L'action en nullité d'une cession de droits sociaux conclue pour un prix indéterminé ou vil ne tend qu'à la protection des intérêts privés des cédants et se prescrit donc par cinq ans. Telle est la solution énoncée par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 22 mars 2016 (Cass. com., 22 mars 2016, n° 14-14.218, FS-P+B
N° Lexbase : A3664RAX). En l'espèce, les associés d'une société ont conclu un contrat, aux termes duquel ils s'engageaient chacun à céder à un tiers 5 % du capital de la société "
pour le prix forfaitaire et symbolique de 500 euros", cependant qu'"
en contrepartie de la cession au prix d'acquisition symbolique précité", le cessionnaire s'engageait à "
mettre au service de la société en qualité de directeur commercial sa connaissance du marché ainsi que son industrie, pendant une durée minimum de cinq années". Le 5 mars 2003, les actes de cession ont été signés et la société a engagé le cessionnaire. Le 17 mars 2010, les cédants ont assigné ce dernier, à titre principal, en nullité des cessions de parts pour indétermination du prix, à défaut, pour vileté du prix. Le cessionnaire a soulevé la prescription de l'action. La Cour de cassation rappelle, dans cet arrêt, qu'elle jugeait depuis longtemps que la vente consentie à vil prix était nulle de nullité absolue (Cass. civ. 1, 24 mars 1993, n° 90-21.462
N° Lexbase : A5326CZB). La solution était affirmée en ces termes par la Chambre commerciale : "
la vente consentie sans prix sérieux est affectée d'une nullité qui, étant fondée sur l'absence d'un élément essentiel de ce contrat, est une nullité absolue soumise à la prescription trentenaire de droit commun" (Cass. com., 23 octobre 2007, n° 06-13.979, F-P+B
N° Lexbase : A8462DY3). Or, cette solution a été abandonnée par la troisième chambre civile, qui a jugé "
qu'un contrat de vente conclu pour un prix dérisoire ou vil est nul pour absence de cause et que cette nullité, fondée sur l'intérêt privé du vendeur, est une nullité relative soumise au délai de prescription de cinq ans" (Cass. civ. 3, 24 octobre 2012, n° 11-21.980, FS-D
N° Lexbase : A0477IWL). Pour sa part, la première chambre civile a énoncé que la nullité d'un contrat pour défaut de cause, protectrice du seul intérêt particulier de l'un des cocontractants, est une nullité relative (Cass. civ. 1, 29 septembre 2004, n° 03-10.766, FS-P+B
N° Lexbase : A4815DDP). Ainsi, pour la Chambre commerciale, il y a lieu d'adopter la même position ; en effet, c'est non pas en fonction de l'existence ou de l'absence d'un élément essentiel du contrat au jour de sa formation, mais au regard de la nature de l'intérêt, privé ou général, protégé par la règle transgressée qu'il convient de déterminer le régime de nullité applicable. Dès lors, cette action, qui relève du régime des actions en nullité relative, se prescrit par cinq ans par application de l'article 1304 du Code civil (
N° Lexbase : L1724KMS ; cf. l’Ouvrage "Droit des sociétés" N° Lexbase : E1094AEA).
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