Réf. : CJUE, 19 décembre 2019, aff. C-263/18 (N° Lexbase : A4752Z8I)
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N1705BYS
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par Vincent Téchené
le 08 Janvier 2020
► La vente de livres électroniques d’occasion par le biais d’un site internet constitue une communication au public soumise à l’autorisation de l’auteur.
Tel est l’enseignement d’un arrêt rendu le 19 décembre 2019 par la Cour de de justice de l’Union européenne (CJUE, 19 décembre 2019, aff. C-263/18 N° Lexbase : A4752Z8I).
L’affaire. Deux associations ayant pour objet la défense des intérêts des éditeurs néerlandais, ont saisi le rechtbank Den Haag (tribunal de La Haye, Pays-Bas) d’une requête visant à faire interdire, entre autres, à une société de mettre des livres électroniques à la disposition des membres du club de lecture créé par cette dernière sur son site internet ou de reproduire ces livres. En proposant des livres électroniques «d’occasion» à la vente dans le cadre de ce club de lecture, cette société effectuerait une communication au public non autorisée de ces livres. La société soutient, au contraire, que de telles activités relèvent du droit de distribution, soumis par la Directive 2001/29 du 22 mai 2001 (N° Lexbase : L8089AU7) à une règle d’épuisement lorsque l’objet concerné, en l’occurrence les livres électroniques, a été vendu dans l’Union par le titulaire du droit ou avec son consentement. La CJUE a donc été saisie d’un question préjudicielle.
La décision. La Cour a considéré que la fourniture par téléchargement, pour un usage permanent, d’un livre électronique ne relève pas du droit de «distribution au public», prévu à l’article 4 § 1 de la Directive 2001/29, mais bien du droit de «communication au public», prévu par son article 3 § 1, pour lequel l’épuisement est exclu. La Cour a notamment déduit du traité de l’OMPI sur le droit d’auteur, à l’origine de cette Directive, ainsi que des travaux préparatoires de cette dernière, que le législateur de l’Union avait eu l’intention de réserver cette règle d’épuisement à la distribution d’objets tangibles, tels que des livres sur support matériel. En revanche, l’application de cette règle d’épuisement à des livres électroniques risquerait d’affecter l’intérêt des titulaires à obtenir une rémunération appropriée de manière beaucoup plus significative que dans le cas de livres sur support matériel, dès lors que des copies numériques dématérialisées de livres électroniques ne se détériorent pas avec l’usage et constituent ainsi, sur un éventuel marché de l’occasion, des substituts parfaits des copies neuves. S’agissant plus précisément de la notion de «communication au public», la Cour a indiqué que celle-ci doit s’entendre au sens large, comme couvrant toute communication au public non présent au lieu d’origine de la communication et, ainsi, toute transmission ou retransmission, de cette nature, d’une œuvre au public, par fil ou sans fil. Cette notion associe deux éléments cumulatifs, à savoir un acte de communication d’une œuvre et la communication de cette dernière à un public. Selon la Cour, le fait de mettre les œuvres concernées à la disposition de toute personne qui s’enregistre sur le site internet du club de lecture doit être considéré comme une «communication» d’une œuvre, sans qu’il soit nécessaire que la personne concernée utilise cette possibilité en extrayant effectivement le livre électronique à partir de ce site Internet.
En outre, il y a lieu de tenir compte non seulement du nombre de personnes pouvant avoir accès à la même œuvre parallèlement, mais également du nombre d’entre elles qui peuvent avoir successivement accès à celle-ci. En l’occurrence, selon la Cour, le nombre de personnes pouvant avoir accès, parallèlement ou successivement, à la même œuvre par le biais de la plate-forme du club de lecture est important. Par ailleurs, la Cour a jugé que, pour être qualifiée de communication au public, une œuvre protégée doit être communiquée selon un mode technique spécifique, différent de ceux jusqu’alors utilisés ou, à défaut, auprès d’un public nouveau, c’est-à-dire un public n’ayant pas déjà été pris en compte par les titulaires du droit d’auteur lorsqu’ils ont autorisé la communication initiale de leur œuvre au public. En l’occurrence, dès lors que la mise à disposition d’un livre électronique est en général accompagnée d’une licence d’utilisation autorisant seulement la lecture de celui-ci, par l’utilisateur ayant téléchargé le livre électronique concerné, à partir de son propre équipement, il y a lieu de considérer qu’une communication est faite à un public n’ayant pas été déjà pris en compte par les titulaires du droit d’auteur et, partant, à un public nouveau.
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