties à une promesse unilatérale de vente étaient libres de convenir que le défaut d'exécution par le promettant de son engagement de vendre pouvait se résoudre en nature par la constatation judiciaire de la vente". La solution appelle plusieurs séries d'observations. On relèvera, d'abord, que, contrairement à certaines clauses qui, à examiner le droit positif, semble voir leur efficacité largement contrariée -on pense, naturellement, aux clauses limitatives ou exclusives de responsabilité, neutralisées soit par l'application du droit de la consommation, soit, en droit commun, par l'appel aux notions de dol, de faute lourde, d'obligation essentielle et de cause (9)-, d'autres se voient ainsi conférer par la Cour de cassation une vitalité certaine (10). Ensuite, l'encouragement ainsi donné aux parties de prévoir conventionnellement l'exécution forcée en nature en cas de défaillance du débiteur devrait faire encore un peu plus reculer le principe de l'impossibilité de l'exécution forcée directe lorsque l'obligation inexécutée est une obligation de faire ou de ne pas faire (11). On pourrait, par suite, et plus généralement, s'interroger sur le bien fondé d'une règle supplétive que les parties sont manifestement encouragées à écarter (12). Enfin, en matière d'avant-contrats, on peut assez facilement imaginer que cette clause sera opportunément stipulée dans les promesses unilatérales de vente, à propos desquelles, on l'a rappelé, la Cour de cassation continue de s'en tenir à une interprétation surannée de l'article 1142 du Code civil.
(1)Voir not. D. Mazeaud, Mystères et paradoxes de la période précontractuelle, Mél. Ghestin.
(2) W. Jeandidier, L'exécution forcée des obligations contractuelles de faire, RTDCiv., 1976, p. 700.
(3) Cass. mixte, 26 mai 2006, n° 03-19.376, Daurice Pater, épouse Pere c/ M. Jean Solari, P+B+R+I ([LXB=A7227DPD)], D., 2006, p. 1861, note P.-Y. Gautier et p. 1864, note D. Mainguy. Pour une confirmation, au plan des principes : Cass. civ. 3, 31 janvier 2007, n° 05-21.071, Société Aux Jardins de France, FS-P+B (N° Lexbase : A7853DTZ), Bull. civ. III, n° 16 et nos obs., Exécution forcée du pacte de préférence (à propos de la substitution au tiers acquéreur du bénéficiaire du pacte), Lexbase Hebdo n° 248 du 15 février 2007 - édition privée générale (N° Lexbase : N0412BAI).
(4) Cass. civ. 3, 30 avril 1997, n° 95-17.598, Office européen d'investissement et autres c/ Association Médecins du Monde et autre (N° Lexbase : A0614ACQ), D., 1997, p. 475, note D. Mazeaud, RTDCiv., 1997, p. 685, obs. P.-Y. Gautier.
(5) Pour une illustration : Cass. civ. 3, 14 février 2007, n° 05-21.814, Société civile immobilière (SCI) Serp, FS-P+B (N° Lexbase : A2160DUK), D., 2007, AJ, p. 657 ; JCP éd. E, 2007, p. 1615, note H. Lécuyer.
(6) En ce sens, P.-Y. Gautier, note sous Cass. mixte, 26 mai 2006, préc..
(7) Cass. civ. 3, 15 décembre 1993, n° 91-10.199, Consorts Cruz c/ Mme Godard (N° Lexbase : A4251AGK), Bull. civ. III, n°174 ; D., 1994, p. 507, note L. Aynès ; JCP éd. G, 1995, II, 22366, note D. Mazeaud.
(8) Cass. civ. 3, 28 octobre 2003, n° 02-14.459, Société Sogefi Méditerranée c/ M. Sarwat Ghobrial, F-D (N° Lexbase : A0064DAM), RDC, 2004, p. 270, obs. D. Mazeaud.
(9) Pour une illustration récente de cette tendance, voir not. Cass. com., 4 mars 2008, n° 07-11.790 (N° Lexbase : A3326D7C), et nos observations, L'efficacité des clauses limitatives de responsabilité à l'épreuve de la faute dolosive et de la faute lourde (N° Lexbase : N7482BET).
(10) Sur l'obligation essentielle et la cause, voir not. Cass. com., 13 février 2007, préc., JCP éd. G, 2007, II, 10063, note Y.-M. Serinet.
(11) Comp., au sujet de la clause résolutoire expresse, Cass. civ. 3, 19 mars 2008, n° 07-11.194, M. André Rousseau, FS-P+B (N° Lexbase : A4890D7A), D., 2008, AJ, 1056, obs. Rouquet, décidant que le seul écoulement du temps ne peut caractériser un acte manifestant sans équivoque la volonté de renoncer à se prévaloir de ses effets.
(12) Voir not., sur la question, Le juge et l'exécution du contrat, PUAM, 1993, Avant-propos de J. Mestre.
(13) Comp., dans le même ordre d'idée, à propos du refus de principe de la révision pour imprévision, R. David, L'imprévision dans les droits européens, Mélanges Jauffret, 1974, p. 211 et s., spéc. p. 229.
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